Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
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TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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HISTOIRE DE LA TERRE





CHAPITRE CINQUIÈME

L'époque actuelle.

L'époque actuelle est un temps de repos entre les révolutions anciennes et celle qui, d'après la croyance de tous les peuples, détruira la terre par le feu. Les astronomes ont démontré que, depuis les plus anciennes observations qui nous soient connues, la durée de la rotation de notre globe ou la longueur du jour et de la nuit est demeurée identiquement la même. On a pareillement constaté par les témoignages de l'histoire, que la température moyenne de la surface terrestre n'avait pas varié d'une manière appréciable pendant les temps historiques, et que les limites des plantes cultivées, telles que la vigne, passaient aujourd'hui encore par les mêmes lieux qu'au temps de Moïse.

Enfin, les fastes de l'Antiquité n'ont enregistré ni la ruine, ni l'apparition de quelque grande région qui aurait modifié sensiblement la configuration des continents et les proportions de la terre ferme et de l'Océan. Si donc on juge d'après les apparences, ou si l'on oublie ce que Dieu a révélé aux hommes touchant les origines et la fin du monde, on dira : Depuis que nos pères sont morts, toutes choses demeurent dans le même état où elles étaient au commencement de la création (2 Pierre, III). Mais le repos de notre époque actuelle n'est que relatif, et le mouvement est assez grand à la surface de notre globe pour nous enseigner par la science et nous aider à croire que nous sommes à peine sortis d'une grande crise et que nous allons bientôt rentrer dans une crise nouvelle.

Et d'abord la température moyenne de la surface terrestre paraît soumise d'un âge à l'autre à certaines perturbations qu'on peut croire périodiques. Si l'on pouvait se fier à l'exactitude des chroniqueurs du moyen âge, le sixième siècle n'aurait eu qu'un seul hiver très froid (celui de 562), le septième aucun, le huitième un seul (763), le neuvième six (800, 822, 829, 860, 874, 891), le dixième un seul (991), le onzième trois (1001,1044,1067), et le douzième trois (1124, 1133, 1179), tandis que les six siècles suivants en ont compté neuf, treize, quinze, quatorze, vingt-trois et dix-neuf. Nous aurions donc d'une part 6 siècles et 15 hivers rigoureux ; d'autre part 6 siècles et 93 hivers rigoureux.
Mais le chiffre des années très froides n'est qu'un des éléments du calcul ; il faut y ajouter celui des années remarquables par leur grande chaleur. Or les sept premiers siècles n'ont eu que neuf années très chaudes, (763, 860, 993 et 994, 1000, 1022, 1130, 1159, 1171), et l'on en compte trente-huit pendant les six siècles subséquents. Il paraîtrait donc que la température de notre Europe, du sixième au douzième siècle, a été tout à la fois plus égale et plus chaude que du treizième au dix-neuvième.

Des étés très chauds et très secs ou des années trop pluvieuses produisent de chétives récoltes, et amènent ces famines qui occupent une assez large place dans les annales de l'humanité. Mais le fléau ne peut frapper à la fois la terre entière ; car elle a sa somme annuelle de chaleur ou de pluie, qui a été exactement déterminée par le Créateur, et lorsque telle région est affligée de pluies excessives, telle autre voit sous un ciel serein ses champs se couvrir de magnifiques récoltes. Ici il y a surabondance, là disette, et le commerce aspire à rétablir l'équilibre. Les famines apparaissent d'ailleurs dans la vie des peuples et dans celle de l'humanité, à l'improviste et comme au hasard.
Toutefois le hasard recouvre si souvent la loi, qu'il est permis de supposer dans ce cas comme dans nombre d'autres, l'existence d'une certaine périodicité. Nous la supposons sans la démontrer.

Le travail constant et régulier de la nature pendant notre époque de repos est plus facile à suivre sur la face même de la terre que dans sa température. Ainsi, on voit les fleuves, dans les plaines, élever insensiblement leurs lits, et à leurs embouchures, empiéter de plus en plus sur la mer par leurs atterrissements. Ainsi encore les dunes que le vent crée sur les côtes sablonneuses, s'accroissent constamment sous ses efforts incessants et marchent rapidement dans l'intérieur des terres. Or on a calculé approximativement le temps où les dunes ont commencé leurs voyages, les fleuves leurs travaux, et l'on a trouvé le chiffre de quatre mille ans, qui est celui du Déluge. Voilà donc des phénomènes qui relient intimement notre époque de calme à la dernière grande crise tellurique.

D'autres faits indiquent au contraire que notre planète n'est point encore entrée dans son état définitif, qu'elle peut à chaque instant donner à ses continents une forme nouvelle, et qu'elle se tient prête à quelque immense catastrophe.
Une partie considérable de sa surface est constamment en mouvement, ici s'affaissant, là s'élevant et gagnant sur la mer du terrain ou en perdant. Sur la côte de Pouzzoles, le fameux temple de Sérapis a descendu jusqu'à cinq mètres sous les eaux, et s'est relevé plus tard au-dessus du niveau de la mer.

L'Italie moyenne, la Sardaigne, la Suède, offrent certaines localités qui ont été submergées lorsque déjà elles étaient habitées par l'homme, et qu'ont ensuite soulevées les forces plutoniques qui agissent (1) sans cesse dans les entrailles de la terre.
La Suède tout entière (sauf la Scanie) monte lentement au-dessus de la Baltique, qui se retire et laisse à nu ses anciens rivages. La côte occidentale de l'Arabie nous offre le même phénomène (2).
Celle du Groenland, au contraire, s'est depuis quatre siècles continuellement affaissée sur une longueur de deux cents lieues.
En 1819, le cours inférieur de l'Indus a été considérablement modifié par l'apparition subite d'un dos de terrain, de vingt lieues de longueur sur six de largeur, et par l'enfoncement d'une zone parallèle.
Dans le Nouveau Monde, tandis que de violents tremblements de terre soulèvent la côte du Chili, les îles de Chiloé, qui sont au sud, s'enfoncent insensiblement au-dessous du niveau de l'Océan : les indigènes étonnés trouvent une eau profonde où naguère était le banc coquillier qui les nourrissait de ses richesses, et la forêt qui leur fournissait leur bois est recouverte de plusieurs pieds d'eau, ou a péri renversée par quelque vague immense que le tremblement de terre a soulevée, et qui a recouvert le sol à une grande hauteur des productions de l'Océan.
D'O-Tahiti à Madagascar, si nous devons nous fier à quelques observations sur lesquelles Darwin a fondé une hypothèse hardie, toutes les terres sont en mouvement : les îles de la Société et les îles Basses, sur un espace de 500 lieues de longueur et de 150 de largeur, s'affaissent insensiblement ; les Nouvelles Hébrides, les îles de Salomon et de la Nouvelle-Irlande sont au contraire soulevées, et dans les vastes parages qui s'étendent entre ces foyers d'actions contraires, on voit les îles qui montent et les îles qui descendent, irrégulièrement dispersées les unes parmi les autres et toutes également agitées par les tremblements de terre.

Plus à l'ouest se reproduisent des phénomènes tout semblables : la Nouvelle-Guinée, Timor, Java, Sumatra, émergent, ainsi que l'attestent leurs rivages, tandis que la côte orientale du continent australien verrait, par suite d'une lente immersion, s'élargir de plus en plus le canal qui la sépare de son immense barrière de bancs de coraux.
Au sud-ouest du détroit de la Sonde, les îles Keeling ou des Cocos, secouées en dix ans par trois tremblements de terre, s'enfoncent incontestablement. Ainsi font aussi les Laquedives, les Maldives et les Chagos, lagunes rangées du septentrion au midi sur une même ligne de 500 lieues de longueur ; et la côte orientale du Décan, ainsi que le nord de Ceylan, offrent au contraire divers phénomènes qui attestent un soulèvement.
Les Seychelles enfin, la partie septentrionale de Madagascar et la côte voisine de l'Afrique, sont cernées ou bordées de bancs de coraux qui ont été soulevés à une époque récente.

Les forces volcaniques concourent aussi, mais dans des dimensions restreintes, à modifier dans notre époque actuelle de repos, la face de notre globe. Tantôt elles font sortir du milieu des mers des îles nouvelles, comme Hiéra dans l'Archipel (186 ans avant J.-C), Sabrina dans les Açores (1811), et un grand nombre d'autres dans le Grand-Océan. Tantôt elles créent sur les continents des montagnes, comme le Monte-Nuovo, près du Vésuve, en 1538, ou des lacs pareils à celui qui s'est formé au Japon 286 ans avant J.-C.

Mais le phénomène qui, par sa fréquence non moins que par ses redoutables effets, prouve peut-être avec le plus de force que notre terre n'est point encore entrée dans son repos, c'est le tremblement de terre. Non seulement il peut détruire en un clin d'oeil de grandes cités et des centaines de villages ; mais il trouble pour un temps plus ou moins long la constitution des saisons, ainsi que l'a fait dans le midi de l'Europe le tremblement de terre de 1735 ; mais il refroidit d'une manière permanente le climat de la contrée, comme celui de Quito depuis 1797 ; mais il corrompt l'air au point d'engendrer des épidémies.

Les tremblements de terre n'ont point été d'ailleurs également fréquents aux différents âges de notre époque actuelle. Il me paraît qu'ils ont été fort rares de l'ère de Moïse ou du seizième siècle jusqu'au quatrième avant J.-C, et que pendant ce temps-là la terre a, sous toutes les zones, joui d'un calme relatif très profond. Mais avec le quatrième siècle notre planète, semble-t-il, s'est mise de nouveau à trembler de tous ses membres ; à ses extrémités de grandes contrées s'abîment dans les océans, dans ses mers intérieures apparaissent de petites îles.

Antérieurement à l'historien Ephore et au grand roi de Macédoine, Alexandre, eut lieu dans la mer du Nord, à la suite d'un violent tremblement de terre, une invasion de la mer qui recouvrit les terres des Cimbres et des Teutons et les obligea à s'expatrier. Ces terres étaient sans doute situées entre le Jutland et la côte allemande, au-devant de l'embouchure actuelle de l'Elbe. Elles devaient leur existence, ainsi que le bas pays hollandais, aux courants de la mer du Nord, qui avaient jadis accumulé les alluvions sur toute la rive méridionale, à l'époque où le Pas-de-Calais n'existait pas encore.
Les basses plaines des Cimbres auront été détruites par la mer comme l'ont été plus tard celles du Zuydersée, et ce n'est peut-être que de cette grande révolution que date, selon une vague tradition, la forme actuelle des îles danoises (3). Au reste, le niveau de toutes ces contrées a subi, depuis les temps historiques, de grands changements : on a trouvé dans l'Oldenbourg (à Jever), des ancres ; dans l'Ostfriese (à Watteworden), à dix pieds de profondeur, des planches, des pieux et des cendres ; dans le Sleswick (à Husum), un tombeau avec des armes en pierres à plusieurs pieds au-dessous du niveau de la mer.

À l'autre extrémité de l'Ancien Monde, l'île de Ceylan, comme nous l'avons déjà dit, vit, en 322, s'engloutir neuf îles voisines, et d'après les traditions javanaises, dont la chronologie ne mérite sans doute que fort peu de créance, le détroit de la Sonde entre Java et Sumatra ne daterait que du premier siècle avant l'ère chrétienne.

Au centre de l'Ancien Monde, les contrées de la mer Caspienne n'avaient point encore leur forme présente. Selon Aristote, ce lac, le Pont-Euxin et la Méotide n'étaient séparés les uns des autres que par un isthme très étroit. Séleucus avait eu la pensée de le couper, et Clitarque, que toutefois Strabon contredit, prétendait même qu'il était recouvert par les eaux. Au nord du Caucase était un grand marais que les Huns traversèrent dans une de leurs marches, et qui n'existe plus. Tous les géographes anciens, et Strabon lui-même, qui était d'Asie Mineure, s'accordent à faire de la Méotide une vaste mer. Le Jaxarte avait, d'après Ptolémée, sur sa rive gauche, deux grands affluents, qui n'arrivent plus jusqu'à lui, et peut-être se jetait-il, à travers le lac Aral, dans la Caspienne. L'Oxus, en 1660, envoyait encore un de ses bras à cette mer au fond du golfe de Balkan.

Dans le bassin de la Méditerranée, Thérasia, qui est un fragment du grand cratère de Santorin, sortait de la mer en 207 avant J.- C; dans la même enceinte apparaissaient Hiéra, cent trente ans plus tard, et Thia, l'an 19 de notre ère.
En 373 avant J.-C, un tremblement de terre avait englouti Hélia,dans le golfe de Corinthe  ; et l'île de Chrysé, près de Lemnos dont elle avait été précédemment détachée, s'abîma dans les flots avec son volcan, vers l'an 323.

Sur les côtes de l'Italie, le volcan de l'Epoméo avait déjà chassé d'Ischia une colonie d'Eubéens, vers l'an 900, dans le même temps où l'antique capitale des rois Latins, Albe, périssait dans le lac volcanique d'Albano. Beaucoup plus tard, dans le cinquième ou dans le quatrième siècle, de nouvelles éruptions de l'Epoméo forcèrent les Syracusains, qui avaient remplacé les Eubéens, à s'enfuir à leur tour, et l'île de Proehyta se détacha d'Aenaria. Mais ce volcan redoutable s'est apaisé depuis que le Vésuve, en l'an 79 après J.-C, a repris son ancienne activité.
Une des îles Lipari date du temps d'Annibal.

Les tremblements de terre furent tellement fréquents pendant la seconde guerre punique, qu'en une seule année on en annonça cinquante-sept à Rome. Ils acquirent, depuis l'ère chrétienne, une violence extraordinaire.
Pendant le premier siècle, le plus grand de tous tut celui de l'an 17, sous Tibère, où douze villes d'Asie périrent en une seule nuit.
Celui d'Antioche, dans lequel Trajan fut en très grand danger de mort, et qui dura plusieurs jours, fit un nombre incalculable de victimes.
Sous les règnes suivants, le même fléau se répéta fréquemment, et l'on peut dire qu'il a accompagné l'empire Romain dans sa longue décadence.

Cependant il s'opérait dans la constitution intime de la Terre de grands changements pendant la période qui a précédé et suivi la venue du Sauveur. Ce fui alors vraisemblablement que les orages perdirent de leur intensité dans les limites du monde civilis  ; on ne les vit plus, en Asie Mineure, foudroyer en une seule nuit un grand nombre de soldats, comme aux temps de Xerxès, ou renverser en Italie, entre Terracine et le temple de Félonie, toutes les tours qu'on y élevait (4).
De nos jours pour voir d'aussi redoutables effets de la foudre, on doit se rendre dans les régions tropicales, soit sur les côtes des océans, soit sur les hauts plateaux des Andes. Ce fut alors aussi que les vapeurs qui avaient, pendant une longue série de siècles, plongé dans une ivresse prophétique les pythonisses de Delphes, cessèrent de s'élever des entrailles de la terre.
C'était le temps où les dieux de la nature s'en allaient, où le monde physique perdait son omnipotence sur l'esprit humain, où l'âme, se recueillant en elle-même, entrait, par la foi en Jésus-Christ, dans le domaine de la vie spirituelle.

Depuis la chute de l'empire Romain, la terre nous paraît avoir eu un nouveau temps de repos, jusqu'au treizième siècle, où nous voyons les rives de nos mers septentrionales et l'archipel Indien être simultanément le théâtre de catastrophes locales. Mais ces révolutions ne peuvent entrer en comparaison, pour le nombre et pour l'importance, avec celles du quatrième siècle avant l'ère chrétienne.

La mer du Nord, par ses irruptions, a formé le Jahde (1218 et de 1016 à 1631), le Dollart (de 1278 à 1287)et le Zuydersée (en 1282), et détruit, sur les côtes du Sleswick (en 1240), la Frise septentrionale, contrée basse, très peuplée et très prospère, dont elle n'a laissé subsister que quelques îles qu'elle ronge depuis lors sans relâche.

Dans la Baltique, en 1308, une violente inondation a détaché l'île de Ruden de celle de Rugen, qui tenait autrefois, dit-on, à la côte Poméranienne, et mis à sec un grand lac entre Colberget Cammin. D'après une tradition, le Frisch-Haff avec sa Nehrung ne dateraient que du douzième siècle.
Daus la Notasie, Bali se détacha de Java en 1204, et Sumbawa perdit Sélo-Parangen 1280, et Giling Travangan en 1260.

Ces révolutions locales étaient les avant-coureurs des fléaux de tout genre qui décimèrent l'humanité pendant les siècles suivants, ainsi que nous le dirons tout à l'heure.

L'histoire de la terre pendant l'époque actuelle de calme nous fait connaître à l'avance quels sont les traits distinctifs de l'histoire physique de l'homme dans cette même période.
Ici encore il y a tout à la fois ordre et désordre. La longévité humaine est demeurée la même depuis le temps où Moïse la fixait à soixante-dix et quatre-vingts ans, et dans toute société de quelques cents personnes, les naissances mâles et les naissances femelles se font invariablement équilibre. Mais cet ordre paisible qui règne dans l'existence corporelle de l'humanité est troublé par les maladies, qui correspondent aux années de stérilité et aux tremblements de terre.
La plus affreuse de toutes les maladies, la lèpre, est aussi la plus ancienne. Les Védas la font remonter aux premiers temps du monde (5)  ; elle occupe une large place dans la législation de Moïse, et c'était une variété de ce mal qui avait atteint Job, qui vivait dans le temps où la vie humaine venait d'être extraordinairement abrégée (Job VIII, 8 sq.).

Le mal physique a donc fait irruption dans la race humaine sous sa forme la plus terrible  ; il n'est point arrivé à son comble progressivement et lentement, et ce fait corrobore ce que nous avons dit plus haut des types nègres les plus difformes, qui sont aussi anciens que l'histoire post-diluvienne, et qui ont dû se former dès les premiers temps de l'époque ethnogonique. D'ailleurs la lèpre, qui avait presque entièrement disparu de l'Europe au commencement du moyen âge, y a été apportée de nouveau par les croisés, au douzième siècle, et y a causé d'affreux ravages. On la voit disparaître au dix-septième siècle, mais avant de s'éteindre elle avait, vers l'an 1500, transmis en quelque sorte son venin à la syphilis, qui, depuis trois siècles et demi, ronge ostensiblement ou en secret toute notre race, et spécialement l'Europe si fière de sa civilisation.

Il me paraît même que les épidémies sévissent dans nos sociétés modernes avec plus de violence qu'elles ne le faisaient chez les anciens peuples. Les annales de l'Antiquité ne mentionnent ni peste noire, ni choléra décimant en peu d'années toutes les nations d'un bout de l'Ancien Monde à l'autre. D'ailleurs le commerce, en embrassant dans ses réseaux la terre entière, tend, avec les guerres lointaines, à implanter dans chaque pays les maladies propres à tous les autres. Ce sont les vaisseaux marchands qui introduisent dans les ports de mer de notre Europe occidentale la peste africaine et la fièvre jaune de l'Amérique tropicale. Le typhus, connu déjà d'Hippocrate, a été apporté en Perse et en Egypte vers 640, par les Sarrasin s; il l'a été, de Chypre et de l'Archipel, en Espagne et en Italie, vers 1500 ; d'Europe aux Antilles, en 1585 ; il se forme spontanément, dans le seizième siècle, au milieu des armées de Charles-Quint et de celles de Maximilien II, et ce sont les armées de Napoléon, ou des Alliés, qui l'ont introduit dans nombre de villes où jusqu'alors il ne s'était jamais montré.

On croit que la variole et la rougeole, originaires d'Éthiopie, datent en France de l'invasion des Arabes, et nous venons de voir que les Croisés, à leur retour d'Asie, ont renouvelé la lèpre en Occident. Le scorbut, endémique sur les bords de la Baltique, s'est propagé depuis le moyen âge dans toute l'Europe (6). Les relations que la vapeur établit entre les contrées les plus distantes, sont si aisées et si rapides, qu'on peut prévoir le temps où toutes les maladies se mêleront et s'additionneront les unes aux autres dans chaque coin de la surface terrestre.

Aux maladies étrangères qui arrivent par les armées ou par le commerce dans une contrée, s'ajoutent celles qui y prennent spontanément naissance, ou qui, fort anciennes déjà, deviennent subitement épidémiques. C'est ainsi que, dans le seizième siècle, l'Europe et la Sibérie ont été ravagées par la fièvre cérébrale qui jusqu'alors était assez rare : les Grecs et les Romains ne la connaissaient peut-être pas même, et elle prit à l'improviste les caractères d'une vraie maladie pestilentielle.
L'angine gangreneuse, dont avait parlé Hippocrate, avait disparu, semble-t-il, pendant le moyen âge, quand elle s'offrit de nouveau en Allemagne au seizième siècle, sous une forme épidémique.
Le crowp, que plusieurs médecins disent provenir de la vaccine, a fait sa première apparition en 1747, en Italie.

Mais si de nouvelles maladies se produisent dans le cours des siècles, il en est d'autres qui prennent fin. Autrement le sort de l'humanité serait intolérable.
Le principe morbide que le péché a créé dans la constitution physique de l'homme, soutient une lutte incessante contre notre saine et primitive nature. Elle use de toutes ses ressources pour l'expulser, pour le détruire, ou elle répare par un surcroît de naissances les vides qu'il a faits dans les rangs de la société. Mais s'il est constamment vaincu, il n'est jamais détruit ; chassé sous une forme il réparait sous une autre ; il s'attaque tour à tour à chaque organe, et nous, qui sommes spectateurs de cette guerre qui dure depuis la chute d'Adam, nous nous demandons avec angoisse à qui restera la victoire.

La maladie parvenait à tuer les Antédiluviens au bout de mille ans ; aujourd'hui elle arrache le corps à l'âme avant cent ans, et rien ne nous prouve que sa force aille s'affaiblissant d'une génération à l'autre.
L'amélioration du sort temporel des classes pauvres a bien fait hausser la longévité moyenne chez quelques nations de notre Europe moderne ; mais si moins de personnes meurent dans la première moitié de la carrière qu'elles étaient appelées à parcourir, la carrière elle-même ne s'est point allongée.

Ainsi donc, l'étude scientifique de l'état physique de l'espèce humaine pendant l'époque actuelle, ne nous lait point pressentir l'approche d'un meilleur avenir, et ce n'est que par la foi à la prophétie que nous savons que l'humanité marche dès maintenant à la rencontre d'un temps où, dans les limites de la Terre-Sainte, les disciples du Christ recouvreront la santé et la longue vie que possédaient les Antédiluviens. Cette restauration physique de l'homme n'est certainement possible qu'à la condition que le Dieu créateur verse dans lui des forces nouvelles assez puissantes pour triompher du principe morbide.

Il y a d'ailleurs dans l'histoire des maladies quelque chose d'imprévu, d'inexplicable, de mystérieux, qui déjoue toutes les prévisions des médecins et toutes les ressources de leur art.
Non seulement on a vu d'antiques maux qui n'avaient jusqu'alors attaqué que des individus isolés, frapper tout à coup de leurs verges mortelles des villes, des provinces, des royaumes ; mais ici ce sont des insectes ailés d'une espèce inconnue, qui blessent de leurs aiguillons empoisonnés tout un peuple, et qui disparaissent ; là, ce sont des vers intestinaux qui affligent pendant peu d'années un certain district ; ailleurs c'est un ulcère, c'est une espèce de lèpre, c'est un tremblement de tout le corps, c'est une maladie des extrémités qui envahit un cercle bien déterminé, parfois assez restreint, et qui cesse comme il a commencé, sans cause appréciable (7).

Même bizarrerie dans la nature, l'arrivée et le départ des aliénations mentales épidémiques. La Fable nous parle des filles de Proetus et des femmes d'Argos, qui se croyaient métamorphosées en vaches.
La lycanthropie, qui paraît être une des maladies les plus anciennes et les plus générales, a été épidémique au dix-septième siècle dans une partie de l'Allemagne, où les hommes, se croyant changés en loups-garous, couraient les campagnes pendant la nuit en poussant des hurlements affreux (8).
Le vampirisme, en Servie et en Hongrie, date de 1732.
Les jeunes filles, en 1813, dans un village du Valais, se pendaient toutes les unes après les autres, et Plutarque raconte le même fait de celles de Milet. On dirait qu'il y a un contage moral qui se communique de l'âme à l'âme par la vue et l'ouïe.
On pourrait croire que la vie religieuse doit être à l'abri des épidémies, mais il n'en est point ainsi, car la foi que Dieu donne pour le salut de l'âme et pour la sanctification, peut être détournée de son but par la liberté humaine, et produire des phénomènes anormaux sui generis.
Tantôt ce sont des crises qui peuvent s'expliquer par le magnétisme animal, comme chez les lecteurs de Suède ; tantôt des convulsions extraordinaires, comme chez les méthodistes de Cornouailles, en 1814 ; tantôt des cris involontaires que les irwingiens veulent faire passer pour des langues étrangères dont parle saint Paul.

Mais le plus souvent les symptômes deviennent tellement étranges que toutes les lois et les forces connues de la nature sont impuissantes à les expliquer, et qu'on est tenté d'y voir l'influence d'esprits surhumains et malfaisants.
Ce sont les possédés de Loudun, les nonains ensorcelés d'Allemagne, les convulsionnaires jansénistes, les prophètes réformés des Cévennes.
Ce sont aussi ces fanatiques des bords du Rhin, qui, en 1370, vingt ans après la peste noire, allaient de ville en ville dansant la danse de saint Guy.

Enfin, on dirait qu'il y a une autre espèce encore de contage qui trouble l'esprit sans produire aucune désorganisation dans le corps. Chaque siècle ou chaque génération est en proie à son vertige particulier, qui ; sous le nom d'esprit du temps ou d'idées dominantes, précipite chacun dans la même erreur.

Tandis que dans la Cité de Dieu l'Esprit saint opère de temps en temps de puissants réveils, qui se manifestent par la création d'Églises nouvelles, par la réforme des vieilles Églises, par la fondation d'ordres religieux catholiques ou de conventicules protestants, dans la Cité du monde il suffit qu'une séduisante erreur jaillisse du cerveau d'un homme de génie, ou se forme spontanément dans les masses, ou vienne d'un pays étranger, pour que, dans certaines circonstances données, elle s'insinue bientôt dans tous les esprits, même dans ceux qui, avec quelque peu de vigilance, l'auraient le plus aisément repoussée. Elle produit une sorte de fièvre, dont le premier symptôme est un assoupissement profond du sens moral, et qui vous pousse ensuite à vous frayer une voie, par tous les moyens licites ou illicites, vers le but qu'elle fait briller à vos yeux. Vous ne reculez plus alors devant rien, pas même devant le sang, et la haine, mère du meurtre, est le trait saillant de cette fièvre du mal, comme la charité et la paix caractérisent les grandes agitations qui viennent de Dieu.
Toutefois Dieu fait sortir du mal le bien, et la saine nature de l'esprit humain réagit tôt ou tard contre toutes les épidémies spirituelles (9) qui se produisent successivement dans la série des âges. Mais, malheureusement, l'homme tirant le mal du bien transforme trop souvent les saints réveils de la foi en mouvements fébriles et maladifs.

Parmi les fièvres spirituelles qu'a subies l'humanité, nous citerons, dans notre Europe, celle des croisades, qui, sous le prétexte de la gloire de Dieu et de son Église, poussait à massacrer les Mahométans, les Juifs et les Albigeois, et qui s'est survécue à elle-même dans l'Inquisition ; celle des sorciers, qui leur inspirait l'irrésistible désir d'empoisonner gens et bêtes, et qui remplissait les juges et tout le public d'un désir non moins insensé de brûler les innocents avec les coupables ; celle moins violente des astrologues, que l'on comptait à Paris, sous les derniers Valois, par milliers ; celle des anabaptistes ; celle de l'incrédulité voltairienne, dont le mot d'ordre était : Écrasons l'infâme ; celle du sans-culottisme, qui a couvert la France de sang et de ruines ; celle du communisme, et tout spécialement la fièvre démagogique qui, dans ses moments de crise, change le père de famille le plus honnête en un énergumène, et qui le laisse bientôt après rentrer dans sa placidité habituelle.
Les épidémies spirituelles ne tiennent que par des liens très délicats et comme imperceptibles au monde physique, et c'est bien moins dans l'histoire de la terre que dans celle de l'humanité qu'il faut chercher les causes qui les produisent.
Celles des épidémies physiques, au contraire, ne peuvent se trouver que dans les éléments de notre planète et dans les phases de son développement, et doivent exister dans l'atmosphère. Il paraîtrait même, d'après un physicien des États-Unis, Webster, qu'il existe certains rapports entre les maladies pestilentielles d'une part, et d'autre part, les comètes, les pluies, les sécheresses excessives, tout particulièrement les éruptions volcaniques et les tremblements de terre.
Nous ne dirons point que ces phénomènes produisent les pestes, mais nous croyons que les pestes accompagnent d'ordinaire ces phénomènes, et nous expliquerons leur simultanéité par la volonté de Dieu, qui use de toutes ses verges à la fois quand il châtie les nations qui ne se sont pas laissé gagner par ses bienfaits.

Il y en a en effet deux classes fort différentes de maladies. Les unes sont devenues une partie intégrante, habituelle et nécessaire de l'existence terrestre de l'homme, et elles frappent en quelque manière à l'aventure le juste et l'injuste, n'épargnant pas même les Job et les saint Paul ; les autres ont un caractère exceptionnel d'intensité, elles épouvantent, par le nombre immense des morts les nations, qui tantôt s'humilient devant le Dieu qui les frappe, et tantôt s'irritent et blasphèment. Or les prophètes hébreux et ceux de la Nouvelle Alliance, quand ils racontent ou prédisent les châtiments divins, associent à la mortalité, c'est-à-dire à la peste, non seulement la guerre extérieure ou intestine, mais la famine et le tremblement de terre (Jérém. XIV, 12. Ezéch. V, 12 ; VI, 11. Apoc. VI, 1-8 ; XVI.).

L'histoire d'Israël nous révèle le but et le sens moral des fléaux de Dieu. Au désert, les Hébreux rebelles sont trois fois châtiés par des pestes subites qui les taisaient périr en peu d'heures par milliers (Nomb. XI, 33 ; XVI. 16 sq. ; XXV).
Les temps des Juges nous sont mal connus ; les nombreuses chutes du Peuple de Dieu auront certainement été punies par bien d'autres fléaux que par la famine dont le Livre de Ruth fait accidentellement mention.
Un crime de Saül a été suivi de trois ans de famine : l'orgueil de David, de quelques heures de peste (2 Sam. XXI. XXIV).
Le règne de Salomon, qui est le point culminant de l'histoire du Peuple Élu, s'écoule sans le moindre fléau. Ce temps de paix se prolonge sous ses successeurs jusqu'au temps de la première décadence de Juda et de la corruption croissante d'Israël. Alors la main de Jéhova s'appesantit de plus en plus sur son peuple.

C'est d'abord la famine d'Élie, qui a duré trois ans et demi, vers 910 avant J.-C. c'est, une génération plus tard, une autre famine de sept ans, du vivant d'Élisée (1 Rois XVII et XVIII ; 2 Rois VIII, 1, 2 et sans doute ; IV, 38. Comp. Amos IV, 6-8) ; ce sont, sous Osias, un tremblement de terre qui avait menacé (entre 809 et 784) d'une ruine pareille à celle de Sodome la Judée (qu'Amos compare à un tison arraché du feu (Amos I, 1 ; IV, 11 ; VIII, 8. Zach. XIV, 5), et une sécheresse aggravée par le fléau des sauterelles (Joël l, si ce prophète a réellement vécu sous Osias). Puis Ephraïm est emmené en captivité ; Juda se relève sous Ezéchias et plus tard sous Josias. Aussi, pendant plus d'un siècle, nulle calamité publique ne frappe la Terre-Sainte, et la peste ne fait périr que l'armée de Sennachérib (2 Rois, XIV). Mais Juda est incorrigible, sa ruine est imminente. Toutefois Dieu cherche encore à le ramener au bien par de salutaires rigueurs, et Jérémie lui explique le but de la sécheresse qui a, plus d'une fois sans doute, ravagé la Judée pendant son ministère (Jérém. V, 24 ; XII, 1-13 ; XIV, 1-6).
Enfin, un siècle plus tard, avant l'an 522, Dieu a frappé de ce même fléau son peuple, qui, de Babylone, était revenu dans sa patrie avec son ancien endurcissement (Aggée, I, 11 ; II, 17).

Cette connexion entre la corruption des peuples et les fléaux de la nature, est une des idées fondamentales de la grande prophétie de Jésus-Christ sur la ruine de Jérusalem. « Avant cet événement, il y aura, dit-il, au milieu de guerres et de séditions, des tremblements de terre en divers lieux et des famines et des pestes (Luc, XXI, 10-12)»
De même, dans les Révélations de saint Jean, la famine et la mortalité ravagent l'empire Romain, au temps des guerres intestines du troisième siècle et avant la ruine du monde païen (Apoc. VI).

Cette ruine et celle de Jérusalem sont l'image des derniers temps où seront renversées pour ne plus se relever toutes les puissances politiques et ecclésiastiques qui s'élèvent contre Jésus-Christ. Leur chute sera précédée d'un « ulcère malin et dangereux, » d'une « excessive sécheresse, qui consumera les hommes et les fera blasphémer le nom de Dieu, » et d'un « tremblement de terre tel qu'il n'y en aura jamais eu de pareil (Apoc. XVI, -2, 8 et 9, 18). »

Voyons si, à la lumière de la Révélation, nous pourrons retrouver dans l'histoire profane le sens des grands fléaux qui ont frappé les nations païennes.
Notons d'abord que toutes, elles reconnaissaient dans ces fléaux la juste colère des dieux qu'elles avaient irrités par leurs péchés, et qu'elles apaisaient par leurs sacrifices. C'est ainsi qu'Homère explique par le courroux d'Apollon la peste qui dévastait le camp des Grecs devant Troie.

L'histoire authentique d'Athènes nous offre : d'abord, dans ces temps de profonde corruption dont Solon nous a laissé le tableau dans ses poésies, une époque de maladies contagieuses que le pieu Epiménide avait fait cesser par ses lustrations ; puis, après les batailles de Salamine et de Platée, plus de cinquante années toutes resplendissantes de santé, de prospérité et de gloire, et enfin, à l'instant où cette cité, enorgueillie par ses succès, s'engage dans une guerre de frères, cette fameuse peste qu'a décrite Thucydide, et qui ne ressemblait à aucun des fléaux antérieurs.

À Rome, cinq pestes depuis sa fondation à l'an 488 avant J.-C; pas une seule pendant la période de ses conquêtes, et dix sous les empereurs et pendant sa longue décadence.

Or nous savons déjà que les cinq premiers siècles de l'ère chrétienne ont été témoins de nombreux tremblements de terre, et les famines pendant ce même espace de temps n'ont pas causé de moindres ravages que les tremblements de terre et que les pestes.
Par ces diverses causes, ainsi que par les guerres intestines et par les invasions des peuples étrangers, certaines provinces de l'empire perdirent le tiers et jusqu'à la moitié de leurs habitants.
Ainsi Athènes et surtout Rome ont été régies par les mêmes lois qu'Israël ; le temps de leur fleur a été exemptde tout fléau, et les fléaux qui ont accompagné leur ruine ont été infiniment plus fréquents et plus violents que ceux qui avaient éclaté pendant leur enfance et leur jeunesse.

Au sixième siècle, dans notre Occident, le monde romain se décompose, les vertus de l'épiscopat, dernière auréole de la première Église, s'éclipsent, et les Germains ajoutent aux vices grossiers des barbares les crimes des races qui se sont corrompues au sein de la civilisation.
Grégoire de Tours, saisi d'effroi, croit discerner dans la société qui l'entoure les signes précurseurs de la fin du monde (10). Or pendant ce siècle, à dater de 540, la peste a sévi en Occident pendant cinquante années avec de courts moments de répit.

L'Occident, au septième siècle, descend à son nadir, selon l'heureuse expression de M. Guizot, et Dieu semble alors s'être lassé de frapper.
Au huitième, où commence le mouvement ascensionnel, apparaît une race et une dynastie nouvelles, et l'austrasien Charlemagne tente de réaliser, selon ses lumières, l'idéal d'un État chrétien. Mais, déjà sous son fils, commencent les guerres intestines, signes infaillibles de la décadence. C'est alors que Nilhard termine son histoire en disant « qu'au temps de Charlemagne, de bienheureuse mémoire, régnaient partout la paix et l'harmonie, la joie et l'abondance, parce que le peuple suivait la voie de Dieu ; mais aujourd'hui que chacun suit sa propre route, il n'y a plus que querelles et discordes, que disette et tristesse, et les éléments nous sont hostiles et nuisibles, ainsi que le témoigne la Sainte Écriture. » La peste de 836 avait enlevé la fleur de la noblesse franke.

La nation française s'est constituée en un royaume sous les premiers Capétiens, au milieu de pestes et de famines affreuses. Déjà en 945 avait apparu pour la première fois le feu sacré, ou mal des ardents, qui causa en France de grands ravages, à six reprises pendant deux siècles.
L'année 985 ouvrit, par une effrayante mortalité, une période de pestes d'environ quarante ans, et en 1030. après de longues pluies, commença un temps de stérilité où l'on vit des malheureux assassiner les voyageurs pour se repaître de leur chair (11).
On eût dit que Dieu s'apprêtait, au onzième siècle, à détruire l'espèce humaine.
Le douzième, qui est celui des croisades, fut encore très mauvais ; toutefois il l'aurait été moins si les armées des chrétiens n'avaient rapporté d'Orient la lèpre.
Avec le treizième siècle et saint Louis, la France du moyen âge arrive au faîte de sa gloire et de sa vie religieuse ; aussi les maladies épidémiques disparaissent-elles, et, sans les croisades, l'état sanitaire de l'Occident aurait été excellent.

Mais au moment où les historiens signalent la corruption des moeurs, arrive du fond de l'Asie, avec une extrême rapidité, la peste noire, qui, de 1348 à 1354, enleva le quart, ou suivant une autre appréciation les deux tiers de la population de l'Europe et de l'Asie. Cette peste a été, avec celle de 540 à 590, le plus terrible des fléaux qui aient ravagé le monde. Elle s'était formée à la suite de tremblements de terre qui, depuis 1333 à 1347, avaient ébranlé l'Ancien Monde, de la Chine à l'Atlantique ; après d'excessives sécheresses, des pluies diluviennes et de grandes famines ; lors de la conjonction de Saturne, de Jupiter et de Mars dans le Verseau (le 23 mars 1345), et tandis que des globes de feu éclataient dans les airs (12). Ces années ne seraient-elles point le temps d'une grande crise tellurique dont le sens nous échappe, parce que nous connaissons fort peu la vraie histoire de notre planète ? Un siècle plus tard, en 1450, l'Europe entière fut de nouveau ravagée par une épidémie pestilentielle.

Le seizième siècle s'ouvrit sous de sinistres augures.
En 1503 éclate pour la première fois en Europe la fièvre cérébrale, qui était sans doute le contrecoup de la fièvre intellectuelle qui dévorait depuis un demi-siècle les esprits.
L'an 1505 passe pour être la date de la première apparition en Europe du typhus, qui dès lors y a causé de très grands ravages, et dans cette même année les fièvres cérébrales prirent une intensité croissante, qui leur donna, en 1580, les caractères d'une vraie maladie pestilentielle.
En 1511, une famine fit périr trente mille personnes dans le seul arrondissement de Florence.
En 1525 sévit en Italie une peste horrible, qui se propagea plus tard dans toute l'Europe. Elle avait été précédée en France de la première épidémie connue du choléra européen, qu'on nomma trousse-galant.
L'an 1535 a été témoin, en Italie, de la plus ancienne épidémie de pleurésie. Vers le milieu du siècle, l'angine gangreneuse devient épidémique après des années fort humides, et dépeuple, en 1564, les villes et les campagnes en Europe, dans l'ouest de l'Asie et dans le nord de l'Afrique.

Le seizième siècle est celui de la Réforme, et l'on serait tenté, au point de vue catholique, de voir dans tous ces fléaux les châtiments que Dieu dispensait à l'Europe rebelle. Mais comme ces fléaux ont la plupart précédé Luther, qu'ils se relient naturellement à ceux du quinzième et du quatorzième, et que le premier effet de la Réforme a été partout de mettre un frein à la corruption des moeurs, il est plus juste de dire que les temps de la résurrection de la foi reproduisent le spectacle des premiers temps de l'Église, où les fléaux se multipliaient à mesure que l'Évangile se propageait dans le monde.

À ces deux époques, Dieu frappait à coups redoublés une société profondément corrompue, en même temps qu'il lui offrait l'unique remède à tous ses maux.
Le catholicisme, par sa lutte contre la Réforme, reprend de la force en reprenant de la vraie vie ; la Réforme ajoute à la vérité de son premier âge la piété intime de celui de Spener, et crée des sociétés nouvelles où règne une pureté de moeurs que ses ennemis traitent de puritanisme ; l'Europe moderne s'élève, sous Louis XIV, au comble de sa gloire ; et aussi les pestes et les fléaux suspendent pendant plus de deux siècles leurs ravages.

La révolution française commence en l'année que les astrologues avaient désignée depuis fort longtemps comme devant être celle d'un bouleversement général. Les hommes s'égorgent les uns les autres pendant vingt ans, sans que Dieu frappe immédiatement de la mortalité et de la famine les insensés qui se frappent eux-mêmes de l'épée ou de la hache de la guillotine.
Mais à peine l'Europe s'est-elle replongée volontairement, en 1830, dans le gouffre des révolutions, que le choléra asiatique l'y poursuit et se jette sur elle et la tourmente comme nulle épidémie ne l'avait fait depuis la peste noire.

Je n'ai point la prétention d'avoir découvert les véritables motifs des divers fléaux qui ont frappé le monde païen et l'Europe chrétienne. Mais il me parait impossible de nier qu'il existe entre l'histoire de ces fléaux et celle de l'humanité, une harmonie qui a été préétablie par un Dieu de justice et de sainteté.




CHAPITRE CINQUIÈME

CHAPITRE SIXIÈME

Résumé

Nous avons reconstruit, d'après la Bible, l'histoire de la terre, et tenté de démontrer l'harmonie de cette histoire avec celle que donnent les sciences naturelles. Mais nous avons puisé à tant de sources différentes et groupé un si grand nombre de faits en apparence hétérogènes, que nos lecteurs éprouvent certainement avec nous le besoin de résumer les principaux résultats de ces recherches. Nous allons donc mettre en regard la série des faits bibliques et celle des faits géologiques, qui s'expliquent et se confirment mutuellement.

LA BIBLE LES SCIENCES.
I. LE MONDE DE L'AURORE
Au commencement Dieu créa les cieux et la terre.
[ La terre était la demeure des Anges qui se sont rebellés, et dont la chute a entraîné la sienne.]
La terre [ou le système solaire] était informe et vide : abîme de ténèbres et d'eau.
Les substances dont les astres du système solaire ont été formés étaient primitivement à l'état gazeux.
II. LE MONDE PRÉSENT
A. Les temps de création.
Ce monde aurait pu être restauré en un instant par une seule parole de Dieu, aussi bien que progressivement et lentement. Or il l'a été en six Jours. La terre a été formée en plusieurs époques.
Le progrès s'opère non point par la simple addition des êtres nouveaux aux êtres anciens, mais au milieu de crises violentes, par une succession de Soirs et de Matins, et par des actes réitérés de la toute-puissance du Créateur. Les périodes offrent une longue succession de Cataclysmes et de Créations.
PREMIER JOUR.
Le premier jour est celui du chaos.
L'esprit de Dieu féconde les eaux ténébreuses.
La Lumière apparaît.
D'après les sciences naturelles, c'était bien la Lumière qui devait être créée avant toutes choses.
Les substances gazeuses offrent l'aspect d'une nébuleuse, et la lumière de la nébuleuse est plus ancienne que celle du soleil. La nébuleuse se divise en une sphère centrale et lumineuse qui deviendra le soleil, et en un anneau de substances opaques qui formeront les planètes.
Dieu sépare la lumière des ténèbres.
DEUXIÈME JOUR
Dieu sépare les eaux inférieures des eaux supérieures, et donne à l'intervalle le nom de CIEUX.
[Les eaux inférieures ou de notre terre se condensent et s'organisent en un globe que la mer recouvre de toutes parts.]
L'anneau se divise en cercles concentriques dont chacun donnera naissance à une planète.
Dans chaque cercle les substances se réunissent en un astre ou en plusieurs. Celui de ces astres que nous habitons, a été primitivement recouvert de tous côtés par la mer.
La terre qui, par sa forme sphérique et par son aplatissement aux pôles, atteste son origine fluidiforme (aquatique ou ignée), possède dans le feu qu'elle recèle sous sa surface une force qui se manifeste surtout par le soulèvement des montagnes.
Cette mer unique cachait sous ses eaux des montagnes, qui s'étaient dressées.
TROISIÈME JOUR.
L'océan se rassemble en plusieurs bassins ou mers, et la TERRE FERME paraît avec ses montagnes qui se dressent, et ses vallées qui s'abaissent ; l'atmosphère retentit des éclats de la foudre.
La terre ferme se couvre de ses premiers Végétaux.
Les forces plutoniques font émerger de l'océan primitif les premières terres.
(Les végétaux antésolaires n'ont pas été retrouvés (13))
QUATRIÈME JOUR.
Le SYSTÈME SOLAIRE est constitué. La terre entre dans ses relations actuelles avec le soleil et avec la lune.
CINQUIÈME JOUR. PREMIÈRE PÉRIODE.
Dieu crée les premiers ANIMAUX, qui sont postérieurs au soleil.
Terrains de transition.

Les plus anciens animaux étaient éclairés déjà par la même lumière solaire que ceux de nos temps.
Ces premiers animaux sont les ANIMAUX AQUATIQUES, c'est-à-dire les poissons et même les cétacés, non moins que les rayonnés. La loi du progrès, vraie de l'oeuvre totale des six jours, ne l'est pas de l'oeuvre de chaque jour.
Avec les animaux aquatiques apparaissent les Animaux Atmosphériques, insectes et oiseaux.
Parmi les animaux marins se distinguent les thaninim ou les monstres.
(Animaux atmosphériques.)
(Thaninim.)

(Animaux atmosphériques.)
a) Époque cumbrienne, silurienne et dévonienne. ANIMAUX MARINS : rayonnes, articulés, mollusques et poissons sauroïdes. Le progrès, vrai de l'oeuvre totale de la création de la terre, ne l'est pas de l'oeuvre de chaque époque.
Des insectes.
Plantes marines ; plantes terrestres, fougères.

b) Époque houillère. Bancs énormes de substances végétales décomposées. Cryptogames aquatiques. Fougères, conifères.
Poissons dans les marais. - Scorpions. - Insectes.

c) Époque pénéenne. La terre est habitée pour la première fois par des sauriens voisins des monitors.


SECONDE PÉRIODE.
Terrains secondaires.

a) Époque triassique.
Les sauriens prédominent. - Batraciens. -

Traces d'oiseaux.

b) Époque oolithique.
Sauriens éminemment nageurs, ichtyosaures, etc. Des cétacés ?
Sur la terre, les mégalosaures et des marsupiaux. Des arachnides.
Saurien volant, les ptérodactyles. - Insectes coléoptères et névroptères.
Les conifères et les cycadées dominent.

c) Époque crétacée.
Les sauriens font place aux squales. - Sur la terre, les iguanodons, les mégalosaures et divers crocodiles. - Aucun débris de mammifère terrestre.
Peu de changements importants dans la faune et dans la flore.
SIXIÈME JOUR. TROISIÈME PÉRIODE.
Terrains tertiaires.
Soir du sixième jour Déposition des terrains crétacés, les plus vastes couches sédimentaires connues, et dont l'épaisseur atteste de longues périodes de tranquillité.
Dieu fait les ANIMAUX TERRESTRES.
Dieu leur donne, ainsi qu'aux oiseaux, les plantes pour nourriture.
a) La terre est enfin peuplée de MAMMIFÈRES ; palaeothères et autres pachydermes.
Ils sont herbivores.
Avec eux apparaissent les premiers poissons d'eau douce analogues aux nôtres. De grands changements s'opèrent parmi les invertébrés ; les trois centièmes des espèces de coquilles existent, dit-on, encore dans nos mers. Les dicotylédones complètent la flore continentale. L'Europe centrale avait la température actuelle de la basse Égypte.
De fréquents phénomènes plutoniques.

b) Un cataclysme local détruit en partie la flore et la faune éocènes dont les espèces coexistent avec celles de l'époque miocène, ou de la molasse. Mastodontes, rhinocéros, hippopotames, singes, dinothères.

c) L'époque pliocène ou subalpennine est pareillement séparée de la précédente par des révolutions locales.
Dieu fait pousser en Eden une flore nouvelle :
il y place Adam, créé homme-femme ;
il forme Ève de la substance d'Adam ;
il peuple le Paradis de nouvelles espèces de quadrupèdes et d'oiseaux (parmi lesquelles, sans aucun doute, il n'y en avait aucun de carnivore). Pas de serpents rampant sur le ventre.
D'après les quatre fleuves du Paradis, la surface de la terre n'avait pas sa forme actuelle. La terre subsistait parmi l'eau.
Pas de pluie ; une vapeur arrosait la terre.
Dieu déclare la terre très bonne.
Les temps de création cessent.
Elle a sa flore distincte, formée en Europe de conifères et de dicotylédones.
Les quadrupèdes pliocènes ne diffèrent la plupart des nôtres que par une taille plus grande.
La moitié des coquilles sont identiques avec celles de la Méditerranée. Point d'ophidiens.
Des continents moins étendus, plus océaniques et insulaires que les nôtres.
Une température plus chaude qu'aujourd'hui, des palmiers en Europe.
(A cette terre très bonne correspondraient un temps de repos entre les dernières injections des roches plutoniques et les premières éruptions volcaniques, et la prédominance des pachydermes aux moeurs pacifiques.)
Les roches compactes, formées [par voie chimique, cessent.
La flore pliocène possède les premières céréales et point de vignes.
La faune pliocène se distingue de la miocène et surtout de l'éocène, par la prédominance des espèces carnassières.
Avant le Déluge, les grands carnassiers semblent avoir été en Europe les maîtres de la terre.
(L'homme primitif n'a pas été retrouvé.)
B. Les temps de repos ou le septième jour.
Dieu achève son oeuvre et se repose.
L'homme pèche. Il cultivera les céréales. Les chardons et les ronces apparaissent. Point encore de vigne.
[ Le travail de Dieu recommence dans de certaines limites, à cause du péché. Nous supposons que Dieu fait les animaux carnassiers de la terre et de l'air.]
1° La Terre Antédiluvienne.
(1656 ans.)
Une révolution locale bouleverse le Paradis.
La terre refuse son fruit aux Caïnites. Effroyable sécheresse de Méhujaël.
Avant le Déluge, les animaux eux-mêmes avaient corrompu leur voie.
L'homme vivait plusieurs siècles et était de très grande taille.
LE DÉLUGE.
(L'an 2348 avant J.-C.)
Le DILUVIUM.
Le Déluge recouvre les plus hautes montagnes qui existaient alors.
Le Déluge a été une unique et courte révolution.
Les mouvements de ces eaux avaient une violence extraordinaire.

Les eaux débordaient de toute part, et les eaux douces se sont mêlées aux eaux de la mer.
Le Déluge est la dernière des révolutions telluriques.

Le Paradis et son quadruple fleuve disparaissent sans doute lors du Déluge.
L'atmosphère subit un changement considérable, qui se manifeste par le premier arc-en-ciel.
DÉPÔTS DILUVIENS sur les plateaux des Andes et vers les cimes de l'Himalaya.
Ces dépôts forment une couche unique, où les blocs n'ont pas eu le temps d'être entamés et arrondis.
C'est au diluvium que se sont formées les vallées d'érosion, et ses dépôts comprennent des blocs de granit dans des contrées calcaires, ainsi que des coquilles d'eau douce mêlées à des coquilles marines.

Les dépôts diluviens recouvrent tous les autres terrains, et dans les cavernes sont eux-mêmes recouverts de stalagmites qui se forment maintenant encore.
Le diluvium est l'époque du soulèvement d'une partie des Alpes, et celle où l'Europe a pris son relief actuel.
Il a été accompagné d'un subit abaissement de la température, comme le prouvent les grands pachydermes que les glaces ont saisis sur les côtes sibériennes de l'océan Boréal.
2° TERRE ACTUELLE.
a) Époque post-diluvienne.
QUATRIÈME PÉRIODE.
Époque quaternaire.
(8 à 9 siècles ; de 2348 à 1500 avant J.-C.) La vie de l'homme s'abrège, sa taille diminue [ainsi que celle des animaux sauvés avec lui dans l'arche].
L'humanité se divise en races et peuples.
Les glaciers des montagnes acquièrent de gigantesques dimensions. Dans les pays chauds, des pluies torrentielles tombent sur des contrées où, de nos jours, il ne pleut pas. La première neige, d'après le Zend-Avesta.
[Les contrées les plus distantes de l'Ararat et les grandes îles se peuplent de faunes spéciales que Dieu a faites et non créées.]
Ère ethnogonique ou d'Abraham.
Les faunes spéciales de l'époque pliocène reparaissent avec la plupart des mêmes types. Ce sont des espèces nouvelles de genres anciens.
Époque du soulèvement du Ténare, ou époque glaciaire (des pays tempérés et boréaux). Ère de Typhée (dans le bassin de la Méditerranée), du barattement de la mer (en Inde).
Ruine de Sodome. Ruine des Adites. Formation de la vallée de l'Oronte. La Phrygie brûlée. Les forêts d'Égypte vitrifiées. Les monts Béhéda. - Déluge d'Yao. - Rupture des isthmes au sud-est et au nord-ouest.
Fonte des glaciers ; déluges locaux.
2° Ère de Moïse et de Josué.
Phénomènes miraculeux en Égypte, dans l'Arabie Pétrée, en Judée.
Ralentissement de la marche du soleil à la parole de Josué.
L'Italie bouleversée. Anaphé et Théra émergent.
b) L'époque actuelle.
(De 1500 avant J.-C à X après J.-C.)
CINQUIÈME PÉRIODE.
Ordre et repos troublés par les famines, les maladies pestilentielles et les tremblements de terre.
Correspondance des temps de fléaux et des temps de corruption.
L'histoire de ces triples fléaux est trop mal connue, ou les phases de l'un ne correspondent pas assez avec celles des deux autres, pour qu'on puisse diviser cette époque en un certain nombre d'âges. On peut dire seulement que les fléaux, à dater de l'ère chrétienne, ont sévi avec beaucoup plus de violence que jusqu'alors.
(Dans l'avenir.)
Une effrayante sécheresse.
Le plus grand des tremblements de terre.

Après la ruine de Babylone, le Christ revient au milieu d'une épouvantable agitation de la nature entière. Le relief de la Judée est tout changé.

c) La Terre du millénium.
La Judée recouvre sa première fertilité. Le désert fleurit. L'homme à cent ans meurt jeune. Les bêtes carnassières disparaissent de la Terre-Sainte ou sont transformées. Le serpent demeure serpent.
La terre et le système solaire sont consumés et renaissent.
Nouvelle révolution géologique, mettant fin à noire époque actuelle de repos.






Dernière révolution géologique.
III. LE MONDE ÉTERNEL.
Plus de mer ni de ténèbres. L'or-cristal. Les hommes aux corps aériens.


Dans ce résumé, j'ai appelé avec intention les regards de mes lecteurs sur les points où, d'après mon interprétation, il y a discordance entre la Genèse et la géologie. On en découvrira peut-être d'autres encore ; mais ce qui me semble impossible, c'est de nier que, prise dans son ensemble, la cosmogonie de la Bible ne soit en harmonie avec celle de la science.
Au reste, cet accord sera bientôt au nombre de ces vérités triviales qu'on ne prend plus la peine de démontrer, parce que personne ne les conteste plus, et déjà M. Beudant termine son Cours élémentaire de géologie à l'usage des collèges par quelques pages excellentes sur la géogénie biblique.

On peut ne pas accepter l'identité du Déluge et du diluvium. Mais ce qui me semble impossible, c'est de ne pas avouer que le Déluge est, d'après la Genèse et d'après les traditions païennes, une immense crise tellurique, une vraie révolution géologique qui a profondément modifié l'atmosphère, la faune, la flore et l'espèce humaine, et qui même a été accompagnée de créations nouvelles.

On trouvera sans doute fort incomplète mon esquisse de l'histoire physique de l'homme. Mais tout esprit impartial reconnaîtra que le chapitre de la Genèse qui nous donne la décroissance de la longévité humaine chez les Noachides, est un des monuments les plus extraordinaires et les plus précieux du monde primitif.
On peut ne pas admettre la divine inspiration des saintes Écritures, et s'assurer qu'elles renferment sur l'histoire de la terre une vue d'ensemble très originale, qui embrasse, d'une éternité à l'autre, toute la série des temps, et qui n'est en contradiction ni avec les données fondamentales de la raison, ni avec les grands résultats des sciences modernes. Les regards des prophètes plongent en arrière et en avant beaucoup plus loin que les géologues, qui ne remontent qu'au cinquième jour cosmogonique et qui s'arrêtent à l'heure actuelle, qui est le seuil, toujours mobile, de l'impénétrable avenir. Mais ils n'ont aucune objection sérieuse à faire aux parties des révélations prophétiques qui échappent à leur contrôle, et le jour viendra où les tableaux qu'ils tracent, avec tous les détails possibles, des nombreuses phases qu'a subies notre planète, entreront sans effort dans le vaste plan que la Bible nous donne des destinées de la terre. Alors les résultats de la science se compléteront par la prophétie, et la prophétie s'expliquera et s'illuminera par la science. Car elles font plus que de dire les mêmes choses chacune dans son langage : l'une sait ce que l'autre ignore, et ce n'est qu'en réunissant leurs enseignements qu'on parviendra à savoir toute la vérité. Les matériaux fournis par l'une ne sont pas moins solides que ceux de l'autre, et ils sont tous prédestinés à entrer à titre égal dans la construction de l'édifice définitif.

On ne niera pas davantage que, dans les saintes Écritures, l'homme est le terme où aboutit la création de la terre, et qu'une fois l'homme créé, les destinées de la terre sont indissolublement liées à celles de l'homme. Cette unité mystérieuse du monde physique et du monde moral répugnera peut-être à certains philosophes ; mais la philosophie même acceptera sans difficulté cette doctrine, à laquelle elle arrive d'ailleurs nécessairement par ce besoin d'unité qui fait l'essence même de l'âme humaine.

Ainsi donc, l'historien qui veut étudier le développement de l'humanité, doit constamment avoir présent à l'esprit celui de la nature ; car l'une n'est pas plus stationnaire que l'autre, et l'histoire des tremblements de terre, des famines, des épidémies, est le complément nécessaire de celle des peuples et des États.

Mais toute histoire suppose un point de départ, un progrès et un terme ; autrement il n'y a plus qu'un chapelet d'accidents qui ne méritent pas un regard, un instant de réflexion.
Or s'il y a progrès et dans l'histoire de la nature et dans celle de l'humanité, il y a plan. S'il y a plan, il y a une intelligence pour le concevoir et pour l'exécuter.

L'intelligence qui fait marcher de concert la terre et l'homme, c'est Dieu. Le point de départ, le chemin et le but nous seraient également inconnus si Dieu ne nous les avait révélés par ses prophètes. Et ce Dieu, qui a parlé au monde, est aussi celui qui l'avait créé par son Verbe, et qui le sauve par Jésus-Christ.



Table des matières

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(1) M'est-il permis de noter que j'écrivais ce mot agissent, le 25 juillet, vers 12 3/4 heures, quand mon pupitre se souleva par un choc vertical, auquel succéda, quelques secondes après, une oscillation du nord-est au sud-est, qui fit tinter les sonnettes de la maison ?

(2) Voyez page 178.

(3) Catteau Calleville, Tableau de la Baltique, t. I, p. 27. 43.

(4) Arago, Annuaire de 1838.

(5) Rig-Veda, t. IV de latiraunct. française. Voir Apala et Ghocha dans la table des matières.

(6) Ozanam, Histoire médicale des maladies épidémiques, 2e édit Voir les chapitres du scorbut, du typhus, etc.

(7) Ozanam, t. IV, p. 183, 233 sq.

(8) Ozanam, t. IV, p. 216. 254

(9) J'emprunte ce terme à un petit écrit de Carus qui porte ce titre. (Leipzig, 1852.)

(10) Hist. IV, 18; V, t.

(11) Les récoltes de 1033 en valurent cinq ordinaires.

(12) Ozanam, t. IV, p. 76 sq.

(13) Nous soulignons les discordances.

 

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