VOIR JÉSUS
NOUS SOUVENIR DES PAUVRES
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Sermon prêché
à l'Oratoire du Louvre,
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le 14 Novembre 1937
-
par le pasteur WILFRED MONOD.
« Ils
nous
recommandèrent seulement de nous souvenir
des pauvres ».
Galates 2/10.
MES FRÈRES,
Dans l'air qui se refroidit, dans la
lumière qui pâlît, nous avons
perçu un carillon de sonneries
mystérieuses : pour la Fête de la
Toussaint, pour la Fête des
Trépassés, pour la Fête de
l'Armistice.
Nous avons tressailli à
l'appel des cloches d'hiver, qui lançaient
l'avertissement solennel : Souvenez-vous des
morts ! Aujourd'hui, c'est une autre
admonition qui retentit : Souvenez-vous des
pauvres !
Cette antique formule,
empruntée à notre liturgie
dominicale, est inscrite dans l'épître
aux Galates ; saint Paul, un missionnaire, y
déclare que les apôtres Jacques,
Pierre et Jean l'accréditèrent pour
la tâche exceptionnelle
d'évangéliste parmi les païens,
mais en lui mettant sur le coeur, néanmoins,
les indigents de la première église
fondée ici-bas : la communauté
de Jérusalem.
Vous comprenez pourquoi cette
recommandation vénérable peut
s'adapter aux présentes circonstances. Notre
admirable Délégation
générale des Diaconats nous
supplie : « Souvenez-vous des
pauvres ! » Essayons de
méditer une expression rebattue, banale
peut-être pour nos oreilles, jamais pour nos
sentiments. Efforçons-nous
d'interpréter ce terme poignant :
« un pauvre ».
D'abord, simplifions la tâche
en écartant les considérations
variées, d'ordre social ou moral, qui
viseraient, dans telle circonstance donnée,
à découvrir la cause d'un état
de pauvreté ; je laisse de
côté l'asphyxiante pensée que
le mendiant parfois nous trompe (comme aussi nous
risquons, nous-mêmes, de tromper un
malheureux). Pour l'instant, je prends simplement
la pauvreté comme un fait
irrécusable, une réalité
brutale, qui suffit à expliquer l'existence
de nos orphelinats, de nos asiles, de nos
infirmeries, et qui suffit également
à justifier un appel constant à la
vigilance, à la pitié intelligente et
active dans la paroisse, afin que des
misères secrètes, et grises, couleur
pluie, couleur pavé, affectent
néanmoins notre attention fraternelle ou
notre sollicitude chrétienne. Cherchons
ensemble à définir la
pauvreté.
En premier lieu, c'est le manque de paix,
l'absence de sécurité. On n'ose pas
regarder devant soi : on craint pour
l'avenir ; on dort, la nuit, sous un fardeau
qui écrase la poitrine brusquement, le
rêve se transforme en cauchemar on se
réveille en sursaut, écarquillant les
yeux. Au plafond, des chiffres phosphorescents
animent les ténèbres : on voit
briller le rappel de l'échéance pour
le remboursement d'une vieille dette ;
à côté fulgure le total de la
somme à verser pour deux termes en
retard ; et voici l'addition du boulanger, la
facture du pharmacien, la note du
cordonnier.
« Mon Dieu, mon Dieu,
pitié ! Est-ce là
vivre ? » C'est une mort lente, un
long supplice. On ne respire plus... Un
missionnaire en Afrique racontait que, dans une
certaine région, les indigènes
tremblaient toujours devant des périls
pressentis : terreur de l'ennemi
embusqué, terreur du léopard
affamé, terreur des mauvais esprits et des
fantômes irrités. Or l'existence du
pauvre, dans nos cités européennes,
est-elle bien différente ? La
perpétuelle épouvante du lendemain le
ramène aux alarmes sans terme des
fétichistes païens... Osons même
avouer qu'il tombe au-dessous de l'existence
humaine ; il ressemble à l'animal
errant dans la forêt, toujours sur le
qui-vive, toujours sur la défensive,
tressaillant à la chute d'un rameau de bois
sec, figé sur place par l'éclat d'une
lumière inopinée dans les
taillis.
En tous les cas, la vie nomade
se
retrouve autre part que dans les
déserts ; en plein Paris, des
êtres vagabondent, malgré eux tel
Caïn, l'éternel chemineau. Ils n'ont
pas un endroit où reposer leur tête.
La première étoile qui s'allume au
ciel est un signal infernal !
« où dormir ? » -
J'ai visité jadis, vers minuit, avec un
officier de l'Armée du salut, les repaires
qui entourent la place Maubert, aux environs de la
cathédrale ; j'ai constaté que
de nombreuses créatures humaines couchaient
par terre, ou la tête appuyée sur le
marbre d'une table de café, ou le dos contre
un mur du débit.
Le jour de la Toussaint, au
crépuscule, dans la paisible sacristie
où rayonnent les portraits de nos
conducteurs disparus, un quémandeur (qui
n'était pas un saint !), me raconta son
histoire ; amputé d'une jambe
tuberculeuse, il frémissait à
l'idée de rester sans abri. « Avec
trente francs, je louerais une chambre pour une
semaine. Quant à la nourriture ?...
Tant pis ! L'essentiel est d'avoir un
toit. »
Voilà pourquoi l'indigence
m'apparaît, d'abord, comme le manque de
sécurité. Naguère, un de nos
étudiants en théologie s'est
exilé dans une usine en qualité de
manoeuvre, pour communier avec les plus
humbles ; il subit des peines
épuisantes ; néanmoins, il ne
put s'identifier avec ses camarades
éphémères, car son
épreuve était choisie,
momentanée ; il n'était pas
inquiet pour l'avenir. Il faut le
répéter avec insistance : un des
traits essentiels de la pauvreté, c'est
l'absence de sûreté pour demain,
d'assurance pour après-demain.
Aux yeux du tourmenté qui se
tracasse dans la hantise de l'imprévu, le
plus modeste retraité, le plus humble
rentier de la Caisse d'épargne, sont des
personnages fabuleux, maîtres de la
Destinée, des demi-dieux.
Hélas ! je n'oublie pas
que nous sommes entrés tous ensemble,
individus et collectivités, dans une
calamiteuse époque de brume, de suspicion
générale, d'incertitude universelle,
où l'ombre envahit les plus clairs sentiers.
Mais une expérience aussi lugubre, mes
frères, nous dispose à mieux
comprendre l'essence de la misère
chronique : le pauvre est un damné,
privé de paix.
Le deuxième caractère
de la pauvreté, c'est le manque de
pouvoir.
J'ai entendu parler d'un
chômeur, dans le quartier latin, qui avait
bien découvert un emploi, mais auquel
manquaient des souliers, pour se présenter
convenablement à l'adresse indiquée.
Et comment se procurer des chaussures, puisqu'il
était sans argent ? La pauvreté,
donc, équivaut à l'incapacité,
à l'impuissance. Le malheureux aurait vu
s'envoler son gagne-pain, sans la bonté d'un
cordonnier inconnu, auquel il s'adressa par hasard,
en désespoir de cause, et qui, ému de
pitié, remit à crédit une
paire de souliers au quémandeur.
L'indigent ne peut pas. Il
ressemble
au poisson captif, enfermé dans un aquarium,
et qui tourne indéfiniment dans sa cage
transparente ; à travers la
matière dure et diaphane, il devine un
au-delà, un monde lointain, l'univers ;
mais il reste incapable de franchir la muraille
translucide. Le pauvre est frappé d'une
tragique inaptitude ; son indigence fait son
impotence. Imaginez une veuve dont la seule
consolation est un enfant maladif, menacé de
rachitisme et de mort précoce ; on le
sauverait en lui assurant une meilleure nourriture,
une chambre moins obscure, des vêtements plus
chauds... Mais elle ne peut pas, cette
mère ! Comprenez-vous ? Elle ne
peut pas. Soigner son enfant bien-aimé est
une chose aussi impossible, que de s'élancer
d'un bond dans une autre planète.
Ou encore, voici un jeune homme
intelligent qui a soif de s'instruire par les
livres, de se cultiver par des voyages ; mais
chacun de ces voeux légitimes est le
rêve d'un fou, car il ne doit pas
s'abandonner à des souhaits absurdes, cruels
par leur beauté même ; il est
esclave de la réalité qui
l'enchaîne. Non seulement il ne peut pas
viser à l'érudition, mais il peut
encore moins développer ses talents
particuliers, son génie secret, s'abandonner
à une activité créatrice de
musicien, ou d'inventeur, ou de peintre, ou
d'ingénieur. Pourquoi ? Parce qu'il est
pauvre ; l'indigence paralyse.
Voici maintenant un homme dont
le
coeur vibré à tous les enthousiasmes,
à toutes les compassions ; il voudrait
soutenir largement les nobles causes de la
réforme sociale, du relèvement moral,
de l'évangélisation, protéger
la femme et l'enfant, lutter contre les
institutions barbares et les jeux cruels, poser
devant l'opinion publique le problème de
l'inutile souffrance animale, laquelle nous
déshonore. Un tel programme lui demeure
interdit. Pourquoi ? Parce qu'il est pauvre.
Les suprêmes joies d'ici-bas lui restent
durement inaccessibles, puisque Jésus
déclara : « Il y a plus de
bonheur à donner qu'à
recevoir. » Est-ce que l'indigent peut
souvent dépenser et dispenser ? Est-il
vraiment capable de gratifier, d'octroyer, de
doter, de léguer, de fonder ? Cette
félicité sublime lui est
refusée. Il ne souhaiterait pas la fortune
pour la jouissance, mais pour la puissance ;
car il demeure étrangement faible, et quasi
paralysé dans l'action.
Récemment un vieillard
croyant, qui avait consacré sa vie à
répandre l'Évangile, rendit le
dernier soupir. Peu avant sa fin, il s'exprima en
ces termes : « La mort est une rude
épreuve, quand il faut mourir pauvre,
privé non seulement de confort, mais sans
possibilité d'atténuer la
déchéance et la dépendance
matérielles, sevré des adoucissements
que procurent des soins compétents, un
milieu, et le cadre habituel d'un chez-soi ou d'un
cercle d'amis. Mais, accepter tout cela, d'avance,
est nécessaire pour un
chrétien. » Et il
s'éteignit, silencieux, pauvrement, dans le
calme et la patience, avec une austère
dignité.
J'ai reçu quelques lignes
d'une personne ruinée. Elle
m'écrivait : « Si vous saviez
ce qu'on, découvre de cruelles
épreuves physiques et d'incroyables
détresses morales, dans un asile de
vieillards pauvres ! Je fais mon possible pour
aider et alléger autour de moi. Ma vie est
très réduite, mais avec le minimum
indispensable qui préserve du sentiment de
dégradation ; et j'ai la
paix. »
Je devine, mes frères,
certaines réactions spontanées dans
vos coeurs. Sans rien objecter à mes
remarques, vous êtes tentés de
formuler cette pensée
irrésistible : « Si
l'indigence est l'impuissance, alors nous sommes
presque tous plus ou moins des pauvres ou des
candidats à la pauvreté ; car
nos « moyens » diminuent chaque
jour (nos moyens), tandis que le prix de
l'existence quotidienne augmente ; le timbre
collé sur une lettre, expédiée
dans la même ville, coûte aussi cher
que treize croissants achetés chez le
boulanger avant la guerre. » -
Soyez assurés, mes frères, que je
partage avec une entière sympathie votre
sollicitude légitime ; tous, n'est-ce
pas ? nous sentons se rétrécir
autour de nous le cercle de notre activité
possible. Or, une expérience pareille nous
initie à la détresse du
misérable, et nous aide à mieux
apprécier l'avertissement si banal et si
urgent : « Souvenez-vous des
pauvres »
Mais cette formule mérite
encore de fixer notre attention. Nous venons de
constater que le pauvre manque de paix et manque de
pouvoir ; ajoutons qu'il manque de pain, Cela
est dramatique, odieux, scandaleux ; pourtant,
comment le nier ? Le pauvre, en
définitive, n'est pas seulement celui auquel
fait défaut le superflu ; en
réalité, il est privé du
nécessaire ; voilà pourquoi on
le désigne par ce titre lamentable : un
« nécessiteux ».
Cette épreuve, atroce,
apparaissait à Jésus lui-même
(en dépit de sa foi héroïque et
radieuse en la Providence), comme une menace
constante ici-bas ; preuve en soit qu'elle
jette son ombre redoutable sur l'écran de la
prière modèle :
« Donne-nous notre pain,
quotidien ». Si l'on traduit ainsi :
« Donne-nous le pain de notre
subsistance », l'idée reste
inchangée. Il suffit donc de réciter
l'oraison par excellence, l'oraison
élémentaire, l'oraison dominicale,
pour qu'au milieu de la requête surgisse
l'image du pain nécessaire, et en
conséquence l'image de la sous-alimentation
possible et de la famine. Cette vision est si
affreuse, qu'on ose à peine s'y
arrêter.
Beaucoup de ceux qui récitent
le Notre Père sont incapables de prendre au
sérieux l'invocation relative au pain, car
elle est d'avance couronnée de
succès ; l'exaucement est
déjà visible sur un rayon de buffet
ou un garde-manger ; la miche attend la dent.
De même qu'un bourgeois, embauché dans
l'usine comme salarié, ne connaîtra
pas la véritable existence de ses compagnons
- (incapables de tirer comme lui un chèque
sur la banque) - de même un chrétien
qui répète sans véritable
angoisse : « Donne-nous notre
pain ! » (et qui hume
déjà l'odeur d'une croûte
dorée) n'est pas réellement soumis
à l'épreuve d'une foi
surnaturelle.
Ne jouons pas avec le langage de
l'Écriture pesons les expressions bibliques.
Par exemple, notre liturgie dominicale renferme la
récitation des Béatitudes avec cette
image violente : « Heureux ceux qui
ont faim de justice. » Personnellement,
je suis incapable de pénétrer
à fond le sens de la phrase, car je n'ai
jamais été un affamé.
Celui-là seul qui a connu pareille torture,
celui-là seul qui a jeté un regard
d'envie sur les épluchures et les
détritus (comme les prisonniers de guerre
dans un camp de représailles),
celui-là seul peut recevoir en plein coeur
le choc de la parole déchirante :
« Heureux ceux qui ont une vraie faim, et
une vraie soif, d'être
justes ! »
Bref, en dernière analyse, le
pauvre est celui dont l'organisme corporel demeure
« sous-alimenté », il
souffre de perpétuelle
« dénutrition » :
c'est le langage scientifique, le vocabulaire
estompé des médecins.
En Normandie, une de mes
paroissiennes, courageuse au travail et vaillante
à l'épreuve, me parlait d'un de ses
enfants, un faible d'esprit ; soudain, pour
démontrer d'une manière
décisive l'incurable bêtise de son
garçon, elle décrivit son
égoïsme aveugle durant les repas,
à la table de famille :
« Figurez-vous ! Il mange à
sa faim ! ... »
Je me rappelle à Paris une
pauvre femme - non, une femme pauvre - une reine
par le coeur, par l'esprit de sacrifice et de
prière, par le courage lumineux,
vouée totalement au sauvetage moral d'un
être chéri... Elle me disait avec
sérénité :
« Heureusement, Dieu, me donne un petit
appétit. » (Créature
angélique ! Son appétit devenait
toujours moindre !)
Est-ce qu'une parole aussi
magnifique ne doit pas se propager de monde en
monde jusqu'aux ultimes confins de l'univers -
aussi bien que ces rayons cosmiques,
émanés de quelque nébuleuse
avant que notre humanité respirât, et
dont les physiciens actuels, dans le
« Palais de la
Découverte », perçoivent au
microphone le choc d'arrivée sur notre
globe ?
Voilà deux semaines, je
reçus à l'Oratoire la visite d'un
coreligionnaire, déjà
mentionné tout à l'heure ; il
était dans la force de l'âge, mais
dans la faiblesse de la maladie ; poitrinaire muni
d'un pneumothorax, il sortait non, guéri
d'un sanatorium. Il me déclara
posément, sans indignation, sans
désespoir ni fureur : « C'est
aujourd'hui la quatrième journée
où ma nourriture consiste en un croissant
trempé dans du café au
lait. » À sa place que
feriez-vous ? Que diriez-vous ? Quelles
seraient vos pensées de derrière la
tête sur notre planète, sur la
chrétienté, sur le
Créateur ?
Oh ! l'hypocrisie d'un
certain
optimisme de commande, étalé dans les
affiches électorales, ou
réfugié dans des catéchismes
poussiéreux, et frauduleux. C'est à
crier de honte, à vomir de
dégoût. Si l'Eglise chrétienne,
ici-bas, n'est point résolue,
inébranlablement, à incarner la
Charité, avec toute la sainte poésie
et la Sainte pitié d'un François
d'Assise, alors qu'elle cesse, de prêcher
l'Évangile. En vérité, en
vérité, il existe des termes qu'on
rougit d'employer : est-ce que
l'homnme-qui-mange-à-sa-faim ne sursaute
pas, à la vue d'un homme
affamé ? Est-ce qu'il a le droit de
dire, cyniquement : Celui-ci est mon
« semblable » ! Voici mon
« pareil » !
Il faut renoncer, une fois pour
toutes, à un tel mensonge, trempé
d'ironie et de fourberie, ou bien il faut
transposer de telles expressions
(révoltantes si elles ne deviennent pas
sublimes), dans le domaine des visions
surnaturelles. Vous n'avez pas oublié le
sermon d'un Émile Guiraud, quand notre
bien-aimé entraîneur spirituel,
chargé de plaider la cause des indigents, en
un dimanche de « grande collecte pour les
pauvres », fixa nos âmes sur la
définition apostolique : « Le
frère pour lequel Christ est
mort... » Oui, voilà ce qu'il faut
voir en notre prochain, ce qu'il faut
savoir.
Depuis deux mille ans à la
surface de notre globe, au sein d'une
humanité souffrante et pécheresse
(mais « aimée »,
entendez-vous ?
« aimée » envers et
contre tout, « aimée »
pour elle-même), depuis deux mille
années, sous quelle forme le christianisme
s'est-il imposé. aux imaginations, aux
coeurs, aux consciences ? Vous ne l'ignorez
point. Le graphique de l'épopée du
salut est représenté par la
descendante ligne d'une incarnation, par le
mouvement plongeant d'une Pitié
rédemptrice, d'un Esprit sauveur
acharné à partager notre sort.
« Dieu a tant aimé le monde qu'il
a donné son Fils unique. » Ce Fils
lui-même, une fois parvenu dans nos parages,
a décrit la joie libérale et
libératrice de son Père en. lui
appliquant avec jubilation la fameuse parole :
Il y a plus de bonheur à donner qu'à
recevoir.
Et lui-même Jésus, le
Christ, l'explorateur ici-bas de notre Enfer ou de
notre Purgatoire, le pionnier des promesses
divines, croyez-vous qu'il ait visité notre
terre « à la manière
de », sans devenir conforme à
nous, comme, un étudiant (en bourgeron
d'ouvrier) travaille dans une fabrique, sans,
craindre ni chômage, ni
famine ?
Pensez-vous que le Fils de
l'homme
avait un pied sur la Terre et l'autre dans le Ciel,
si bien qu'il n'épousa point vraiment
l'humanité, et vécut ici-bas d'une
existence amphibie (selon le dogme des deux
natures !), sans réellement redouter
l'agonie de Gethsémané et les clous
de la croix ?
Non, mes frères, non !
Écoutez l'apôtre Paul
quand il écrivit à ses disciples de
Corinthe en faveur des indigents de
Jérusalem : « La grâce
de Dieu s'est manifestée dans les
Églises de la Macédoine. Au milieu
des nombreuses tribulations qui les
éprouvaient, une joie excessive et une
pauvreté ont débordé en riches
libéralités. Tous ont donné
volontairement, je l'atteste, selon leurs moyens,
et même au-delà, réclamant avec
insistance le privilège de participer
à l'assistance destinée aux
saints », leurs frères pauvres en
Palestine. À votre tour, s'écrie
l'apôtre, entrez dans la même voie.
« Car vous connaissez la grâce de
notre Seigneur Jésus-Christ : en votre
faveur il s'est rendu pauvre, de riche qu'il
était, afin que, par sa pauvreté,
vous fussiez enrichis. »
Voici mon dernier mot :
- Souvenez-vous des morts... ces
vivants !
- Souvenez-vous des pauvres... ces
mourants !
Amen.
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