Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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AU SERVICE DU MAÎTRE

Soeur Sophie de Pury





« Consécration de mon être entier au Seigneur. »

O Seigneur, mon Dieu et mon Sauveur ! il y a longtemps que j'ai soif de t'appartenir plus complètement, entièrement, tout de bon, Seigneur ! Je suis jalouse de posséder aussi les grâces excellentes que Tu répands dans le coeur de beaucoup de tes enfants dans ce temps-ci : Tu leur fais éprouver que Tu peux les sanctifier aussi bien que Tu les as pardonnés et justifiés ; Tu leur fais goûter une paix complète, une grande joie et Tu dissipes tout à fait les ténèbres spirituelles dans lesquelles nous errons si souvent. Ta volonté leur devient en tout temps facile, le péché n'a plus d'attraits pour eux, ils marchent dans la lumière, comme Tu es Toi-même dans la lumière.

O Seigneur ! cette grâce immense, donne-la moi aussi ! Mais le premier pas pour y parvenir, c'est la consécration entière de mon être à Toi. Mon Dieu, pourquoi ai-je renvoyé si longtemps à le faire ! J'ai eu peur du sacrifice . . . . . j'ai oublié que quand Tu nous dis : donne-moi à boire ! c'est que Tu veux nous donner infiniment plus, c'est que Tu veux verser en nous des flots d'eau vive, capables de nous désaltérer jusqu'en vie éternelle.

Mon Sauveur, Tu sais que dimanche dernier, au sortir de notre conférence, à 5 heures du soir, je me suis enfin décidée à Te dire : Me voici, je veux être à Toi entièrement, maintenant, oui maintenant, et pas plus tard. Reçois-moi dans ton alliance, dans ton intime alliance, ô Jésus, et aide-moi à dire, à croire : Mon Bien-aimé est à moi, et moi, je suis à Lui ! - Seigneur, mon Dieu, je te bénis de ce que Tu m'as accordé l'immense grâce de me consacrer à Toi solennellement, tellement que je puis me répéter : Ce n'est plus à moi-même que j'appartiens, mais à Dieu qui m'a rachetée. Et c'est afin que cette grâce et cette assurance soient toujours vivantes dans mon coeur que je viens solennellement par écrit Te le répéter encore.

Mon Sauveur, Tu le sais, j'espérais que par cette consécration j'éprouverais beaucoup de joie, que je sentirais une vie toute nouvelle, un amour fervent pour Toi. - Tu n'as pas jugé bon de me le donner ainsi ; il paraît que Tu trouves nécessaire de me faire marcher par la foi simple et nue . . . . . si telle est Ta volonté, mon Dieu, je le veux bien - pourvu que cette foi simple et nue soit forte en Toi, enracinée en Toi, et qu'elle ne me fasse jamais défaut - d'ailleurs un jour Tu me le donneras, la joie viendra - il s'agit maintenant d'obéir. Et puis, mon Sauveur et mon Ami, j'ai pourtant à Te bénir de toute mon âme de ce que depuis ce moment de ma consécration complète j'ai cependant goûté Ta paix, et Ta paix m'a fortifiée et rendue heureuse au travers de mes journées si remplies par tant de choses et de difficultés. Tu es infiniment bon, Jésus ! la première, la grande, peut-être l'unique grâce que je Te demande encore, c'est que Tu veuilles répandre Ton amour dans mon coeur - oh ! j'en ai soif, Jésus ! il faut que je T'aime tout de bon, de toute mon âme, et cela me suffira. Je sais que de Ton amour découlera l'amour pour mes frères, pour mes soeurs dans la foi. Et plus je les aimerai, plus Ton amour augmentera encore en moi.
Seigneur, je compte sur Ta fidélité !
Amen !

Strasbourg, Mardi, le 20 octobre 1874.
à 11 heures du soir.

Ruines du Staufenberg dans la forêt. 17 mai 1877.

O Jésus, Tu le sais ! c'est avec confusion et avec repentance que j'ai relu devant Toi cette consécration que je Te fis de mon être entier, il y a deux ans et demi. - Ce qui m'humilie le plus, Seigneur, c'est qu'après T'avoir tant dit que c'est Ton amour dont mon coeur a soif, je me retrouve aujourd'hui avec le même coeur vide, hélas ! de Ton amour ! mais je voudrais T'aimer ! oui, Tu le sais, c'est le cri de mon coeur ; et maintenant, ô bien-aimé Sauveur, maintenant que Tu m'as permis de renouveler mon alliance avec Toi, maintenant que Tu m'as reçue et consacrée de nouveau solennellement à Toi, maintenant, ô Jésus, j'attends de Ta grâce que Tu répandes en moi Ton amour par Ton Saint-Esprit. C'est là ma prière, ô Père, ô Fils, ô Saint-Esprit. Amen !
« Or l'espérance ne confond point, parce que l'amour de Dieu a été répandu dans nos coeurs par le Saint-Esprit qui nous a été donné. » Romains 5.

Soulzbach, 24 juin 1881.

N'importe, n'importe, n'importe !
Je suis assurée que ni la mort, ni la vie ..... ni aucune puissance . . . . . ne me séparera de l'amour que Dieu m'a témoigné en Jésus-Christ mon Seigneur !

J'élève mes yeux vers les montagnes d'où me vient le secours.
Tu m'as fait diminuer, mon Dieu, pendant ces années, Tu m'as fait diminuer, merci mon Dieu ; pourvu que Toi Tu aies grandi ! Augmente ma foi ! Toi, tout ; moi, rien.

31 août 1884.

Cinquante ans ! Mon Dieu, j'ai honte, je suis trop confuse pour élever ma face vers Toi ! Mais je crie, je crie ; réponds-moi, mon Dieu et mon Sauveur !

O Seigneur, lave et relave avec soin
De mon péché la tache si profonde,
Et fais-moi grâce en ce pressant besoin
Sur Ta bonté tout mon espoir se fonde

Ton amour, ô Jésus, j'en ai soif, Tu le sais. Quand viendras-Tu ? Mon coeur restera toujours un vieux coeur souillé par le péché - mais, Tu as la victoire sur ce coeur, Seigneur, il t'appartient. Merci pour Ta grâce infinie pendant ce demi-siècle, mon Dieu, et continue !

Mon passé : Réparateur des brèches !
Mon avenir : Destructeur des obstacles !

et puis, au bout, la vie éternelle par Jésus-Christ, mon Seigneur et mon Sauveur ! »

Ce fut tout spécialement dans son ministère de Mère des novices que notre Soeur déploya une activité bénie. Elle s'y révéla comme une admirable éducatrice, une directrice dans le sens le plus profond et le plus idéal du mot ; car elle dirigeait non seulement fidèlement et consciencieusement l'éducation pratique des jeunes Soeurs, mais encore par son exemple, ses paroles, par l'influence de sa seule personnalité et l'atmosphère qui l'entourait, elle dirigeait leurs pensées, leurs aspirations vers les choses qui sont En-Haut. Sa seule présence exerçait une influence qui sanctifiait et préservait du mal, imposait aux unes une réserve salutaire, ranimait chez d'autres les énergies latentes, réveillait ce qu'il y avait de meilleur en chacune et exerçait une discipline foncièrement éducatrice.

Se rencontrer avec elle, n'importe où, c'était être remise en face de Celui qui sonde les coeurs, en face du but vers lequel il s'agit de tendre, en face des choses éternelles. Elle faisait luire le soleil de son affection, une affection si sincère, si profondément vraie, sur toutes ses enfants sans distinction. Si jamais elle eut une préférence, elle s'est gardée de la trahir : toutes participaient également à ce festin de tendresse, chacune se sentait entourée auprès d'elle d'une sainte affection, qui avait pour objet son âme, d'un amour qui intercédait pour elle devant le trône de grâce, de la charité qui croit tout, qui espère tout, qui supporte tout. Lorsqu'on venait à elle, le coeur gros de quelque récent déboire, pleine du sentiment d'avoir été lésée dans ses droits, ah ! comme toutes les revendications, qui semblaient si fondées tout à l'heure, paraissaient exagérées, toutes les choses étroites, mesquines, égoïstes, déraisonnables vous apparaissaient dans tout leur néant, on respirait auprès d'elle l'air des hauteurs éternelles, on voyait les choses à la lumière d'En-Haut.


Et cependant, comme elle était accueillante et maternelle, comme on se sentait au large avec elle, comme on pouvait tout lui dire ! Ce qui attirait à elle les jeunes âmes assoiffées d'idéal, c'était aussi un parfum de poésie qui se dégageait de sa personne, une poésie céleste, divine, qui s'inspirait d'En-Haut. Et puis, les jours de fête, quand elle présidait la table du festin, quelle grâce, quelle douce et gentille malice, quels jolis petits discours en allemand ! tout ce qu'elle disait était aimable et spirituel, assaisonné de ce sel que nous recommande l'apôtre, sans jamais se départir de cette simplicité et de cette humilité qui étaient les traits distinctifs de son caractère.
Aux heures de recueillement elle était elle-même le recueillement incarné ; quelle expression de profonde concentration sur cette chère figure ! Les paupières baissées, elle semblait inaccessible à tout ce qui pouvait l'approcher du dehors. Et que sa prière était bienfaisante ! sous une grande sobriété de langage on sentait une force contenue, qui vous émouvait profondément. Des personnes qui se sont rencontrées fortuitement avec elle pour de courts instants ont assuré avoir eu comme une sensation physique de la sainteté qui était en elle, et les jeunes âmes qui regardaient à elle avec une généreuse admiration étaient unanimes à la déclarer impeccable.

Ce n'est pas une tâche facile que de former des diaconesses. Combien de jeunes filles entrent dans l'Oeuvre sans avoir la plus faible idée de ce à quoi tend l'éducation qu'elles se croient prêtes à subir. Elles voudraient offrir leur aide à l'humanité souffrante et ne se rendent pas compte, qu'il importe avant tout de se laisser aider par Celui qui est venu pour servir et pour donner sa vie pour notre rançon. Il s'agit, pour ces âmes, de découvrir que ce qui leur manque est la condition primordiale d'une vie au service du Maître, et Dieu seul peut leur ouvrir l'entendement à cet égard. Mais à côté de la seule chose nécessaire, indispensable à la diaconesse, il y a bien des choses d'utilité secondaire, qu'une éducation appropriée peut contribuer à mettre à leur portée. Combien d'entre elles sont plus ou moins dépourvues de culture, et elles ne tardent pas à s'en apercevoir au contact des Soeurs. Soeur Sophie s'entendait d'une façon magistrale à faire leur éducation. Sans doute, il ne lui avait pas été facile, dans les débuts, d'enseigner à d'autres ce qui lui était inné ou, du moins, ce qui lui avait été inculqué sans qu'elle s'en doutât, mais elle s'y était appliquée de tout son coeur et avait soigneusement pris note des expériences faites dans ce domaine. Elle faisait à ses jeunes Soeurs un cours de bonnes manières au point de vue chrétien. Elle avait coutume de dire : "Je suis sûre que le Seigneur Jésus, pendant son ministère terrestre, a été le plus parfait gentilhomme. "

Le savoir-vivre qu'elle cherchait à leur inculquer se distinguait de celui qui a cours dans le monde en ceci, qu'au lieu d'être basé sur des prescriptions plus ou moins arbitraires, qui souvent ne tendent qu'à déguiser l'égoïsme et à satisfaire l'amour-propre, il était fait de renoncement à soi-même et d'égards pour les autres, c'était cette politesse du coeur, dont les statuts ont été énoncés par St. Paul (1. Cor. 13), que lui-même a si bien mis en pratique dans son épître à Philémon, et dont notre chère Soeur Sophie était à tout moment une illustration des plus sympathiques.

Afin d'éveiller et de développer chez les jeunes Soeurs le sens de la fidélité dans les plus petites choses, de la véracité, de la discrétion, de l'humilité, elle avait composé à leur intention une série de récits traitant des expériences pratiques d'une Soeur Mélanie, nom choisi par elle tout exprès pour ne froisser aucune susceptibilité, puisqu'il ne figurait pas sur la liste des Soeurs

Elle excellait à dépeindre avec une finesse de touche, une profondeur et une vivacité admirables les petites négligences de Soeur Mélanie qui amenaient une série innombrable de suites fâcheuses, les ruses coupables qu'elle inventait pour dissimuler de légers méfaits, l'effet désastreux de ses paroles inutiles, sa vie cachée toute confite en adulation de son petit Moi, dont elle faisait le centre de l'univers, et en analysant ainsi de main de maître le coeur humain si retors et si compliqué, elle présentait avec une grâce charmante à ses auditrices un miroir où les âmes droites se reconnaissaient non sans effroi et dont la fidélité incontestable leur fut en bénédiction.

Nous faisons suivre ici quelques lettres qui nous montrent de quel amour saint et profond notre Soeur Sophie aimait les âmes que le Seigneur lui avait plus particulièrement confiées. La première est datée de 1862:

« Il est probable que le moment viendra tôt ou tard, où il faudra nous quitter. Si les chrétiens sont appelés comme leur Maître à être errants et voyageurs ici-bas, les diaconesses le sont d'une manière plus directe encore et pour elles « il n'est point de cité permanente».
Je ne pourrais te quitter, sans t'avoir adressé comme adieu quelques conseils que me dictent mon affection pour toi et mon ardent désir de te voir heureuse en ton Sauveur. Je bénis, je bénis de tout mon coeur le Seigneur de ce qu'Il a déjà fait pour toi, j'ai la ferme assurance qu'Il achèvera tout ce qui te concerne et que son Esprit Saint prendra un soin jaloux de ton coeur. «C'est Lui qui ouvre, et personne ne ferme».

Écoute, écoute bien cette voix de l'Esprit, prête-Lui une oreille attentive, que ton âme prenne garde à ses doux avertissements, afin qu'Il n'ait jamais besoin d'user d'une sévère discipline à ton égard. Cet Esprit Saint t'a enseigné bien des choses déjà depuis ton enfance, mais tu es à une école toute nouvelle, remplie d'expériences nouvelles, ne te décourage pas, si parfois il te semble n'avoir rien appris encore, ne rien savoir encore, cela t'est bon, cela te fera devenir petite et misérable, cela te fera avancer. Plus nous sommes petits, plus Jésus est grand. « Il faut qu'Il croisse et que je diminue. " (Jean 3, 30.)

Rappelle-toi sans cesse que nous avons tout pleinement en Lui et que dans son service Il nous donne les dons et les capacités nécessaires tant dans le domaine du matériel que dans celui du spirituel. La grande affaire consiste à être assurés que nous sommes où Il veut que nous soyons ; avec cette assurance on peut aller en avant.

Dans toutes les difficultés, grandes et petites, ne te lasse pas d'aller à Jésus, qu'il soit ton conseiller et ton intime ami, qu'Il soit ta Sagesse et ton Espoir, confie-Lui ce que tu n'oserais confier à personne, tant la chose te paraît indigne, et pourtant, si pour toi elle te tient à coeur, il en est de même pour Jésus, qui compte les cheveux de notre tête.

Apprends, ma Soeur chérie, apprends toujours, partout et pour tout à voir la main, la volonté de ton Dieu. Ne regarde les hommes que comme des instruments, quelle que soit la tâche qui te sera donnée, l'entourage avec lequel tu auras à vivre, vois en toutes choses la volonté du Seigneur. Tu t'épargneras ainsi bien des douleurs, bien des amertumes, bien des péchés, et tu pourras facilement te plier et accepter quoi que ce soit qui soit demandé de toi. Applique-toi de tout ton coeur à l'ouvrage, n'importe lequel, et ce qui peut te paraître aride, insignifiant ou sans but te deviendra intéressant, utile et même cher. Sois fidèle dans les petites choses, quand bien-même ce ne serait que ramasser une épingle tombée, fermer une porte ou enlever la poussière d'un meuble. Ne te dis jamais que tu serais faite pour quelque chose de mieux que ce que tu as à faire, que l'on méconnaît tes capacités - Jésus les connaît, Jésus sait ce qu'il te faut, Jésus conduit les coeurs comme il Lui plaît. Il a en vue ton éducation, et il te développera en te conduisant par la vallée de l'humilité.

Et puis, n'oublie pas que ton bonheur et ta paix ne dépendent pas des circonstances extérieures, mais bien des sentiments et des dispositions intérieures ; si l'on porte Jésus avec soi dans son coeur, le lieu le plus sombre comme l'occupation la plus ingrate sont transformés et embellis.

Ai-je encore besoin de recommander à tes pensées, à ton imagination de ne pas s'égarer loin du présent, de la réalité, pour aller se perdre dans les souvenirs du passé ... ? tu en as compris les dangers, ma chérie, et tu les combats.

Veille et prie, sois attentive à tes péchés dominants, combats-les avec ardeur, mais ne crois pas que parce que tu as vaincu une fois, tu remporteras toujours la victoire ; quand tu auras fait une chute ne te désole pas loin de Jésus, mais cours à Lui, dis-le Lui, tu recevras avec son pardon, une force nouvelle, et tu reprendras les armes, plus humble et plus aimante - et cette perte te sera un grand gain.

Enfin, oubliant les choses qui sont derrière toi et t'avançant vers celles qui sont devant toi, cours vers le but, vers le prix de ta vocation céleste de Dieu en Jésus-Christ. En avant, en avant !
L'Éternel te bénisse et te garde, ma Soeur aimée, l'Éternel fasse luire sa face sur toi et te soit propice, l'Éternel tourne son visage vers toi et te donne sa paix. Que le nom du Dieu de Jacob te mette en une haute retraite. "

TA SOPHIE.

En 1867 elle écrivait à la même Soeur à l'occasion de sa consécration :
«Que la grâce, la miséricorde et la paix de la part de Dieu notre Père et de la part de notre Seigneur Jésus-Christ te soient données et multipliées par la communication de l'Esprit.

Te voilà arrivée à l'acte le plus solennel de ta vie de diaconesse, mon enfant bien-aimée, oh ! puisses-tu te consacrer à ton Dieu, Lui donner tout, Le choisissant pour ta portion pour le temps et pour l'éternité. La vie est sérieuse, elle est courte, il ne vaut la peine de vivre que pour Celui qui nous a aimés, nous voulons tenir ceci pour certain que si Lui est mort pour tous, tous aussi sont morts, et qu'Il est mort pour tous, afin que ceux qui vivent ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour Celui qui est mort et ressuscité pour eux. - Mais qui est suffisant pour ces choses ? C'est que nous avons notre trésor dans des vases de terre, afin que l'excellence de cette force soit de Dieu et non pas de nous.

Il n'est pas nécessaire que je te dise tout ce que mon coeur sent pour toi et tout ce qu'il demande en ce jour à l'Auteur de toute grâce excellente et de tout don parfait. Qu'Il te rende de plus en plus participante de son don inexprimable, de Lui-même en toi, c'est ma prière la plus ardente pour celle que j'aime à nommer ma chère enfant dans le Seigneur. Que notre affection mutuelle soit cimentée par Lui et qu'elle contribue à nous le faire aimer toujours davantage, et qu'Il nous fasse puissamment éprouver qu'avec son amour dans le coeur nous pouvons tout supporter, tout accepter. Qu'Il te conduise jusqu'à la fin de ta route, ma Soeur chérie, Il t'a beaucoup aimée, et son amour reste le même hier, aujourd'hui et éternellement, qu'Il en soit béni !"

Elle était une vraie mère en Israël, et parce qu'elle pouvait dire en vérité avec le psalmiste (Ps. 87, 7) : "Toutes mes sources sont en Toi", le Seigneur avait pu faire d'elle une ouvrière avec Dieu pour préparer les matériaux de cette Maison à la direction de laquelle elle devait bientôt être appelée.

Le 31 octobre 1881 Soeur Sophie célébrait son jubilé de 25 ans, et à cette occasion elle recevait de M. le professeur Godet la lettre suivante :

Neuchâtel, octobre 1881.

MA CHÈRE SOEUR,

J'apprends que c'est demain que vous célébrez le vingt-cinquième anniversaire de votre entrée dans la carrière de diaconesse. Ce qui se présentait alors à vous dans l'obscurité de l'avenir, vous pouvez le contempler maintenant en jetant un regard en arrière dans la clarté d'un beau passé. Si vous avez été trompée, ç'a été en beau. Le Seigneur a été pour vous et a fait pour vous plus que tout ce que vous demandiez et pensiez le jour où vous fûtes reçue dans la maison qui est devenue celle de votre seconde famille.

Que la joie la plus sereine et la plus pure, celle de la reconnaissance, remplisse votre coeur et fasse de ce jour un jour tout éclairé de l'Étoile du Matin, un prélude de la joie des fidèles servantes à leur entrée dans la maison de leur fidèle et plus fidèle Maître ! Quelle ne serait pas la joie de votre vénérable mère, si elle pouvait partager avec vous les douces émotions de ce jour. Celui qui est venu pour rapprocher et réunir toutes choses, tant celles qui sont au ciel que celles qui sont sur la terre (Eph. 1, 10) saura y pourvoir. Il a donné à Abraham de contempler d'En-Haut le jour de sa venue sur la terre, Il saura bien donner aussi à une tendre mère le bonheur de contempler du ciel le jour de la joie de son enfant.

« Réjouissez-vous donc dans le Seigneur, je vous le dis encore : Réjouissez-vous !" "Le sentier du juste est comme la lumière resplendissante qui augmente d'éclat jusqu'à ce que le jour soit arrivé à sa perfection. " (Prov. 4, 18.) Que le quart de siècle qui va succéder à celui qui est maintenant écoulé, réalise en plein cette divine promesse ! Toutes les promesses de Dieu sont oui en Jésus et amen en Lui. »

Croyez à la respectueuse affection de celui qui fut peut-être le premier confident d'une pensée maintenant déjà devenue une vie ! Ses voeux vous accompagnent dans cette seconde entrée comme ils vous accompagnaient dans la première.

Mes amitiés à tous les coeurs joyeux et aimants qui vous entourent.

Votre dévoué en Christ
F. GODET.

Le 4 décembre 1887, Soeur Sophie fut élue Soeur supérieure. Avant sa consécration solennelle, qui eut lieu le 18, elle prit un temps de retraite à Bade. Après sa mort on trouva parmi ses papiers un pli, daté du 16 décembre, avec l'inscription : Pacte entre mon Dieu et moi. Nous faisons suivre ici ce précieux document qui nous permet de pénétrer dans le sanctuaire intime de cette grande âme et nous révèle les dispositions qui l'animaient à ce moment décisif de sa vie.

Mon Seigneur et mon Dieu,

C'est dans ma profonde indignité que je viens à Toi ; mais Tu viens de me dire, de me faire comprendre et sentir combien Tu m'as aimée, Tu m'as rappelé vivement ton abaissement, tes souffrances, tes humiliations, ton abandon de Dieu, ta mort sur la croix, et tout cela pour me sauver, moi aussi ! 0 mon Sauveur ! tout mon coeur, toute mon âme te bénissent et te louent. Que demandes-Tu en retour ? Tu me veux toute entière ...... c'est un pauvre et misérable don que je peux te faire, ô mon Dieu !

Quand je regarde en arrière, non seulement depuis mon enfance, mais depuis le moment où Tu m'as appelée à ton service, ô Seigneur, que de péchés ont souillé ma conscience ! que de péchés qui me font me voiler la face devant tes yeux trop purs pour voir le mal ! Ma vie, Seigneur Jésus, ma vie n'est qu'un long péché, et elle a besoin d'être plongée tout entière dans ton sang. Fais-le Seigneur ! Oui, Tu l'as fait et je t'en rends grâce mille et mille fois, et ce ne sera pas trop de toute l'Éternité pour te bénir et t'adorer. - Puisque Tu m'as tant aimée, mon Dieu, il est juste et raisonnable que je te donne tout en retour. Tu veux bien te contenter de ma pauvre vie, de mon pauvre coeur, Tu veux y faire ta demeure, Tu veux y régner en vainqueur et disposer de moi comme Tu le juges bon.

Qu'il en soit ainsi, mon Dieu-Sauveur ! merci de ta grâce infinie ! je t'appartiens. Je ne me sens en sûreté que cachée dans ton coeur. Même en ce moment où je me consacre à Toi, je sais, je sens que mon coeur est mauvais et que l'ennemi de mon âme guette sa proie ; entoure d'épines ce coeur pour qu'il ne puisse pas t'échapper.

Et puisque Tu te plais, ô mon Dieu, à te glorifier dans la faiblesse de tes instruments, puisque Tu as bien voulu me choisir et me donner une grande tâche dans ton service - eh bien, Seigneur, j'accepte ! Ce qui fait ma force et mon repos, c'est ma grande faiblesse, c'est mon impuissance - cela te force, ô Seigneur, à tout me donner, à tout faire en moi ; je ne veux être qu'un instrument docile dans ta main, un canal qui sert à transmettre tes grâces et tes bénédictions. Mon Dieu, remplis mon coeur de ton amour ! mon Dieu, que pour moi soit aussi la promesse pleine de grâce céleste que Tu fais entendre par ton prophète Osée, chapitre II, 21 et 22.

Alors, avec cet amour dans le coeur, je saurai aimer ce que Tu m'appelles à aimer ici-bas - je saurai aimer mes Soeurs que Tu m'appelles à diriger, hélas ! Seigneur, dans toute ma faiblesse ! Mais l'amour est tout-puissant : si j'aime véritablement, je serai rendue capable d'accomplir ma tâche.
Fais-moi aimer, mon Dieu ! et donne-moi, comme à Salomon, un coeur intelligent pour conduire tout ce peuple.

Dans deux jours, ô mon Dieu, je promettrai solennellement et devant toutes nos Soeurs, d'obéir à ta voix et de remplir fidèlement les devoirs de mon nouveau ministère ; dans deux jours je serai consacrée pour cette tâche ! ô mon Sauveur, cette promesse, cette consécration, que ce ne soit que la ratification de la promesse que je te fais maintenant, de la consécration que Toi-même Tu veuilles bien me donner maintenant dans le silence et la retraite.

Amen !
Écrit et prié à Bade, le 16 décembre 1887. SOPHIE DE PURY, servante du Seigneur.

En même temps elle adressait aux Soeurs la circulaire suivante :

Mes bien-aimées Soeurs,

Nous pleurons encore sur la tombe de notre chère et bienheureuse Soeur Louisa, nous demandons encore : pourquoi, Seigneur ? et déjà nous devons penser à la remplacer et à rentrer dans l'ordre.

Vous avez bien voulu me choisir, et vous n'avez pas craint de me charger de ce fardeau. Mes chères Soeurs, c'est dans le profond sentiment de ma misère que j'accepte cette tâche. Je désire de toute mon âme la remplir comme Dieu me le demande, c'est-à-dire en me déchargeant sur Lui de toute responsabilité et en Lui demandant la grâce de Le suivre fidèlement dans le chemin de l'obéissance et de l'humilité.

Je n'ai pas besoin de vous dire de m'aider, mes chères Soeurs ; vous m'avez dit que vous êtes toutes disposées à le faire ; vous comprenez qu'en bien des choses, il me sera plus difficile qu'à une autre de suffire à cette tâche, et le coeur me manque quand je regarde à moi-même. Demandez donc à Jésus de détourner mes regards de moi et de les fixer invariablement sur Lui. Je demande à nos Soeurs anciennes de m'aider de leurs conseils et de leur expérience ; je demande aux jeunes Soeurs de m'aider par leur obéissance et leur fidélité dans les petites choses ; je vous demande à toutes de m'aider par votre intercession journalière. Je veux le faire de mon côté pour vous, et nous ne voulons avoir d'autre mobile que celui de glorifier notre Dieu dans notre faiblesse.

Ce que notre cher pasteur nous écrivait dans la circulaire d'octobre pendant la maladie de notre bien-aimée Soeur Louisa, c'est encore maintenant qu'il faut le réaliser ; notre mot d'ordre à toutes doit être : Père, glorifie ton nom ! - Notre vie journalière est semée de beaucoup de difficultés, mais elles seront plus facilement vaincues, elles disparaîtront même en partie si nous regardons toutes et toujours droit au but, nous laissant dépouiller de notre moi et ne voulant que glorifier notre Maître. Acceptons comme Lui le chemin douloureux de la croix, c'est le seul par lequel nous glorifions Dieu, et c'est celui qui nous amène nous-mêmes à la gloire.

Soyons fidèles à nous aimer, et fidèles à prier les unes pour les autres ; vous ne vous étonnerez pas, mes bien chères Soeurs, si je vous demande de me laisser chaque matin une heure au moins de solitude avec Dieu, j'en aurai besoin pour être d'autant plus fidèle à la tâche qu'Il me donne auprès de vous.

J'ai besoin de vous demander aussi, je demande à toutes mes chères Soeurs de ne pas craindre de me dire la vérité, de me rendre attentive à mes manquements, à mes erreurs, à mes fautes, je tâcherai, avec l'aide de Dieu, d'en être toujours reconnaissante, et j'examinerai soigneusement devant Dieu en quoi j'aurai manqué. À mon tour, vous me permettrez de vous dire ce qui me paraîtra n'être pas bien, et nous demanderons toutes ensemble au Seigneur que Son Esprit de vérité et de charité règne au milieu de nous.

«Ayant purifié nos âmes en obéissant à la vérité pour avoir un amour fraternel sincère, aimons-nous ardemment les uns les autres, de tout notre coeur, puisque nous avons été régénérés, non par une semence corruptible, mais par une semence incorruptible, par la parole vivante et permanente de Dieu."»1 Pierre 1, 22 et 23.

Votre Soeur Sophie.

Le jour de sa consécration comme Soeur supérieure, Soeur Sophie recevait de M. F. Godet la lettre suivante :

Neuchâtel, 17 décembre 1887.

MA CHÈRE SOEUR ET AMIE,

En vous chargeant aujourd'hui de la tâche qu'Il vous confie, le Seigneur ne s'en décharge pas Lui-même. Il y a entre vous et Lui le même rapport qu'autrefois, quand Il était sur la terre, entre Lui et son Père. Le Père Lui montrait l'oeuvre qu'Il voulait, et Jésus, entrant dans la pensée du Père, l'exécutait ici-bas avec Lui, pour Lui (Jean 5, 19-20) Jésus veut entrer dans la même relation avec vous dans l'accomplissement de la tâche qu'Il vous confie. Il vous le dit Lui-même dans une parole qui est une inépuisable promesse. (Jean 6, 57.)

Je ne puis que vous souhaiter dans ce jour de réaliser dans l'accomplissement de votre mission journalière le contenu de cette parole. Cela exige en même temps que le revêtement journalier de Christ, un constant dépouillement de soi-même. Vous êtes exercée dès longtemps à ces deux actes, qui marchent de pair. Ils vous deviendront plus habituels par l'accroissement de la tâche et de la responsabilité.

Si Monsieur Haerter, ce vénérable père spirituel, était encore là, il vous dirait un mot comme mot d'ordre : servir ! servir en dirigeant, servir en commandant, servir en reprenant ... Le désir de servir et, par là, de sauver, voilà l'âme de la charge que vous confient les hommes, Cette âme est le souffle de Dieu, la charité qu'inspire l'Esprit.

Oh ! que comme pour Jésus s'ouvrit le ciel et descendit l'Esprit et retentit intérieurement le témoignage divin, vous aussi vous soyez fortifiée, enrichie, bénie pour le Ministère nouveau que vous allez commencer ! Tout ce que le Seigneur a reçu, Il l'a reçu pour nous en même temps que pour Lui.

Votre bien affectionné
F. GODET.

Soeur Sophie se rendait compte de la grandeur et des difficultés de l'oeuvre à laquelle le Seigneur l'avait appelée, et cependant, au moment de sa consécration comme Soeur directrice, en réponse à la question solennelle relative aux dispositions de fidélité dans lesquelles elle abordait sa tâche, elle ne se contenta pas de prononcer les paroles prescrites : « Oui, je promets de le faire avec l'aide de Dieu », mais elle put ajouter du fond de son coeur « et avec joie ! »


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