Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
Cela me suffit...



AVANT L'AURORE
APPEL AUX HOMMES


PRÉFACE

Quelques personnes, dévouées au progrès de la vie morale et membres actifs de la Ligue pour le Relèvement de la Moralité Publique, ont eu l'heureuse pensée de publier une nouvelle édition de l'admirable Appel aux Hommes qu'une femme de grand coeur et de grande piété chrétienne (1) adressait, il y a plus de trente-cinq ans, aux citoyens conscients et réfléchis de la libre Angleterre. Ces personnes ont estimé aussi qu'il était utile « d'introduire » en quelques mots, auprès des lecteurs de langue française, l'auteur lui-même, Mme Joséphine-E. Butler et le très grave sujet auquel ce petit volume est consacré. Je voudrais, sans retenir longtemps l'attention du lecteur, exécuter cette double mission.

Nul, parmi ceux qui se sont intéressés au mouvement abolitionniste, c'est-à-dire à la propagande faite en vue de l'abolition des lois qui, sous prétexte d'hygiène et de sécurité publiques, réglementent la débauche d'un sexe au profit de l'autre, n'ignore le nom de Mme Joséphine-E. Butler. Cette femme, mariée à un directeur d'École de Liverpool, fut l'initiatrice du grand mouvement qui, après seize années de luttes héroïques, obtint enfin l'abrogation de la loi de 1869 relative à la réglementation de la prostitution féminine. Elle-même nous a décrit, en des pages émouvantes, l'angoisse de son âme, pendant ces années 1864-1869, au cours desquelles le Parlement britannique vota successivement quatre lois qui établirent et développèrent un système policier de contrôle sur les femmes qui acceptaient la triste fonction de satisfaire les appétits grossiers de la débauche masculine ; la dernière mesure législative venait, en 1869, d'étendre à dix-huit villes cet étrange régime.

Mme Butler comprit, dès le début, qu'une pareille législation, humiliante et odieuse dans son principe, ne pouvait que contribuer à démoraliser encore et à dégrader ses concitoyens. Elle sentit la rougeur de la honte lui monter au front, et cependant, exemple admirable, elle sut pendant plusieurs années dominer son émotion et se préparer par l'étude, la méditation et la prière, à la grande tâche qu'elle devait plus tard si magistralement accomplir. Enfin, un soir, après un entretien approfondi, M. Butler dit à sa femme : « Allez, et que Dieu soit avec vous ! » et aussitôt l'action fut résolue. Le 1er janvier 1870, l'Association nationale des Dames lançait son fameux manifeste en faveur de la Pureté sociale (social Purity), et, le 7 mars suivant, paraissait le premier numéro du Shield, défenseur éloquent et infatigable de la doctrine de l'unité de la morale pour les deux sexes.

Il n'entre pas dans le plan de cette brève introduction de rappeler les péripéties diverses de cette propagande de seize années où les heures d'épreuve et de découragement furent mêlées aux heures plus sereines de l'espoir et de la paix. Le 16 mars 1886, le Parlement britannique abrogeait la funeste législation de 1869, et le régime légal de la débauche surveillée avait vécu. Depuis cette époque, personne n'a plus réclamé la réglementation de la prostitution féminine et personne n'oserait même formuler pareille réclamation. Le sens de la dignité de la femme est trop développé en Angleterre, pour que l'opinion publique autorise une telle initiative.

Que dire maintenant de la grande thèse si éloquemment soutenue par Mme Butler, dans son Appel aux Hommes, et que d'ailleurs, avant elle et après elle, les âmes éprises de pureté ont toujours proclamée être la seule maxime morale capable de répondre aux aspirations supérieures de la conscience ?

Une seule morale pour les deux sexes : le devoir de la pureté est aussi rigoureux pour l'homme que pour la femme, telle est la double affirmation fondamentale de la morale sexuelle, et il suffit de la formuler pour mesurer aussitôt la navrante opposition qui existe en cette matière entre le fait et le droit.

Si haut que nous remontions dans les annales de l'humanité, en quelques lointains pays que nous allions encore aujourd'hui étudier les peuplades sauvages ou barbares, nous voyons le droit du mâle s'exercer brutalement contre la femme. Objet de propriété que le jeune homme pubère achète au père de famille, esclave soumise aux travaux les plus pénibles et les plus rebutants, bête de somme affectée au transport des plus lourds fardeaux, la femme qui est tout cela, est aussi, trop souvent, « la chair à plaisir » naturellement destinée à la satisfaction des passions sexuelles de l'homme.

« Un Hottentot qui se marie, nous dit un voyageur, trouve à la fois une esclave, une bête de somme et une femme. »

Dans les sociétés moins barbares, la femme, moins écrasée sous le poids des besognes matérielles, reste néanmoins l'objet de volupté dont l'homme dispose à son gré. Jeune fille, on ne semble veiller jalousement sur sa pureté que dans l'intérêt de celui qui sera plus tard son époux ; mariée, on la place sous l'autorité de son maître, qui au besoin la séquestre, pour mieux garantir sa sécurité maritale, et la loi qui omet volontiers de punir l'adultère du mari réprime au contraire avec sévérité, voire avec cruauté, l'adultère de la femme. Veuve, on l'oblige parfois à épouser le frère de son mari, à moins qu'on ne l'immole sur la tombe même de son époux auquel la bienséance ne lui permet pas de survivre. La ruse et la violence, l'autorité publique et l'autorité domestique ou religieuse, tout est employé pour mieux servir les appétits du mâle.

Et plût au ciel que tout cela ne soit que l'histoire du passé ! Dans le présent même de nos sociétés qui prétendent avoir le souci de la justice et de l'égalité, de quelles violations de cette justice et de cette égalité la femme n'est-elle pas la victime ! Telle excellente mère de famille qui rougirait de honte si elle pouvait soupçonner que la moindre pensée impure a effleuré l'esprit de sa fille, admet sans difficulté que son fils n'est pas astreint aux mêmes devoirs. « Il faut que jeunesse se passe ! » De même le nombre est grand des maris qui croient satisfaire au devoir conjugal en gardant « la fidélité de coeur », fidélité sur la valeur de laquelle ils insistent avec d'autant plus de complaisance qu'elle les dispense de l'autre. L'opinion commune, appuyée sur l'assentiment même des femmes, admet ces étranges droits de l'homme !

Cependant, quelques instants de réflexion loyale suffisent à attester que ces affirmations d'une double morale sexuelle ne sont qu'illusions complaisantes entretenues par l'égoïsme, et comme il arrive toujours lorsqu'on est en face d'une grande vérité profonde, puissante par ses racines comme par les ramures qu'elle étend au loin sur l'organisme social, les arguments se pressent pour démontrer la loi souveraine de l'unité de la loi morale pour les deux sexes.

Regardez plutôt ce jeune homme de vingt ans, sorti du peuple ou de la bourgeoisie : s'il est vrai qu'il a droit à la luxure, quelles seront donc les compagnes choisies pour être les instruments de ses plaisirs mauvais ? On a beau refuser d'ouvrir les yeux : la réalité brutale est là, et c'est parce qu'on la sait trop odieuse qu'on ne veut pas la voir. Toute personne qui affirme que le jeune homme a le droit de « s'amuser », postule par là même qu'il doit exister dans la société une masse innombrable de femmes dégradées et déchues, dont la honteuse profession est une souillure inexpiable pour la collectivité tout entière. Qui seront ces femmes prostituées ? Où se recruteront-elles ? Seront-ce nos filles, nos soeurs ?

Non certes, et notre esprit se révolte à la seule pensée qu'une pareille question ait pu être posée. Mais alors ? De quel droit affirmerions-nous qu'il existe dans la société des jeunes filles et des fillettes, plus naïves, ou plus vicieuses, ou plus écrasées par la misère, dont la chute prochaine répondra à un besoin social ? N'ont-elles point comme nos soeurs et nos filles droit à la dignité et au respect, ne sont-elles pas, comme elles, nées d'une femme qui les a enfantées dans la douleur, créées par Dieu à son image, rachetées par le sang du même Christ, appelées aux mêmes destinées éternelles ?

Si leur naïveté les expose au danger, avertissons-les et protégeons-les ; si leurs tendances sont vicieuses, purifions leur coeur et fortifions leur volonté ; si, enfin, elles sont trop pauvres et si chaque jour le labeur est vraiment trop dur pour un salaire trop maigre, protestons contre les injustices de la concurrence et rappelons à la société, qui l'oublie, que le travail normal a droit à un salaire normal. Mais, au lien d'accomplir ces devoirs qui semblaient pourtant n'exiger qu'une vertu commune, nous profitons de la faiblesse pour précipiter dans le gouffre des femmes qui sont incapables de résistance, et les inégalités sociales, dues aux hasards de la destinée, trouvent en nous, non pas d'honnêtes citoyens qui vont s'employer à les redresser et à les corriger, mais des profiteurs égoïstes qui vont les exploiter et les aggraver.

Honteuse conduite, qui n'a même pas l'excuse de la passion et de l'inexpérience, car à côté des jeunes « gamins » qui ignorent toute la gravité de leurs méfaits, une cohorte immense d'hommes de tout âge est là qui exploite aussi pour son propre compte, ou tolère, quand elle ne l'encourage pas, l'exploitation des autres.

N'avons-nous pas en France le système savant de la police des moeurs, que dirigent de « beaux messieurs » aux cheveux grisonnants, et ce qui est pis encore, n'est-il pas vrai que le nombre est immense des maris et des pères que l'opinion publique déclare être des hommes honorables et respectables et dont la jeunesse a cependant été consacrée à des oeuvres d'injustice et de honte ? Ils sont fiers de la vertu de leurs femmes et de leurs filles, ils répètent que la famille et le foyer sont à leurs yeux des institutions sacrées, et cependant aucun remords de leur vie passée ne traverse leur conscience. Ils connaissent les grandes iniquités qui s'accomplissent autour d'eux et ils demeurent inertes ; leurs fils continuent la même oeuvre de mort, et peut-être eux-mêmes y collaborent-ils encore. En tout cas, ils se montrent insouciants ; la nécessaire propagande en faveur de la chasteté et de la morale égale pour les deux sexes ne les regarde pas. Il leur suffit de recevoir le tribut d'estime et de déférence que leur accordent leurs amis et leur entourage ; peu à peu, ils en viennent à le considérer comme légitime. En vérité, ces hommes peuvent-ils être considérés comme d'honnêtes gens ? Ne sont-ils pas plutôt semblables à ces sépulcres blanchis dont parle l'Évangile, et combien Mme Butler a raison de flageller leur hypocrisie !

Si douloureuses que soient les répercussions morales et sociales, sur la destinée de la femme, du faux principe que nous combattons ici, il s'en faut cependant que ce soient les seules. La solidarité qui unit les êtres vivants n'autorise point les prétentions que l'homme pourrait avoir de cantonner la honte et la dégradation en certains compartiments habilement cloisonnés de la vie collective. L'oeuvre perverse qui corrompt la victime corrompt aussi l'auteur, et l'appétit grossier tire avantage des concessions qu'on lui a faites pour exiger toujours davantage. Au fond, pourquoi ne pas l'avouer, notre médiocrité bourgeoise aurait une prédilection marquée pour un régime stable dans lequel les jeunes gens non mariés et même accessoirement les maris, trouveraient la satisfaction commode et exempte de périls de leurs besoins physiologiques. Volontiers, nous concédons que l'inconduite de l'homme doit garder une certaine mesure, mais, cette condition remplie, le désordre cesserait en quelque manière d'être le désordre. On canaliserait le torrent, on cantonnerait la luxure en certains quartiers, voire en certaines maisons, et on pourrait même lui réserver certaines heures de jours déterminés. L'ordre régnerait ; tout serait arrangé suivant un art savant, bourgeois et de tout repos. Ce serait à la fois délicieux et abominable.

Voilà le plan : tournons-nous maintenant vers la réalité. Avec quelle force elle nous atteste qu'on ne fait pas au désordre sa part. L'instinct sexuel doit être dominé, réglé, dirigé vers sa grande fonction de créateur et de pourvoyeur de la vie. Lorsqu'il n'est plus maintenu sous une discipline sévère, son impétuosité a tôt fait de bousculer les fragiles barrières de nos conventions sociales.

Qui donc supputera les désastres causés par le dérèglement des moeurs, dans les rangs de ceux-là mêmes qui pensaient ne retirer que les profits et se croyaient assez habiles pour se préserver des dommages ?

Que de jeunes hommes dont le corps, désormais privé de vigueur et peut-être, pis encore, atteint d'une indélébile infection, ne sera plus qu'une dépouille misérable, inapte au rude effort que nos sociétés démocratiques requièrent de tous leurs membres ! Un jour prochain, ils sentiront eux aussi le besoin d'une affection pure et dévouée, et ils s'uniront par les liens du mariage à une jeune fille dont la vertu contrastera étrangement avec les moeurs faciles des marchandes d'amour. Ils prétendent enterrer la vie de garçon et revêtir l'homme nouveau : étrange illusion, inconcevable folie ! Leur corps débilité ne retrouvera plus sa vigueur d'antan et les enfants malingres porteront dans leur corps la trace même des fautes de leur père. Si, laissant de côté ces considérations, pourtant si graves, de l'ordre physiologique - et la proportion est plus grande qu'on ne croit, des épouses atteintes dans leur santé même - nous nous attachons aux phénomènes de l'ordre moral, nous sommes là aussi témoins des plus lamentables déchéances. L'hypocrisie et le mensonge sont installés au foyer même. Ce mari qui se croit un honnête homme et qui dit aimer et respecter sa femme, lui cache avec un soin jaloux les mauvais exploits de sa vie passée. Il se vante d'avoir réparti sa vie en deux périodes radicalement distinctes, et il ne remarque pas que lui-même est tout imprégné des poisons naguère si allégrement dégustés. Son intelligence, son imagination, son coeur ont subi, pendant de longues années, des influences pervertissantes dont l'effet ne peut plus être éliminé, et jusque dans l'acte suprême de la vie conjugale, les souvenirs honteux viennent émerger de sa mémoire et lui rappeler les contacts impurs.

Souvent on se plaint de la platitude morale et intellectuelle de notre bourgeoisie française ; elle manque d'idéal, de générosité, de vaillance ; bassement attachée aux profits matériels et immédiatement réalisables, elle semble parfois ne plus pouvoir s'intéresser aux grands desseins, servir les grandes causes. Il m'a toujours paru que cette veulerie lamentable avait sa principale cause dans l'inconduite d'un si grand nombre de jeunes gens.

Quoiqu'on dise, les nobles idées de démocratie ou de liberté, de justice, d'égalité, de patrie vraiment aimée et de religion sincèrement professée, ne sont plus capables de faire battre le coeur d'un homme qui, pendant son adolescence, n'a eu d'autre préoccupation que de satisfaire les instincts grossiers de la bestialité.

L'idée ne peut germer et s'épanouir en enthousiasme qu'autant que l'homme a su exercer sur ses appétits un contrôle efficace, et, pour mon compte, j'ai souvent constaté l'impossibilité d'intéresser à une entreprise quelconque de culture supérieure des hommes qui n'étaient point disposés à reconnaître le devoir primordial de la chasteté et de la pureté. Pour se dévouer, il faut croire à l'idéal et avoir foi dans la vie : or, cette foi ne résiste pas à des contacts, prolongés pendant dix et quinze années, avec des compagnons grossiers de plaisirs avilissants. De quel droit prétendrait-on soustraire le développement de la vie morale au régime universel qui est la loi de tout développement ? On n'acquiert de bons muscles qu'en se soumettant à un entraînement rationnel et on n'affine son goût littéraire que par la lecture des grands chefs-d'oeuvre ; ainsi en est-il de la vie morale. Elle aussi a ses conditions précises d'entretien et de développement.

Nos calculs égoïstes voudraient établir des compartiments, et une section au moins de notre vie morale bénéficierait du régime de la licence : l'unité de la personne humaine rend impossibles ces combinaisons et on ne peut être étonné que la violation des disciplines qui doivent régir les organes affectés à la transmission de la vie ait d'indéfinies répercussions. L'amplitude des désordres qui résultent du mauvais fonctionnement d'un organisme, est corrélative à l'importance du service que cet organisme devait remplir : or, quel service est plus important pour la prospérité de la vie sociale que celui de l'entretien même de la vie organique ? Quelle oeuvre d'art, quelle entreprise commerciale peut se vanter d'être aussi belle et aussi féconde que la création même de ce petit être qui, vingt années plus tard, après avoir reçu dans une famille soucieuse de ses devoirs, la virile éducation qui lui est nécessaire, sera à son tour capable de continuer l'oeuvre de la race et le labeur des ancêtres ? La Providence a confié là, aux adultes, une mission d'une souveraine beauté et d'une importance sans égale ; s'ils pervertissent en eux les forces qui devaient s'y employer, cette perversion aura des conséquences d'une souveraine hideur et d'une malfaisance sans égale. Une logique implacable le veut ainsi, et aucun esprit scientifique n'osera protester contre elle.

Il est vrai, nous prétendons, utilisant notre science même, trouver dans nos techniques habiles un moyen d'échapper aux conséquences de nos défaillances morales, et nous entretenons volontiers l'espoir sournois que, devenant plus savants, nous aurons le droit d'être moins vertueux. La science jouerait ainsi, si nos souhaits impies pouvaient se réaliser, le rôle d'une banque d'escompte chargée de nous ouvrir des crédits d'immoralité. Heureusement, notre pouvoir est trop court. Le mal sait, comme le bien, utiliser nos découvertes, et il reculera toujours les limites de sa puissance nocive à mesure que notre pouvoir d'action s'étendra. Depuis un siècle, notre aptitude à lutter contre les conséquences qui découlent du désordre des moeurs s'est admirablement développée, dans tous les domaines, celui de l'hygiène comme celui de l'assistance, celui de la science comme celui des institutions politiques, et cependant les maux innombrables qui résultent de ces moeurs n'ont cessé de croître ; la malice a multiplié ses méfaits et, certes, on n'exagère rien quand on affirme que ceux qui se déclarent partisans des deux morales, reculeraient d'horreur s'il leur était donné de contempler d'un seul regard l'ensemble des maux que l'impureté des moeurs déverse sans relâche sur le monde.

Avec quelle ardeur nous scrutons les secrets de la nature, afin de la mieux dominer ; avec quelle âpreté nous exploitons les ressources nouvelles une fois découvertes ! De ces découvertes, et de cette exploitation, nous attendons des merveilles et, nous oublions qu'il est en nous un instinct à la fois admirable et brutal qu'il faut aussi dominer et dont les débordements sont, presque à eux seuls, responsables de la désorganisation de notre société. Nous inventons les aéroplanes et les dirigeables ; mais hélas ! ce ne sont que nos corps que ces inventions pourront élever dans les airs ; nos coeurs resteront attachés à la terre, enchaînés par les liens de la bestialité, insensibles aux généreuses sollicitations de l'idéal.

Soyons plus purs et devenons « parfaits comme le Père céleste est parfait ». S'il est vrai que pour nous autres hommes, la pureté nous est plus difficile qu'aux femmes et que notre organisme physiologique est partiellement responsable de la violence plus grande de nos instincts sexuels, cette situation ne doit être pour nous qu'une raison supplémentaire d'engager la bataille avec plus de générosité et de vaillance. Si nous sommes plus menacés, redoublons de précautions ; si notre sang est plus souillé, soyons plus vigilants à éviter tout contact impur. Notre devoir est certain, précis, incontestable ; ceignons nos reins et armons-nous de courage. Les récompenses, réservées aux sociétés qui sauront être pures, sont en vérité si splendides, qu'elles dépassent tout ce qui peut être conçu, et nous sommes assurés de voir nos efforts rémunérés au centuple.

Paul BUREAU.


Table des matières


1 Cet Appel a été publié et répandu sous le voile de l'anonyme ; c'est ce qui explique que l'auteur y emploie la forme masculine dans les passages où il est fait allusion à sa personne. - Les éditeurs.

 

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