COURS
DE
RELIGION CHRÉTIENNE.
INTRODUCTION
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- - La religion est le lien qui existe
entre Dieu et l'homme.
Il n'y a donc qu'une vraie religion, celle
qui donne une idée juste de Dieu,
de l'homme, et des rapports qui existent
entre eux. -
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- - Avoir une religion, suivre une
religion, professer une religion, c'est
croire en Dieu et entrer en
relation avec Dieu. Ainsi, une
prière est une relation qui
s'établit entre Dieu et nous ;
mais, pour le prier, il faut avant tout
croire en lui. Notre croyance, ou notre
foi, est le fondement de notre
religion.
Il est donc d'une importance extrême
que notre foi soit ferme. Une foi
oublieuse, distraite, chancelante, rendra
notre religion très imparfaite.
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- - Notre foi aura une base solide, si
toutes les vérités de notre
religion reposent sur une
vérité simple, claire,
facile, à la portée de tous,
et indubitable.
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- - Cette vérité, la
première qui se présente
à nous dans cette étude, est
celle-ci : J'existe.
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- - Cette vérité a deux
caractères qui la distinguent de
toutes les autres sans
exception :
1° Il est complètement
inutile d'en donner la moindre
preuve : Tous qui lisez ces lignes,
est-il nécessaire de vous prouver
que vous existez ?
2° Il est absolument
impossible d'y opposer la moindre
objection : vous qui lisez ces
lignes, que peut-on vous dire pour vous
faire douter de votre existence ?
Qui connaît ce qui est en
l'homme, si ce n'est l'esprit de l'homme
qui est en lui ?
(1 Cor. 2. 11)
Cette vérité, certaine pour
chacun, est unique en son espèce,
puisqu'il est inutile de la prouver et
impossible de la contredire ; elle
sera la base de toute la religion, et nous
arriverons à savoir que Dieu est,
avec autant de certitude que nous savons
que nous sommes. -
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- - L'étude de la religion, si
notre foi s'appuie sur la connaissance que
nous avons de notre propre existence, doit
donc commencer par l'étude de
l'homme ; aussi bien est-il naturel
de se connaître soi-même avant
de chercher à acquérir
d'autres connaissances.
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- - L'homme est un être mixte,
c'est-à-dire formé d'un
corps et d'une âme, ou d'esprit et
de matière : L'homme a
été fait en âme
vivante.
(Gen. 2. 7) Ne craignez
point, a dit Jésus-Christ,
ceux qui tuent le corps et qui ne
peuvent tuer l'âme.
(Matt. 10. 28)
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- Les preuves les plus faciles de cette
vérité sont les
suivantes :
1° Les sourds ou les aveugles,
qui le sont devenus par accident ou par
vieillesse, ont une idée
très distincte de ce qui se voit ou
de ce qui s'entend. Cette idée ne
peut être dans leurs yeux qui ne
voient plus, ou leur oreille qui n'entend
plus ; elle est dans leur
âme.
2° Quand l'homme
éprouve deux désirs, il
serait attiré, s'il n'était
que matière,
précisément comme le fer
entre deux aimants : mais non ;
il choisit, il se détermine, il a
une volonté, et sa volonté
prouve qu'il a une âme.
3° Nous avons cinq sens
distincts et bien
séparés : L'oreille
ne juge-t-elle pas des discours, comme le
palais savoure les aliments
(Job, 12.11) ? l'un des
cinq sens ne nous apprend rien des
sensations produites par les quatre
autres ; la vue ne nous apprend rien
de la douceur du son de la
flûte ; l'ouïe ne nous
apprend rien de la douceur du
parfum de la rose ; l'odorat ne nous
apprend rien de la douceur, sous
nos doigts, du velouté de ses
feuilles. Cependant nous comparons
au-dedans de nous les sensations produites
par l'ouïe, l'odorat et le toucher,
et nous disons que ce son est doux, que
celle odeur est douce, que ces feuilles
sont douces sous notre main : ce qui
compare en nous, ce n'est donc ni l'oeil,
ni l'oreille, ni la main ; c'est
notre âme.
4° II n'y a que cinq
espèces de sensations qui nous
viennent de nos cinq sens. Nous avons en
nous des idées qui n'en viennent
pas, telles que celles
d'éternité (32),
d'immensité (33), et aussi
celles de justice, de bonté, de
perfection ; elles nous viennent de
notre âme.
5° Enfin, l'homme pense ;
sa pensée est simple,
c'est-à-dire qu'on ne peut la
mesurer, la peser, la voir, la toucher, la
diviser en plusieurs parties. Qu'est-ce
qu'une moitié de pensée, un
tiers, un quart de pensée,
etc. ? Ce qui pense en lui n'est donc
pas son corps, qui, au contraire, peut
être mesuré, pesé, vu,
touché, divisé ; ce qui
pense, c'est son âme. -
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- - L'homme est un être
raisonnable, c'est-à-dire
qu'il a le moyen de s'étudier et de
se connaître lui-même. Il se
dit avec certitude : J'existe
(4 et 5), et il peut
examiner sa propre nature, sa propre
existence, et se comparer à tout ce
qui existe hors de lui : L'esprit
de l'homme est une lampe divine, elle
sonde jusqu'aux choses les plus profondes.
(Prov. 20. 27)
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- - L'homme est un être moral
ou consciencieux,
c'est-à-dire qu'il est
forcé de faire une
différence entre ses actions, et
d'attacher aux unes l'idée de bien,
aux autres celle de mal ; c'est
là ce qu'on appelle avoir une
conscience. Il est vrai que l'homme, dans
sa position actuelle, peut se tromper et
prendre le bien pour le mal et le mal pour
le bien ; mais ce qu'il ne peut pas
faire, c'est de se persuader qu'il n'y a
ni bien ni mal, et que tout est
indifférent ; Notre
conscience nous rend témoignage, et
nos pensées nous accusent et aussi
nous défendent.
(Rom. 2. 15)
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- - L'homme est un être libre,
c'est-à-dire qu'il est toujours
maître de choisir sa conduite, de
pratiquer ou non ce qu'il considère
comme bien, et d'éviter ou non ce
qu'il considère comme mal. J'ai
mis devant toi la vie et la mort, la
bénédiction et la
malédiction, disait Moïse
à Israël ; choisis
donc la vie.
(Deut. 30. 19) En effet,
agir, pour lui, c'est toujours choisir,
et, quand nous rentrons en
nous-mêmes, nous sentons très
bien que nous sommes libres dans notre
conduite ; nous hésitons
souvent : comment pourrions-nous
hésiter, si nous n'étions
pas libres ?
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- - L'homme est un être
successif, c'est-à-dire
placé entre une
génération qui part et une
génération qui arrive,
héritant de ses devanciers pour
transmettre à ses
descendants : Une
génération passe et l'autre
génération vient ; mais
la terre demeure toujours ferme.
(Eccl. 1. 4)
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- - L'homme est donc un être mixte,
raisonnable, moral, libre et
successif ; il est cela, rien de
plus, rien de moins ; oublier ou
ajouter ici un seul trait, c'est se
représenter un être
imaginaire, ou du moins un être qui
n'est pas l'homme.
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- - De ces caractères dont il est
revêtu, résultent trois
désirs dont il est
animé :
1° Le désir
d'exister, qu'il ne faut pas
confondre avec le désir de
vivre. On ne désire pas
toujours de vivre, mais on désire
toujours d'exister. Nous tenons à
l'existence ; le néant ne nous
fait pas peur, mais il nous
déplaît, il nous
répugne, et les tristesses de la
mort viennent en grande partie de ce
qu'elle ressemble à un
anéantissement : Au
sépulcre ou tu vas, il n'y a ni
oeuvre, ni discours, ni science, ni
sagesse.
(Ecc. 9. 10.) Ce
désir d'exister n'est ni
borné ni étouffé par
la mort ; nous souhaitons d'exister
encore au-delà du tombeau :
c'est une existence sans fin que nous
désirons. -
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- - 2° Le désir de
jouir, c'est-à-dire
d'être heureux. Il est
contradictoire qu'un être quelconque
veuille son mal. Quoique l'homme se trompe
bien souvent sur le bonheur, il en veut,
il en cherche, il en espère
toujours. - Une existence qui se
réduirait à un état
d'insensibilité sans souffrance,
mais aussi sans félicité,
serait contraire à notre
nature ; nous n'y resterions que
malgré nous. - Et ce que nous
désirons, ce n'est pas un bonheur
imparfait, incertain,
mélangé, acheté par
des épreuves
préalables ; c'est un bonheur
auquel rien ne manque, nous ne serions pas
contents à moins ; il nous
resterait quelque chose à
souhaiter : nous voulons être
heureux tout de suite.
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- 3° Le désir de
savoir. L'œil n'est jamais
rassasié de voir, ni l'oreille
assouvie d'entendre.
(Eccl. 1. 8) La raison de
l'homme est insatiable dans son ardeur de
connaître ; il n'est rien
qu'elle ne veuille approfondir. - Plus les
choses lui échappent, plus elle en
est curieuse. - Il est vrai que la
difficulté d'apprendre refroidit
souvent ce désir, et tout le monde
ne veut pas étudier ; mais, en
revanche, tout le monde voudrait savoir. -
La raison de l'homme est d'ailleurs
organisée de manière qu'elle
apprend toujours et même
malgré lui.
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- - Ces trois désirs,
inhérents à notre nature,
sont inséparables, universels et
constants ; tous, nous les
éprouvons tous les trois et
toujours. Il ne dépend pas de nous
de ne les point éprouver, et,
à vrai dire, ils se fondent en un
seul, le désir d'être
heureux.
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- - Voilà donc l'homme
considéré dans ses
facultés et dans les désirs
qui en dérivent ;
considérons-le maintenant dans sa
destinée ; si sa
destinée est conforme à sa
nature, ses trois désirs, exister,
jouir, savoir, seront suffisamment
remplis.
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- - Son désir d'exister est-il
rempli autant qu'il le voudrait ?
Non. Étranger et voyageur, il
cherche un pays meilleur, savoir, le
céleste.
(Hébr. 11. 15, 16)
L'existence qu'il possède
actuellement est courte, et bien plus
courte que ses prévoyances ou ses
affections ; incertaine, sans cesse
menacée, et d'une inconcevable
fragilité : il est
étonnant de voir combien de causes
et quelles petites causes peuvent y mettre
fin. - La mort est une autre raison qui
empêche notre désir d'exister
d'être suffisamment rempli.
Cette sortie de la vie est triste,
douloureuse, effrayante, même
à ne la prendre que pour une
interruption de l'existence humaine. -
Enfin, il y a la même insuffisance
dans notre attente de ce qui suit la mort,
tant sont pénibles et longs les
efforts que la raison, laissée
à elle-même, doit faire pour
arriver à une tranquille et
inébranlable certitude d'une autre
vie.
Voici donc une première
contradiction entre ce que l'homme est et
ce qu'il veut être. -
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- - Son désir de jouir est-il
assez rempli ? Non. Sa chair,
pendant quelle est sur lui, a de la
douleur, et son âme s'afflige,
tandis qu'elle est en lui.
(Job, 14. 22) Aucune joie de
cette vie ne répond pleinement
à son attente ; son
imagination rêve sans cesse des
joies meilleures. Ce n'est pas seulement
plus de bonheur qu'il veut, c'est un autre
bonheur. - La satiété vient
corrompre toutes ses
félicités ; il s'en
dégoûte à regret et
malgré lui. -
À côté de ses plaisirs
sont ses peines ; il y en a tant que
c'est une tâche qui est au-dessus de
ses forces, que de compter tous ses maux.
- Ses affections sont, il est vrai, bien
douces ; les séparations de la
mort en font ses plus cruelles
douleurs.
Seconde contradiction entre ce qu'il est
et ce qu'il veut être. -
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- - Son désir de savoir est-il
assez rempli ? Non. Nous ne sommes
que d'hier, et nous ne savons rien.
(Job, 8. 9)
Déjà les sciences sont si
vastes qu'aucun homme ne peut savoir tout
ce que les hommes savent. - Le don de la
parole, ce moyen admirable de
communication et d'enseignement, est aussi
un obstacle à l'ardeur de savoir,
par la diversité des langues, que
personne ne peut savoir toutes :
Combien de sortes de mots n'y a-t-il
pas dans le monde ? et il n'y en a
aucun qui ne signifie quelque chose.
(1 Cor. 14. 10) -
L'écorce des choses seule nous est
connue ; le fond des choses nous est
caché : nous ne voyons bien
que les phénomènes, les
apparences. - Le monde de l'esprit nous
est encore fermé, nous est presque
inconnu : Les choses
cachées sont pour l'Éternel.
(Deut. 29. 29)
Troisième contradiction entre ce
que l'homme est et ce qu'il doit
être. -
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