Il est
écrit: TA PAROLE EST LA VERITE (Jean 17.17) Cela me suffit... |
REGARD
Bibliothèque chrétienne online EXAMINEZ toutes choses... RETENEZ CE QUI EST BON - 1Thess. 5: 21 - (Notre confession de foi: ici) |
Il est
écrit: TA PAROLE EST LA VERITE (Jean 17.17) Cela me suffit... |
LE
VEILLEUR SUR LA TOUR
|
Pourvu que je t'aie, que m'importent le
ciel et la terre ! |
La question que traite le Psaume 73 est un des
aspects du problème douloureux de la
théodicée. Problème difficile
entre tous.
La justification de Dieu !
Comment
Dieu met-il en lumière l'action de sa
Providence, quand les hommes lui demandent compte
des iniquités qui se commettent sous le
ciel ? Comment la réussite insolente de
l'impie et la souffrance imméritée du
juste se concilient-elles avec l'existence d'un
Dieu d'amour et de sagesse ?
Ce problème, l'Israélite
des anciens jours le résolvait sans trop de
peine. Dans ses horizons, qui ne
s'étendaient pas au delà de
l'existence terrestre, il situait sans effort les
rétributions divines. Il croyait que la
bénédiction d'En-Haut se
répandait naturellement sur le sentier des
justes. « Heureux, chantait-il, l'homme
qui ne marche pas selon le conseil des
méchants. Il est comme un arbre
planté près d'un courant d'eau, qui
donne son fruit en sa saison. Tout ce qu'il fait
lui réussit. »
Le juste, gardé par la
sollicitude de Yahvé, devait terminer ses
jours en paix, après une vieillesse
heureuse, retiré dans sa vigne et à
l'ombre de son figuier, en communion avec une
nature tout imprégnée de la
bonté de son Dieu.
Heureux temps, où la vertu
s'épanouissait d'elle-même en bonheur,
où la vie se déroulait, paisible et
sereine, en des travaux faciles, sous la
bénédiction du ciel
oriental !
Ensuite vint la tourmente. Israël,
violemment arraché du sol maternel,
transplanté sur une terre
étrangère, dut assister en pleurant
aux triomphes de la force et de l'iniquité.
La harpe qui, jadis, aux campagnes paisibles de
Bethléem et d'Esdrelon, avait murmuré
des chants si doux, se fit plaintive et
gémissante sur les rives des fleuves de
Babylone. L'impie était victorieux, le juste
était opprimé. Il le fut toujours,
dès lors. Comment concevoir un pareil
renversement de l'ordre naturel, si peu conforme
avec ce qu'on était en droit d'attendre de
la sagesse divine ?
Il y avait bien une attitude que l'on
pouvait prendre : se prosterner devant la
majesté infinie du Dieu insondable, qui a
droit de vie et de mort sur sa
créature.
En lisant le livre de Job, nous nous
rendons compte que cette solution fut
acceptée dans une certaine mesure par la
conscience religieuse d'Israël.
« Comment l'homme serait-il juste
devant Dieu ?
demande Job.
S'il voulait contester avec Dieu, sur mille choses
il ne pourrait répondre à une seule.
À Dieu la sagesse et là
toute-puissance ! » Et sa plainte
s'achève sur une parole de soumission dont
rien n'égale l'humilité :
« Je suis trop peu de chose : que te
répliquerai-je ? je mets la main sur ma
bouche. » Admirable triomphe de la
foi !
Croire, malgré
l'écrasement de toutes ses
espérances, adorer la main qui frappe,
saluer dans l'épreuve sous laquelle sombre
un radieux avenir la manifestation d'une puissance
souveraine, dont les arrêts, quelle qu'en
soit parfois l'apparente injustice, ne se discutent
point, c'est grand, cela. On comprend qu'il se
trouve encore aujourd'hui des penseurs pour
célébrer la grandeur du Dieu
lointain, inaccessible aux entreprises de la raison
humaine, et dont les jugements insondables
confondent la frivole sagesse des hommes.
Beaucoup de chrétiens n'ont pas
dépassé cette phase : ils se
sont courbés devant le mystère qui
les terrifie, et ils ont mis leur main sur leur
bouche.
Mais cette résignation
héroïque est-elle digne de notre
Dieu ? L'enfant de la maison doit tenir au
Père un autre langage qu'à son
maître l'esclave châtié et
tremblant. Il y a quelque chose de plus admirable
que le silence de Job : c'est la confiance
joyeuse et victorieuse
du Psaume 73.
Le problème que posent à
nouveau tous les jours les triomphes apparents de
la ruse et de l'iniquité est insoluble. Ceux
qui ont l'ambition de sauver leur idéal
sont, du point de vue de la terre, des vaincus.
Dieu ne règne pas dans la
société moderne ; il n'y
règne nulle part ; et, dans cette lutte
toujours plus âpre, la vertu est de moins en
moins récompensée.
Et pourtant, Dieu aura le dernier mot.
Il ne suffit pas de dire qu'il l'aura, il l'a,
dès maintenant ; c'est la certitude du
Psaume, et ce doit être la nôtre.
La faute de ces réalistes qui
disent : « Comment Dieu
saurait-il ? comment le Très-Haut
connaîtrait-il ? » porte en
elle-même son châtiment. Le Psalmiste
en a eu la révélation. Dieu lui a
montré sur quels sentiers glissants ces
prétendus vainqueurs se trouvaient
engagés par leur criminelle folie.
Remarquez-le : il n'est pas question,
nécessairement, d'une ruine
matérielle ; et ceci ne serait pas
encore ce qu'il y a de plus tragique dans leur
destinée. Dans l'esprit de ces hommes qui ne
font plus entrer Dieu en ligne de compte, Dieu se
voile. Et la ruine spirituelle de ceux qui n'ont
voulu vivre que pour la terre se trouve être
le pire des châtiments, tandis que le
sentiment de la présence de Dieu est pour le
juste opprimé la plus douce
récompense, et le pressentiment d'une
communion éternelle.
C'est ainsi que nous voyons
émerger des profondeurs de la conscience
israélite une intuition de l'Au-delà
par où s'achève dans l'homme la
présence divine. L'âme croyante en
arrive, dès ce temps-là, à cet
idéal de vie intérieure et mystique
dont un philosophe contemporain a pu dire :
« Il est si nouveau, que bien peu encore
l'ont pleinement compris. »
« Tu me conduiras par ton
conseil ! s'écrie le Psalmiste ;
puis, tu me recevras dans ta gloire. »
Voilà, nettement formulée pour la
première fois, l'espérance. Elle ne
se détache pas de Dieu. Elle résulte
de la vie qu'il dispense à l'âme qui
se confie à Lui.
« Pourvu que je t'aie, dit le
Psalmiste à son Dieu, que m'importent le
ciel et la terre ! » je renonce
à la perspective du bonheur terrestre, aux
preuves extérieures de ta grâce,
à toute manifestation apparente de ton
amour. Toi, et Toi seul, Tu seras toute ma joie,
toute ma force, toute mon espérance.
Qui a dit cela ? Était-ce un
homme ayant au front la marque d'élection
divine, un prophète ? Ne le croyez
pas : c'était l'âme d'un peuple
opprimé qui s'élevait vers son Dieu.
Ce peuple, ayant conscience de sa vocation divine,
avait vu ses autels profanés, son existence
nationale dissoute, ses rêves d'avenir
évanouis, Alors, il s'est
réfugié dans l'amour de son Dieu pour
ne pas douter de sa justice, et, renonçant
aux récompenses
terrestres de sa fidélité, ne
sollicitant aucune récompense
céleste, il ne demande rien, n'espère
rien, que Dieu seul.
Quand nous voyons qu'avant
l'Évangile, avant la Croix, avant la
Résurrection, avant tout ce qui fait notre
force, des hommes sont parvenus à une telle
hauteur de spiritualité, est-ce que la honte
ne nous étreint pas l'âme ?
Notre Dieu ne nous a pas laissés
dans l'obscurité, réduits, comme les
justes d'Israël, à deviner ses
intentions secrètes. Il nous a
révélé son dessein le plus
profond en Jésus-Christ. Et cependant,
combien il manque à notre foi pour pouvoir
s'écrier : « Pourvu que je
t'aie, que m'importent le ciel et la
terre ! » Vous attendez beaucoup du
ciel et de la terre ; et, quand vous vous
rendez compte que vous n'en obtiendrez pas ce que
vous avez souhaité, il arrive que vous
murmuriez sourdement contre un Dieu qui
néglige de récompenser la
fidélité de ses adorateurs, ou que
vous gardiez le silence découragé de
Job.
D'où vient la faiblesse du
christianisme actuel ? De ce que les
chrétiens ne cherchent plus assez ce que
doivent chercher des hommes religieux, ce qu'ils
cherchent même en dehors du
christianisme : Dieu, et Dieu seul.
Il y a dans la vie de cruels
mystères ; jamais aucun raisonnement ne
les dissipera complètement ici-bas. Mais si
l'on a Dieu, on peut vivre, et
on doit vaincre. N'enviez pas les
éphémères succès de ces
arrivistes sans scrupule qui ne croient pas aux
valeurs spirituelles. Dites-vous qu'en ayant Dieu,
on n'a pas seulement plus : on a tout.
Il faut revenir à ce qui est
l'essentiel de la religion, c'est-à-dire
à ce qu'elle renferme de purement religieux.
Le christianisme est tout autre chose qu'une
morale. Il est cela, assurément : il
est une morale admirable, mais il est d'abord une
religion. Et quand certaines tendances du
protestantisme moderne finissent par ne laisser
pratiquement subsister de la religion que
l'élément moral, elles commettent
à nouveau l'erreur des astronomes
d'autrefois. elles mettent l'homme au centre du
monde, après en avoir ôté
Dieu.
Être religieux, dans la langue de
tous les temps, c'est mettre le centre de sa vie en
Dieu. La religion est un lien d'amour qui
s'établit entre l'homme et Dieu. Telle est
la religion des Psaumes, et aussi la religion des
Évangiles.
Adolphe Monod, sur son lit de mort, la
définit ainsi ; « Dieu nous a
aimés : c'est toute la doctrine de
l'Évangile. Aimons Dieu, c'en est toute la
morale. »
La religion ainsi entendue n'est pas
tout d'abord un lien de fraternité qui nous
unit à l'homme : elle est un lien de
filialité qui nous unit à Dieu.
Dieu nous réclame : il nous
revendique pour lui ; il nous demande de lui
rapporter toutes nos pensées, toutes nos
affections, toutes nos énergies.
En se donnant à nous, il nous
récompense au delà de tout ce que nos
coeurs peuvent imaginer. Songez à la joie
parfaite de saint François, à la joie
de Pascal, quand il s'écrie :
« Oubli du monde et de tout, hormis
Dieu ! »
C'est dans l'absence de communion avec
Dieu que réside le secret de la faiblesse
des Églises d'aujourd'hui. Certes, l'oeuvre
de solidarité humaine est grande, et pour y
suffire, les hommes et les ressources font
étrangement défaut ; mais ce qui
manque le plus aujourd'hui, ce n'est ni l'argent ni
les hommes : c'est le recueillement, c'est la
vie intérieure. Les chrétiens se
placent volontiers sur le terrain de la
philanthropie. Ils y sont bien utiles, ils y
rendent des services que nous ne devons ni
méconnaître, ni
déprécier. Et c'est la place des
disciples de Jésus-Christ. La rivière
va porter aux campagnes l'eau qui les
fertilise ; il n'y a rien de plus beau que de
répandre ainsi la vie. Mais la
première chose est de ne pas laisser tarir
la source de cette action vivifiante.
Un Luther, parmi l'écrasant
labeur de son oeuvre réformatrice,
consacrait chaque jour des heures à la
prière. On a honte de dire cela aujourd'hui,
quand on voit la peine qu'ont les chrétiens
à dérober çà et
là aux occupations
futiles où s'absorbe leur
vie, quelques instants destinés au
recueillement.
Notre attention se porte aujourd'hui
volontiers du côté des grands
inspirés de l'Inde moderne. C'est l'un d'eux
qui, entrant en contact avec des chrétiens,
s'étonnait de l'insuffisance de leurs
recueillements. « Celui qui
préside leurs réunions leur
dit : Entrons en communion avec Dieu. Alors,
je me dis : Maintenant, ils vont descendre
dans le monde intérieur et y
pénétrer longuement. Mais à
peine quelques minutes étaient-elles
passées, qu'ils rouvraient les yeux. Comment
peut-on trouver Dieu après une
méditation aussi
légère ? »
Nous admirons ces mystiques de l'Orient,
qui ont vécu "en Dieu" à tel point,
qu'un de leurs biographes a pu dire :
« Ce Dieu, on le voyait en voyant
l'homme, on voyait l'homme s'y engouffrer, en vous
parlant, comme un baigneur qui plonge et
reparaît au bout d'un instant, tout
ruisselant et rapportant l'odeur de varech, le
goût de sel de
l'océan. »
Il y a là des exemples qui
doivent nous faire rentrer en
nous-mêmes.
Mais, penserez-vous, dans une telle
recherche de Dieu, ne va-t-il pas y avoir une
façon de se détacher de
l'humanité et des devoirs urgents qu'elle
nous présente ?
Il est vrai que parfois, au cours des
âges, certains mystiques ont donné
dans l'égoïsme
spirituel. Le cloître a
été souvent un refuge contre la
faiblesse humaine et contre les dangers d'un monde
impie. Que celui qui y écrivait sur la porte
de sa cellule : « Mon Dieu est mon
tout, » ait exclu de sa vision l'image de
l'humanité, c'est un fait, mais qui
appartient au passé. Aujourd'hui, le danger
n'est plus de ce côté. Et quant
à ce qui est de l'humanité, comment
se peut-il qu'elle soit digne d'amour, si elle
n'est vue en Dieu ?
Dire à Dieu :
« Pourvu que je t'aie, que m'importent le
ciel et la terre », ce n'est pas se
détacher de l'oeuvre qu'il donne à
faire ici-bas ; car le seul moyen
véritablement efficace d'aimer les hommes,
c'est d'aimer Dieu.
Mais il est bien entendu que le Dieu que
nous aimons n'est pas un Dieu lointain. C'est le
Dieu qui se révèle à nous en
Jésus-Christ, et qui, dans l'âme de
Jésus-Christ, nous devient tout proche.
C'est le Dieu qui nous aime et qui souffre pour
nous. Quand on l'aime, ce Dieu, on ne peut faire
autrement que d'aimer ceux qu'il aime. Ne craignez
donc point que Dieu, qui est l'Amour infini, se
mette jamais entre vous et vos frères,
représentants de cette douloureuse
humanité qu'il a voulu sauver. Si vous
pouvez dire : « Je suis toujours
avec Lui », quelle force ceci vous
donnera pour faire part à vos frères
de ce mystère d'amour !
Si Dieu est là, vous pouvez
affronter sans crainte le spectacle du chaos. Vous
direz : « Je sais qu'il
règne, puisque je vis de lui. »
Si, descendant au fond de votre coeur, vous le
trouvez, c'est le ciel qui est là, jusque
dans les pires infortunes. Partout où il y a
un homme qui vit dans la communion du Père,
c'est le ciel. Car le ciel n'est pas une
récompense extérieure ; ses
joies ne sont pas calquées sur les joies de
la terre. Le ciel, c'est l'union intime,
éternelle avec Dieu. Ce n'est pas une
localité lointaine, c'est un état
d'âme présent. Le véritable
croyant ne cherche pas à gagner le
ciel ; il cherche Dieu ; et quand il l'a
trouvé, il ne s'inquiète plus de rien
d'autre : il a le ciel.
C'est dire qu'il n'est pas question de
demander à Dieu une solution
théorique des problèmes de la vie,
non plus qu'une récompense concrète
de notre fidélité. La
récompense qu'il nous donnera, c'est
lui-même. Si vous lui remettez avec confiance
votre destinée, ayant été avec
vous dans les jours de calme, il restera avec vous
dans les jours de tempête.
Quand tout ce qui est de la terre se
retire peu à peu, si Dieu vous reste, rien
n'est perdu, puisque vous retrouverez en lui tout
ce que vous avez aimé, et pour
l'éternité.
La vie, peut-être, aura
déçu vos espoirs : vous ne
regretterez pas ces revers, s'ils vous ont
déterminé à chercher Dieu avec
plus d'énergie, et si,
l'ayant trouvé, il vous reste, alors que
tout passe. Et jusque dans cet
anéantissement de la vie terrestre, vous
pourrez murmurer : « Ma chair et mon
coeur défaillent. Tu es quand même,
ô Dieu, la consolation de mon âme et
mon partage à jamais. »
Table des
matières Page précédente:
Page suivante:
|
|