HISTOIRE DE
LA TERRE
CHAPITRE CINQUIÈME
L'époque actuelle.
L'époque actuelle est un temps de repos
entre les révolutions anciennes et celle
qui, d'après la croyance de tous les
peuples, détruira la terre par le feu. Les
astronomes ont démontré que, depuis
les plus anciennes observations qui nous soient
connues, la durée de la rotation de notre
globe ou la longueur du jour et de la nuit est
demeurée identiquement la même. On a
pareillement constaté par les
témoignages de l'histoire, que la
température moyenne de la surface terrestre
n'avait pas varié d'une manière
appréciable pendant les temps historiques,
et que les limites des plantes cultivées,
telles que la vigne, passaient aujourd'hui encore
par les mêmes lieux qu'au temps de
Moïse.
Enfin, les fastes de l'Antiquité n'ont
enregistré ni la ruine, ni l'apparition de
quelque grande région qui aurait
modifié sensiblement la configuration des
continents et les proportions de la terre ferme et
de l'Océan. Si donc on juge d'après
les apparences, ou si l'on oublie ce que Dieu a
révélé aux hommes touchant les
origines et la fin du monde, on dira :
Depuis que nos pères sont morts, toutes
choses demeurent dans le même état
où elles étaient au commencement de
la création
(2 Pierre, III).
Mais le repos de notre époque actuelle n'est
que relatif, et le mouvement est assez grand
à la surface de notre globe pour nous
enseigner par la science et nous aider à
croire que nous sommes à peine sortis d'une
grande crise et que nous allons bientôt
rentrer dans une crise nouvelle.
Et d'abord la température moyenne de la
surface terrestre paraît soumise d'un
âge à l'autre à certaines
perturbations qu'on peut croire périodiques.
Si l'on pouvait se fier à l'exactitude des
chroniqueurs du moyen âge, le sixième
siècle n'aurait eu qu'un seul hiver
très froid (celui de 562), le
septième aucun, le huitième un seul
(763), le neuvième six (800, 822, 829, 860,
874, 891), le dixième un seul (991), le
onzième trois (1001,1044,1067), et le
douzième trois (1124, 1133, 1179), tandis
que les six siècles suivants en ont
compté neuf, treize, quinze, quatorze,
vingt-trois et dix-neuf. Nous aurions donc d'une
part 6 siècles et 15 hivers rigoureux ;
d'autre part 6 siècles et 93 hivers
rigoureux.
Mais le chiffre des années très
froides n'est qu'un des éléments du
calcul ; il faut y ajouter celui des
années remarquables par leur grande chaleur.
Or les sept premiers siècles n'ont eu que
neuf années très chaudes, (763, 860,
993 et 994, 1000, 1022, 1130, 1159, 1171), et l'on
en compte trente-huit pendant les six
siècles subséquents. Il
paraîtrait donc que la température de
notre Europe, du sixième au douzième
siècle, a été tout à la
fois plus égale et plus chaude que du
treizième au dix-neuvième.
Des étés très chauds et
très secs ou des années trop
pluvieuses produisent de chétives
récoltes, et amènent ces famines qui
occupent une assez large place dans les annales de
l'humanité. Mais le fléau ne peut
frapper à la fois la terre
entière ; car elle a sa somme annuelle
de chaleur ou de pluie, qui a été
exactement déterminée
par le Créateur, et
lorsque telle région est affligée de
pluies excessives, telle autre voit sous un ciel
serein ses champs se couvrir de magnifiques
récoltes. Ici il y a surabondance, là
disette, et le commerce aspire à
rétablir l'équilibre. Les famines
apparaissent d'ailleurs dans la vie des peuples et
dans celle de l'humanité, à
l'improviste et comme au hasard.
Toutefois le hasard recouvre si souvent la loi,
qu'il est permis de supposer dans ce cas comme dans
nombre d'autres, l'existence d'une certaine
périodicité. Nous la supposons sans
la démontrer.
Le travail constant et régulier de la nature
pendant notre époque de repos est plus
facile à suivre sur la face même de la
terre que dans sa température. Ainsi, on
voit les fleuves, dans les plaines, élever
insensiblement leurs lits, et à leurs
embouchures, empiéter de plus en plus sur la
mer par leurs atterrissements. Ainsi encore les
dunes que le vent crée sur les côtes
sablonneuses, s'accroissent constamment sous ses
efforts incessants et marchent rapidement dans
l'intérieur des terres. Or on a
calculé approximativement le temps où
les dunes ont commencé leurs voyages, les
fleuves leurs travaux, et l'on a trouvé le
chiffre de quatre mille ans, qui est celui du
Déluge. Voilà donc des
phénomènes qui relient intimement
notre époque de calme à la
dernière grande crise tellurique.
D'autres faits indiquent au contraire que notre
planète n'est point encore entrée
dans son état définitif, qu'elle peut
à chaque instant donner à ses
continents une forme nouvelle, et qu'elle se tient
prête à quelque immense
catastrophe.
Une partie considérable de sa surface est
constamment en mouvement, ici s'affaissant,
là s'élevant et gagnant sur la mer du
terrain ou en perdant. Sur la côte de
Pouzzoles, le fameux temple de Sérapis a
descendu jusqu'à cinq mètres sous les
eaux, et s'est relevé plus tard au-dessus du
niveau de la mer.
L'Italie moyenne, la Sardaigne,
la Suède, offrent certaines localités
qui ont été submergées lorsque
déjà elles étaient
habitées par l'homme, et qu'ont ensuite
soulevées les forces plutoniques qui
agissent (1) sans
cesse dans les entrailles de la terre.
La Suède tout entière (sauf la
Scanie) monte lentement au-dessus de la Baltique,
qui se retire et laisse à nu ses anciens
rivages. La côte occidentale de l'Arabie nous
offre le même phénomène
(2).
Celle du Groenland, au contraire, s'est depuis
quatre siècles continuellement
affaissée sur une longueur de deux cents
lieues.
En 1819, le cours inférieur de l'Indus a
été considérablement
modifié par l'apparition subite d'un dos de
terrain, de vingt lieues de longueur sur six de
largeur, et par l'enfoncement d'une zone
parallèle.
Dans le Nouveau Monde, tandis que de violents
tremblements de terre soulèvent la
côte du Chili, les îles de
Chiloé, qui sont au sud, s'enfoncent
insensiblement au-dessous du niveau de
l'Océan : les indigènes
étonnés trouvent une eau profonde
où naguère était le banc
coquillier qui les nourrissait de ses richesses, et
la forêt qui leur fournissait leur bois est
recouverte de plusieurs pieds d'eau, ou a
péri renversée par quelque vague
immense que le tremblement de terre a
soulevée, et qui a recouvert le sol à
une grande hauteur des productions de
l'Océan.
D'O-Tahiti à Madagascar, si nous devons nous
fier à quelques observations sur lesquelles
Darwin a fondé une hypothèse hardie,
toutes les terres sont en mouvement : les
îles de la Société et les
îles Basses, sur un espace de 500 lieues de
longueur et de 150 de largeur, s'affaissent
insensiblement ; les
Nouvelles Hébrides, les
îles de Salomon et de la Nouvelle-Irlande
sont au contraire soulevées, et dans les
vastes parages qui s'étendent entre ces
foyers d'actions contraires, on voit les îles
qui montent et les îles qui descendent,
irrégulièrement dispersées les
unes parmi les autres et toutes également
agitées par les tremblements de terre.
Plus à l'ouest se reproduisent des
phénomènes tout semblables : la
Nouvelle-Guinée, Timor, Java, Sumatra,
émergent, ainsi que l'attestent leurs
rivages, tandis que la côte orientale du
continent australien verrait, par suite d'une lente
immersion, s'élargir de plus en plus le
canal qui la sépare de son immense
barrière de bancs de coraux.
Au sud-ouest du détroit de la Sonde, les
îles Keeling ou des Cocos, secouées en
dix ans par trois tremblements de terre,
s'enfoncent incontestablement. Ainsi font aussi les
Laquedives, les Maldives et les Chagos, lagunes
rangées du septentrion au midi sur une
même ligne de 500 lieues de longueur ;
et la côte orientale du Décan, ainsi
que le nord de Ceylan, offrent au contraire divers
phénomènes qui attestent un
soulèvement.
Les Seychelles enfin, la partie septentrionale de
Madagascar et la côte voisine de l'Afrique,
sont cernées ou bordées de bancs de
coraux qui ont été soulevés
à une époque récente.
Les forces volcaniques concourent aussi, mais dans
des dimensions restreintes, à modifier dans
notre époque actuelle de repos, la face de
notre globe. Tantôt elles font sortir du
milieu des mers des îles nouvelles, comme
Hiéra dans l'Archipel (186 ans avant J.-C),
Sabrina dans les Açores (1811), et un grand
nombre d'autres dans le Grand-Océan.
Tantôt elles créent sur les continents
des montagnes, comme le Monte-Nuovo, près du
Vésuve, en 1538, ou des lacs pareils
à celui qui s'est formé au Japon 286
ans avant J.-C.
Mais le phénomène qui, par sa
fréquence non moins que par ses redoutables
effets, prouve peut-être avec le plus de
force que notre terre n'est point encore
entrée dans son repos, c'est le tremblement
de terre. Non seulement il peut détruire en
un clin d'oeil de grandes cités et des
centaines de villages ; mais il trouble pour
un temps plus ou moins long la constitution des
saisons, ainsi que l'a fait dans le midi de
l'Europe le tremblement de terre de 1735 ;
mais il refroidit d'une manière permanente
le climat de la contrée, comme celui de
Quito depuis 1797 ; mais il corrompt l'air au
point d'engendrer des épidémies.
Les tremblements de terre n'ont point
été d'ailleurs également
fréquents aux différents âges
de notre époque actuelle. Il me paraît
qu'ils ont été fort rares de
l'ère de Moïse ou du seizième
siècle jusqu'au quatrième avant J.-C,
et que pendant ce temps-là la terre a, sous
toutes les zones, joui d'un calme relatif
très profond. Mais avec le quatrième
siècle notre planète, semble-t-il,
s'est mise de nouveau à trembler de tous ses
membres ; à ses
extrémités de grandes contrées
s'abîment dans les océans, dans ses
mers intérieures apparaissent de petites
îles.
Antérieurement à l'historien Ephore
et au grand roi de Macédoine, Alexandre, eut
lieu dans la mer du Nord, à la suite d'un
violent tremblement de terre, une invasion de la
mer qui recouvrit les terres des Cimbres et des
Teutons et les obligea à s'expatrier. Ces
terres étaient sans doute situées
entre le Jutland et la côte allemande,
au-devant de l'embouchure actuelle de l'Elbe. Elles
devaient leur existence, ainsi que le bas pays
hollandais, aux courants de la mer du Nord, qui
avaient jadis accumulé les alluvions sur
toute la rive méridionale, à
l'époque où le Pas-de-Calais
n'existait pas encore.
Les basses plaines des Cimbres auront
été détruites par la
mer comme l'ont
été plus tard celles du
Zuydersée, et ce n'est peut-être que
de cette grande révolution que date, selon
une vague tradition, la forme actuelle des
îles danoises
(3). Au reste, le
niveau de toutes ces contrées a subi, depuis
les temps historiques, de grands changements :
on a trouvé dans l'Oldenbourg (à
Jever), des ancres ; dans l'Ostfriese
(à Watteworden), à dix pieds de
profondeur, des planches, des pieux et des
cendres ; dans le Sleswick (à Husum),
un tombeau avec des armes en pierres à
plusieurs pieds au-dessous du niveau de la mer.
À l'autre extrémité de
l'Ancien Monde, l'île de Ceylan, comme nous
l'avons déjà dit, vit, en 322,
s'engloutir neuf îles voisines, et
d'après les traditions javanaises, dont la
chronologie ne mérite sans doute que fort
peu de créance, le détroit de la
Sonde entre Java et Sumatra ne daterait que du
premier siècle avant l'ère
chrétienne.
Au centre de l'Ancien Monde, les contrées de
la mer Caspienne n'avaient point encore leur forme
présente. Selon Aristote, ce lac, le
Pont-Euxin et la Méotide n'étaient
séparés les uns des autres que par un
isthme très étroit. Séleucus
avait eu la pensée de le couper, et
Clitarque, que toutefois Strabon contredit,
prétendait même qu'il était
recouvert par les eaux. Au nord du Caucase
était un grand marais que les Huns
traversèrent dans une de leurs marches, et
qui n'existe plus. Tous les géographes
anciens, et Strabon lui-même, qui
était d'Asie Mineure, s'accordent à
faire de la Méotide une vaste mer. Le
Jaxarte avait, d'après
Ptolémée, sur sa rive gauche, deux
grands affluents, qui n'arrivent plus
jusqu'à lui, et peut-être se
jetait-il, à travers le lac Aral, dans la
Caspienne. L'Oxus, en 1660, envoyait encore un de
ses bras à cette mer au fond du golfe de
Balkan.
Dans le bassin de la Méditerranée,
Thérasia, qui est un fragment du grand
cratère de Santorin, sortait de la mer en
207 avant J.- C; dans la même enceinte
apparaissaient Hiéra, cent trente ans plus
tard, et Thia, l'an 19 de notre ère.
En 373 avant J.-C, un tremblement de terre avait
englouti Hélia,dans le golfe de
Corinthe ; et l'île de Chrysé,
près de Lemnos dont elle avait
été précédemment
détachée, s'abîma dans les
flots avec son volcan, vers l'an 323.
Sur les côtes de l'Italie, le volcan de
l'Epoméo avait déjà
chassé d'Ischia une colonie
d'Eubéens, vers l'an 900, dans le même
temps où l'antique capitale des rois Latins,
Albe, périssait dans le lac volcanique
d'Albano. Beaucoup plus tard, dans le
cinquième ou dans le quatrième
siècle, de nouvelles éruptions de
l'Epoméo forcèrent les Syracusains,
qui avaient remplacé les Eubéens,
à s'enfuir à leur tour, et
l'île de Proehyta se détacha
d'Aenaria. Mais ce volcan redoutable s'est
apaisé depuis que le Vésuve, en l'an
79 après J.-C, a repris son ancienne
activité.
Une des îles Lipari date du temps
d'Annibal.
Les tremblements de terre furent tellement
fréquents pendant la seconde guerre punique,
qu'en une seule année on en annonça
cinquante-sept à Rome. Ils acquirent, depuis
l'ère chrétienne, une violence
extraordinaire.
Pendant le premier siècle, le plus grand de
tous tut celui de l'an 17, sous Tibère,
où douze villes d'Asie périrent en
une seule nuit.
Celui d'Antioche, dans lequel Trajan fut en
très grand danger de mort, et qui dura
plusieurs jours, fit un nombre incalculable de
victimes.
Sous les règnes suivants, le même
fléau se répéta
fréquemment, et l'on peut dire qu'il a
accompagné l'empire Romain dans sa longue
décadence.
Cependant il s'opérait dans la constitution
intime de la Terre de grands changements pendant la
période qui a
précédé et suivi la venue du
Sauveur. Ce fui alors vraisemblablement que les
orages perdirent de leur intensité dans les
limites du monde civilis ; on ne les vit
plus, en Asie Mineure, foudroyer en une seule nuit
un grand nombre de soldats, comme aux temps de
Xerxès, ou renverser en Italie, entre
Terracine et le temple de Félonie, toutes
les tours qu'on y élevait
(4).
De nos jours pour voir d'aussi redoutables effets
de la foudre, on doit se rendre dans les
régions tropicales, soit sur les côtes
des océans, soit sur les hauts plateaux des
Andes. Ce fut alors aussi que les vapeurs qui
avaient, pendant une longue série de
siècles, plongé dans une ivresse
prophétique les pythonisses de Delphes,
cessèrent de s'élever des entrailles
de la terre.
C'était le temps où les dieux de la
nature s'en allaient, où le monde physique
perdait son omnipotence sur l'esprit humain,
où l'âme, se recueillant en
elle-même, entrait, par la foi en
Jésus-Christ, dans le domaine de la vie
spirituelle.
Depuis la chute de l'empire Romain, la terre nous
paraît avoir eu un nouveau temps de repos,
jusqu'au treizième siècle, où
nous voyons les rives de nos mers septentrionales
et l'archipel Indien être
simultanément le théâtre de
catastrophes locales. Mais ces révolutions
ne peuvent entrer en comparaison, pour le nombre et
pour l'importance, avec celles du quatrième
siècle avant l'ère
chrétienne.
La mer du Nord, par ses irruptions, a formé
le Jahde (1218 et de 1016 à 1631), le
Dollart (de 1278 à 1287)et le
Zuydersée (en 1282), et détruit, sur
les côtes du Sleswick (en 1240), la Frise
septentrionale, contrée basse, très
peuplée et très prospère, dont
elle n'a laissé subsister que quelques
îles qu'elle ronge depuis lors sans
relâche.
Dans la Baltique, en 1308, une violente inondation
a détaché l'île de Ruden de
celle de Rugen, qui tenait autrefois, dit-on,
à la côte Poméranienne, et mis
à sec un grand lac entre Colberget Cammin.
D'après une tradition, le Frisch-Haff avec
sa Nehrung ne dateraient que du douzième
siècle.
Daus la Notasie, Bali se détacha de Java en
1204, et Sumbawa perdit Sélo-Parangen 1280,
et Giling Travangan en 1260.
Ces révolutions locales étaient les
avant-coureurs des fléaux de tout genre qui
décimèrent l'humanité pendant
les siècles suivants, ainsi que nous le
dirons tout à l'heure.
L'histoire de la terre pendant l'époque
actuelle de calme nous fait connaître
à l'avance quels sont les traits distinctifs
de l'histoire physique de l'homme dans cette
même période.
Ici encore il y a tout à la fois ordre et
désordre. La longévité humaine
est demeurée la même depuis le temps
où Moïse la fixait à
soixante-dix et quatre-vingts ans, et dans toute
société de quelques cents personnes,
les naissances mâles et les naissances
femelles se font invariablement équilibre.
Mais cet ordre paisible qui règne dans
l'existence corporelle de l'humanité est
troublé par les maladies, qui correspondent
aux années de stérilité et aux
tremblements de terre.
La plus affreuse de toutes les maladies, la
lèpre, est aussi la plus ancienne. Les
Védas la font remonter aux premiers temps du
monde (5) ;
elle occupe une large place dans la
législation de Moïse, et c'était
une variété de ce
mal qui avait atteint Job, qui vivait dans le temps
où la vie humaine venait d'être
extraordinairement abrégée (Job VIII,
8 sq.).
Le mal physique a donc fait irruption dans la race
humaine sous sa forme la plus terrible ; il
n'est point arrivé à son comble
progressivement et lentement, et ce fait corrobore
ce que nous avons dit plus haut des types
nègres les plus difformes, qui sont aussi
anciens que l'histoire post-diluvienne, et qui ont
dû se former dès les premiers temps de
l'époque ethnogonique. D'ailleurs la
lèpre, qui avait presque entièrement
disparu de l'Europe au commencement du moyen
âge, y a été apportée de
nouveau par les croisés, au douzième
siècle, et y a causé d'affreux
ravages. On la voit disparaître au
dix-septième siècle, mais avant de
s'éteindre elle avait, vers l'an 1500,
transmis en quelque sorte son venin à la
syphilis, qui, depuis trois siècles et demi,
ronge ostensiblement ou en secret toute notre race,
et spécialement l'Europe si fière de
sa civilisation.
Il me paraît même que les
épidémies sévissent dans nos
sociétés modernes avec plus de
violence qu'elles ne le faisaient chez les anciens
peuples. Les annales de l'Antiquité ne
mentionnent ni peste noire, ni
choléra décimant en peu
d'années toutes les nations d'un bout de
l'Ancien Monde à l'autre. D'ailleurs le
commerce, en embrassant dans ses réseaux la
terre entière, tend, avec les guerres
lointaines, à implanter dans chaque pays les
maladies propres à tous les autres. Ce sont
les vaisseaux marchands qui introduisent dans les
ports de mer de notre Europe occidentale la peste
africaine et la fièvre jaune de
l'Amérique tropicale. Le typhus, connu
déjà d'Hippocrate, a
été apporté en Perse et en
Egypte vers 640, par les Sarrasin s; il l'a
été, de Chypre et de l'Archipel,
en Espagne et en Italie, vers
1500 ; d'Europe aux Antilles, en 1585 ;
il se forme spontanément, dans le
seizième siècle, au milieu des
armées de Charles-Quint et de celles de
Maximilien II, et ce sont les armées de
Napoléon, ou des Alliés, qui l'ont
introduit dans nombre de villes où
jusqu'alors il ne s'était jamais
montré.
On croit que la variole et la rougeole, originaires
d'Éthiopie, datent en France de l'invasion
des Arabes, et nous venons de voir que les
Croisés, à leur retour d'Asie, ont
renouvelé la lèpre en Occident. Le
scorbut, endémique sur les bords de la
Baltique, s'est propagé depuis le moyen
âge dans toute l'Europe
(6). Les
relations que la vapeur établit entre les
contrées les plus distantes, sont si
aisées et si rapides, qu'on peut
prévoir le temps où toutes les
maladies se mêleront et s'additionneront les
unes aux autres dans chaque coin de la surface
terrestre.
Aux maladies étrangères qui arrivent
par les armées ou par le commerce dans une
contrée, s'ajoutent celles qui y prennent
spontanément naissance, ou qui, fort
anciennes déjà, deviennent subitement
épidémiques. C'est ainsi que, dans le
seizième siècle, l'Europe et la
Sibérie ont été
ravagées par la fièvre
cérébrale qui jusqu'alors
était assez rare : les Grecs et les
Romains ne la connaissaient peut-être pas
même, et elle prit à l'improviste les
caractères d'une vraie maladie
pestilentielle.
L'angine gangreneuse, dont avait parlé
Hippocrate, avait disparu, semble-t-il, pendant le
moyen âge, quand elle s'offrit de nouveau en
Allemagne au seizième siècle, sous
une forme épidémique.
Le crowp, que plusieurs médecins disent
provenir de la vaccine, a fait sa première
apparition en 1747, en
Italie.
Mais si de nouvelles maladies se produisent dans le
cours des siècles, il en est d'autres qui
prennent fin. Autrement le sort de
l'humanité serait intolérable.
Le principe morbide que le péché a
créé dans la constitution physique de
l'homme, soutient une lutte incessante contre notre
saine et primitive nature. Elle use de toutes ses
ressources pour l'expulser, pour le
détruire, ou elle répare par un
surcroît de naissances les vides qu'il a
faits dans les rangs de la société.
Mais s'il est constamment vaincu, il n'est jamais
détruit ; chassé sous une forme
il réparait sous une autre ; il
s'attaque tour à tour à chaque
organe, et nous, qui sommes spectateurs de cette
guerre qui dure depuis la chute d'Adam, nous nous
demandons avec angoisse à qui restera la
victoire.
La maladie parvenait à tuer les
Antédiluviens au bout de mille ans ;
aujourd'hui elle arrache le corps à
l'âme avant cent ans, et rien ne nous prouve
que sa force aille s'affaiblissant d'une
génération à l'autre.
L'amélioration du sort temporel des classes
pauvres a bien fait hausser la
longévité moyenne chez quelques
nations de notre Europe moderne ; mais si
moins de personnes meurent dans la première
moitié de la carrière qu'elles
étaient appelées à parcourir,
la carrière elle-même ne s'est point
allongée.
Ainsi donc, l'étude scientifique de
l'état physique de l'espèce humaine
pendant l'époque actuelle, ne nous lait
point pressentir l'approche d'un meilleur avenir,
et ce n'est que par la foi à la
prophétie que nous savons que
l'humanité marche dès maintenant
à la rencontre d'un temps où, dans
les limites de la Terre-Sainte, les disciples du
Christ recouvreront la santé et la longue
vie que possédaient les
Antédiluviens. Cette restauration physique
de l'homme n'est certainement possible qu'à
la condition que le Dieu créateur verse dans
lui des forces nouvelles assez puissantes pour
triompher du principe
morbide.
Il y a d'ailleurs dans l'histoire des maladies
quelque chose d'imprévu, d'inexplicable, de
mystérieux, qui déjoue toutes les
prévisions des médecins et toutes les
ressources de leur art.
Non seulement on a vu d'antiques maux qui n'avaient
jusqu'alors attaqué que des individus
isolés, frapper tout à coup de leurs
verges mortelles des villes, des provinces, des
royaumes ; mais ici ce sont des insectes
ailés d'une espèce inconnue, qui
blessent de leurs aiguillons empoisonnés
tout un peuple, et qui disparaissent ;
là, ce sont des vers intestinaux qui
affligent pendant peu d'années un certain
district ; ailleurs c'est un ulcère,
c'est une espèce de lèpre, c'est un
tremblement de tout le corps, c'est une maladie des
extrémités qui envahit un cercle bien
déterminé, parfois assez restreint,
et qui cesse comme il a commencé, sans cause
appréciable
(7).
Même bizarrerie dans la nature,
l'arrivée et le départ des
aliénations mentales
épidémiques. La Fable nous parle des
filles de Proetus et des femmes d'Argos, qui se
croyaient métamorphosées en
vaches.
La lycanthropie, qui paraît être une
des maladies les plus anciennes et les plus
générales, a été
épidémique au dix-septième
siècle dans une partie de l'Allemagne,
où les hommes, se croyant changés en
loups-garous, couraient les campagnes pendant la
nuit en poussant des hurlements affreux
(8).
Le vampirisme, en Servie et en Hongrie, date de
1732.
Les jeunes filles, en 1813, dans un village du
Valais, se pendaient toutes les unes après
les autres, et Plutarque raconte le même fait
de celles de Milet. On dirait qu'il y a un contage
moral qui se communique de l'âme à
l'âme par la vue et l'ouïe.
On pourrait croire que la vie religieuse doit
être à l'abri des
épidémies, mais il n'en est point
ainsi, car la foi que Dieu donne
pour le salut de l'âme et pour la
sanctification, peut être
détournée de son but par la
liberté humaine, et produire des
phénomènes anormaux sui
generis.
Tantôt ce sont des crises qui peuvent
s'expliquer par le magnétisme animal, comme
chez les lecteurs de Suède ;
tantôt des convulsions extraordinaires, comme
chez les méthodistes de Cornouailles, en
1814 ; tantôt des cris involontaires que
les irwingiens veulent faire passer pour des
langues étrangères dont parle saint
Paul.
Mais le plus souvent les symptômes deviennent
tellement étranges que toutes les lois et
les forces connues de la nature sont impuissantes
à les expliquer, et qu'on est tenté
d'y voir l'influence d'esprits surhumains et
malfaisants.
Ce sont les possédés de Loudun, les
nonains ensorcelés d'Allemagne, les
convulsionnaires jansénistes, les
prophètes réformés des
Cévennes.
Ce sont aussi ces fanatiques des bords du Rhin,
qui, en 1370, vingt ans après la peste
noire, allaient de ville en ville dansant la
danse de saint Guy.
Enfin, on dirait qu'il y a une autre espèce
encore de contage qui trouble l'esprit sans
produire aucune désorganisation dans le
corps. Chaque siècle ou chaque
génération est en proie à son
vertige particulier, qui ; sous le nom
d'esprit du temps ou d'idées
dominantes, précipite chacun dans la
même erreur.
Tandis que dans la Cité de Dieu l'Esprit
saint opère de temps en temps de puissants
réveils, qui se manifestent par la
création d'Églises nouvelles, par la
réforme des vieilles Églises, par la
fondation d'ordres religieux catholiques ou de
conventicules protestants, dans la Cité du
monde il suffit qu'une séduisante erreur
jaillisse du cerveau d'un homme de génie, ou
se forme spontanément dans les masses, ou
vienne d'un pays étranger, pour que, dans
certaines circonstances données, elle
s'insinue bientôt dans tous les esprits,
même dans ceux qui, avec quelque peu de
vigilance, l'auraient le plus
aisément repoussée. Elle produit une
sorte de fièvre, dont le premier
symptôme est un assoupissement profond du
sens moral, et qui vous pousse ensuite à
vous frayer une voie, par tous les moyens licites
ou illicites, vers le but qu'elle fait briller
à vos yeux. Vous ne reculez plus alors
devant rien, pas même devant le sang, et la
haine, mère du meurtre, est le trait
saillant de cette fièvre du mal, comme la
charité et la paix caractérisent les
grandes agitations qui viennent de Dieu.
Toutefois Dieu fait sortir du mal le bien, et la
saine nature de l'esprit humain réagit
tôt ou tard contre toutes les
épidémies spirituelles
(9) qui se
produisent successivement dans la série des
âges. Mais, malheureusement, l'homme tirant
le mal du bien transforme trop souvent les saints
réveils de la foi en mouvements
fébriles et maladifs.
Parmi les fièvres spirituelles qu'a subies
l'humanité, nous citerons, dans notre
Europe, celle des croisades, qui, sous le
prétexte de la gloire de Dieu et de son
Église, poussait à massacrer les
Mahométans, les Juifs et les Albigeois, et
qui s'est survécue à elle-même
dans l'Inquisition ; celle des sorciers, qui
leur inspirait l'irrésistible désir
d'empoisonner gens et bêtes, et qui
remplissait les juges et tout le public d'un
désir non moins insensé de
brûler les innocents avec les
coupables ; celle moins violente des
astrologues, que l'on comptait à Paris, sous
les derniers Valois, par milliers ; celle des
anabaptistes ; celle de
l'incrédulité voltairienne, dont le
mot d'ordre était : Écrasons
l'infâme ; celle du sans-culottisme, qui
a couvert la France de sang et de ruines ;
celle du communisme, et tout spécialement la
fièvre démagogique qui, dans ses
moments de crise, change le
père de famille le plus honnête en un
énergumène, et qui le laisse
bientôt après rentrer dans sa
placidité habituelle.
Les épidémies spirituelles ne
tiennent que par des liens très
délicats et comme imperceptibles au monde
physique, et c'est bien moins dans l'histoire de la
terre que dans celle de l'humanité qu'il
faut chercher les causes qui les produisent.
Celles des épidémies physiques, au
contraire, ne peuvent se trouver que dans les
éléments de notre planète et
dans les phases de son développement, et
doivent exister dans l'atmosphère. Il
paraîtrait même, d'après un
physicien des États-Unis, Webster, qu'il
existe certains rapports entre les maladies
pestilentielles d'une part, et d'autre part, les
comètes, les pluies, les sécheresses
excessives, tout particulièrement les
éruptions volcaniques et les tremblements de
terre.
Nous ne dirons point que ces
phénomènes produisent les pestes,
mais nous croyons que les pestes accompagnent
d'ordinaire ces phénomènes, et nous
expliquerons leur simultanéité par la
volonté de Dieu, qui use de toutes ses
verges à la fois quand il châtie les
nations qui ne se sont pas laissé gagner par
ses bienfaits.
Il y en a en effet deux classes fort
différentes de maladies. Les unes sont
devenues une partie intégrante, habituelle
et nécessaire de l'existence terrestre de
l'homme, et elles frappent en quelque
manière à l'aventure le juste et
l'injuste, n'épargnant pas même les
Job et les saint Paul ; les autres ont un
caractère exceptionnel d'intensité,
elles épouvantent, par le nombre immense des
morts les nations, qui tantôt s'humilient
devant le Dieu qui les frappe, et tantôt
s'irritent et blasphèment. Or les
prophètes hébreux et ceux de la
Nouvelle Alliance, quand ils
racontent ou prédisent les châtiments
divins, associent à la mortalité,
c'est-à-dire à la peste, non
seulement la guerre extérieure ou intestine,
mais la famine et le tremblement de terre
(Jérém. XIV, 12.
Ezéch. V, 12 ;
VI, 11.
Apoc. VI, 1-8 ;
XVI.).
L'histoire d'Israël nous révèle
le but et le sens moral des fléaux de Dieu.
Au désert, les Hébreux rebelles sont
trois fois châtiés par des pestes
subites qui les taisaient périr en peu
d'heures par milliers
(Nomb. XI, 33 ;
XVI. 16 sq. ;
XXV).
Les temps des Juges nous sont mal connus ; les
nombreuses chutes du Peuple de Dieu auront
certainement été punies par bien
d'autres fléaux que par la famine dont le
Livre de Ruth fait accidentellement mention.
Un crime de Saül a été suivi de
trois ans de famine : l'orgueil de David, de
quelques heures de peste
(2 Sam. XXI. XXIV).
Le règne de Salomon, qui est le point
culminant de l'histoire du Peuple Élu,
s'écoule sans le moindre fléau. Ce
temps de paix se prolonge sous ses successeurs
jusqu'au temps de la première
décadence de Juda et de la corruption
croissante d'Israël. Alors la main de
Jéhova s'appesantit de plus en plus sur son
peuple.
C'est d'abord la famine d'Élie, qui a
duré trois ans et demi, vers 910 avant J.-C.
c'est, une génération plus tard, une
autre famine de sept ans, du vivant
d'Élisée
(1 Rois XVII et XVIII ;
2 Rois VIII, 1, 2 et sans
doute ;
IV, 38. Comp.
Amos IV, 6-8) ; ce sont, sous
Osias, un tremblement de terre qui avait
menacé (entre 809 et 784) d'une ruine
pareille à celle de Sodome la Judée
(qu'Amos compare à un tison arraché
du feu (Amos I, 1 ;
IV, 11 ;
VIII, 8.
Zach. XIV, 5), et une
sécheresse aggravée par le
fléau des sauterelles
(Joël l, si ce prophète a
réellement vécu sous Osias). Puis
Ephraïm est emmené en
captivité ; Juda se
relève sous Ezéchias et plus tard
sous Josias. Aussi, pendant plus d'un
siècle, nulle calamité publique ne
frappe la Terre-Sainte, et la peste ne fait
périr que l'armée de
Sennachérib
(2 Rois, XIV). Mais Juda est
incorrigible, sa ruine est imminente. Toutefois
Dieu cherche encore à le ramener au bien par
de salutaires rigueurs, et Jérémie
lui explique le but de la sécheresse qui a,
plus d'une fois sans doute, ravagé la
Judée pendant son ministère
(Jérém. V, 24 ;
XII, 1-13 ;
XIV, 1-6).
Enfin, un siècle plus tard, avant l'an 522,
Dieu a frappé de ce même fléau
son peuple, qui, de Babylone, était revenu
dans sa patrie avec son ancien endurcissement
(Aggée, I, 11 ;
II, 17).
Cette connexion entre la corruption des peuples et
les fléaux de la nature, est une des
idées fondamentales de la grande
prophétie de Jésus-Christ sur la
ruine de Jérusalem. « Avant cet
événement, il y aura, dit-il,
au milieu de guerres et de
séditions, des tremblements de terre en
divers lieux et des famines et des pestes
(Luc, XXI,
10-12). »
De même, dans les Révélations
de saint Jean, la famine et la mortalité
ravagent l'empire Romain, au temps des guerres
intestines du troisième siècle et
avant la ruine du monde païen
(Apoc. VI).
Cette ruine et celle de Jérusalem sont
l'image des derniers temps où seront
renversées pour ne plus se relever toutes
les puissances politiques et ecclésiastiques
qui s'élèvent contre
Jésus-Christ. Leur chute sera
précédée d'un
« ulcère malin et
dangereux, » d'une « excessive
sécheresse, qui consumera les hommes et les
fera blasphémer le nom de Dieu, »
et d'un « tremblement de terre tel qu'il
n'y en aura jamais eu de pareil
(Apoc. XVI, -2,
8 et 9,
18). »
Voyons si, à la lumière de la
Révélation, nous pourrons retrouver
dans l'histoire profane le sens des grands
fléaux qui ont frappé les nations
païennes.
Notons d'abord que toutes, elles reconnaissaient
dans ces fléaux la juste colère des
dieux qu'elles avaient irrités par leurs
péchés, et qu'elles apaisaient par
leurs sacrifices. C'est ainsi qu'Homère
explique par le courroux d'Apollon la peste qui
dévastait le camp des Grecs devant
Troie.
L'histoire authentique d'Athènes nous
offre : d'abord, dans ces temps de profonde
corruption dont Solon nous a laissé le
tableau dans ses poésies, une époque
de maladies contagieuses que le pieu
Epiménide avait fait cesser par ses
lustrations ; puis, après les batailles
de Salamine et de Platée, plus de cinquante
années toutes resplendissantes de
santé, de prospérité et de
gloire, et enfin, à l'instant où
cette cité, enorgueillie par ses
succès, s'engage dans une guerre de
frères, cette fameuse peste qu'a
décrite Thucydide, et qui ne ressemblait
à aucun des fléaux
antérieurs.
À Rome, cinq pestes depuis sa fondation
à l'an 488 avant J.-C; pas une seule pendant
la période de ses conquêtes, et dix
sous les empereurs et pendant sa longue
décadence.
Or nous savons déjà que les cinq
premiers siècles de l'ère
chrétienne ont été
témoins de nombreux tremblements de terre,
et les famines pendant ce même espace de
temps n'ont pas causé de moindres ravages
que les tremblements de terre et que les
pestes.
Par ces diverses causes, ainsi que par les guerres
intestines et par les invasions des peuples
étrangers, certaines provinces de l'empire
perdirent le tiers et jusqu'à la
moitié de leurs habitants.
Ainsi Athènes et surtout Rome ont
été régies par les mêmes
lois qu'Israël ; le temps de leur fleur a
été exemptde tout
fléau, et les fléaux qui ont
accompagné leur ruine ont été
infiniment plus fréquents et plus violents
que ceux qui avaient éclaté pendant
leur enfance et leur jeunesse.
Au sixième siècle, dans notre
Occident, le monde romain se décompose, les
vertus de l'épiscopat, dernière
auréole de la première Église,
s'éclipsent, et les Germains ajoutent aux
vices grossiers des barbares les crimes des races
qui se sont corrompues au sein de la
civilisation.
Grégoire de Tours, saisi d'effroi, croit
discerner dans la société qui
l'entoure les signes précurseurs de la fin
du monde (10).
Or pendant ce siècle, à dater de 540,
la peste a sévi en Occident pendant
cinquante années avec de courts moments de
répit.
L'Occident, au septième siècle,
descend à son nadir, selon l'heureuse
expression de M. Guizot, et Dieu semble alors
s'être lassé de frapper.
Au huitième, où commence le mouvement
ascensionnel, apparaît une race et une
dynastie nouvelles, et l'austrasien Charlemagne
tente de réaliser, selon ses
lumières, l'idéal d'un État
chrétien. Mais, déjà sous son
fils, commencent les guerres intestines, signes
infaillibles de la décadence. C'est alors
que Nilhard termine son histoire en disant
« qu'au temps de Charlemagne, de
bienheureuse mémoire, régnaient
partout la paix et l'harmonie, la joie et
l'abondance, parce que le peuple suivait la voie de
Dieu ; mais aujourd'hui que chacun suit sa
propre route, il n'y a plus que querelles et
discordes, que disette et tristesse, et les
éléments nous sont hostiles et
nuisibles, ainsi que le témoigne la Sainte
Écriture. » La peste de 836 avait
enlevé la fleur de la noblesse franke.
La nation française s'est constituée
en un royaume sous les premiers Capétiens,
au milieu de pestes et de
famines affreuses. Déjà en 945 avait
apparu pour la première fois le feu
sacré, ou mal des ardents, qui
causa en France de grands ravages, à six
reprises pendant deux siècles.
L'année 985 ouvrit, par une effrayante
mortalité, une période de pestes
d'environ quarante ans, et en 1030. après de
longues pluies, commença un temps de
stérilité où l'on vit des
malheureux assassiner les voyageurs pour se
repaître de leur chair
(11).
On eût dit que Dieu s'apprêtait, au
onzième siècle, à
détruire l'espèce humaine.
Le douzième, qui est celui des croisades,
fut encore très mauvais ; toutefois il
l'aurait été moins si les
armées des chrétiens n'avaient
rapporté d'Orient la lèpre.
Avec le treizième siècle et saint
Louis, la France du moyen âge arrive au
faîte de sa gloire et de sa vie
religieuse ; aussi les maladies
épidémiques disparaissent-elles, et,
sans les croisades, l'état sanitaire de
l'Occident aurait été excellent.
Mais au moment où les historiens signalent
la corruption des moeurs, arrive du fond de l'Asie,
avec une extrême rapidité, la peste
noire, qui, de 1348 à 1354, enleva le
quart, ou suivant une autre appréciation les
deux tiers de la population de l'Europe et de
l'Asie. Cette peste a été, avec celle
de 540 à 590, le plus terrible des
fléaux qui aient ravagé le monde.
Elle s'était formée à la suite
de tremblements de terre qui, depuis 1333 à
1347, avaient ébranlé l'Ancien Monde,
de la Chine à l'Atlantique ;
après d'excessives sécheresses, des
pluies diluviennes et de grandes famines ;
lors de la conjonction de Saturne, de Jupiter et de
Mars dans le Verseau (le 23 mars 1345), et tandis
que des globes de feu éclataient dans les
airs (12). Ces
années ne seraient-elles point le temps
d'une grande crise tellurique dont le sens nous
échappe, parce que nous connaissons
fort peu la vraie histoire de
notre planète ? Un siècle plus
tard, en 1450, l'Europe entière fut de
nouveau ravagée par une
épidémie pestilentielle.
Le seizième siècle s'ouvrit sous de
sinistres augures.
En 1503 éclate pour la première fois
en Europe la fièvre cérébrale,
qui était sans doute le contrecoup de la
fièvre intellectuelle qui dévorait
depuis un demi-siècle les esprits.
L'an 1505 passe pour être la date de la
première apparition en Europe du typhus, qui
dès lors y a causé de très
grands ravages, et dans cette même
année les fièvres
cérébrales prirent une
intensité croissante, qui leur donna, en
1580, les caractères d'une vraie maladie
pestilentielle.
En 1511, une famine fit périr trente mille
personnes dans le seul arrondissement de
Florence.
En 1525 sévit en Italie une peste horrible,
qui se propagea plus tard dans toute l'Europe. Elle
avait été
précédée en France de la
première épidémie connue du
choléra européen, qu'on nomma
trousse-galant.
L'an 1535 a été témoin, en
Italie, de la plus ancienne épidémie
de pleurésie. Vers le milieu du
siècle, l'angine gangreneuse devient
épidémique après des
années fort humides, et dépeuple, en
1564, les villes et les campagnes en Europe, dans
l'ouest de l'Asie et dans le nord de l'Afrique.
Le seizième siècle est celui de la
Réforme, et l'on serait tenté, au
point de vue catholique, de voir dans tous ces
fléaux les châtiments que Dieu
dispensait à l'Europe rebelle. Mais comme
ces fléaux ont la plupart
précédé Luther, qu'ils se
relient naturellement à ceux du
quinzième et du quatorzième, et que
le premier effet de la Réforme a
été partout de mettre un frein
à la corruption des moeurs, il est plus
juste de dire que les temps de la
résurrection de la foi reproduisent le
spectacle des premiers temps de l'Église,
où les fléaux se multipliaient
à mesure que l'Évangile se propageait
dans le monde.
À ces deux époques, Dieu frappait
à coups redoublés une
société profondément
corrompue, en même temps qu'il lui offrait
l'unique remède à tous ses maux.
Le catholicisme, par sa lutte contre la
Réforme, reprend de la force en reprenant de
la vraie vie ; la Réforme ajoute
à la vérité de son premier
âge la piété intime de celui de
Spener, et crée des sociétés
nouvelles où règne une pureté
de moeurs que ses ennemis traitent de
puritanisme ; l'Europe moderne
s'élève, sous Louis XIV, au comble de
sa gloire ; et aussi les pestes et les
fléaux suspendent pendant plus de deux
siècles leurs ravages.
La révolution française commence en
l'année que les astrologues avaient
désignée depuis fort longtemps comme
devant être celle d'un bouleversement
général. Les hommes s'égorgent
les uns les autres pendant vingt ans, sans que Dieu
frappe immédiatement de la
mortalité et de la famine les
insensés qui se frappent eux-mêmes de
l'épée ou de la hache de la
guillotine.
Mais à peine l'Europe s'est-elle
replongée volontairement, en 1830, dans le
gouffre des révolutions, que le
choléra asiatique l'y poursuit et se jette
sur elle et la tourmente comme nulle
épidémie ne l'avait fait depuis la
peste noire.
Je n'ai point la prétention d'avoir
découvert les véritables motifs des
divers fléaux qui ont frappé le monde
païen et l'Europe chrétienne. Mais il
me parait impossible de nier qu'il existe entre
l'histoire de ces fléaux et celle de
l'humanité, une harmonie qui a
été préétablie par un
Dieu de justice et de
sainteté.
CHAPITRE CINQUIÈME
CHAPITRE SIXIÈME
Résumé
Nous avons reconstruit, d'après la Bible,
l'histoire de la terre, et tenté de
démontrer l'harmonie de cette histoire avec
celle que donnent les sciences naturelles. Mais
nous avons puisé à tant de sources
différentes et groupé un si grand
nombre de faits en apparence
hétérogènes, que nos lecteurs
éprouvent certainement avec nous le besoin
de résumer les principaux résultats
de ces recherches. Nous allons donc mettre en
regard la série des faits bibliques et celle
des faits géologiques, qui s'expliquent et
se confirment mutuellement.
|
|
|
|
LA
BIBLE |
|
LES SCIENCES. |
|
|
|
I. LE MONDE DE L'AURORE |
|
|
|
|
|
Au commencement Dieu créa les
cieux et la terre.
[ La terre était la demeure des
Anges qui se sont rebellés, et dont
la chute a entraîné la
sienne.]
La terre [ou le système solaire]
était informe et vide :
abîme de ténèbres et
d'eau. |
|
Les substances dont les astres du
système solaire ont
été formés
étaient primitivement à
l'état gazeux. |
|
|
|
II. LE MONDE PRÉSENT |
|
|
|
|
|
A.
Les
temps de
création.
|
|
|
|
|
|
Ce monde aurait pu être
restauré en un instant par une
seule parole de Dieu, aussi bien que
progressivement et lentement. Or il l'a
été en six Jours. |
|
La terre a été
formée en plusieurs
époques. |
Le progrès s'opère non point
par la simple addition des êtres
nouveaux aux êtres anciens, mais au
milieu de crises violentes, par une
succession de Soirs et de Matins, et par
des actes réitérés de
la toute-puissance du Créateur. |
|
Les périodes offrent une longue
succession de Cataclysmes et de
Créations. |
|
|
|
PREMIER JOUR. |
|
|
Le premier jour est celui du chaos.
L'esprit de Dieu féconde les eaux
ténébreuses.
La Lumière apparaît. |
|
D'après les sciences naturelles,
c'était bien la Lumière qui
devait être créée
avant toutes choses.
Les substances gazeuses offrent l'aspect
d'une nébuleuse, et la
lumière de la nébuleuse est
plus ancienne que celle du soleil. La
nébuleuse se divise en une
sphère centrale et lumineuse qui
deviendra le soleil, et en un anneau de
substances opaques qui formeront les
planètes. |
Dieu sépare la lumière des
ténèbres. |
|
|
|
|
|
DEUXIÈME JOUR |
|
|
|
|
|
Dieu sépare les eaux
inférieures des eaux
supérieures, et donne à
l'intervalle le nom de CIEUX.
[Les eaux inférieures ou de notre
terre se condensent et s'organisent en un
globe que la mer recouvre de toutes
parts.] |
|
L'anneau se divise en cercles
concentriques dont chacun donnera
naissance à une planète.
Dans chaque cercle les substances se
réunissent en un astre ou en
plusieurs. Celui de ces astres que nous
habitons, a été
primitivement recouvert de tous
côtés par la mer.
La terre qui, par sa forme
sphérique et par son aplatissement
aux pôles, atteste son origine
fluidiforme (aquatique ou ignée),
possède dans le feu qu'elle
recèle sous sa surface une force
qui se manifeste surtout par le
soulèvement des montagnes. |
Cette mer unique cachait sous ses eaux des
montagnes, qui s'étaient
dressées. |
|
|
|
|
|
TROISIÈME JOUR. |
|
|
|
|
|
L'océan se rassemble en
plusieurs bassins ou mers, et la TERRE
FERME paraît avec ses montagnes qui
se dressent, et ses vallées qui
s'abaissent ; l'atmosphère
retentit des éclats de la
foudre.
La terre ferme se couvre de ses premiers
Végétaux. |
|
Les forces plutoniques font
émerger de l'océan primitif
les premières terres.
(Les végétaux
antésolaires n'ont pas
été retrouvés
(13)) |
|
|
|
QUATRIÈME JOUR. |
|
|
|
|
|
Le SYSTÈME SOLAIRE est
constitué. La terre entre dans ses
relations actuelles avec le soleil et avec
la lune. |
|
|
|
|
|
CINQUIÈME JOUR. |
|
PREMIÈRE
PÉRIODE. |
|
|
|
Dieu crée les premiers ANIMAUX,
qui sont postérieurs au soleil. |
|
Terrains de transition.
Les plus anciens animaux étaient
éclairés déjà
par la même lumière solaire
que ceux de nos temps. |
Ces premiers animaux sont les ANIMAUX
AQUATIQUES, c'est-à-dire les
poissons et même les
cétacés, non moins que les
rayonnés. La loi du progrès,
vraie de l'oeuvre totale des six jours, ne
l'est pas de l'oeuvre de chaque jour.
Avec les animaux aquatiques apparaissent
les Animaux Atmosphériques,
insectes et oiseaux.
Parmi les animaux marins se distinguent
les thaninim ou les
monstres.
(Animaux atmosphériques.)
(Thaninim.)
(Animaux atmosphériques.) |
|
a) Époque
cumbrienne, silurienne et
dévonienne. ANIMAUX MARINS :
rayonnes, articulés, mollusques et
poissons sauroïdes. Le
progrès, vrai de l'oeuvre totale de
la création de la terre, ne l'est
pas de l'oeuvre de chaque
époque.
Des insectes.
Plantes marines ; plantes terrestres,
fougères.
b) Époque
houillère. Bancs énormes de
substances végétales
décomposées. Cryptogames
aquatiques. Fougères,
conifères.
Poissons dans les marais. - Scorpions.
- Insectes.
c) Époque pénéenne.
La terre est habitée pour la
première fois par des sauriens
voisins des monitors.
SECONDE PÉRIODE.
Terrains secondaires.
a) Époque
triassique.
Les sauriens prédominent. -
Batraciens. -
Traces d'oiseaux.
b) Époque
oolithique.
Sauriens éminemment nageurs,
ichtyosaures, etc. Des
cétacés ?
Sur la terre, les mégalosaures
et des marsupiaux. Des arachnides.
Saurien volant, les ptérodactyles.
- Insectes coléoptères et
névroptères.
Les conifères et les
cycadées dominent.
c) Époque
crétacée.
Les sauriens font place aux squales. -
Sur la terre, les iguanodons, les
mégalosaures et divers
crocodiles. - Aucun débris de
mammifère terrestre.
Peu de changements importants dans la
faune et dans la flore. |
|
|
|
SIXIÈME JOUR. |
|
TROISIÈME
PÉRIODE.
Terrains tertiaires. |
|
|
|
Soir du sixième jour |
|
Déposition des terrains
crétacés, les plus vastes
couches sédimentaires connues, et
dont l'épaisseur atteste de longues
périodes de
tranquillité. |
Dieu fait les ANIMAUX TERRESTRES.
Dieu leur donne, ainsi qu'aux oiseaux, les
plantes pour nourriture. |
|
a) La terre est
enfin peuplée de
MAMMIFÈRES ;
palaeothères et autres
pachydermes.
Ils sont herbivores.
Avec eux apparaissent les premiers
poissons d'eau douce analogues aux
nôtres. De grands changements
s'opèrent parmi les
invertébrés ; les trois
centièmes des espèces de
coquilles existent, dit-on, encore dans
nos mers. Les dicotylédones
complètent la flore continentale.
L'Europe centrale avait la
température actuelle de la basse
Égypte.
De fréquents
phénomènes plutoniques.
b) Un cataclysme local
détruit en partie la flore et la
faune éocènes dont les
espèces coexistent avec celles de
l'époque miocène, ou de la
molasse. Mastodontes, rhinocéros,
hippopotames, singes,
dinothères.
c) L'époque pliocène
ou subalpennine est pareillement
séparée de la
précédente par des
révolutions locales. |
Dieu fait pousser en Eden une flore
nouvelle :
il y place Adam, créé
homme-femme ;
il forme Ève de la substance
d'Adam ;
il peuple le Paradis de nouvelles
espèces de quadrupèdes et
d'oiseaux (parmi lesquelles, sans aucun
doute, il n'y en avait aucun de
carnivore). Pas de serpents rampant sur le
ventre.
D'après les quatre fleuves du
Paradis, la surface de la terre n'avait
pas sa forme actuelle. La terre subsistait
parmi l'eau.
Pas de pluie ; une vapeur arrosait la
terre.
Dieu déclare la terre très
bonne.
Les temps de création cessent. |
|
Elle a sa flore distincte, formée
en Europe de conifères et de
dicotylédones.
Les quadrupèdes pliocènes ne
diffèrent la plupart des
nôtres que par une taille plus
grande.
La moitié des coquilles sont
identiques avec celles de la
Méditerranée. Point
d'ophidiens.
Des continents moins étendus, plus
océaniques et insulaires que les
nôtres.
Une température plus chaude
qu'aujourd'hui, des palmiers en
Europe.
(A cette terre très bonne
correspondraient un temps de repos entre
les dernières injections des roches
plutoniques et les premières
éruptions volcaniques, et la
prédominance des pachydermes aux
moeurs pacifiques.)
Les roches compactes, formées [par
voie chimique, cessent.
La flore pliocène possède
les premières
céréales et point de
vignes.
La faune pliocène se distingue de
la miocène et surtout de
l'éocène, par la
prédominance des espèces
carnassières. |
|
|
Avant le Déluge, les grands
carnassiers semblent avoir
été en Europe les
maîtres de la terre.
(L'homme primitif n'a pas
été retrouvé.) |
B.
Les
temps de repos ou le septième
jour.
|
|
|
|
|
|
Dieu achève son oeuvre et se
repose.
L'homme pèche. Il cultivera les
céréales. Les chardons et
les ronces apparaissent. Point encore de
vigne.
[ Le travail de Dieu recommence dans de
certaines limites, à cause du
péché. Nous supposons que
Dieu fait les animaux carnassiers de la
terre et de l'air.] |
|
|
|
|
|
1° La Terre
Antédiluvienne.
(1656 ans.) |
|
|
Une révolution locale bouleverse
le Paradis.
La terre refuse son fruit aux
Caïnites. Effroyable
sécheresse de
Méhujaël.
Avant le Déluge, les animaux
eux-mêmes avaient corrompu leur
voie.
L'homme vivait plusieurs siècles et
était de très grande taille. |
|
|
|
|
|
LE DÉLUGE.
(L'an 2348 avant J.-C.) |
|
Le DILUVIUM. |
|
|
|
Le Déluge recouvre les plus
hautes montagnes qui existaient alors.
Le Déluge a été une
unique et courte révolution.
Les mouvements de ces eaux avaient une
violence extraordinaire.
Les eaux débordaient de toute part,
et les eaux douces se sont
mêlées aux eaux de la
mer.
Le Déluge est la dernière
des révolutions telluriques.
Le Paradis et son quadruple fleuve
disparaissent sans doute lors du
Déluge.
L'atmosphère subit un changement
considérable, qui se manifeste par
le premier arc-en-ciel. |
|
DÉPÔTS DILUVIENS sur les
plateaux des Andes et vers les cimes de
l'Himalaya.
Ces dépôts forment une couche
unique, où les blocs n'ont pas eu
le temps d'être entamés et
arrondis.
C'est au diluvium que se sont
formées les vallées
d'érosion, et ses
dépôts comprennent des blocs
de granit dans des contrées
calcaires, ainsi que des coquilles d'eau
douce mêlées à des
coquilles marines.
Les dépôts diluviens
recouvrent tous les autres terrains, et
dans les cavernes sont eux-mêmes
recouverts de stalagmites qui se forment
maintenant encore.
Le diluvium est l'époque du
soulèvement d'une partie des Alpes,
et celle où l'Europe a pris son
relief actuel.
Il a été accompagné
d'un subit abaissement de la
température, comme le prouvent les
grands pachydermes que les glaces ont
saisis sur les côtes
sibériennes de l'océan
Boréal. |
|
|
|
2° TERRE ACTUELLE.
a) Époque post-diluvienne.
|
|
QUATRIÈME
PÉRIODE.
Époque quaternaire.
|
|
|
|
(8 à 9 siècles ; de
2348 à 1500 avant J.-C.)
La vie de l'homme s'abrège, sa
taille diminue [ainsi que celle des
animaux sauvés avec lui dans
l'arche].
L'humanité se divise en races et
peuples. |
|
Les glaciers des montagnes
acquièrent de gigantesques
dimensions. Dans les pays chauds, des
pluies torrentielles tombent sur des
contrées où, de nos jours,
il ne pleut pas. La première neige,
d'après le Zend-Avesta. |
[Les contrées les plus distantes de
l'Ararat et les grandes îles se
peuplent de faunes spéciales que
Dieu a faites et non
créées.]
1° Ère ethnogonique ou
d'Abraham. |
|
Les faunes spéciales de
l'époque pliocène
reparaissent avec la plupart des
mêmes types. Ce sont des
espèces nouvelles de genres
anciens.
Époque du soulèvement du
Ténare, ou époque glaciaire
(des pays tempérés et
boréaux). Ère de
Typhée (dans le bassin de la
Méditerranée), du
barattement de la mer (en Inde). |
Ruine de Sodome. |
|
Ruine des Adites. Formation de la
vallée de l'Oronte. La Phrygie
brûlée. Les forêts
d'Égypte vitrifiées. Les
monts Béhéda. -
Déluge d'Yao. - Rupture des isthmes
au sud-est et au nord-ouest.
Fonte des glaciers ; déluges
locaux. |
|
|
|
2° Ère de
Moïse et de Josué. |
|
|
|
|
|
Phénomènes miraculeux en
Égypte, dans l'Arabie
Pétrée, en Judée.
Ralentissement de la marche du soleil
à la parole de Josué. |
|
L'Italie bouleversée. Anaphé
et Théra émergent. |
|
|
|
b) L'époque actuelle.
(De 1500 avant J.-C à X
après J.-C.) |
|
CINQUIÈME PÉRIODE.
|
|
|
|
Ordre et repos troublés par les famines, les maladies pestilentielles et les tremblements de terre.
Correspondance des temps de fléaux et des temps de corruption.
|
|
L'histoire de ces triples fléaux
est trop mal connue, ou les phases de l'un
ne correspondent pas assez avec celles des
deux autres, pour qu'on puisse diviser
cette époque en un certain nombre
d'âges. On peut dire seulement que
les fléaux, à dater de
l'ère chrétienne, ont
sévi avec beaucoup plus de violence
que jusqu'alors. |
|
|
|
(Dans
l'avenir.) |
|
|
|
|
|
Une effrayante sécheresse.
Le plus grand des tremblements de
terre.
Après la ruine de Babylone, le
Christ revient au milieu d'une
épouvantable agitation de la nature
entière. Le relief de la
Judée est tout changé.
c) La Terre du
millénium.
La Judée recouvre sa
première fertilité. Le
désert fleurit. L'homme à
cent ans meurt jeune. Les bêtes
carnassières disparaissent de la
Terre-Sainte ou sont transformées.
Le serpent demeure serpent.
La terre et le système solaire sont
consumés et renaissent. |
|
Nouvelle révolution
géologique, mettant fin à
noire époque actuelle de repos.
Dernière révolution
géologique. |
|
|
|
III. LE MONDE ÉTERNEL. |
|
|
|
|
|
Plus de mer ni de
ténèbres. L'or-cristal. Les
hommes aux corps aériens. |
|
|
|
|
|
|
Dans ce résumé, j'ai appelé
avec intention les regards de mes lecteurs sur les
points où, d'après mon
interprétation, il y a discordance entre la
Genèse et la géologie. On en
découvrira peut-être d'autres
encore ; mais ce qui me semble impossible,
c'est de nier que, prise dans son ensemble, la
cosmogonie de la Bible ne soit en harmonie avec
celle de la science.
Au reste, cet accord sera bientôt au nombre
de ces vérités triviales qu'on ne
prend plus la peine de démontrer, parce que
personne ne les conteste plus, et
déjà M. Beudant termine son Cours
élémentaire de géologie
à l'usage des collèges par
quelques pages excellentes sur la
géogénie biblique.
On peut ne pas accepter l'identité du
Déluge et du diluvium. Mais ce qui me semble
impossible, c'est de ne pas avouer que le
Déluge est, d'après la Genèse
et d'après les traditions païennes, une
immense crise tellurique, une vraie
révolution géologique qui a
profondément modifié
l'atmosphère, la faune, la flore et
l'espèce humaine, et qui même a
été accompagnée de
créations nouvelles.
On trouvera sans doute fort incomplète mon
esquisse de l'histoire physique de l'homme. Mais
tout esprit impartial reconnaîtra que le
chapitre de la Genèse qui nous donne la
décroissance de la longévité
humaine chez les Noachides, est un des monuments
les plus extraordinaires et les plus
précieux du monde primitif.
On peut ne pas admettre la divine inspiration des
saintes Écritures, et s'assurer qu'elles
renferment sur l'histoire de la terre une vue
d'ensemble très originale, qui embrasse,
d'une éternité à l'autre,
toute la série des temps, et qui n'est en
contradiction ni avec les
données fondamentales de
la raison, ni avec les grands résultats des
sciences modernes. Les regards des prophètes
plongent en arrière et en avant beaucoup
plus loin que les géologues, qui ne
remontent qu'au cinquième jour cosmogonique
et qui s'arrêtent à l'heure actuelle,
qui est le seuil, toujours mobile, de
l'impénétrable avenir. Mais ils n'ont
aucune objection sérieuse à faire aux
parties des révélations
prophétiques qui échappent à
leur contrôle, et le jour viendra où
les tableaux qu'ils tracent, avec tous les
détails possibles, des nombreuses phases
qu'a subies notre planète, entreront sans
effort dans le vaste plan que la Bible nous donne
des destinées de la terre. Alors les
résultats de la science se
compléteront par la prophétie, et la
prophétie s'expliquera et s'illuminera par
la science. Car elles font plus que de dire les
mêmes choses chacune dans son langage :
l'une sait ce que l'autre ignore, et ce n'est qu'en
réunissant leurs enseignements qu'on
parviendra à savoir toute la
vérité. Les matériaux fournis
par l'une ne sont pas moins solides que ceux de
l'autre, et ils sont tous prédestinés
à entrer à titre égal dans la
construction de l'édifice
définitif.
On ne niera pas davantage que, dans les saintes
Écritures, l'homme est le terme où
aboutit la création de la terre, et qu'une
fois l'homme créé, les
destinées de la terre sont indissolublement
liées à celles de l'homme. Cette
unité mystérieuse du monde physique
et du monde moral répugnera peut-être
à certains philosophes ; mais la
philosophie même acceptera sans
difficulté cette doctrine, à laquelle
elle arrive d'ailleurs nécessairement par ce
besoin d'unité qui fait l'essence même
de l'âme humaine.
Ainsi donc, l'historien qui veut étudier le
développement de l'humanité, doit
constamment avoir présent à l'esprit
celui de la nature ; car l'une n'est pas plus
stationnaire que l'autre, et l'histoire des
tremblements de terre, des famines, des
épidémies, est le complément
nécessaire de celle des peuples et des
États.
Mais toute histoire suppose un point de
départ, un progrès et un terme ;
autrement il n'y a plus qu'un chapelet d'accidents
qui ne méritent pas un regard, un instant de
réflexion.
Or s'il y a progrès et dans l'histoire de la
nature et dans celle de l'humanité, il y a
plan. S'il y a plan, il y a une intelligence pour
le concevoir et pour l'exécuter.
L'intelligence qui fait marcher de concert la terre
et l'homme, c'est Dieu. Le point de départ,
le chemin et le but nous seraient également
inconnus si Dieu ne nous les avait
révélés par ses
prophètes. Et ce Dieu, qui a parlé au
monde, est aussi celui qui l'avait
créé par son Verbe, et qui le sauve
par Jésus-Christ.
|