OUVERTURE DE LA
PREMIÈRE MAISON D'ORPHELINES, LE 21 AVRIL
1836. -
FONDATION
D'UN DEUXIÈME ORPHELINAT POUR LES TOUT
PETITS DE QUATRE A SIX ANS ; PUIS D'UNE
TROISIÈME MAISON POUR GARÇONS. -
PUBLICATION
DE
LA PREMIÈRE PARTIE DES
« MÉMOIRES ». -
« VIENS
UN PEU A L'ÉCART ».
21
avril.
- OUVERTURE DE LA PREMIÈRE
MAISON POUR ORPHELINES. - J'ai loué pour
un an au moins l'immeuble No 6 de la rue Wilson. Il
est vaste et bon marché. Je l'avais
occupé jusqu'au 25 mars
(2). Maintenant
le voici aménagé pour recevoir les
vingt-six petites filles admises depuis le 11
avril. La journée du 21 avril, celle de
l'ouverture de l'Orphelinat, fut mise à part
pour la prière et l'action de grâce.
Nous avions décidé de ne prendre que
les fillettes de sept à douze ans. Mais nous
avons déjà reçu plusieurs
demandes pour des fillettes de
quatre à six ans. Ne devons-nous pas les
recevoir aussi puisqu'il y a encore de la place et
que Dieu a répondu avec munificence à
nos requêtes, en nous donnant au delà
de tout ce que nous pensions ? Après
avoir beaucoup prié à ce sujet, nous
avons décidé devant Dieu que nous
ouvririons aussi une maison pour les
« petits » : filles et
garçons, dès que nous aurions
l'immeuble, le mobilier et le personnel
nécessaires.
3 mai. -
Depuis plusieurs
jours, je prie Dieu qu'il se souvienne de nos
besoins personnels et de ceux de l'Institut
biblique.
6 mai.
- Voilà
déjà plusieurs années que je
pense à rédiger et à publier
un court récit de ce que Dieu a fait pour
moi. J'ai beaucoup prié à ce
sujet ; ces mois passés, cette
publication s'impose très
particulièrement à moi. Aujourd'hui,
j'en ai commencé la
rédaction.
16 mai.
- Depuis
plusieurs semaines, nous n'avions presque rien,
bien que j'eusse prié Dieu à
plusieurs reprises. Je n'avais donc pas pu mettre
de côté la somme requise pour les
impôts. Ce qui me tranquillisait,
c'était la pensée que Dieu enverrait
le nécessaire avant l'époque voulue.
Mais une épreuve bien plus sérieuse
pour moi que nos besoins personnels, ce fut de ne
pouvoir plus aider qu'à peine ceux de nos
frères qui sont dans la pauvreté.
Aujourd'hui, Dieu nous a envoyé cent
quatre-vingt-dix francs. il nous a exaucés
en temps voulu et avant qu'on ne vînt
percevoir la somme due.
3 juin.
- Depuis le 16
mai, je suis obligé de garder la maison et
même le lit, puisque je ne dois pas marcher. Mais
j'ai pu
écrire presque chaque jour et continuer le
« Récit »
commencé, que j'avais dû laisser
presque aussitôt à cause de
très pressantes occupations. Il est à
noter que je n'ai pu rédiger ce travail
jusqu'ici, faute de temps. Je crois qu'il pourra
faire du bien, mais le plus grand obstacle à
sa rédaction c'est justement la
multiplicité de mes travaux. À cause
de la maladie, j'ai maintenant les loisirs requis
et la liberté d'esprit voulue, de sorte que
j'ai pu écrire cent pages in-quarto.
Que Dieu me dirige dans sa bonté.
11 juin. -
Grâce
à Dieu, l'amélioration continue, mais
l'inflammation m'empêche de marcher. J'ai
donc encore pu écrire la semaine
passée.
12 juin.
- Aujourd'hui,
j'ai pu prêcher. C'est beaucoup plus
tôt que je n'osais
l'espérer.
18 juin.
- Toutes ces
semaines passées, nous n'avons eu que peu
d'argent pour nos dépenses personnelles.
J'en suis affligé parce que nous ne pouvons
pas aider les frères pauvres, autant que
nous le voudrions. Aujourd'hui samedi, il ne nous
reste que les trois francs soixante-quinze
nécessaires pour payer la voiture dont j'ai
besoin pour aller à Béthesda demain
dimanche, puisque je dois éviter de marcher.
S'il nous reste ce peu d'argent, c'est que le
boulanger a offert le pain qu'il apportait,
refusant d'en accepter le prix.
21 juin. -
Ce soir,
frère C ... r et moi, nous avons eu la joie
de constater que durant la semaine
écoulée Dieu ne nous avait pas
seulement envoyé les quatre cent trente-sept
francs cinquante nécessaires au loyer des
deux écoles, mais cent vingt-cinq francs de
plus.
28 juillet. -
Depuis
quelques semaines, nous n'avons pu payer un mois
à l'avance le traitement des instituteurs et
institutrices, selon notre habitude. Nous n'avons
pu le faire qu'une semaine à l'avance, et
même ceci aurait dû être
modifié si Dieu ne nous avait pas secourus.
Or, ce soir, nous avons reçu deux cent
vingt-cinq francs. Sur cette somme, deux cents
francs proviennent des ouvriers de l'un de nos
frères : ceux-ci avaient effectivement
décidé, depuis plusieurs mois
déjà, de laisser un sou par
semaine pour nos oeuvres, et Dieu a mis au
coeur de notre ami de nous apporter le total de ces
oboles alors que nous en avions un très
grand besoin.
Ma foi en a été
fortifiée.
Certes, je n'ai pas eu
un seul
instant l'idée de mettre en doute la
fidélité de Dieu, cependant je ne
comprenais pas ses voies, et pourquoi il ne nous
accordait que le nécessaire, juste assez
pour empêcher que l'oeuvre ne fût
interrompue. Je me demandais s'il y avait eu
quelque infidélité en moi, et si Dieu
voulait à cause de cela que je restreignisse
le champ de notre activité. Aujourd'hui,
j'ai compris qu'il n'en est pas ainsi,
malgré mon indignité, et que s'il a
permis que nous eussions à prier si souvent
c'est pour que la délivrance fût plus
éclatante et que nous l'appréciions
davantage.
1er octobre.
- À
cause des nombreuses délivrances qui nous
ont été accordées
dernièrement, nous n'avons pas
hésité à agrandir notre champ
d'action par l'ouverture d'une nouvelle
école de garçons dont le besoin se
faisait sentir. Nous avons des demandes d'admission
qui remontent à plusieurs mois.
19 octobre.
- Aujourd'hui
j'ai trouvé une soeur comme directrice pour
l'Orphelinat des « petits ».
Jusqu'ici je n'avais
rencontré personne qui semblât
qualifié. Voilà quelque temps
déjà que nous avons en mains l'argent
suffisant pour cette oeuvre et plusieurs demandes
d'admission.
25 octobre.
- Par la
bonté de Dieu, nous avons pu acquérir
aujourd'hui et sans difficulté aucune, un
immeuble très propre à se transformer
en orphelinat pour « les
Petits ». Si nous avions
dépensé des milliers de francs
à construire, nous aurions pu difficilement
faire mieux que ce que nous avons trouvé
tout fait. L'intervention de Dieu est manifeste en
tout ceci. Qu'il est important de lui remettre tout
ce qui nous occupe, les choses grandes et petites,
car tout ce qu'il fait est bien fait. Si notre travail est son
travail, il le
fera prospérer.
30 novembre. -
Je suppose
que c'est à cause d'autres demandes
urgentes, d'autres occupations pressantes que, ces
temps passés, je n'ai pas été
conduit à prier pour les fonds
nécessaires. Et hier matin, à
cause du très grand besoin d'argent, je
me suis senti poussé à prier avec
instance à ce sujet. En réponse, j'ai
reçu le même soir deux cent cinquante
francs d'un frère qui voulait faire ce don
depuis quelque temps, mais en avait
été empêché parce qu'il
n'avait pas eu les moyens jusque-là. Ces
moyens, Dieu les lui fournit juste au moment que
nous avions le plus besoin de son aide ; et
par là, il vint à notre secours.
Puis, nous avons encore reçu hier soir cent
vingt-cinq francs d'une soeur que je n'ai jamais
vue et dont Dieu s'est souvent servi pour
suppléer à nos besoins. Voici ce
qu'elle m'écrit :
« Dernièrement, j'ai eu
constamment l'impression que je devais vous envoyer
quelque chose ; il me semble que vous devez
avoir quelque besoin, et que le
Seigneur veut me faire l'honneur d'être son
instrument en vous donnant par moi le
nécessaire. Je vous envoie donc cent
vingt-cinq francs, tout ce que j'ai à la
maison en ce moment. Mais si vous avez l'occasion
de m'écrire et voulez bien me dire ce qu'il
en est, je vous enverrai à nouveau cent
vingt-cinq francs. »
10 décembre. -
Du
26 mars à ce jour, il a été
dépensé pour les orphelins neuf mille
neuf cent vingt francs quinze centimes.
15 décembre. -
Ce
jour a été mis à part pour la
prière et les actions de grâce,
à l'occasion de l'ouverture de l'Orphelinat
des Petits qui eut lieu le 28 novembre. Le matin,
réunion de prière.
L'après-midi, prière et actions de
grâce, puis réunion pour les enfants
de nos écoles et des orphelinats :
trois cent cinquante environ. Je leur ai
parlé sur ce texte : Ecclésiaste
XII :
1 : « Jeune homme
réjouis-toi pendant ton jeune âge,
livre ton coeur à la joie pendant les jours
de ta jeunesse... mais sache que pour chacun de tes
actes Dieu t'appellera en jugement. »
Ce soir, rapport sur l'oeuvre des
orphelinats...
31 décembre. -
Nous avons maintenant cent quatre-vingt-un membres
d'église à Gideon Chapel et cent
soixante-huit à Béthesda ; en
tout, trois cent quarante-neuf frères et
soeurs.
Il a plu à Dieu de me
donner durant l'année écoulée
cinq mille huit cents francs pour mes besoins
personnels.
22 avril. - Deux cas de typhus à
l'Orphelinat. Dieu exauçant nos
prières a empêché que la
maladie ne s'étendît, et les deux
petits malades sont en convalescence.
28 mai. -
Le récit
de ce que Dieu a fait pour moi va être
publié. Et ceci m'a conduit à
demander à Dieu avec instance qu'il
voulût bien m'accorder ce qui manque aux
vingt-cinq mille francs que je lui ai
demandés pour l'Orphelinat à
l'origine (3).
Pour moi, j'ai déjà l'exaucement, et
la chose est aussi bien que faite ; de sorte
que bien des fois déjà, j'ai pu
bénir et louer Dieu par anticipation. Mais
pour les autres, ceci n'est pas suffisant. Et
puisque l'Oeuvre des orphelinats a
été commencée pour la gloire
de Dieu et pour donner à l'Eglise et au
monde une nouvelle preuve visible qu'Il entend la
prière et prend plaisir à l'exaucer,
puisqu'il manque encore quelque chose aux
vingt-cinq mille francs demandés et que
j'aimerais que mon livre ne sortît pas de
presse avant d'avoir reçu le dernier franc
pour avoir le précieux privilège de
lui rendre témoignage dans cette
publication, pour toutes ces raisons je me suis
adonné très particulièrement
à la prière depuis le 21 mai. Le 22,
j'ai reçu cent quatre-vingt-neuf francs
cinquante, le 23 : soixante-quinze
francs ; le 24, une dame que je n'avais jamais
vue jusque-là m'a apporté mille
francs. Ceci m'a puissamment encouragé, car
le Seigneur m'a montré par là qu'Il
daignera continuer à nous envoyer de fortes sommes, et cela en
se servant aussi
de personnes que nous ne connaissons pas.
15 juin. -
J'ai à
nouveau ardemment prié aujourd'hui pour
obtenir ce qui manque aux vingt-cinq mille francs,
et ce soir même j'ai reçu cent
vingt-cinq francs de sorte que la somme est acquise
et au delà.
C'est pourquoi je veux
répéter à la gloire de Dieu
à qui je suis, et que je sers, que chacun
des shellings de cette somme et que tous les objets
mobiliers ont été reçus sans que rien n'ait été
demandé à personne qu'à
lui.
Et puisque Dieu a
daigné
si complètement et au delà de ce que
je pensais répondre à mes
espérances, puisqu'il a rempli ma
bouche
(Ps.
LXXXI : 10), ne
voulez-vous
pas, frères et soeurs bien-aimés en
Christ, m'aider à le louer pour sa grande
condescendance ! N'est-ce pas une chose
merveilleuse qu'un serviteur aussi indigne, aussi
infidèle que moi, soit puissant avec
Dieu !
Que ceci soit pour
vous, chers
frères et soeurs, un sujet d'encouragement.
Certainement, si un homme si peu conforme à
la pensée de Christ et tel que je suis
obtient l'exaucement de ses prières, ne
pouvez-vous aussi, enfin, obtenir ce que
vous demandez ? Depuis dix-huit mois et dix
jours, j'ai fait monter vers Dieu presque
quotidiennement cette requête en faveur de
l'Oeuvre des Orphelins. Dès l'instant que je
la formulai, j'eus l'assurance que je recevrais
toute la somme demandée. Et j'ai souvent
loué Dieu avant l'exaucement, tellement
j'étais assuré de
l'obtenir.
La chose à laquelle
nous
devons très particulièrement prendre
garde en priant, c'est de croire que nous recevrons
comme il est dit dans l'évangile de Marc
(XI :
24) :
« Tout ce que vous demanderez en
priant, croyez que vous le recevrez et il vous sera
accordé. » Il arrive souvent
que ceci manque à mes prières. Mais quand je
suis capable de croire que je reçois, Dieu
agit en conséquence.
Tandis que je rédige
ces
notes (28 juin 1837), j'attends du Seigneur les
quatre cent trente-sept francs cinquante qu'il me
faut pour le loyer de nos deux écoles, loyer
dû dans trois jours, et je n'ai en mains que
soixante-quinze francs. Je crois que Dieu peut
donner cette somme, je crois que Dieu veut la
donner si c'est pour notre bien et j'ai souvent
demandé qu'il la donnât ; mais ma
foi n'est pas triomphante et je ne puis dès
maintenant le remercier de ce qu'il m'a
exaucé et accordé cette petite
somme. J'attends le secours à chaque
courrier, à chaque coup de sonnette ;
certes, je compte sur Dieu et sur Dieu seul, mais
jusqu'ici je n'ai pas cette assurance de pouvoir
payer le loyer au même point que je l'aurais
si j'avais déjà l'argent en
poche.
UN
ORPHELINAT POUR LES GARÇONS. - Comme
jusqu'ici le Seigneur a daigné exaucer mes
prières, comme je crois que l'un des
principaux talents qu'il m'a confiés c'est
de pouvoir saisir par la foi l'effet de ses
promesses pour mes besoins temporels et ceux des
autres, à cause de la
nécessité d'un orphelinat pour
garçons au-dessus de sept ans dans cette
ville de Bristol, et parce que sans cette
« Maison » nous ne saurions
comment placer les enfants qui ont atteint cet
âge ou vont l'atteindre dans l'Orphelinat des
« Petits », pour toutes ces
raisons je caresse le projet d'ouvrir une nouvelle
Maison qui pourra recevoir quarante
garçons.
Toutefois, il y a
entre ce
projet et sa réalisation trois
difficultés qui doivent avoir leur solution
avant que je puisse aller de l'avant :
1° J'ai déjà
plus à faire que je ne puis accomplir. Je ne
puis donc élargir mon champ d'action
à moins qu'il ne plaise à Dieu de
m'envoyer un frère qui remplirait les
fonctions d'économe et me
déchargerait de tout le travail de
bureau : les livres de comptes, l'achat des
Écritures ou portions de la Bible pour la
vente ou les distributions, les comptes à
tenir de ce chef ; les conseils à
donner pour les Orphelinats sur des questions
toutes matérielles, la correspondance ou les
entrevues pour les demandes d'admission, etc... un
économe est même nécessaire
immédiatement, qu'un Orphelinat de
garçons soit ou non ouvert. C'est pourquoi
je place ce besoin d'un aide sur le coeur de ceux
qui liront ces lignes, afin qu'ils prient à
ce sujet et que le frère qualifié
pour ce poste soit trouvé.
2° Avant d'ouvrir ce
nouvel
orphelinat, il faut trouver l'homme pieux qui
pourra en prendre la direction et le personnel
nécessaire pour les soins à donner
aux enfants.
3° Si Dieu veut que
j'aille
de l'avant, j'aimerais qu'il me le montrât
clairement en m'envoyant tout ce qu'il faut. Si
d'une part, je suis prêt à confesser
à la louange de Dieu qu'il m'a donné
la foi requise pour m'attendre à lui,
d'autre part je demande qu'il me garde de toute
présomption et d'emballement, d'un
enthousiasme inconsidéré. Je n'ai pas
l'intention d'attendre qu'il m'envoie des milliers
et des milliers de francs ou qu'il assure la vie de
l'Oeuvre par des legs, mais j'attendrai qu'il donne
le nécessaire pour meubler une maison de
quarante garçons, pour les vêtir, et
la petite somme voulue pour commencer. Sans quoi,
je ne penserais pas qu'il désire voir
l'Oeuvre s'accroître.
1er juillet.
- Dans sa
bonté, Dieu continue de bénir la
prédication de sa Parole pour la conversion
de nombreux pécheurs. Voilà cinq ans
qu'il poursuit sans arrêt son oeuvre dans les
coeurs. Actuellement le nombre de ceux qu'il a
convertis à Bristol par notre moyen est de
cent soixante-dix-huit.
12 juillet. -
La dame qui
m'avait remis le 24 mai mille francs et que
jusque-là je n'avais jamais vue, m'a
donné à nouveau onze mille cinq cents
francs.
15
août. - RÉCEPTION DES PREMIERS
EXEMPLAIRES DU
« RÉCIT ». - J'ai
reçu aujourd'hui le premier envoi (cinq
cents exemplaires) de la première partie du
« Récit »,
(4). Et
tout
aussitôt ce fut à nouveau un tumulte
de pensées diverses qui
s'élevèrent en moi. N'était-ce
pas une erreur que de publier cela ? Une sorte
de tremblement m'a saisi, et le désir de
pouvoir défaire ce que j'avais fait.
Cependant comme j'avais constamment scruté
mon coeur avant de commencer la rédaction de
ce travail, me faisant subir une série
d'examens et de contre-examens sur la question de
mes motifs, comme j'avais recherché avec
ardeur en prière la pensée du
Seigneur et reçu l'assurance que sa
volonté était bien que je servisse
aussi l'Eglise par le moyen de cette publication,
j'attribuai à l'Adversaire les sentiments
contradictoires qui m'assaillaient au moment
où elle paraissait. Ce tremblement, ces
doutes, ces regrets, je les considérai comme
une tentation, et allant
délibérément vers la caisse,
je l'ouvris, je pris quelques brochures et en
donnai une presque
aussitôt, afin de me couper la retraite
(5).
LE PREMIER LEGS. - 15
septembre.
- Ce matin, nous, avons reçu d'une soeur
éloignée un colis contenait des
vêtements pour les orphelins, et un paquet
d'argent. Parmi les dons, il y avait une petite
somme de huit francs soixante léguée
par un jeune garçon qui venait de mourir. Le
cher enfant avait reçu de temps à
autre quelques sous durant sa dernière
maladie, et il les avait mis de côté.
Peu avant de s'endormir en Jésus, il avait
demandé qu'on nous envoyât la petite
somme ainsi réunie. Ce précieux petit
legs en faveur des orphelins est le premier que
nous ayons reçu.
19 septembre.
- Deux
choses ont fait, plus spécialement
aujourd'hui, une profonde impression sur moi. Que
Dieu daigne rendre encore plus profonde cette
impression :
1° Que je dois me
ménager des moments de solitude, même
si, en apparence, l'oeuvre semblait devoir en
souffrir ;
2° Qu'il faut prendre
tels
arrangements utiles pour que je puisse visiter
davantage les frères. Une église qui
n'est pas visitée s'anémie tôt
on tard.
28 septembre.
- Depuis
longtemps, j'ai beaucoup trop d'occupations au
dehors. Hier matin, je me suis retiré trois
heures durant, à la sacristie de
« Gideon Chapel », pour avoir
un peu de solitude. J'avais l'intention de
recommencer l'après-midi, mais avant qu'il
me fût possible de quitter la maison on vint m'appeler,
puis les visites
se
succédèrent. Aujourd'hui ce fut la
même chose.
OUVERTURE DU TROISIÈME
ORPHELINAT. - 21 octobre. - Il y a quelques
semaines, j'avais loué, à très
bon compte, un très grand immeuble pour
l'Orphelinat de garçons ; mais
apprenant que les gens du quartier
menaçaient le propriétaire d'un
procès parce qu'il avait loué
à un établissement charitable, je
renonçai aussitôt à mes droits.
Et voici ce qui me guida en cette affaire :
ces paroles de l'Écriture, « pour autant qu'il dépend de
vous, vivez en paix avec tous les
hommes ». En renonçant
à cette maison, j'avais l'assurance que le
Seigneur m'en trouverait une autre. Ceci se passait
le 5 octobre de bonne heure ; or, ce
matin-là, pour manifester qu'il continuait
de nous bénir, Dieu nous envoya mille deux
cent cinquante francs par une soeur qui est loin
d'être riche, argent destiné au
mobilier de l'Orphelinat des garçons.
Aujourd'hui, il nous donne pour cet Orphelinat une
autre maison située, comme les deux
précédentes, rue Wilson. À son
heure, Dieu nous a donc encore aidés en
cette circonstance. En vérité, chaque
fois que dans cette Oeuvre je n'ai eu affaire
qu'à lui, je n'ai jamais été
déçu.
1er novembre.
- Nous
n'avons presque plus rien pour l'Institut biblique,
pour les écoles et la caisse des Missions,
et voilà déjà quelque temps
que je demande à Dieu de bien vouloir nous
envoyer avec largesse ce qu'il nous faut. Je lui ai
parlé à plusieurs reprises de deux
mille cinq cents francs. Jusqu'ici il ne semblait
pas que Dieu eût entendu, les dons
étaient minimes. Mais hier, il y a eu un don
de deux mille deux cent
cinquante francs et aujourd'hui un autre de deux
cent cinquante, ce qui forme la somme de deux mille
cinq cents francs que j'avais nommée. Nous
pouvons donc augmenter notre stock de Bibles,
lequel était fort
réduit...
7 novembre. - Ma tête
est
si faible que je comprends la
nécessité absolue de laisser l'Oeuvre
pour quelque temps. J'avais à peine pris la
décision de quitter Bristol pour prendre le
repos nécessaire que je reçus
d'Irlande une lettre anonyme contenant cent
vingt-cinq francs pour mes besoins personnels. Dieu
m'envoie donc les moyens de ce déplacement.
Je ne puis plus travailler, ma tête est dans
un tel état de faiblesse provoquée
par un labeur incessant que je me sens heureux de
partir. Et cependant, humainement parlant, peu
d'instants sont aussi peu favorables à un
déplacement ! L'Orphelinat de
garçons va être ouvert sous peu. Il
faudrait mettre au courant le personnel. Certaines
questions d'églises sont pendantes et
attendent toujours une solution. Mais Dieu sait
tout cela mieux que moi, et il prend soin de son
oeuvre mieux que je ne le pourrais faire, mieux que
je ne le puis faire. Par conséquent, je veux
lui remettre toutes choses.
REPOS
NÉCESSAIRE. - 16 novembre. -
Aujourd'hui je suis allé à Weston
super Mare.
17 novembre.
- Weston
super Mare. Ce soir, ma femme, l'enfant et la
servante sont arrivées. Hier une soeur a
placé cinquante francs dans le portefeuille
de ma femme. Que le Seigneur est bon de nous
envoyer les moyens suffisants. Qu'il est bon aussi
de nous avoir envoyé l'aide
nécessaire en frère T. pour s'occuper du travail
qu'entraînent les écoles, les
orphelinats, etc.... de même qu'il avait
envoyé frère C ... r il y a deux ans
lorsque je dus prendre un repos
prolongé !
25 novembre.
- Nous
sommes revenus à Bristol.
30 novembre. - Je ne
vais pas
mieux. J'ai écrit à mon père,
peut-être pour la dernière fois. Tout
est bien, et tout sera bien ; tout ne peut
être que bien puisque je suis en Christ.
Qu'il m'est précieux, maintenant que je suis
malade, de n'avoir pas à chercher Dieu, mais
de l'avoir déjà
trouvé.
17 décembre.
Jour du
Seigneur. - J'ai vu passer sous mes
fenêtres ce matin les trente-deux orphelines
qui ont plus de sept ans. Quand je vis les
chères enfants avec leurs robes propres,
leurs chauds manteaux et la soeur qui les
accompagnait à la chapelle, je me suis senti
reconnaissant envers Dieu qui m'avait choisi comme
son instrument dans cette oeuvre ; car toutes
sont beaucoup mieux avec nous sous tous les
rapports : spirituel et matériel,
qu'elles ne le seraient dans les milieux
d'où elles sortent. J'ai senti que, pour un
tel résultat, il valait la peine d'avoir
travaillé non seulement quelques jours, mais
encore durant des mois et des années, et que
ceci répondait suffisamment aux amis qui me
disent : « Vous faites
trop. »
24 décembre. -
Voici le septième dimanche que je suis
immobilisé. Aujourd'hui j'ai
décidé que je ne joindrais plus de
lettres aux paquets puisque la loi le
défend ; car je comprends maintenant
que le disciple de Jésus doit se conformer
à la législation en tout ce qui ne
s'oppose pas à la conscience.
31 décembre. - Il y a
maintenant quatre-vingt-un enfants dans nos trois
orphelinats, et neuf frères et soeurs pour
prendre soin d'eux. Total : quatre-vingt-dix
personnes à table tous les jours. Nos
écoles de semaine ont toujours autant besoin
de nous et même davantage puisqu'elles
comptent trois cent vingt enfants, et les
écoles du dimanche trois cent cinquante.
« 0 Dieu, ton serviteur n'est qu'un
pauvre homme ! mais il s'est confié en
toi, il s'est glorifié de toi devant les
enfants des hommes, ne permets donc pas qu'il soit
confondu. Ne permets pas qu'on puisse dire de ton
oeuvre qu'elle est le fruit d'un enthousiasme sans
lendemain, un feu de paille qui ne peut
durer ! »
- Ce matin j'ai
gravement
déshonoré le Seigneur en me laissant
aller à l'irritation avec ma chère
femme. Or, peu d'instants auparavant,
j'étais agenouillé devant Dieu et le
bénissais de m'avoir donné une telle
compagne !
- Cette année, il a
été dépensé dix-huit
mille cinq cents francs pour les Orphelinats, dix
mille pour les écoles et l'achat des
Écritures saintes, et j'ai reçu pour
mon entretien sept mille six cent soixante-dix-huit
francs vingt.
George
Müller
ne s'occupait pas
seulement des écoles, de la diffusion des
Écritures, des missions, de son
église, il avait encore demandé
à Dieu des ressources particulières
pour les pauvres de Bristol. Nous lisons à
ce sujet dans son journal :
« Les cent
paires de
couvertures de laine sont arrivées
aujourd'hui. Que le Seigneur est bon de faire de
nous ses instruments pour subvenir aux besoins des
pauvres parmi les frères, et dans le monde.
Elles arrivent bien à
propos ; les informations prises
révèlent des cas d'extrême
détresse... Que le Seigneur m'accorde de
renoncer à moi-même pour subvenir aux
besoins des pauvres. Que de choses on peut faire
avec le renoncement ! Seigneur,
aide-moi ! Les couvertures sont de très bonne qualité :
quiconque veut imiter Jésus en aidant les
malheureux ne se demandera pas comment faire pour
donner le moins possible, mais il s'exercera
à donner largement.
MALADIE ET BÉNÉDICTION. - 6
janvier. - Il me semble que l'état de ma
tête ne s'améliore pas, bien que
l'état général soit plus
satisfaisant ; mais mon bon docteur assure que
je vais mieux et conseille un changement d'air. Or,
ce même jour, une soeur qui habite à
quelque cinquante-quatre kilomètres d'ici
(elle ne sait donc rien de l'ordonnance du docteur)
m'a envoyé trois cent soixante-quinze francs
en spécifiant que c'était pour un
changement d'air. Dieu prend soin des siens de
façon merveilleuse ! J'ai donc les
moyens de suivre l'avis du docteur. - Aujourd'hui
j'ai entendu parler d'une remarquable conversion
effectuée par la lecture du
« Récit ».
7 janvier. -
Ma
tête est dans un état pitoyable et
aussi malade que jamais, me semble-t-il. Les nerfs
doivent être touchés ; et ceci
provoque en moi une forte tendance à
l'irritabilité, mêlée de je ne
sais quel sentiment satanique, qui est
étranger à ma nature. 0
Seigneur ! veuille garder ton serviteur de te
déshonorer ! Mieux vaudrait que tu me
prisses à toi.
10 janvier. -
Aujourd'hui
nous sommes partis pour Trowbridge, ma famille et
moi.
12 janvier.
Trowbridge. -
J'ai commencé la lecture de la
« Vie de Whitefield »
par M. Philip.
13 janvier.
- La lecture
de cette biographie m'a déjà
été en bénédiction. Il
est évident qu'il faut attribuer les grands
succès de la prédication de
Whitefield à sa vie de prière intense
et au fait qu'il lisait la Bible à genoux.
Je sais depuis quelques années
déjà l'importance de ce dernier
point ; mais jusqu'ici je ne m'y suis que
très peu conformé. J'ai eu
aujourd'hui plus de communion avec Dieu que je n'en
avais eue ces temps passés.
14 janvier.
Jour du Seigneur. - J'ai continué la lecture de la Vie
de Whitefield, et Dieu continue de bénir
celle-ci pour mon âme. J'ai passé
plusieurs heures en prière aujourd'hui.
À genoux, j'ai lu le psaume
soixante-troisième, ce qui a
été pour moi l'occasion de deux
heures de méditation et de prière.
Mon âme est maintenant parvenue à ce
point qu'elle fait ses délices de la
volonté de l'Éternel quelle qu'elle
soit, Oui, du plus profond du coeur, je puis
dire maintenant que je ne voudrais pas que la
maladie se dissipât tant que je ne jouis pas
pleinement de la bénédiction que Dieu
veut me dispenser par ce moyen. Hier et
aujourd'hui, il a puissamment attiré mon
âme vers lui. « 0 Dieu !
continue à manifester tes bontés
envers moi, et remplis-moi
d'amour ! » Je voudrais te glorifier
davantage ; pas tellement par une
activité extérieure que par la
conformité intérieure à
l'image de Christ. Qu'est-ce qui empêcherait
Dieu de faire d'un être aussi vil que moi un
autre Whitefield ? Il
est
certain que Dieu pourrait faire reposer sur moi
autant de grâce qu'il en fit reposer sur
lui.
15 janvier. -
Les
douleurs de tête ont été bien
moins vives depuis hier après-midi.
Cependant, je suis loin d'être bien. Mais
à cause des bénédictions
spirituelles que le Seigneur m'a déjà
accordées, j'ai l'assurance
intérieure que par cette maladie il veut me
purifier pour son service béni, et qu'il me
rendra bientôt avec la santé la
possibilité de travailler encore pour
lui.
16 janvier. -
Journée bénie ! Oh ! que le
Seigneur est bon ! Sa grâce entretient
en moi la ferveur d'esprit. Le psaume LXVI a fait
l'objet de mes méditations, et plus
spécialement les versets dix, onze et douze,
qui s'appliquent à mes circonstances
particulières. Par le moyen de cette
maladie, Dieu m'a déjà
« mis au large et dans
l'abondance », et je crois qu'il veut
me bénir encore davantage. Que n'a-t-il pas
fait déjà pour moi durant les
dix-huit années
écoulées ! Si j'établis
un parallèle entre ce 16 janvier 1838 et le
16 janvier 1820, jour de la mort de ma chère
mère, je puis mesurer la grandeur de son
Amour à mon endroit. Aujourd'hui j'ai pris
la résolution, si Dieu me rend la
santé, d'avoir une fois par semaine ou tous
les quinze jours, avec les enfants de nos
écoles et les orphelins, une réunion
spéciale à la chapelle pour
étudier avec eux les Écritures. Le
Seigneur incline mon coeur à prier pour bien
des choses ; celle-ci par exemple : qu'il
veuille allumer en moi un saint désir de lui
gagner des âmes et un plus grand amour pour
les perdus. C'est la lecture de la Vie de
Whitefield qui m'a fait sentir mon devoir sur ces
points spéciaux.
17 janvier. -
Dieu
continue à me manifester sa faveur en
maintenant en moi la ferveur d'esprit. À
plusieurs reprises aujourd'hui, je me suis senti
attiré par la prière, et j'ai
prié longuement. J'ai lu à genoux le psaume
LXVIII en priant et en
méditant. Au verset cinquième, le
qualificatif de « Père des
orphelins » donné à
Jéhovah m'a été en
bénédiction. Je me suis
approprié immédiatement tout ce qu'il
comportait en pensant aux enfants qui me sont
confiés ; jamais encore je n'avais
réalisé comme aujourd'hui la
vérité contenue dans ce passage. Dieu
aidant, elle deviendra mon argument pour les heures
difficiles. Il est leur Père, Il s'est
engagé à pourvoir à leurs
besoins, à prendre soin d'eux. Je n'ai donc
qu'à lui rappeler les besoins des orphelins
pour qu'il donne le nécessaire. Mon
âme s'est encore élargie pour les
malheureux enfants sans parents. Cette
expression : « le Père des
orphelins » recèle assez
d'encouragement pour que je puisse sans crainte
placer des milliers d'orphelins sur le coeur du
Père, et les remettre à son
amour.
11 février.
- Ce
matin, j'ai été conduit à lire
les versets cinq à douze du chapitre III des
Proverbes pendant les quelques instants libres que
j'avais avant le déjeuner. Et ces mots m'ont
particulièrement frappé :
« NE TE REBUTE PAS QUAND L'ÉTERNEL
TE REPREND. » Certes, je n'ai pas
méprisé le châtiment du
Seigneur, mais il m'arrive de temps à autre
d'être las d'être repris. « 0
Dieu, aie pitié de moi, ton serviteur
inutile ! Tu sais bien que l'homme
intérieur veut endurer l'affliction avec
patience, et que même il ne voudrait pas
qu'elle se retirât aussi longtemps qu'elle
n'a pas parfaitement accompli son oeuvre et
porté les fruits paisibles, de justice
qu'elle doit porter.
Mais tu sais aussi
quelle
épreuve c'est pour moi de continuer à
vivre comme je le fais maintenant. Viens mon
secours, Seigneur ! »
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