Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
Cela me suffit...



FÉLIX NEFF PORTEUR DE FEU



CHAPITRE VIII

CHEZ LES VAUDOIS DU PIÉMONT

Neff se devait à lui-même de franchir un jour le col de la Croix, au fond du Queyras, pour visiter les Vaudois du Piémont. Parvenu sur son sommet, il s'écrie : « Humble vallée arrosée du sang de tant de martyrs, es-tu aussi devenue aride ? Lampe ardente qui a si longtemps brillé dans les ténèbres, es-tu éteinte pour toujours ? »

Nous ne pouvons que rappeler à grands traits la magnifique histoire de ce coin de terre. Dans les temps anciens, ses pasteurs, appelés barbes, parcouraient le pays deux à deux, en missionnaires. Les chroniques signalent leurs fréquents voyages au Queyras, à la Vallouise et à Freissinières, auprès de leurs frères en la foi. En marge de leur sacerdoce, ces barbes exerçaient une profession profane : colporteurs, artisans, médecins. Ils s'occupaient des malades, des indigents, servaient d'arbitres dans les conflits locaux et admonestaient tièdes et fautifs. Leur doctrine ? Autorité de la Bible, Trinité en Dieu, état de péché des hommes. « Lo premier article de la nostra le es que nos croyons en un Dio payre, tot puissant... Local Dio es un en Trenita.... Nous sommes conçus en péché et misère. L'âme traîne après elle une souillure. Péché, souillure et iniquité, nous suivons ; pensons, parlons et agissons déloyalement. » Il n'y a de salut, gratuit, que par le Christ et la foi agissante en charité.

Ces Vaudois du Piémont admettaient la confession, mais elle doit, d'abord, s'adresser à Dieu et du fond du coeur, ensuite, seulement, au barbe, pour prendre conseil. Nul ne doit se reposer sur quiconque pour son salut. Entre Dieu et les hommes, aucun intermédiaire. « Appelle à ton secours le Seigneur et il t'exaucera. »

Les barbes furent les premiers à écrire en langue romane. Leurs poèmes religieux ont une beauté simple, dépouillée.


«JE SUIS ALLÉ PORTER LE FEU AU PIÉMONT»

Ces vallées, aujourd'hui italiennes, furent une terre de refuge où l'on vit, comme à Freissinières, monter les survivants des massacres de Mérindol, de Cabrières, de Lourmarin, rejoints par de nouvelles persécutions. De siècle en siècle, les Vaudois se défendirent comme des lions. On connaît leur retraite en Suisse, leur retour au pays natal ou les attendaient de dures tribulations. Après quoi, toujours comme à Freissinières, se leva l'aube de temps plus tranquilles ; avec la paix, la tiédeur, presque l'indifférence, à quoi Neff allait se heurter.
C'est Antoine Blanc, frère du pasteur de Mens, qui accueille le voyageur à la Tour. « Vous êtes attendu ici comme le Messie. On languit de vous voir et de vous entendre. »
Jusqu'à un certain point, car on dort sur ce versant des Alpes. Le vieux pasteur qui fut à l'inauguration du temple des Viollins et en tenait si fort pour M. Vincent, de Nîmes, ne cache pas qu'il est difficile de célébrer deux cultes le même dimanche.
- C'est qu'il y a taulas, tir à la cible, et bal devant le temple, Alors, le service du matin, le plus tôt possible. Un second, d'après-midi ?... Très court !
« Je contins mon indignation, confie Neff au papier, me promettant bien cependant de ne pas asservir le service de Dieu à celui de la vanité : car il n'est que trop vrai que dans plusieurs églises vaudoises on hâte le service divin pour laisser plus de place aux plaisirs. »

En l'honneur de l'hôte étranger, on renonce pourtant au bal et le crépitement du tir cesse en temps opportun. Véhément, Neff prêche sur ce texte : Qui n'a pas l'Esprit, n'a pas le Fils. Tièdes et indifférents sont sérieusement secoués. Depuis longtemps. ils n'avaient entendu pareil langage.

Battant le fer, même s'il n'est pas chaud, pendant quinze jours le fougueux évangéliste organise des réunions du soir. Seul, le pasteur Meille, respectable vieillard, montre quelque compréhension.

Un dimanche est consacré à l'Eglise de Saint-Germain : « je fis ouvrir de grands yeux à mes auditeurs quand je leur déclarai que non seulement ils n'étaient pas régénérés mais qu'ils n'avaient peut-être jamais vu qui le fût ! »

Au cours de nombreuses visites, Neff constate « que les pasteurs sont la tiédeur même pour ne rien dire de plus ». Il prêche à la Tour sur la vision des ossements secs. On imagine aisément le parti qu'il en tira. Jugement sévère : « Les Vaudois foulent indignement dans leurs jeux profanes le sang et la cendre de leurs bienheureux aïeux tandis que leur nom, comme un vrai fantôme et comme l'ombre sainte d'un corps qui n'est plus, émeut encore en leur faveur les Églises les plus éloignées. »

Il était temps que Neff repassât le col de la Croix ! Un homme de Saint-Jean lui dira, peu après :
- « Vous avez eu bon nez, M. Blanc et vous, de partir, l'autre jour, autrement vous étiez coffré. Sa Majesté Sarde, informée que des Ministres étrangers avaient prêché dans ses États, a écrit aux Vaudois une lettre fulminante que les pasteurs ont été obligés de lire en chaire dans toutes les églises. Vous encore là, on ne sait pas ce qui serait arrivé. »

Par les soins de l'Intendant de Pignerol, le gouvernement avait en effet réprimandé les « coupables ».
Ne pouvant plus, désormais, pour les secouer, Neff écrivit lettre sur lettre aux dormeurs d'au delà des monts, les harcelant jusqu'à ce qu'une flamme couronnât ce brasier éteint.

« Ah ! je puis maintenant dire comme le Seigneur : je suis allé porter le feu au Piémont. Que puis-je ajouter, s'il est allumé ? »
Et il est resté allumé !


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