Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

LES LIVRES DE LA BIBLE.

suite

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DES APOCRYPHES DE L'ANCIEN-TESTAMENT.



On entend par apocryphes, c'est-à-dire cachés, douteux, certains livres reliés quelquefois avec la Bible comme appendice de l'Ancien-Testament, et qui cependant ne font point partie du Volume inspiré.

Quoique compris sous un même nom, ces livres n'ont presque rien de commun entre eux. Les uns sont des écrits moraux ou didactiques, comme l'Ecclésiastique et la Sapience.

D'autres sont des écrits historiques, comme le premier livre d'Esdras et les Maccabées.

D'autres sont des écrits fabuleux destinés à instruire et à intéresser, comme Tobit et Judith.

D'autres encore sont des écrits supposés, mis faussement sous les noms connus d'écrivains sacrés et de prophètes. Par exemple, Baruch, le deuxième livre d'Esdras.

Ou bien de simples additions faites à des livres canoniques, longtemps après leur rédaction. Ainsi Susanne, Bel et le Dragon, le cantique des trois jeunes Hébreux, ajoutés à Daniel; des fragments d'Esther ajoutés au livre de ce nom; la prière de Manassé ajoutée aux Chroniques, etc.

Ces livres diffèrent non seulement par le sujet et par la forme , mais encore par le pays d'où ils proviennent; pour les uns, c'est la Palestine; pour d'autres, l'Egypte; - et pour la langue originale, qui est ici le grec, là l'hébreu, ailleurs le caldéen.

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- Catalogue des apocryphes.

Nous pouvons diviser les livres apocryphes de l'Ancien-Testament en deux classes:

1° livres historiques, savoir:

- deux livres d'Esdras,

- deux livres des Maccabées,

- Judith,

- les additions au livre d'Esther,

- et les divers suppléments au prophète Daniel;

2° livres didactiques ou moraux, savoir :

- Tobit,

- la Sapience,

- l'Ecclésiastique,

- Baruch,

- et la prière du roi Manassé.

 

Nous marquerons d'un astérisque tous ceux qui sont reçus comme canoniques par l'Eglise romaine.

1. Le premier livre d'Esdras, communément appelé le troisième d'Esdras (1). Il n'est regardé comme canonique que par l'Eglise grecque.

2. Le second livre d'Esdras, communément appelé le quatrième d'Esdras. Il est repoussé du canon par toutes les Eglises.

3. * Le livre de Tobit ou Tobie (2).

4. * Le livre de Judith.

5. * Les additions au livre d'Esther.

6. * Le livre de la Sapience ou de la Sagesse, dit de Salomon.

7. * L'Ecclésiastique, nommé autrement la Sapience de Jésus, fils de Sirach.

8. * Baruch.

9. * Le cantique des trois jeunes Hébreux dans la fournaise.

10. * L'histoire de Susanne.

11. * L'histoire de l'idole Bel et du Dragon.

12. La prière de Manassé, roi de Juda. Elle n'a été admise comme canonique que par l'Eglise grecque.

13. * Enfin les livres des Maccabées. Il y a quatre livres qui portent ce nom : les deux derniers sont reconnus comme apocryphes par toutes les Eglises.

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- L'Eglise juive n'a jamais reçu les apocryphes dans le canon.

L'Église juive, à qui les oracles de Dieu ont été confiés (Rom., III, 2), n'a jamais reçu , dans le canon ou recueil des livres sacrés, les apocryphes. Philon, qui connaît ces livres, leur emprunte quelquefois des phrases ou de belles expressions, mais il ne les cite jamais comme ayant une autorité divine ou canonique. Josèphe, dans sa réponse à Appion (livre I, chapitre II) , s'exprime de la manière suivante concernant les livres canoniques et les apocryphes: « Il ne peut, au reste, y avoir rien de plus certain que les écrits autorisés parmi nous, puisqu'ils ne sauraient être sujets à aucune contrariété , à cause qu'on n'approuve que ce que les prophètes ont écrit il y a plusieurs siècles selon la pure vérité , par l'inspiration et par le mouvement de l'Esprit de Dieu.

On n'a donc garde de voir parmi nous un grand nombre de livres qui se contrarient. Nous n'en avons que vingt-deux qui comprennent tout ce qui s'est passé qui nous regarde depuis le commencement du monde jusqu'à cette heure, et auxquels on est obligé d'ajouter foi. Cinq sont de Moïse, qui rapportent tout ce qui est arrivé jusqu'à sa mort durant près de trois mille ans, et la suite des descendants d'Adam. Les prophètes qui ont succédé à cet admirable législateur ont écrit, en treize autres livres, tout ce qui s'est passé depuis sa mort jusqu'au règne d'Artaxerxès, fils de Xerxès, roi de Perse; et les quatre autres livres contiennent des hymnes et des cantiques faits à la louange de Dieu, et des préceptes pour le règlement de nos moeurs. On a aussi écrit tout ce qui s'est passé depuis Artaxerxès jusqu'à notre temps; mais à cause qu'il n'y a pas eu comme auparavant une suite de prophètes, on n'y ajoute pas la même foi qu'aux livres dont je viens de parler. »

Josèphe réduit à vingt-deux le nombre des livres tenus par les Juifs comme divins, et repousse les autres livres, écrits depuis Artaxerxès, comme n'ayant qu'une autorité humaine. Or aucun des livres tenus comme apocryphes ne faisait partie des vingt-deux mentionnés comme divins par Josèphe; d'où il suit qu'ils ne peuvent tomber que dans la catégorie de ces ouvrages auxquels les Juifs n'ajoutaient pas la même foi, parce qu'ils n'avaient pas été écrits par des hommes inspirés.

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- Les chrétiens de l'Eglise primitive n'ont pas reçu les apocryphes comme inspirés.

Les chrétiens n'ont pas à déterminer le canon de l'Ancien-Testament, mais simplement à le recevoir des Juifs, puisque c'est à ces derniers que les oracles de l'Ancien-Testament ont été confiés; ils ne peuvent donc tenir les apocryphes pour inspirés , puisque les Juifs ne les ont jamais reçus comme tels; mais à cette raison décisive nous pouvons en ajouter d'autres :

1° Parce que Jésus-Christ ni les apôtres, qui en appellent souvent aux livres de l'Ancien-Testament, ou à des passages de ces livres, dans les six cents citations environ qu'ils font des livres canoniques, n'ont jamais cité aucun des apocryphes,

2° Parce que les chrétiens des quatre premiers siècles ne les ont pas considérés comme divins, bien qu'ils les lussent dans leurs assemblées comme livres d'édification, si ce n'est en entier, du moins en partie. Il est vrai qu'ils les ont cités en diverses occasions, mais non sans déclarer souvent qu'ils ne leur attribuaient qu'une autorité humaine, et non l'autorité divine d'écrits inspirés; car ils ne les admettaient pas au nombre des écrits canoniques;

3° Parce qu'ils ont été écrits après la cessation de l'esprit prophétique (Mal., IV , 1-6) , et que d'ailleurs leurs auteurs eux-mêmes se présentent à nous comme des écrivains ordinaires (1 Macc., IV, 46; IX, 27. 2 Macc., Il, 20-33 ; XV, 39 ) ;

4° Parce qu'ils enseignent des doctrines d'origine assyrienne ou babylonienne , ou des doctrines qui, sans avoir la même origine, sont opposées à celles des livres inspirés, telles que:

- l'efficacité des prières pour les morts ( 2 Macc. , XII, 43-46 ) ;

- la transmigration des âmes (Sap., VIII, 19, 26);

- la justification par les oeuvres de la loi (2 Esdras, VIII, 33. Tob., XII, 8-9. Ecclés., III, 4, 31 ; XXXV, 3);

- la perfection sans péché (Ecclés., XIII, 28).

- Ils contiennent aussi des fables (Ester, I, 6-10),

- des faits contraires à la droite raison ( 2 Macc., I, 49-22; II, 4);

- et des contradictions historiques.

- Ils recommandent enfin des pratiques immorales, telles que le mensonge, le suicide, le meurtre, les invocations magiques, etc. , etc. , comme nous le démontrerons plus loin.

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- Les Pères de l'Eglise ont aussi repoussé la canonicité des apocryphes.

Les Pères des premiers siècles, unanimes dans leurs témoignages, et d'anciens docteurs de l'Eglise de Rome répètent que les apocryphes ne sont pas les oracles de Dieu.

Méliton, évêque de Sardes, qui avait visité toutes les Eglises de l'Orient, dit que pas une d'elles ne recevait les livres apocryphes. Eusèbe, Origène , Hilaire de Poitiers , Athanase, Cyrille de Jérusalem, Epiphane, Grégoire de Nazianze, Rufin, Augustin (1) , Jérôme, et beaucoup d'autres évêques et docteurs , les répudient d'un commun accord , et déclarent que, comme ils n'étaient pas les oracles de Dieu, ils ne furent pas mis dans l'arche de l'alliance. Jérôme surtout, homme d'étude et de savoir, un des Pères qui ont la plus travaillé sur la Bible et qui, au quatrième siècle, voyagea dans la Palestine pour apprendre l'hébreu, dit expressément: " Nous n'avons pas connu l'économie de notre salut par d'autres que par ceux qui d'abord prêchèrent l'Evangile, qu'ensuite ils mirent par écrit, pour qu'il fût la colonne et le fondement de notre foi. » Puis il nomme tous les livres de cette économie, tant de l'Ancien que du Nouveau-Testament, et ne fait aucune mention des livres apocryphes, si ce n'est pour dire que, s'il a traduit ces fables, ce n'est que pour se prêter aux préjugés du peuple ; mais qu'il les a marqués d'un style (ou stylet), « afin, en quelque sorte, de les égorger. » Nous citerons ici les déclarations remarquables de Jérôme au sujet de chacun des livres que nous nommons apocryphes. Ainsi, au sujet du livre de Tobit, il dit: « Je ne puis assez m'étonner des instances avec lesquelles vous me persécutez pour que je traduise le livre de Tobit, que les Hébreux ont retranché du catalogue des divines Ecritures et mis au nombre de ceux qu'ils appellent apocryphes. »

Au sujet du livre de Judith : « Les Hébreux mettent Judith parmi les apocryphes; j'ai cédé à votre demande, ou plutôt à votre persécution, traduisant toutefois plutôt d'après le sens que mot à mot. »

C'était une manière de dire : « Ce livre ne valait pas la peine que j'y regardasse de plus près. » Quant à la Sapience et à l'Ecclésiastique, il dit. « Arrivé au livre qu'on appelle communément la Sapience de Salomon, et à l'Ecclésiastique, que personne n'ignore être de Jésus, fils de Sirach , j'ai arrêté ma plume, désirant ne corriger pour vous que les Ecritures canoniques, savoir, l'ancienne traduction latine qui en avait été faite.

» J'ai trouvé, ajoute-t-il, le premier de ces pseudépigraphes en hébreu, mais avec le titre de Paraboles, au lieu de celui de l'Ecclésiastique. Quant au second, il n'existe point chez les Juifs, et le style même sent l'éloquence grecque, en sorte que plusieurs auteurs anciens affirment qu'il est du juif Philon.

Ainsi, de même que l'Eglise lit les livres de Judith, Tobit et les Maccabées, mais ne les reçoit pas au nombre des Ecritures canoniques, de même elle peut lire ces deux volumes, mais non pour appuyer sur eux l'autorité des dogmes ecclésiastiques. »

On pourrait trouver beaucoup de citations semblables dans les écrits d'autres Pères de l'Eglise et auteurs ecclésiastiques; car un auteur allemand n'a pas rempli moins de quatre pages de la simple énumération des noms de ceux d'entre eux auxquels on peut en appeler (1). Nous nous bornerons à mentionner le témoignage des autorités suivantes :

Le concile de Laodicée ne les admet point non plus; et je remarque qu'il devient la voix de l'Eglise entière (2).

En Afrique, Augustin nous dit qu'ils ne sont lus que comme livres inférieurs et sans autorité. Au septième siècle, Jean Damascène (si favorable, d'ailleurs, à d'autres opinions de l'Eglise latine), ne compte que vingt-deux livres de l'Ancien-Testament; et, comme Epiphane, il remarque que les apocryphes ne furent pas mis dans l'arche sainte. Et quant aux docteurs romains, deux cardinaux, Cajétan (1639) et Ximénès (1517), et avec eux tous les docteurs d'Alcala (3) , Thomas d'Aquin (1274), Nicolas de Lyra (1660), Pagninus (1527), et bien d'autres, les excluent des Bibles qu'ils impriment ou commentent; enfin, c'est un pape (604) qui « pense, dit-il, n'avoir pas mal agi en citant le livre des Maccabées, quoiqu'il ne soit pas canonique , mais écrit seulement pour l'édification de l'Eglise (1). Dès lors l'Eglise, se corrompant de jour en jour davantage, en admit au fur et à mesure quelques-uns, jusqu'à ce qu'enfin le Concile de Trente, dans sa quatrième session (8 avril 1516), les reçût presque tous dans le code sacré (2).

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- Les apocryphes ne sont point inspirés.

Les apocryphes ne peuvent être inspirés, puisqu'ils renferment des erreurs graves de faits, de doctrine et de morale, et sont souvent en contradiction avec la Parole de Dieu. Nous allons prouver la non-inspiration des livres apocryphes.

 

I. Le premier livre d'Esdras n'est qu'une traduction postérieure de l'Esdras canonique, avec de grands changements d'ordre, et des additions empruntées aux Chroniques (2 Chron., XXXV, XXXVI), à Néhémie (Néh., VII, 8, 12) , puis à des sources moins pures. Ce livre est en général d'accord avec l'historien Josèphe. Il n'a aucun mérite sous le rapport historique.

 

II Le second livre d'Esdras est un ouvrage menteur et mal combiné d'un chrétien du troisième siècle. Il n'existe plus qu'en latin. C'est une série de fausses prophéties, destinées à ranimer le courage des Eglises persécutées. On y trouve l'imitation perpétuelle d'Ezéchiel , de Daniel et d'Esaïe, imitation quelquefois belle, souvent languissante et pauvre.

 

III. On ne sait en quelle languele livre de Tobit a été originairement écrit. On en possède aujourd'hui cinq recensions. La chaldaïque, sur laquelle Jérôme a traduit, diffère considérablement de la grecque. Les autres recensions ne diffèrent pas moins entre elles. Ce fait ne se reproduit pour aucun des livres canoniques; en outre cet ouvrage renferme de nombreuses erreurs géographiques, chronologiques et historiques; il favorise la superstition et la propre justice, et justifie le mensonge.

Nous ferons, en nous en tenant au texte de la Vulgate, quelques citations, qui montreront que ces assertions sont fondées. Il nous est dit que Tobit fut emmené captif dans les jours de Salmanasar, roi des Assyriens, c'est-à-dire vers l'an 720 avant l'ère chrétienne (1, 2). Supposons qu'il fût alors âgé de cinq ans; nous trouverions qu'il ne mourut qu'après avoir atteint un âge d'au moins cent trente-sept ans, puisqu'il survécut à la ruine du temple, survenue cent trente-deux ans après la captivité d'Assyrie sous Salmanasar (XIV, 7). Or, l'auteur, qui sans doute n'avait pas été attentif à ces détails chronologiques, fait mourir Tobit lorsqu'il n'avait encore que cent deux ans (1). On pourrait présenter des remarques analogues sur l'âge de Tobie.

Nous trouvons dans ce livre un personnage qui, vers la fin de l'histoire, dit : Je suis l'ange Raphaël, l'un des sept qui assistent devant le Seigneur (XII, 15), mais qui, au commencement, tient un tout autre langage, et se donne pour un Juif de la tribu de Nephthali (V, 5-7, 15-19).

L'ange et Tobie disent tous deux : Nous sommes de la tribu de Nephthali, de la captivité de Ninive (VII, 3). - Cet ange ne semble guère être un ange de lumière, mais bien plutôt un fils de celui que notre Seigneur appelait menteur et père du mensonge (Jean, VIII, 44) !

Ce soi-disant ange de la face ment encore. quand il dit:

L'aumône délivre de la mort, et c'est elle qui lave les péchés et fait trouver la miséricorde et la vie éternelle. Mais ceux qui commettent le péché et l'iniquité sont les ennemis de leur âme (XII, 9) (1). Car, si cette doctrine était vraie, il serait vrai aussi qu'il y a deux moyens de se sauver : l'un par les aumônes, l'autre par le sang de Jésus-Christ; ce qui est contraire à tout l'enseignement des Ecritures.

 

IV. Le Livre de Judith fourmille aussi de difficultés chronologiques, géographiques et historiques; en outre, la morale en est anti-évangélique; car l'héroïne du livre, qui, du commencement à la fin, est donnée en exemple, n'est qu'une trompeuse qui voudrait nous faire croire que Dieu était d'accord avec elle pour bénir sa fausseté (IX, 10, 13).

Elle se glorifie aussi de ce qu'elle a su tromper Holopherne, et elle attribue au Seigneur une part dans son péché (XIII, 19, 20). - Le Psalmiste, inspiré par l'Esprit de Dieu, nous enseigne d'une manière bien différente:

Garde ta langue de mal, et tes lèvres de parler avec tromperie (Ps. XXXIV, 11).

Les paroles de Judith ne sont pas moins en opposition avec les déclarations du saint Livre. Elle dit que c'est Dieu lui-même qui mit entre les mains de Siméon l'épée avec laquelle il répandit le sang des Sichémites (IX, 2) ; or, nous voyons que Jacob, inspiré par l'Esprit de Dieu, maudit l'acte de Siméon, et appelle l'épée dont son fils se servit un instrument de violence (Gen. , XLIX, 5- 7). -

Et Judith ose dire : Seigneur, Dieu de mon père ils ont été enflammés de ton zèle (IX, 3) !

L'auteur du livre de Judith est inconnu ; il écrivit probablement au temps des rois de Syrie , successeurs d'Alexandre. On ne peut décider si ce fut en grec ou en chaldéen.

 

V. Les additions au livre d'Esther ne se trouvent pas dans l'original (l'hébreu); elles ont été intercalées, par une main bien maladroite, dans la traduction grecque des Septante, d'où elles ont passé dans la Vulgate (X, 4-XVI, 24). Ces fragments devraient être repoussés lors même qu'ils n'auraient rien de contraire aux Ecritures; car si l'auteur du livre d'Esther a été inspiré, il a dû savoir tout ce qu'il convenait de dire et de mettre dans le livre. qu'il a écrit; ce livre n'a donc pas besoin de supplément. Mais il est à remarquer que les prétendues additions ne sont pas autre chose qu'une mauvaise composition dans laquelle on n'a pas même su éviter les plus flagrantes contradictions avec le texte sacré (1). En effet, dans la Vulgate, Mardochée est déjà au service d'Artaxerxès, la deuxième année de son règne (XI, 2); dans le texte hébreu, il n'obtient de place à la cour que la septième année de ce règne (II, 16, 19). Dans l'hébreu, il est dit que Mardochée ne reçut aucune récompense pour avoir révélé le complot des deux eunuques ,VI, 3) ; dans la Vulgate, l'auteur prétend le contraire ( XII, 5). Dans l'hébreu, il est rapporté que le roi regarda Esther avec bonté (V, 2) ; dans la Vulgate, qu'il la regarda avec colère (XV, 10). Enfin, dans la Vulgate, Haman veut se venger de Mardochée parce que Mardochée a révélé la conspiration des deux eunuques Bigthan et Térès (XII, 6) ; dans l'hébreu, c'était parce que Mardochée refusait de se prosterner devant lui (III, 5).

Il y a bien d'autres erreurs; par exemple, dans la Vulgate, il est dit : Or, Mardochée était du nombre des captifs que Nabuchodonosor, roi de Babylone, avait transférés de Jérusalem, avec Jéchonias, roi de Juda (XI, 4). En conséquence, au temps du roi Artaxerxès, il devait être âgé d'au moins cent quarante ans, et Esther d'au moins cent ans, puisqu'elle était cousine germaine de Mardochée .....

 

VI. La Sapience de Salomon n'est pas de ce roi, quoiqu'elle le prétende dans son titre et ailleurs (VIII, 8-24 ; IX, 4). C'est un livre écrit par quelque Juif alexandrin. La sagesse qui s'y fait entendre n'est pas autre que celle de la philosophie alexandrine. Elle est prétentieuse, tandis que celle des Proverbes est humble (Prov., XXX, 2). Ecoutons, par exemple, le prétendu Salomon qui parle : Dieu ,m'a fait la grâce de pouvoir dire ce que je veux, de faire des discours selon les choses qui me sont données tellement que je connais toutes choses, tant secrètes que manifestes; car l'ouvrier de toutes choses m'a enseigné par la sagesse (VII, 17-21 ).

Conformément à la philosophie platonicienne , en vogue à Alexandrie, qui croyait que l'âme préexiste au corps, et qu'elle y entre avec de bons ou de mauvais antécédents, l'auteur dit : Or, j'étais un enfant bien né, et une bonne âme m'était échue; ou plutôt, étant bon, je suis entré dans un corps sans souillure (VIII, 19-20).

 

VII. L'Ecclésiastique est le titre insignifiant d'un livre mieux connu en grec. la Sagesse de Jésus, fils de Sirach; ouvrage composé en hébreu 175 ans avant l'ère chrétienne, et traduit en grec par le petit-fils de l'auteur. Il est dicté par une sagesse mondaine qui ne contredit que trop souvent celle des Ecritures authentiques, L'auteur déclare heureux le père qui laisse après lui un fils qui le vengera de ses ennemis (XXX, 6), tandis que la Parole nous dit que nous devons laisser à Dieu la vengeance (Deut., XXXII, 35. Ps. XCIV, 1. Rom., XII, 19).

Il enseigne encore à agir d'une manière dénuée d'affection et pleine d'égoïsme , dans le cas du décès de quelque ami (XXXVIII, 16-22). Nous ne trouvons pas autre chose que cette sagesse qui dit : Mangeons et buvons, car demain nous mourrons (XIV, 11 -17). Enfin, il enseigne le panthéisme : L'abrégé de ces paroles est: Dieu est tout (XLIII, 29).

 

VIII. Le livre de Baruch est un assemblage mal lié de deux écrits très distincts. D'abord, des prophéties mises sous le nom de Baruch, secrétaire de Jérémie, et précédées d'une introduction historique, puis une prétendue lettre de Jérémie aux captifs de Babylone. Ces deux parties paraissent avoir été écrites assez tard. Le livre de Baruch est pour nous sans importance. Il est plein d'inexactitudes et de contradictions. Ainsi, l'auteur représente Baruch à Babylone, tandis que, d'après les écrits canoniques, Baruch s'est rendu avec Jérémie en Egypte; il prétend que son livre fut lu à Jérusalem, devant le roi Jéchonias (I, 3) ; mais, à cette époque, ce roi était prisonnier hors de son pays (2 Rois, XXV, 27), où il ne revint qu'au temps d'Evilmérodac.

 

IX. Les versions grecques, et d'après elles la Vulgate, et les traductions modernes faites sur la Vulgate, renferment dansle livre des prophéties de Daniel quelques fragments qui se rattachent à la vie de ce prophète. Ce sont:

1° le cantique des trois jeunes Hébreux dans la fournaise (Vulgate, III, 24-90 ); 2° l'histoire de Susanne (Vulgate, XIII) ;

3° l'histoire do l'idole Bel et du Dragon. Celle-ci forme dans la Vulgate le XIVe chapitre de Daniel.

Ces additions ne méritent pas plus de confiance que celles du livre d'Esther. D'après le texte hébreu, Daniel est jeté dans la fosse aux lions, parce qu'il a agi contrairement aux ordres du roi (VI, 11-16) ; d'après les additions, parce qu'il a détruit Bel et le Dragon, et mis à mort des prêtres des idoles (Vulgate, XIV, 27-29). D'après le texte hébreu, il fut une nuit dans la fosse (VI, 18-23) ; d'après les additions, sept jours (Vulgate, XIV, 39).

 

X. La prière de Manassé, pénitent, ajoutée aux Chroniques (2 Chron., XXXIII, 13, 18) dans quelques manuscrits grecs, semble être l'ouvrage d'un pharisien. - Il n'en a été fait mention que dans le quatrième siècle de l'ère chrétienne.

 

XI . Jadis on a regardé comme canoniques tantôt un, tantôt deux ou trois, ou même quatre livres des Maccabées. Le quatrième est perdu. Les trois autres sont de mérites très divers, et d'auteurs bien différents.

1° Le premier est une histoire des persécutions souffertes par les Juifs, de l'an 175 avant Jésus-Christ, à l'an 135. Cette histoire a été écrite après l'événement, en hébreu, par un Juif connaissant très bien son pays, et très mal les nations étrangères. Il a quelque valeur historique.

2° Le second raconte les mêmes évènements, et de plus, la profanation du temple par Séleucus Philopator. C'est, du moins en grande partie, l'ouvrage d'un auteur inconnu, sûrement postérieur à Jésus-Christ. Cet écrivain trahit une extrême ignorance de l'histoire profane. Il contredit le premier livre des Maccabées, il contredit également des lettres officielles, peut-être authentiques, placées en tête de son ouvrage , mais probablement par une main étrangère. Il a beaucoup moins de valeur historique que le premier livre.

Ces livres abondent tous deux en inexactitudes et en contradictions aussi bien que les autres apocryphes. On fait régner Darius sur la Grèce ( 1 Macc., 1, I , texte grec) , ce qui est contraire à l'histoire. Alexandre partage de son vivant son royaume à ses généraux (1 Macc., I, 6), ce qui est aussi contraire à l'histoire. On prétend à tort qu'Antiochus fut fait prisonnier par les Romains (1 Macc., VIII, 7, 8).

Il y a un ramassis d'assertions fausses (1 Macc., VIII, 4-16). D'autres portions sont tout-à-fait fausses (1 Macc. , X, 4 ; XII, 7). Enfin, ces livres se contredisent entre eux, comme on peut le voir en comparant divers passages (1 Macc., VI , 47, avec 2 Macc. ., X, 11 ; 1 Macc., VI, 30, avec 2 Macc., II, 11, 13 ; 1 Macc., VII, avec 2 Macc., XIV, 45; 1 Macc., VI, 8-13, avec 2 Macc., 1, 13 et suivants). Ils font mourir le même roi de trois manières différentes ( 1 Macc., VI, 16. 2 Macc., I, 16 ; IX, 28). Le suicide est loué (2 Macc., XIV, 52), en opposition à la Parole de Dieu , qui dit - Tu ne tueras point (Exode, XX, 13).

3° Le troisième rapporte des évènements antérieurs aux deux précédents , savoir, l'entreprise de Ptolémée, Philopator contre le temple de Jérusalem et contre les Juifs d'Alexandrie. L'auteur ne peut être qu'un Juif égyptien, au style mystique et emphatique. Ce livre, plus fabuleux qu'historique, n'a été connu qu'assez tard de l'Eglise grecque, et n'a jamais été reçu par I'Eglise latine.

4° Le quatrième racontait les exploits de Jean Hyrcan, 135-107 ans avant Jésus-Christ.

Si l'on voulait placer ces quatre livres selon l'ordre chronologique des évènements, ils se suivraient ainsi :

- 1 ) le troisième livre;

- 2) le second livre;

- 3 ) le premier livre,

- 4) et, enfin, le quatrième livre ; mais il n'existe entre eux aucune liaison ni aucune suite.

 

Les fausses doctrines et les contradictions contenues dans les apocryphes prouvent à l'évidence que ces livres ne peuvent être le langage de l'Esprit de vérité, de sagesse et de sainteté : savoir, la Parole même de Dieu!

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