AUTREFOIS ET AUJOURD'HUI. -
TEMPS DE PAUVRETÉ. - UNE
DÉLIVRANCE. -
NOUVEAU
DÉPART POUR L'ALLEMAGNE. -
LES
DERNIERS ADIEUX DE G. MÜLLER À SON
PÈRE. RÉUNION DE
« FRÈRES » CHEZ UN
TISSERAND. -
NOTRE
TRÈS PRÉCIEUX SECRET. -
CEUX
QUI
S'ATTENDENT À L'ÉTERNEL. -
JÉHOVA-JIRÉ.
-
À
NAILSWORTH. -
L'ASSURANCE
DU PARDON DES PÉCHÉS. -
TOUJOURS
JOYEUX. -
SUPPRESSION
DES TRONCS POUR LES SUBSIDES AUX PASTEURS. -
BÉNÉDICTIONS
QU'ENTRAÎNE LA VIE DE LA FOI. -
PAUVRETÉ.
-
DIEU
PEUT-IL
OUBLIER ? -
« ENVOYÉ »
-
QU'IL
VAUT LA
PEINE D'ÊTRE PAUVRE.
DANS,
ce travail qui
est nécessairement un résumé
de la vie de George Müller, il nous est
impossible de suivre celui-ci semaine après
semaine, mois après mois ; de signaler
tous les exaucements, toutes les délivrances
de ce chemin de la foi où il marchait d'un
pas résolu, les yeux uniquement fixés
sur Dieu et sur ses promesses. Depuis que Dieu
« l'avait saisi », pour
employer l'expression du prophète, George
Müller n'avait plus qu'une ambition :
glorifier l'Éternel et manifester qu'Il est
toujours le Dieu vivant qui entend la
prière. Mais cette sainte ambition devait
avoir comme corollaire une vie complètement
vécue dans la communion du Père
céleste, en la présence de celui dont
les yeux sont trop purs pour voir le mai.
Effectivement, pour que Dieu répondit
à tout instant à son enfant, il ne
fallait pas que le péché s'immisçât,
qu'aucun nuage ou qu'aucune barrière
s'élevassent qui eussent à coup
sûr empêché l'exaucement. Aussi
voyons-nous de plus en plus chez George
Müller, cette constante recherche de la
volonté de Dieu, et cette résolution
d'obéissance absolue, dans la mesure qu'il
discerne ce que Dieu veut. Loin des chemins battus,
des habitudes prises, des conseils de la prudence,
des doctrines qui ont cours, des règles et
des méthodes admises par les
Sociétés de Mission ou
d'Évangélisation... - Que dit
Dieu ? Que révèle-t-il dans sa
Parole ? - Pour lui tout est
là.
Et nous voyons cet
homme qui
autrefois, dans les sentiers du monde, avait
poursuivi avec opiniâtreté
l'accomplissement de sa volonté propre,
poursuivre maintenant avec non moins
d'énergie, mais dans l'humilité, le
sentier de l'obéissance et de la foi ;
celui de la Volonté de Dieu.
Autrefois, il avait
chéri
l'indépendance, ignoré les scrupules,
choisi sa route, dilapidé son argent et
celui des autres, méprisé toute autre
loi que celle de son bon plaisir. Aujourd'hui il a
les yeux fixés sur Jésus-Christ.
Jésus est son but, sa loi, son mobile, sa
force, son tout. Comme l'apôtre Paul, il
aurait pu dire s'il ne l'a pas fait : George
Müller, « esclave de
Jésus-Christ ». Autrefois, il
était fort, indépendant ;
aujourd'hui, il est faible et dépendant il
n'oserait faire un seul pas de son propre
motivement il est pauvre, et cependant il
possède toutes choses. Aujourd'hui, sa
conscience est devenue si délicate qu'il
n'accepte pas toujours l'argent qu'on veut lui
donner, lui, qui autrefois, puisait sans scrupules
dans la bourse des autres. 0 merveilles de l'Amour
rédempteur ! Fruits merveilleux de la
Vie du Cep qui se communique au
sarment !
C'est ainsi qu'au
service de fin
d'année du 31 décembre 1839, il avait
reçu d'une dame une certaine somme pour les
orphelins. Mais se rappelant tout aussitôt
que la donatrice avait des dettes non encore
payées, malgré toutes les
réclamations des créanciers, il prit
la résolution de rendre ce qu'elle donnait,
puisque personne n'a le droit de disposer de ce qui
est dû. « Et je le fis, dit-il,
tout en sachant qu'il n'y avait pas assez dans la
caisse des orphelinats pour faire face aux
dépenses du 11 janvier ».
Les années de
complète dépendance de Dieu, cette
existence qui attendait tout de lui, avaient
nécessairement développé la
vie de prière, la foi, la communion avec le
Seigneur. D'aucuns s'imaginaient volontiers que les
difficultés de toutes sortes,
l'anxiété, les soucis faisaient peser
sur George Müller un accablant fardeau. C'est
ainsi que certain jour, sous le toit d'un ami qui
avait réuni quelques frères, une dame
chrétienne lui dit « qu'elle
pensait souvent à la lourde charge que
l'oeuvre des orphelinats faisait peser sur ses
épaules ». George Müller note
cette réflexion dans son
« Journal » puis il ajoute sa
réponse :
« Comme il
est
possible, écrit-il, que d'autres personnes
partagent cette façon de voir, je tiens
à dire ici que, par la grâce de Dieu,
il n'en est rien, et que je n'ai aucune
espèce d'inquiétude ni de souci. Les
enfants, je les ai remis à Dieu dès
longtemps. Quant à l'Oeuvre, c'est la
sienne ; il convient donc que j'aie confiance
et sois sans crainte. Si en bien des choses je ne
suis pas ce que je devrais être, en cette
affaire du moins , et avec le secours de sa
Grâce, je puis déposer aux pieds du
Père Céleste tout ce qui pourrait
devenir un fardeau ou un sujet de
souci. »
C'est cette foi
toujours
agissante, toujours vivante, qui lui faisait
accepter des orphelins aussi longtemps qu'il y
avait de la place, même quand la caisse
était vide. C'est elle qui lui fit envisager
la possibilité d'ouvrir un quatrième
orphelinat quand les nombreuses demandes auxquelles
on ne pouvait donner satisfaction, en firent sentir
la nécessité. C'est elle qui l'amena
à ouvrir ce quatrième asile, et
à accepter les dépenses que cet
agrandissement de l'oeuvre entraînerait.
C'est par elle qu'il faisait descendre ici-bas,
d'auprès du Trône des
Miséricordes, tout ce qui était
nécessaire à la subsistance et
à l'entretien des orphelins et de ceux qui
s'occupaient d'eux.
C'est à cause de cette
foi toujours puissante, toujours en éveil
que le quatrième orphelinat fut ouvert,
malgré la longue
période de pauvreté que l'Oeuvre
venait de traverser. Si la foi de George
Müller et de ses collaborateurs ne
s'était pas développée,
fortifiée, élevée pendant la
période difficile qui la mit à
l'épreuve, jamais plus on n'aurait ouvert de
nouvelles « Maisons »,
ni rien ajouté à l'oeuvre existante.
Bien plutôt on aurait envisagé la
possibilité des restrictions.
Mais retournons à l'Autobiographie,
pour y noter rapidement
les faits saillants qui nous permettent de suivre
la vie de Müller, en même temps que son
développement spirituel et les phases
successives de l'Oeuvre qu'il fonda ; monument
élevé par sa foi Au DIEU QUI ENTEND
LA PRIÈRE.
NOUVEAU
VOYAGE
EN ALLEMAGNE. - 25 janvier 1840.
- J'ai beaucoup prié cette semaine au sujet
d'un nouveau voyage dans mon pays : 1° il
s'agit de rencontrer les frères qui offrent
de partir pour l'Inde comme missionnaires ;
2° ceci me permettra de revoir mon
père ; 3° ma santé laisse
beaucoup à désirer en ce moment, et
il semble préférable que je quitte
Bristol. Je pourrais ainsi me reposer, sans cesser
de travailler pour Dieu. « Seigneur
garde-moi d'errer en cette
affaire ! »
3 février.
- J'ai
maintenant la certitude que je dois quitter Bristol
et aller en Allemagne. Je pars demain.
DERNIÈRE
RENCONTRE AVEC M. MÜLLER PÈRE. -
Après un séjour à Berlin,
George Müller partit pour Heimerslebein. Il
trouva son père très affaibli et
toussant beaucoup, et il eut le pressentiment que
c'était la dernière rencontre qu'il
avait avec lui ici-bas. Il occupa chez son
père les deux mêmes chambres qu'il
avait habitées autrefois, alors qu'il vivait
sans Christ. Cette fois, le temps qu'il y passa fut
surtout consacré à la prière,
à l'étude de la Parole de Dieu et
à confesser le nom de Jésus.
« J'ai eu à
nouveau l'occasion d'exposer l'oeuvre du salut
devant mon père, en parlant longuement avec
une visiteuse, écrit-il dans son journal.
J'ai montré, d'après les
Écritures, que ce ne sont pas les oeuvres
qui nous sauvent, mais la seule foi au Seigneur
Jésus, lequel a porté la peine de nos
péchés et accompli la loi à
notre place. Mon père pouvait suivre toute
la conversation de la place où il se
trouvait.
« Je l'ai
quitté le 26 février. C'est un grand
privilège pour moi d'avoir encore pu le
voir, lui témoigner mon amour filial et mon
respect, annoncer la vérité à
ses côtés. Quant à lui, il
s'est montré plein d'affection et
d'attentions à mon égard, comme il
l'avait déjà fait lors des
précédentes rencontres. J'aurais eu
le coeur moins gros en le quittant ce matin si
j'avais eu la certitude qu'il se reposait
uniquement sur Christ. Mais hélas ! je
sais qu'il n'en est pas ainsi, bien qu'il soit
religieux et lise la Bible. »
Après
avoir
quitté son
père, George Müller se rendit à
Sandersleben pour y rencontrer quelques
frères. Comme les lois de cette
époque interdisaient les réunions
privées, celles-ci se tenaient en secret et
dans les endroits les plus divers pour
éviter toute surprise. Les frères
risquaient effectivement, soit une très
lourde amende qui dépassait leurs moyens,
soit l'emprisonnement. Cette fois c'était
chez un pauvre tisserand qu'on se
réunissait. On offrit à G.
Müller le seul siège de la chambre. Les
autres personnes, une trentaine, s'étaient
casées dans le métier ou autour ; le
métier tenait à lui seul la
moitié de cette petite
pièce.
Ces instants de
réunion
furent très précieux, écrit G.
Müller, et je crois que Dieu fit reposer sur
nous une double bénédiction. J'ai
parlé aussi longtemps que je l'ai pu, et mes
chers auditeurs semblaient boire
la Parole de Dieu. Si je note ces faits, c'est afin
que les enfants de Dieu en Angleterre
apprécient comme il convient leurs
très grands privilèges, et qu'ils
sachent en profiter pendant qu'ils les
possèdent
(1)...
9 mars.
- Je suis
rentré en paix à Bristol. J'y ai
retrouvé ma bien chère femme en bonne
santé, et toutes choses avaient bien
marché pendant mon absence. Dieu a
abondamment béni le voyageur et ceux qui
étaient restés.
26 mars. -
J'ai
reçu il y a quelque temps d'un frère
qui nous a souvent aidés dans le
passé la lettre suivante :
« J'ai une petite somme d'argent venant
de... En avez-vous besoin maintenant pour votre
établissement ? Je sais que vous ne demandez rien qu'à
Celui dont vous
faites l'oeuvre ; mais répondre
à quiconque demande, ce n'est pas la
même chose, et c'est même une chose
juste. J'ai des raisons pour désirer ce
renseignement ; car si vous n'aviez pas besoin
de la somme susdite, je pourrais l'affecter
à quelque autre branche de l'oeuvre du
Seigneur, ou à d'autres serviteurs de Dieu
à qui elle est peut-être
nécessaire ? Avez donc la
bonté de me dire combien il vous faut,
c'est-à-dire la somme nécessaire pour
maintenant ou pour toute autre dépense
prévue. »
En vérité, au
moment de la réception de cette lettre nous
avions grand besoin d'argent :
1° pour l'école
maternelle qui allait être ouverte ;
2° pour l'achat de Bibles ;
3° pour les
Orphelinats,
dont l'encaisse n'était que de deux francs
quatre-vingt-cinq à ce
moment-là ! Mais puisque le but de
l'Oeuvre, c'était justement de fortifier la
foi des saints et de les amener à vivre dans
une plus grande dépendance de Dieu, il me
sembla ne pouvoir répondre à la
question posée sans nuire au but que je
poursuivais, et j'écrivis donc comme
suit : « Tout en vous, remerciant
pour la marque d'amour chrétien que vous me
donnez, et bien que je reconnaisse la
différence qu'il y a entre demander de
l'argent, on répondre à une question
au sujet de l'Oeuvre cependant je ne me sens
pas libre de vous donner le renseignement
demandé puisque le premier objet de l'Oeuvre
des Orphelins, c'est justement d'amener les faibles
en la foi à constater que ce n'est pas en
vain qu'on s'adresse à Dieu seul,
et qu'on place en Lui seul son
attente... »
Ma réponse une fois
expédiée, je me sentis pressé
à plusieurs reprises de faire monter vers
Dieu cette prière :
« Seigneur, tu sais que c'est par amour
pour toi que je n'ai pas dit à ce
frère nos besoins. Et maintenant Seigneur,
montre que ce n'est pas en vain que nous
nous adressons uniquement à toi, et
parle à ce frère pour qu'il nous
vienne en aide ». Aujourd'hui en
réponse à ma requête, il nous a
envoyé deux mille cinq cents
francs.
7 avril.
Reçu ce
soir la nouvelle que mon père était
mort le 30 mars. C'est mon jeune demi-frère
qui me l'écrit. Son état a
empiré quelques jours après mon
départ. Dieu est bon de m'avoir permis de le
revoir... Je ne sais pas comment il est mort ;
je ne sais pas s'il s'est endormi dans la
foi ?... À aucune époque je
n'avais prié avec plus d'intensité et
aussi fréquemment pour la
conversion de mon cher père que durant la
dernière année de sa vie. Il n'a pas
plu au Seigneur de me laisser voir
l'exaucement.
4 mai. -
Depuis le 1er
avril, quarante et une personnes sont venues nous
trouver pour nous parler de leurs âmes. Que
le Seigneur suscite des aides dans son oeuvre. En
vérité la moisson est
grande.
6 mai.
- Il y a en ce
moment quatre chrétiens sous mon toit ;
et je n'avais plus que quelques francs. J'ai donc
demandé à Dieu le nécessaire,
il m'a envoyé cent vingt-cinq
francs.
22 juin.
- Demain D. V.,
nous nous proposons ma femme et moi d'accompagner
jusqu'à Liverpool, les huit missionnaires
qui partent pour l'Inde : cinq soeurs et trois
frères allemands... Le soir, réunion
de prière spéciale à
l'occasion de ce départ. Nous avons
très particulièrement remis à
Dieu les partants.
23 juin.
- Nous avons
quitté Bristol ce matin et sommes
arrivés à Liverpool le même
soir.
2 juillet. -
J'ai
accompagné mes frères et soeurs
jusqu'au vaisseau. Au moment de monter à
bord, l'un des frères m'a remis cent
soixante-deux francs cinquante pour les
orphelinats. Il avait vendu son argenterie à
Bristol parce qu'il avait pensé qu'un
serviteur du Maître qui veut prêcher
Christ à de pauvres hindous n'en a pas
besoin. Il s'était acheté des livres
et me donnait le surplus. « La somme que
nous avons en commun, mes frères et moi,
pour le voyage nous suffit, dit-il ; durant
les mois de la traversée nous n'aurons
besoin de rien, et cet argent peut vous être
utile. Si nous manquons de quelque chose, le Seigneur
y pourvoira. Mes
compagnons de voyage n'ont pas d'argent de poche et
je désire être comme eux. Le Seigneur
a très particulièrement placé
l'oeuvre des Orphelinats sur mon coeur, ainsi vous
ne pouvez refuser d'accepter. » Ce
frère ignorait que j'avais à
plusieurs reprises demandé à Dieu des
subsides pour les orphelins. De quelle façon
remarquable le Seigneur m'exauçait en se
servant de lui ! En partance pour l'Inde, il
donnait tout ce qui lui restait, s'attendant
uniquement au Seigneur pour ses besoins temporels.
J'ai immédiatement envoyé cent
vingt-cinq francs à Bristol.
4 juillet. -
Ce matin,
j'ai reçu de Bristol la lettre dont je donne
ci-après copie :
Mon cher
Frère,
Après les derniers
comptes que je vous ai envoyés nous
étions extrêmement pauvres. Nous
avions assez pour le présent, mais l'argent
manquait pour l'achat de pain. L'après-midi,
quelqu'un nous a envoyé un habit de cheval
pour que nous le vendions au profit de I'Oeuvre,
J'en ai eu dix francs soixante-quinze ; j'ai
aussi vendu quelques livres dont ou m'a
donné six francs vingt-cinq, deux vieux
dés d'argent et une bague pour un franc
quatre-vingt-cinq. Le total nous a permis d'acheter
le déjeuner pour les trois maisons. À
midi, nous nous sommes réunis pour prier.
Nous avions le plus grand besoin de fonds. Il
fallait du pain, du lait, la provision de charbon
des trois maisons est épuisé et
d'autres stocks sont aussi bien près de
l'être. En réalité
jusque-là nous n'avions manqué de
rien, mais il ne nous restait presque plus rien.
Or, tandis que nous priions, votre lettre est
arrivée.
L'une des soeurs est
allée à la porte, et on la lui a
remise ; la réunion terminée, on
me l'a donnée. Vous comprendrez notre joie
en l'ouvrant et en découvrant le
contenu ; je ne puis dire tout ce que j'ai
ressenti...
L'argent est très
précieux pour ceux qui, comme nous, voient
derrière le don, LA PENSÉE ET LE
COEUR du Père céleste...
Votre frère
affectionné,
R. B.
29 août. - Pour les autres branches d'activité aussi, nous sommes très pauvres. Nos principales rentrées proviennent de la vente des Bibles. Samedi dernier je n'ai pas pu payer tous les salaires de nos aides dans les écoles de semaine ; toutefois je ne suis pas leur débiteur, puisqu'il est entendu qu'ils doivent s'attendre au Seigneur pour leurs traitements. J'ai vu là une indication à leur dire notre situation, comme je l'ai fait pour le personnel des Orphelinats, afin qu'eux aussi puissent prendre part à l'épreuve de la foi, comme aux joies de la foi. Je les ai donc réunis et leur ai parlé. Puis après avoir placé sur leur conscience la nécessité du silence à cause du Seigneur, et l'importance qu'il y avait à ce qu'ils gardassent secret l'état de nos finances, nous avons prié ensemble.
NOTRE
TRÈS PRÉCIEUX SECRET. - 8
septembre. - Comme le Seigneur est bon d'avoir
dispensé toutes choses de telle façon
que j'ai été amené à
exposer la situation aux aides des Écoles
qui partagent aujourd'hui nos joies comme aussi les
épreuves de notre foi. Il y a deux ans que
j'ai dû faire cette communication au
personnel des Orphelinats, ce qui a
été un moyen de
bénédictions pour tous. Pour moi,
cela m'a permis de quitter
Bristol, et l'oeuvre n'en a pas souffert. Je ne
doute pas que nos aides des écoles de
semaine ne trouvent aussi de grandes
bénédictions à partager notre
très précieux secret.
« CEUX QUI
S'ATTENDENT À
L'ÉTERNEL ». - 21
septembre. - Aujourd'hui, un frère qui
habite les environs de Londres m'a donné
deux cent cinquante francs pour que je les emploie
à ce qui est le plus urgent. Depuis
plusieurs jours nous priions pour recevoir les
subsides nécessaires aux Écoles, au
Fonds Missionnaire, et à notre stock de
Bibles ; j'ai donc versé la
totalité de la somme pour ces trois branches
d'activité. Jusqu'à ce qu'il
vînt à Bristol, c'est-à-dire
trois jours auparavant, ce frère ignorait
tout à fait notre activité. Ainsi le
Seigneur, pour nous montrer qu'il continue de nous
entourer de ses soins, nous envoie de nouveaux
concours. Ceux qui s'attendent à Dieu ne
seront jamais confondus. Quelques-uns de ceux qui
nous ont aidés pendant un certain temps se
sont endormis dans le Seigneur ; d'autres ont
laissé leur zèle se refroidir ;
d'autres qui désirent aider autant que
jamais n'en ont plus les moyens ; d'autres
dont le coeur est bien disposé et qui
possèdent peuvent être conduits par
Dieu à aider d'autres oeuvres ; bref si
pour une cause ou l'autre nous nous appuyions sur
l'homme nous pourrions être confondus ;
mais puisque nous nous attendons à Dieu
seul, les déceptions NE PEUVENT NOUS
ATTEINDRE et nous ne risquons pas d'être
oubliés du fait que les premiers amis de
l'Oeuvre sont morts, ou n'ont plus de ressources,
ou à cause du manque d'amour de
quelques-uns, ou parce que d'autres oeuvres les
sollicitent qui ont aussi besoin d'être
soutenues. Qu'il est précieux d'avoir appris
en une
certaine
mesure à s'appuyer uniquement sur Dieu et
d'être heureux dans l'assurance que celui qui
marche dans ses voies ne manquera jamais d'aucun
bien.
8 novembre,
jour du
Seigneur. - JÉHOVA JIRÉ. - Dieu
nous a montré sa
bonté ; il a pris garde à notre
pauvreté. En plus des trente-sept francs
cinquante versés pour les loyers, j'ai
reçu cent vingt-cinq francs,
accompagné de ce passage de
l'Ecclésiaste : IX : 10. J'ai
aussi reçu l'avertissement que deux grands
sacs de farine d'avoine destinés aux asiles
étaient partis de Glasgow. C'est un cadeau.
D'autre part, un frère m'offre de choisir
chez lui pour une valeur de deux cent cinquante
francs de lainages à mon choix, pour
confectionner des vêtements d'hiver. Enfin
quelqu'un a déposé dans l'une des
boîtes de Béthesda un franc vingt cinq
pour les orphelins, petite somme enveloppée
d'un papier sur lequel étaient inscrits ces
mots : « Jéhova
Jiré ». J'aime ces paroles
qui, depuis plusieurs années, sont un
rafraîchissement pour mon âme. Je les
ai écrites avec les diamants d'une bague de
grand prix sur l'une des vitres de ma chambre. Ceci
me rappelle de quelle façon remarquable
cette bague a été donnée, ce
qui m'a souvent fortifié quand, aux heures
de grande pauvreté, mes yeux
s'arrêtaient sur les mots gravés
« JÉHOVA JIRÉ",
c'est-à-dire l'Éternel y
pourvoira ». (Genèse XXII :
14).
31 décembre
1840.
- Janvier 1841. - Depuis le 20 décembre,
Dieu a abondamment pourvu à tous nos
besoins ; et nous pouvons penser à
faire imprimer le rapport de l'Oeuvre.
19 mars. -
Voici quelque
temps que je me sens très
faible physiquement. Je crois qu'un changement
d'air m'est nécessaire, mais ces jours
passés, je manquais d'argent. Or ce matin
j'ai reçu un chèque de trois cent
soixante-quinze francs, dont cent vingt-cinq pour
moi personnellement. Je vais donc pouvoir quitter
Bristol.
À NAILSWORTH.
- 20 mars.
- Aujourd'hui, à mon arrivée, et
lorsque je fus mis au courant de l'état de
choses existant parmi les frères de
Nailsworth et des environs, je n'ai pu
m'empêcher de penser que le Seigneur m'avait
envoyé pour travailler quelque temps au
milieu d'eux.
22 mars. - C'est
vraiment Dieu
qui m'a envoyé. Certaines affaires qui sont
mises à jour du fait de ma venue, m'en
donnent la preuve...
COMMENT
AVOIR
L'ASSURANCE DU PARDON DES
PÉCHÉS. - Une soeur irlandaise
qui n'a pas l'assurance d'être une enfant de
Dieu, d'être née de nouveau et
pardonnée, qui ne possède pas la
certitude du salut, m'écrit pour m'exposer
sa détresse. Son cas n'est pas unique
malheureusement ; il y a bien des enfants de
Dieu qui ignorent leur état de fils
et de filles... C'est pourquoi je donne ici
quelques réflexions sur cet important
sujet.
Comment puis-je avoir
l'assurance d'être enfant de Dieu,
d'être né de nouveau, que mes
péchés sont pardonnés, que je
ne mourrai point et que j'aurai la vie
éternelle ? - C'est la Parole de Dieu
qui donne la réponse à cette
question, et elle est la seule règle, le
seul code du chrétien... Que dit-elle ?
« Vous êtes les enfants de Dieu
par la foi en Jésus-Christ (Galates
III :
26). À
tous ceux qui l'ont reçu (Jésus), il a été donné (le
droit ou le privilège) d'être faits
enfants de Dieu », savoir ceux qui
croient en son nom et ne sont point nés du
sang, ni de la volonté de la chair, ni de la
volonté de l'homme, mais qui sont nés
de Dieu »
(Jean
I : 11-13).
La question qui se
pose est donc
celle-ci : Ai-je reçu
Jésus ? Est-ce que je crois en son
Nom ? Si oui, je suis né de Dieu, je
suis son enfant. Comment puis-je savoir que mes
péchés sont pardonnés ?
Dois-je attendre de le sentir. Ou bien
faut-il que, quelque passage de l'Écriture,
qui affirme le pardon, se présente à
mon esprit avec puissance ? - C'est encore la
Parole de Dieu qui nous donne la
réponse : Non ; nous n'avons pas
à tenir compte de ce que nous ressentons.
Personnellement, voilà plus de dix-neuf ans
que je suis croyant (2). Depuis
combien de temps
n'ai-je
aucun doute sur le pardon de mes
péchés ? - Je ne puis le dire
exactement. En tout cas depuis que je suis en
Angleterre (il y a de cela seize ans), je n'ai
jamais eu l'ombre d'un doute à cet
égard ; or, je n'ai jamais ressenti ce
pardon. Savoir est une chose, et sentir en est une
autre. Pour savoir, allons à la Parole de
Dieu. Nous lisons dans le livre des Actes au sujet
du Seigneur Jésus : « Tous
les prophètes rendent de lui ce
témoignage que quiconque croira en lui
recevra la rémission de ses
péchés par son nom »
(Chap.
X : 43). Quiconque
s'attend à lui pour être sauvé,
et non à soi-même, quiconque croit
qu'Il est ce que Dieu déclare dans sa
Parole, reçoit la rémission de ses
péchés. La question est donc
celle-ci : Est-ce que je vis sans
Christ ? Est-ce que je compte sur mes efforts
pour être sauvé ? Est-ce que
je crois que mes péchés seront
pardonnés parce que j'amenderai ma vie
à l'avenir ? Ou bien ma seule attente
est-elle en Jésus, mort sur la croix pour
sauver les pécheurs ? En Jésus
qui a accompli la loi pour que les pécheurs
fussent justifiés ? Si je suis de ceux
qui regardent uniquement au Sauveur, mes
péchés sont pardonnés, que je
le sente ou non. Le pardon m'est acquis d'ores et
déjà. Je n'ai pas à attendre
de mourir, ou que Jésus revienne... Mais je
dois prendre Dieu au mot, croire que ce qu'il dit
est vrai... Et quand je crois ce que Dieu dit j'en
éprouve aussitôt de la paix et de la
joie...
Lorsque ceux qui ne
placent pas
leur confiance en eux-mêmes ni dans leur
bonté naturelle, mais regardent uniquement
aux mérites et aux souffrances du Christ, ne
savent pas s'ils sont enfants de Dieu, si leurs
péchés sont pardonnés, et
s'ils sont sauvés, cela provient
généralement de l'une ou l'autre des
causes énumérées
ci-après :
1° Ils ignorent la
simplicité de l'Évangile ;
2° Ils veulent
régler la question avec ce qu'ils
ressentent, ce qu'ils éprouvent ;
3° Ils attendent une
puissante impulsion, ou un rêve, ou une voix
du ciel, ou quelque passage qui se précisera
avec force à leur esprit pour leur donner
l'assurance du salut
4° Ou bien ils vivent
dans
le péché.
S'il s'agit de cette
dernière cause, c'est bien inutilement
qu'ils comprendraient parfaitement
l'Évangile, et qu'ils chercheraient dans la
Parole de Dieu quelque assurance de salut,
même s'ils avaient joui autrefois de cette
assurance... Aussi longtemps qu'il y a
péché, la joie et la paix ne peuvent
habiter dans le coeur. Il peut y avoir chez le
chrétien beaucoup de faiblesse et
d'infirmités, mais le Saint-Esprit ne
console pas, et ne consolera jamais quiconque se
laisse aller à faire le mal en opposition avec la
pensée de Dieu... Il est très
important d'avoir un coeur droit et honnête
devant Dieu pour posséder l'assurance du
salut, du pardon des pêchés, de la
nouvelle naissance, et d'avoir été
fait enfant de Dieu.
7 mai.
- Nous quittons
aujourd'hui Nailsworth, où j'arrivai le 20
mars. J'y ai travaillé au service de la
Parole, et j'ai préparé pour
l'impression la deuxième partie du
« Récit ».
COMMENT FAIRE POUR ÊTRE
TOUJOURS JOYEUX EN CHRIST.
- Il a plu au Seigneur de m'enseigner durant ce
séjour à Nailsworth, et sans le
secours d'instruments humains, pour autant que je
puisse m'en rendre compte, une vérité
dont je n'ai jamais perdu le bénéfice
depuis. Voici : J'ai discerné à
Nailsworth plus clairement que jamais jusqu'ici que
la grande affaire, l'affaire principale de chaque
journée, c'était que mon âme
fût heureuse en Dieu mon Sauveur. La
première chose que je doive rechercher, ce
n'est pas comment je pourrai servir le Seigneur
durant la journée, ou comment je pourrai le
glorifier, mais comment je pourrai remplir mon
âme de joie, nourrir l'être
intérieur.
Car même si je
m'emploie
à exposer la vérité devant les
inconvertis, même si j'essaye de la
communiquer aux fidèles, même si je
cherche à secourir les affligés, et
si je fais des efforts pour me conduire en ce monde
comme il convient à un enfant de Dieu, si,
en même temps, je ne suis pas heureux en
Christ mon Sauveur, si je ne suis pas nourri et
fortifié dans l'être intérieur
jour après jour, toute mon activité
ne procède pas de l'esprit qu'il faut, d'un
esprit dans les conditions d'équilibre
normal.
Jusqu'à ce temps de
retraite à Nailsworth, et au moins durant
les dix dernières années, voici
comment je procédais le matin : je
m'habillais puis je me mettais à
prier.
Maintenant
je comprends
que la chose la plus importante, c'est de lire la
Parole de Dieu et de la méditer pour que mon
coeur soit par là fortifié,
encouragé, repris, instruit, et que dans
cette méditation je sois amené
à faire l'expérience de la communion
avec le Seigneur. Je me suis donc appliqué
à méditer sur le Nouveau Testament
dès le matin en commençant aux
premières pages, après avoir
demandé à Dieu sa
bénédiction sur cette étude de
sa Parole. Puis je m'applique à trouver une
bénédiction dans chaque verset ;
non pas en pensant à de futures
prédications mais dans le seul but de
nourrir mon âme.
Et généralement
voici le résultat : presque
invariablement je suis amené à la
confession, ou à l'action de grâce, ou
à l'intercession ou à la
supplication, si bien que, tout en
commençant par la méditation
et non par la prière, je me trouve
cependant presque aussitôt amené
à prier.
Lorsque j'ai été
conduit à la confession ou à
l'intercession, à la supplication ou
à l'action de grâce durant quelque
temps, je passe au verset suivant en transformant
aussi le contenu en prière pour moi ou les
autres selon que j'y suis guidé par la
Parole ; gardant toutefois en pensée
que mon but essentiel c'est de nourrir mon
âme... Et quand vient l'heure du
déjeuner, l'être intérieur
avant été sensiblement nourri et
fortifié, presque invariablement je jouis
d'une grande paix intérieure, ou même
d'une grande joie. C'est aussi de la sorte que le
Seigneur me communique ce qui devient, par la
suite, de
la
nourriture pour les autres ; bien que je
m'adonne quotidiennement à la
méditation de la Parole, non pour les
autres, mais pour nourrir mon âme.
Autrefois, quand je me
mettais
à prier aussitôt levé,
n'ouvrant la Bible que lorsque mon âme
desséchée avait
particulièrement besoin de nourriture et de
rafraîchissement, que se passait-il ? -
Il m'arrivait souvent de passer à genoux un
quart d'heure, une demi-heure, ou même une
heure, avant d'obtenir quelque réconfort,
quelque encouragement, avant de parvenir à
humilier mon âme..., et c'est après
que j'avais souffert assez longtemps du vagabondage
de ma pensée, que je commençais
à prier vraiment.
Aujourd'hui, il est
extrêmement rare que ceci survienne encore.
Bien que je sois vil et que j'en sois indigne,
comme je me nourris de la vérité,
j'entre aussitôt en communion avec Dieu, et
je parle à mon Père et à mon
Ami, de ce qu'il vient de me dire par sa
très précieuse Parole.
Maintenant qu'il a plu
à
Dieu de me révéler ces choses sur
lesquelles, jusque-là, aucune lecture,
aucune personne n'avaient attiré mon
attention, il m'apparaît comme absolument
lumineux et évident que la chose essentielle
chaque matin, c'est d'obtenir la nourriture
nécessaire à l'être
intérieur. De même que nous ne
saurions travailler longtemps sans donner au corps
la nourriture qu'il réclame, et que cette
nourriture est l'une des premières choses de
la journée, il en va de même pour
l'être intérieur. L'homme doit se
nourrir et sur ce point tout le monde est d'accord.
Et quelle est la nourriture de l'être
intérieur ? Ce n'est pas la
prière, mais c'est LA PAROLE DE DIEU. Non
pas une simple lecture de celle-ci, de sorte
qu'elle traverse seulement la
pensée comme l'eau la conduite qui la
transporte, mais une méditation du texte qui
devient un sujet de réflexions et que nous
appliquons à notre âme.
Quand nous prions,
nous parlons
à Dieu. Or la prière, la vraie
prière, celle qui n'est pas purement
formaliste, ne peut se prolonger sans une certaine
somme de puissance et de saints
désirs ; c'est donc lorsque nous avons
nourri notre âme par la méditation. de
la Parole que nous pouvons le mieux prier. Si
faibles que nous soyons au point de vue spirituel,
nous pouvons toujours méditer les
Écritures, de façon profitable, avec
la bénédiction de Dieu ; bien
plus, plus nous sommes faibles, plus cette
méditation nous est profitable
(3)...
29 mai. -
J'ai
reçu ce jour deux mille cinq cents francs de
l'Inde. En réponse à la
prière, le Seigneur daigne nous envoyer de
temps à autre de fortes sommes ; elles
proviennent même des endroits les plus
éloignés.
SUPPRESSION
DES
TRONCS POUR L'ENTRETIEN DES PASTEURS A
BÉTHESDA CHAPEL. - 7 juin. -
Depuis quelques temps nous nous demandons,
frère Craik et moi, s'il est utile, dans les
circonstances actuelles, que nous laissions encore
les troncs dans la chapelle, avec l'inscription de
nos noms au-dessus, et l'indication de la
destination des dons. Est-ce encore là,
la meilleure manière de faire ?
Nous avons donc décidé aujourd'hui de
faire la communication ci-dessous par la
presse:
« Aux Saints
en
Jésus-Christ qui se réunissent
à Béthesda Chapel,
Bristol,
« Chers
Frères,
« Il nous a
semblé bon d'enlever de la Chapelle, les
troncs qui recevaient les offrandes volontaires
destinées à nos frais d'entretien.
C'est pour éviter les malentendus, et
empêcher que cet acte soit
dénaturé que, dans un sentiment
d'affection, nous exposons aujourd'hui nos raisons
devant vous.
En arrivant à Bristol,
nous avons refusé d'accepter aucun salaire
régulier, non plus que le produit de la
location des bancs. Ce n'était pas que nous
eussions aucune objection à être
assistés dans le domaine temporel par ceux
que nous servons dans le domaine
spirituel.
Mais : 1°
nous ne
voulions pas que la libéralité des
frères fût contrainte,
forcée ; elle doit être libre,
volontaire ;
2° La location des
sièges est contraire à l'enseignement
de l'Écriture. (Jacques Il : 1-6). Nous
avons donc eu recours à des troncs où
chacun pouvait déposer
ses dons, selon que Dieu lui mettait au coeur de le
faire, pour se conformer à ce qu'enseigne ce
passage de l'épître aux Galates :
« Que celui à qui on enseigne
la Parole de Dieu fasse part de tous ses biens
à celui qui l'enseigne (Ch.
VI :
6) ».
À cette époque, il
semblait que nous dussions être les seuls
à travailler parmi vous au service de la
Parole et de la doctrine. Depuis, les circonstances
ont bien changé. À cause de cela et
aussi parce que nous avons reçu plus de
lumière, il nous a semblé bon de
supprimer les troncs qui reçoivent les
offrandes volontaires des saints. Qu'il soit bien
entendu toutefois que nous n'avons pas
changé, quant aux grands principes qui ont
dicté notre première manière
de faire. Au contraire, une expérience de
dix ans a fortifié notre jugement d'alors
sur la question du traitement, et celle de la taxe
sur les bancs. Voici pourquoi nous avons
enlevé les troncs :
1° Aussi longtemps
qu'ils
existaient, il fallait une indication de
l'affectation des dons ; il était donc
nécessaire de mettre nos noms au-dessus des
troncs dont les offrandes nous étaient
destinées. Ceci nous donnait l'apparence de
nous élever au-dessus des autres
frères, de nous arroger un pouvoir sur
eux, alors que nous cherchons uniquement
à remplir l'emploi que le Saint-Esprit nous
a départi dans
l'Assemblée.
2° Il est possible que
le
Seigneur veuille appeler et qualifier de plus en
plus d'autres frères, pour diriger
l'église et y enseigner. Aussi longtemps
qu'on nous considère comme
spécialement préposés sur
l'Assemblée, parce que nos noms
étaient apposés à ces
boîtes, cela pouvait créer des
difficultés pour ceux que les saints reconnaissent
ouvertement et pleinement comme occupant
avec nous, la place que le Seigneur leur
donne.
3° Il était possible
qu'on posât cette question (et même
maintenant on pourrait la poser) : Sont-ils
les seuls ouvriers ? Et voici la
réponse : d'autres travaillent aussi
qui ne sont pas aidés de la même
manière. À ceux qui ne nous
connaissent pas, cela pourrait donner l'impression
que nous essayons de garder une place
prépondérante par quelque marque
extérieure, alors que nous voulons l'occuper
uniquement dans l'obéissance au Seigneur en
laissant à son Esprit le soin d'amener les
saints à reconnaître notre
direction.
4° Enfin, du fait que
nos
noms étaient affichés de la sorte en
public, quelques frères (nous avons des
raisons de le croire) nous considèrent comme
les seuls ministres, et ils se tiennent pour
négligés parce que nous ne les
visitons pas personnellement. Or c'est une erreur
que de supposer que deux personnes peuvent suffire
pour faire les visites pastorales et s'occuper de
la cure d'âme de cinq cent cinquante
fidèles à peu près. En ce qui
nous concerne, nous n'oserions pas assumer cette
responsabilité. Selon le don et la force qui
nous sont départis, nous désirons
gouverner, enseigner, nourrir de façon
générale les brebis du Seigneur, mais
nous n'osons pas entreprendre la direction
spirituelle personnelle de tous ceux qui se sont
joints où se joindront à nous, sur la
base de la foi au Seigneur Jésus.
Voilà, en
résumé, pourquoi nous décidons
de ne plus recourir à ces troncs publics
où nos noms sont apposés pour
recevoir vos offrandes. Nous demandons à
Dieu la grâce de vous servir plus
fidèlement que dans le passé, et nous nous
confions, comme nous l'avons fait jusqu'ici, en
Celui qui a dit : « Si quelqu'un ME
sert... mon Père l'honorera »
(Jean
XII : 26).
Bristol, ce 7
juillet
1841.
HENRY CRAIK, GEORGE MÜLLER.
BÉNÉDICTIONS
ATTACHÉES ONT LA VIE DE LA FOI. - La
décision prise m'a donné une nouvelle
preuve des bénédictions
qu'entraîne l'obéissance de la foi.
Dans d'autres circonstances, je me serais
demandé : « Que va-t-il se
passer ? Comment les offrandes seront-elles
transmises ? Y aura-t-il encore des
offrandes ? » Pas un seul instant
une seule de ces questions ne m'a
troublé ! J'étais bien convaincu
que, de façon on d'autre, le Seigneur
pourvoirait à mes besoins, si ce
n'était par l'intermédiaire des
saints de Bristol, par ceux qui vivent au loin.
Tout ce qui m'incombait c'était de servir le
Seigneur et de me confier en lui ; et lui
prendrait soin de moi. Et c'est bien là ce
qui a eu lieu. Comme par le passé, on nous a
apporté ou envoyé des dons en nature,
des vêtements, des provisions diverses, dons
provenant des saints parmi lesquels nous
travaillons et de ceux qui sont au loin. De petits
paquets d'argent avec les noms des destinataires,
celui de frère Craik ou le mien, ou les deux
réunis, ont été
déposés dans le tronc qui
reçoit les offrandes pour les pauvres parmi
les saints, ou dans celui qui reçoit les
dons pour les frais du culte, l'entretien de la
chapelle, etc... et les diacres nous ont remis ces
offrandes. Parfois des frères et des soeurs
m'ont remis directement de l'argent ; enfin le
Seigneur a continué d'incliner le coeur de
bien des chrétiens
éloignés à m'envoyer des
dons : quelques-uns proviennent de personnes
que je n'ai jamais vues, et dont je ne connais
même pas le nom.
La seule chose que je
craignisse
lorsque la décision d'enlever les troncs fut
prise, ce n'était pas de perdre par
là quelque secours, mais que quelques
enfants de Dieu en prissent prétexte pour
négliger de nous donner quelque chose, ou
que les pauvres hésitassent à donner
les oboles qu'ils pouvaient mettre de
côté, les uns et les autres se
privant par là d'une
bénédiction. Par la grâce
de Dieu, je puis dire en quelque mesure avec
l'apôtre Paul : « Ce n'est
pas que je recherche des présents, mais je
cherche à faire abonder le fruit qui vous en
doit revenir »
(Phil.
IV : 17). Je vise aussi
à atteindre, avec l'aide de Dieu, cet
état d'esprit que manifestent ces paroles de
l'Apôtre : « Et pour moi je
dépenserai très volontiers pour vous
tout ce que j'ai, et je me donnerai encore
moi-même pour vos âmes bien que vous
aimant avec tant d'affection, je sois moins
aimé »
(Il
Corinth. XII : 15).
C'était donc pour ceux qui s'abstiendraient
de donner que je craignais un
préjudice ; pour ceux que Satan
tenterait à ne plus rien faire à
cause de la suppression des troncs. Toutefois,
à cause des raisons exposées
ci-dessus, nous avons cru préférable
d'agir selon ce qui nous paraît être la
pensée du Seigneur en cette
affaire...
2 septembre
1841. -
Durant les quatre derniers mois, nous avons
reçu au delà du nécessaire
pour les Orphelins. Les cours d'eau des bienfaits
de Dieu n'ont cessé de couler vers nous,
apportant de l'argent et des dons en nature. Ceci
succède à une longue période
qui a commencé en juillet 1838 et durant
laquelle notre foi a été souvent mise
à l'épreuve... »
PAUVRETÉ.
- À nouveau, un temps d'épreuve
succéda à la période
d'abondance. Dieu dispensait le secours jour
après jour, souvent repas après
repas, et cela dura six mois. George Müller
écrivit dans son journal à la fin de
l'année 1841 :
« À cause de
notre grande pauvreté et bien que le moment
de l'Assemblée générale de
l'Oeuvre soit venu, nous avons décidé
de remettre à plus tard sa convocation, et
de ne pas publier de rapport financier. Il nous
semble que nous donnons ainsi la meilleure preuve
que nous regardons uniquement au Dieu
vivant. »
Cette période de
pauvreté se prolongea assez longtemps.
À la date du 8 février 1842,
après quelques remarques sur les conditions
dans lesquelles l'oeuvre se poursuit, George
Müller écrivait :
« Si le
Seigneur ne
nous envoyait pas le nécessaire avant neuf
heures du matin, demain, son nom serait
déshonoré. Mais j'ai l'assurance
qu'il ne nous abandonnera
pas. »
Effectivement, avant
huit
heures, le lendemain, le secours était
arrivé, et voici comment :
« Un
monsieur
se rendant à ses
affaires avait déjà fait deux
kilomètres à peu près, lorsque
sa pensée fut absorbée par les
orphelins, au point qu'il s'arrêta :
« Je ne puis cependant retourner sur mes
pas maintenant, se dit-il, je leur porterai quelque
chose ce soir », et il continua son
chemin. Toutefois, sa conscience parlant
très haut, et comme cette pensée d'un
secours immédiat nécessaire ne lui
laissait pas de repos, il revint sur ses pas pour
aller aux Orphelinats. Mais chemin faisant, se
souvenant d'une très importante affaire qui
l'attendait au bureau, il partit derechef dans
cette direction. Cependant il ne pouvait trouver la
paix ; ces paroles ne cessaient de
résonner en lui : « Va
maintenant, va maintenant, n'attends pas à
ce soir », de sorte qu'il prit
résolument le chemin des
Orphelinats et remit soixante-quinze francs pour
l'Oeuvre. Müller arriva aux asiles ce
même matin, avant le déjeuner, pour
s'assurer que le secours était bien
là ; il y trouva la petite somme que M.
X. venait de
remettre. »
Quinze
jours
plus tard, c'est un
samedi soir, l'argent manque pour acheter le pain
du dimanche. Il est huit heures et demie ! Un
visiteur arrive, qui ne sait rien, et il laisse
à M. Müller douze francs cinquante, ce
qui permet de se procurer le pain du lendemain,
avant la fermeture des magasins. Le surlendemain,
les provisions sont extrêmement
réduites, et on manque de thé. Un
visiteur vient qui, pressé par l'heure,
parcourt rapidement les trois maisons, et laisse
vingt-cinq francs dans chacune des
boîtes.
« S'il avait
eu plus
de temps, dit G. Müller, il aurait
parlé plus longtemps et nous n'aurions pas
eu son don au moment voulu pour l'heure du
thé. Quiconque connaît ces
détails ne peut que s'écrier :
C'est ici l'oeuvre du Seigneur, et c'est une chose
admirable à nos yeux. »
Plus tard, quand
l'abondance fut
revenue, jetant un coup d'oeil en arrière
sur ces journées durant lesquelles il
fallait s'attendre à Dieu instant
après instant, George Müller
écrit :
« L'épreuve
de
notre foi a été si prolongée,
si aiguë, que c'est uniquement par la
grâce de Dieu que la confiance de nos
collaborateurs n'a pas sombré, qu'ils ne se
sont pas fatigués de donner leur concours
à une oeuvre comme la nôtre
(4),
qu'ils ne
sont pas retournés aux coutumes et aux
maximes de ce monde mauvais. Je ne puis dire ce
qu'ils ressentaient alors ni ce qu'ils pensaient,
mais je puis parler pour moi et dire à la louange
de Dieu
que, durant tout ce temps, ma foi n'a pas
bronché ! Cependant elle fut souvent si
durement éprouvée que ma
requête se réduisait alors à
demander à Dieu qu'il daignât me la
conserver, et qu'il prît pitié de moi
comme un père prend pitié de son
enfant. Au milieu de l'épreuve, je
conservais l'assurance inébranlable que Dieu
interviendrait à son heure, et que s'il
permettait ces semaines et ces mois durant lesquels
nos circonstances étaient si difficiles,
c'était pour que cela concourût de
quelque façon au bien de l'Eglise de Christ
en général, et que ces paroles de
l'apôtre Paul se vérifiassent aussi
par ma vie : « Si nous sommes
affligés, c'est pour votre
consolation. »
DIEU
PEUT-IL
OUBLIER ? - En parcourant ces pages, plus
d'un lecteur aura pensé sans doute :
« Et s'il n'y avait plus d'argent, s'il
arrivait que vous n'en ayez plus, et vos aides non
plus, et que l'heure du repas fût là
sans que vous ayez rien à donner aux
orphelins ? » - En
vérité, la chose n'est pas
impossible, car nos coeurs sont
désespérément mauvais !
Et je dis que si nous étions laissés
à nous-mêmes, que nous ne nous
attendions plus au Dieu vivant, ou que nous
tolérions l'iniquité dans nos coeurs,
cela pourrait arriver. Mais, bien que nous soyons
loin d'être ce que nous devrions être,
aussi longtemps que nous nous confions en Dieu et
que nous ne vivons pas dans le péché,
cette chose-là est impossible.
« ENVOYÉ ».
- 5 mars. - Ce ne fut pas une petite
délivrance que celle que nous accorda
aujourd'hui le Seigneur : Entre dix et onze heures,
j'ai reçu soixante-deux francs cinquante
d'Edimbourg, alors que nous n'avions pas assez
d'argent pour acheter ce qu'il fallait pour le
déjeuner. Ce
soir, à huit heures, un visiteur s'est
présenté en me disant ceci :
« Je viens bien tard, mais
j'espère être reçu quand
même. Je vous apporte un peu d'argent pour
les orphelins. » Et il me tendit
cinquante francs. Quand je lui demandai son nom, il
me répondit qu'il le donnerait volontiers
s'il y voyait aucune utilité. Ce
n'était pas le cas. « Pour le
Rapport, dit-il, vous n'avez qu'à mettre
à côté du don :
« Envoyé », car
je suis sûr que c'est Dieu qui m'a
envoyé. »
Certes je le crois
aussi ;
car ce don se produisait à un moment des
plus opportuns et en réponse à la
prière.
IL VAUT LA PEINE
D'ÊTRE PAUVRE. - 17 mars. - Ce matin,
nous étions extrêmement pauvres. Je
quittai la maison peu après sept heures pour
me rendre aux Orphelinats et voir si on avait assez
d'argent pour prendre le lait que le fournisseur
apporte vers les huit heures. Je priais en
marchant, demandant à Dieu
« qu'il eût pitié de
nous, comme un père a pitié de ses
enfants ». Certainement il ne voulait
pas nous imposer un fardeau dépassant ce que
nous pouvions porter ; qu'Il daignât
donc verser en nos âmes quelque
rafraîchissement en nous envoyant de l'aide.
« Je lui rappelai aussi que si nous
devions interrompre l'Oeuvre, faute d'argent, cela
aurait les répercussions les plus
déplorables sur les croyants aussi bien que
sur les incrédules. Enfin je m'humiliai
à nouveau devant Dieu confessant que
j'étais indigne d'être son instrument
dans l'Oeuvre des Orphelinats. »
Tandis que j'étais
ainsi
en prière, et presque arrivé à
destination, je rencontrai un frère qui se
rendait à ses affaires à cette heure
matinale. Nous échangeâmes quelques
paroles et je continuai mon chemin ; mais il
courut après moi, et me
remit vingt-cinq francs pour les orphelins. Le
Seigneur avait répondu immédiatement
à ma requête. En vérité,
il vaut la peine d'être pauvre et d'avoir de
ces grandes épreuves de la foi pour avoir
aussi, jour après jour, les preuves si
précieuses de l'Amour du Père qui
s'intéresse aux détails de nos vies.
Celui qui nous a envoyé la preuve la plus
éclatante de son Amour en nous donnant son
propre Fils, nous donnera aussi toutes choses
avec lui. Il vaut la peine d'être pauvres
et que notre foi soit éprouvée si,
par là, les coeurs des enfants de Dieu sont
réjouis et leur foi affermie ; si ceux
qui ne connaissent pas le Seigneur, apprenant ce
qu'il a fait en se servant de nous, sont
amenés à comprendre par cette
démonstration que la foi en Dieu n'est pas
une simple notion, mais une puissance, et que le
Christianisme est une
réalité. »
George Müller dit plus
tard
de cette époque de la vie des Orphelinats
pendant laquelle Dieu m'exauçait que dans
l'instant même :
« Il est
impossible de
raconter avec détails comment, jour
après jour, repas après repas, Dieu
étendit sa main pour donner tout ce dont
nous avions besoin. »
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