LE VRAI BONHEUR
PRÉFACE.
L'histoire n'offre rien
de
plus utile ni de plus intéressant, a dit un
écrivain célèbre, que le
récit des derniers moments de personnes
remarquables et de leur conduite dans cette heure
solennelle.
Qu'y a-t-il, en
effet, de
plus imposant ici-bas que la vue d'un
racheté du Prince de la vie, sur le point de
passer dans l'éternité ? Tant de
doux liens qui l'unissaient encore à ce
monde vont être rompus. Les illusions de la
terre ont fini pour lui, car la terre ne peut plus
rien lui promettre. Il s'est longtemps
agité ; il a fait beaucoup d'efforts,
et tout cela n'est que vanité des
vanités. Ses joies et ses tristesses, ses
espérances et ses craintes, comparées
à son état futur, paraissent aussi
légères qu'une plume auprès de
l'univers, et, malgré l'influence qu'elles
ont exercée sur lui pendant sa vie, elles ne
peuvent plus émouvoir celui qui va leur dire
un éternel adieu.
Le passé n'est
qu'une ombre ; mais l'avenir, l'avenir
immense, se présente à l'homme, sa
dernière heure.
Oh ! quelle
vue
effrayante pour celui qui n'a pas le
véritable soutien ! Oh ! quelle
perspective d'une joie ineffable pour celui qui a
fondé son espérance sur le Rocher des
siècles !
Ici de nouvelles
scènes un monde nouveau et inconnu ; -
une éternité vaste, sans bornes, sans
fin ; - une joie sans mélange, ou une
douleur sans soulagement la société
des anges, ou les gémissements des
réprouvés ; - le sourire
miséricordieux, ou la colère juste et
immuable du souverain Juge. La vérité
a une double force, lorsqu'elle est
manifestée chez une personne dans cet
état.
Tous meurent, mais
il y
en a peu qui meurent dans une véritable paix
ou dans une sainte joie. Il y en a peu même
qui le désirent. Et cependant fut-il jamais
chose plus sérieuse, plus grave, plus
importante que la mort ? fut-il jamais un
bonheur plus grand, plus senti, plus réel
que celui des chrétiens véritables au
moment de leur départ ? - Que le
lecteur ne s'abuse point : le moraliste
incrédule peut se moquer des consolations
que son système ne saurait lui donner ;
mais cette vérité est certaine,
positive, rationnelle, et il y aurait plutôt
de la déraison à attribuer les joies
des chrétiens mourants à un
enthousiasme chimérique. L'Écriture
proclame elle-même le triomphe sur la mort.
« O mort ! où est ton
aiguillon ? ô sépulcre !
où est ta victoire ? Grâces
à Dieu, qui nous a donné la victoire
par Jésus-Christ notre Seigneur
(I Cor., XV, 55, 57). » Aussi rien de plus
naturel qu'une humble assurance en
Jésus, chez celui qui a reçu comme,
véritable la bonne nouvelle du salut.
Si un soldat se
réjouit en recevant son congé, si le
matelot salue avec bonheur le rivage, le
chrétien peut aussi, à plus forte
raison, se réjouir quand ses combats et ses
travaux sont finis, et qu'il aborde au port
tranquille de la bienheureuse
éternité. En considérant les
promesses de Dieu, relatives à la vie future
du croyant qui peut s'étonner que la mort
des rachetés de l'Agneau soit quelquefois si
triomphante ! Celui qui voit la grandeur de
ces promesses doit être au contraire surpris
que cette joie ne soit pas le partage de tous ceux
qui appartiennent au Seigneur Jésus-Christ.
Il nous est parlé dans l'Écriture
d'une demeure préparée par le Sauveur
(Jean,
XIV, 2), d'une
cité meilleure et
même céleste donnée par
l'Éternel Dieu (Héb., XI, 16). Il
nous est dit que nous serons avec lui (Jean,
XVII, 24 que
nous serons semblables à
lui (1
Jean, III, 2)
que nous jouirons du poids
éternel d'une gloire infiniment excellente
(2
Cor., IV, 17) ;
que nous verrons la face de
Dieu où se trouve un rassasiement de joie
pour jamais (Ps.
XVI, 11) ;
que nous aurons des
trésors dans le ciel où les vers ni
la rouille ne gâtent rien, et où les
larrons ne percent ni ne dérobent
(Matth.,
VI, 20) ;
que nous luirons comme le
soleil dans la demeure de notre Père (
Matth.,
XIII, 43
) ; que nous serons de ceux qui
ont lavé leurs robes et les ont blanchies
dans le sang de l'Agneau, qui sont devant le
trône de Dieu, qui n'auront plus ni faim ni
soif, et à qui Dieu
essuiera toute larme de leurs yeux (Apoc.,
VII, 14, 17) ;
qui demeureront avec Dieu
là où il n'y aura plus ni deuil, ni
cri, ni travail (Apoc.,
XXI, 1, 4) ;
en un mot, que nous serons
toujours avec le Seigneur (1
Thes., IV, 17).
Celui qui croit en
ces
promesses et qui, fondé sur la Parole de
Dieu, a l'assurance qu'elles lui sont applicables,
peut se réjouir en pensant à sa
céleste patrie. Il est vrai qu'il est telle
situation où des disciples
dévoués de Christ peuvent demander un
plus long séjour dans ce monde, si c'est
selon la volonté de Dieu - ce n'est pas
là l'indice d'un coeur joyeux dans la foi,
mais ce n'est pas non plus le signe d'un
état désespéré :
cela montre seulement combien les chrétiens
ont besoin de s'écrier :
« Nous croyons ; aide-nous,
Seigneur, dans notre
incrédulité. »
Ces dernières
réflexions ne peuvent pas être
applicables à ceux qui, après avoir
vécu sans manifester en eux l'influence de
la piété, meurent dans une joie, dans
une confiance qui ne sont, hélas !
souvent qu'une funeste illusion.
Beaucoup de malades
promettent de se consacrer à Dieu si la
santé leur est rendue, mais peu y songent
ensuite, si donc vous voulez être soutenu par
les consolations de la piété,
recherchez-les quand vous vous portez bien ;
si vous voulez en jouir à l'heure de la
mort, faites dès à présent
votre principale affaire de les obtenir et de les
conserver, regardez comme une perte toutes choses
à cause de Christ ( Phil.,
III, 7 ).
Prenez garde de vous
tromper. On a lieu de penser que des âmes
immortelles ont été perdues pour
avoir abusé des paroles de chrétiens
sincères, lorsqu'ils ont dit qu'il
n'était jamais trop tard pour se repentir en
citant l'exemple de la conversion du brigand sur la
croix et d'autres malfaiteurs repentants. Il est
à craindre que plusieurs n'aient dit :
Péchons
afin
que la grâce abonde !
Il est à craindre que
plusieurs, s'endormant sur cet oreiller de
sécurité, ne soient arrivés au
tombeau sans avoir jamais connu la véritable
foi. Il est même à craindre que, parmi
ceux-là qui glorifiaient Dieu des
lèvres, il n'y en ait eu qui ne l'aimaient
point, ne le louaient point, n'espéraient
point en lui du fond de leur coeur. Tout ce qui
brille n'est pas or ; cela est aussi vrai pour
la religion que pour les choses du monde
matériel. Louez la grâce divine les
anges ne peuvent assez la louer ; mais
discernez la grâce du Seigneur, et n'appelez
point de ce nom une dangereuse folie, une illusion
mensongère que Satan seul a inventée
pour donner le change aux âmes faciles
à tromper.
Ce petit ouvrage
renferme
de nombreux et importants témoignages rendus
par des mourants à la vérité
de l'Évangile. C'est alors que se
manifestent la paix solide, la joie céleste,
fruit de cette religion dont le centre est la croix
d'Emmanuel,
Dieu avec
nous. Mais comme
la
beauté d'un paysage enchanteur est
rehaussée par le contraste d'un aride
désert, de même les charmes et le prix
de la piété des chrétiens
délogeant de ce monde sont
plus frappants quand on les compare à la
tristesse pleine d'effroi et au morne
désespoir de ceux qui meurent tout
souillés de péchés non
pardonnés.
Ce petit volume
offre
quelques-uns de ces derniers exemples. Puissent-ils
être un avertissement salutaire pour ceux qui
négligent leur éternel
salut.
La plupart de ceux
dont
la fin bienheureuse est racontée dans ce
volume avaient été pieux dès
leur jeunesse. L'auteur les a
considérés comme des exemples de la
puissance de la piété qui commence
dans les jours de la jeunesse.
La date en tête de
chaque récit a pour but d'indiquer celle de
la mort.
Cet écrit est
extrait de deux volumes intitulés
Consolations
qui
découlent des vérités
évangéliques.
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