Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

CHAPITRE II

suite

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115. Parabole des dix vierges.

(Matth. XXV, 1-13.)


 La parabole des dix vierges ne s'occupe que des disciples de Jésus, c'est-à-dire des croyants. Alors le royaume des cieux sera semblable à dix vierges, qui, ayant pris leurs lampes, allèrent au-devant de l'époux. Chaque chrétien est considéré comme une vierge qui s'est donnée au Seigneur et qui lui reste fidèle. Déjà dans l'Ancien Testament, la relation du Dieu de l'alliance avec son peuple, était représentée sous l'image de l'union des fiancés et des époux. L'abandon de Dieu, l'idolâtrie est appelée tout simplement adultère et impureté, comme par exemple au Psaume LXXIII : « Tu retrancheras tous ceux qui se détournent de toi », (littéralement ceux qui commettent l'impureté). Les vierges sont donc les âmes qui aiment Jésus, et qui ont obtenu le pardon de leurs péchés. Dix est le nombre complet, parfait, qui fait penser à la plénitude des croyants.

Cette parabole nous montre le fiancé descendant du ciel et venant chercher sa fiancée ornée et parée pour la conduire dans la salle des noces. Mais le Seigneur veut nous montrer spécialement qu'il n'admettra à ce banquet que ceux qui s'y sont préparés intérieurement. Et cette préparation consiste surtout à aspirer ardemment à entrer dans la communion du Seigneur et à aller au-devant de lui avec une lampe allumée. La parabole ne parle pas de la fiancée, mais seulement des vierges qui l'accompagnent. Cette fiancée n'est d'ailleurs autre que l'assemblée de tous les croyants. On ne pouvait donc pas parler de sa sagesse et de sa folie ; c'est pourquoi le Seigneur parle ici de plusieurs vierges et non d'une seule fiancée. Cependant, ces vierges représentent aussi les âmes fiancées au Sauveur. Les sages participent à la félicité du fiancé, car elles entrent dans la joie de leur Seigneur. De fait, on ne peut distinguer les vierges d'avec la fiancée. Seulement, en parlant de celle-ci, on a plutôt en vue l'Église, tandis que les dix vierges représentent plutôt chacune des âmes dont l'Église se compose.

Or, il y en avait cinq d'entre elles qui étaient sages et cinq qui étaient folles. Celles qui étaient folles, en prenant leurs lampes, n'avaient pas pris d'huile avec elles ; mais les sages avaient pris de l'huile dans leurs vaisseaux avec leurs lampes. La sagesse des sages consistait en ceci : C'est qu'outre l'huile qui alimentait leurs lampes, elles en avaient fait une provision dans leurs vaisseaux. Les folles avaient négligé cette précaution, se contentant de l'huile qui remplissait leurs lampes pour le moment. Dans les Écritures, l'huile est toujours l'image du Saint-Esprit. Les lampes représentent les coeurs ; car, comme l'huile est versée dans la lampe, de même le Saint-Esprit est versé dans les coeurs des croyants. - Les vaisseaux dont les vierges sages étaient munies, étaient remplis d'huile comme les lampes, mais d'une autre manière. Car l'huile qui est dans les vaisseaux n'est pas destinée à brûler et à éclairer immédiatement, comme celle qui est dans les lampes. Avant d'en faire usage, il faut qu'on la verse des vaisseaux dans les lampes, c'est-à-dire dans les coeurs. Si donc les lampes sont des véhicules humains (subjectifs) du Saint-Esprit, les vaisseaux en sont les véhicules objectifs.

Depuis l'effusion dit Saint-Esprit, qui eut lieu le jour de la Pentecôte, l'huile n'est plus versée directement d'en haut dans les coeurs des croyants. Mais le Dieu qui est appelé un Dieu d'ordre (l Cor. XIV, 33) a institué des moyens de grâce, la Parole et les sacrements, comme des vaisseaux remplis du Saint-Esprit, desquels l'huile est versée dans les lampes, c'est-à-dire dans les coeurs. La précaution que prirent les vierges sages de ne pas laisser leurs vaisseaux dans quelque coin, ni même dans le sanctuaire, mais de les emporter et de les garder avec elles, est le signe distinctif de toutes les âmes qui savent que l'huile de leurs lampes s'épuisera peu à peu, et qu'elles doivent en puiser toujours de nouveau, si elles veulent les empêcher de s'éteindre. Elles reconnaissent la Parole de Dieu et les sacrements, comme les véhicules du Saint-Esprit, et lorsqu'elles répètent celle prière : « Ne laisse pas s'éteindre la lumière de ma foi », elles ne s'attendent pas à ce que le ciel s'ouvre à leurs prières, et que le Saint-Esprit descende sur elles sous la forme d'une colombe ; mais elles prennent en mains, avec foi, la cruche d'huile de la Parole de Dieu et des sacrements, et sont assurées que ces vaisseaux versent volontiers leur contenu dans leurs coeurs.

Les vierges folles, au contraire, sont dépourvues de prévoyance et croient pouvoir entretenir et rafraîchir leur vie spirituelle par le seul souvenir de leurs expériences intérieures. Elles ont conscience, de leur foi, et ce sentiment les rend heureuses et les satisfait, en sorte qu'elles oublient leurs péchés et leurs faiblesses, et négligent les grâces qui s'offrent chaque jour à elles. - Les vierges folles sont, comme les sages, engendrées par la Parole de vie, mais cette semence est tombée sur le roc. Elle leva promptement et eut d'abord un développement réjouissant. Elles crurent pendant quelque temps, mais au moment de la tentation elles succombèrent.

Les sages vivent de la Parole de Dieu, et leur âme est comme un arbre planté près des ruisseaux d'eau courante, qui porte son fruit en sa saison et dont le feuillage ne se flétrit point, et tout ce qu'elles entreprennent réussit (Psaume 1, 3). Leurs lampes ne s'éteignent point, parce que ces vierges se sont reconnues comme de pauvres pécheresses qui ne peuvent garder la foi ni par leur propre intelligence ni par leurs propres forces, et qui, à cause de cela, se ménagent toujours une nouvelle provision d'huile. Alors le coeur chrétien s'identifie toujours davantage avec la Parole de Dieu. tellement que tous ses sentiments, toutes ses pensées, tous ses désirs, et toutes ses aspirations sont remplis des puissances du siècle à venir. Alors aussi se vérifie pour lui ce que le Seigneur dit à la Samaritaine, en lui parlant du Saint-Esprit sous l'image de l'eau vive : « Celui qui boira de l'eau que je lui donnerai n'aura plus jamais soif, et l'eau que je lui donnerai deviendra en lui une source d'eau qui jaillira jusqu'à la vie éternelle. - Tout en puisant journellement à cette source, le coeur croyant sent de plus en plus son indigence ; mais c'est précisément ce sentiment qui le rend plus certain de la grâce qu'il a obtenue. Et lorsqu'il voit chaque jour, avec honte et douleur, combien il est rempli de péchés, alors il recourt à la cruche d'huile de la sainte Cène, dont il use avec un saint empressement. Et au moyen de ces provisions sans cesse renouvelées aux vaisseaux d'huile qui, comme au temps d'Élie, ne s'épuisent jamais, bien qu'on y puise sans cesse, la précieuse oeuvre de la grâce s'accomplit, savoir : l'affermissement du coeur. Sans cet approvisionnement un roseau agité çà et là par le vent de ses propres inspirations. Ainsi la sagesse des vierges sages se fait connaître par un désir continuel de croître dans la grâce, par une méditation diligente de la Parole de Dieu, par une fréquentation régulière du service divin, et par un grand zèle à participer à la Sainte-Cène. Ces coeurs veulent être toujours davantage ce qu'ils sont déjà : des coeurs croyants.

Et comme l'époux tardait à venir, elles s'assoupirent toutes et s'endormirent. L'Époux viendra inopinément comme un larron pendant la nuit. Mais pour le brûlant désir des âmes qui l'attendent, il vient toujours trop lentement. Il tarde, et les croyants s'assoupissent et s'endorment. La vie de la foi devient languissante et tiède, même chez les vierges sages, et chez plusieurs l'amour pour Jésus se refroidit. Par ses nombreux combats et ses tentations, l'âme se fatigue. Le premier amour s'est calmé, le feu du premier zèle s'est alangui. On s'est habitué à vivre dans les pensées de paix que procure l'assurance du salut. On a cessé d'y travailler avec crainte et tremblement. On ne croit plus nécessaire de se faire violence pour ravir le royaume des cieux. On n'a plus hâte de sauver son âme. Et comme on a cessé de combattre jusqu'au sang contre le péché, ou n'apporte plus ni ardeur ni ferveur dans ! a prière. On n'éprouve plus aucune crainte à fréquenter le monde. On ne travaille plus à le vaincre ; ou cherche plutôt à vivre en paix avec lui, ce qui est impossible.

Le fait que le Seigneur nous dit que même les vierges sages s'endormirent, est une preuve de sa bonté et de son amour pour les pécheurs, qui n'éteint pas le lumignon qui fume encore. C'est de cette même bonté qu'il usa en Gethsémané envers ses disciples endormis, lorsqu'il leur dit : Veillez et priez, de pour que vous ne tombiez en tentation, car l'esprit est prompt, mais la chair est faible. Je pense que tous ceux qui se seront laissé réveiller par cet appel à la vigilance, et auxquels il sera permis d'accompagner l'Époux dans la salle du festin, lui rendront encore grâces d'une manière toute particulière devant le trône de sa gloire pour cette bonté, qui doit être pour notre âme une puissante défense contre le découragement et l'incrédulité. Cette bonté et cette patience du Seigneur sont notre félicité.

Et sur le minuit ou entendit crier : Voici l'Époux qui vient, sortez au-devant de lui. On ne saurait douter que la venue du Seigneur, dont il est question ici, ne marque le moment où il reviendra pour juger le monde ; mais ces paroles doivent aussi nous rappeler le terme de notre propre vie. Puisse aucun de nous ne manquer, lorsque le gardien fera entendre ce cri de l'amour : « Prépare-toi pour le festin ; il faut que tu ailles au-devant de l'Époux ! » - Alors les vierges se levèrent toutes et préparèrent leurs lampes. Toutes se réveillent. Les folles sont effrayées d'être tirées de leur sommeil. Les sages, au contraire, sont heureuses d'être délivrées de leur pénible engourdissement. Toutes préparent leurs lampes, mais les sages seules peuvent faire luire les leurs. Les folles font de vains efforts pour obtenir le même résultat. Leurs lampes s'éteignent parce qu'elles manquent d'huile. Terrible état de ces âmes, qui ont été une fois illuminées, qui ont vécu dans la communion de l'Époux, et qui sont devenues ténèbres et ont perdu le Saint-Esprit ! - Et les folles dirent aux sages : Donnez-nous de votre huile, car nos lampes s'éteignent. Jusqu'ici, il eût été difficile de faire la différence entre les vierges folles et les sages. Mais maintenant les folles se reconnaissent elles-mêmes comme telles à leur grande frayeur. Elles sentent que leur état spirituel ne leur permet pas de paraître devant l'Époux. Leur lumière s'éteint. Il fait sombre dans leurs coeurs et devant leurs yeux. Auparavant elles avaient le sentiment d'être rassasiées et riches ; maintenant elles sentent le manque absolu de consolations et de forces. Toute leur vie elles ont espéré dans le Seigneur et sont allées au-devant de lui, et maintenant qu'elles doivent le voir et remporter le prix de leur foi, elles s'aperçoivent avec effroi qu'elles sont privées de la vertu et même de la présence du Saint-Esprit.

Ce qui leur manque, elles le voient clairement en regardant les vierges sages. Elles les avaient peut-être dédaignées jusqu'alors. Lorsqu'elles les voyaient recueillir de l'huile avec tant de zèle, se garder avec soin des souillures du monde, elles les considéraient probablement comme des personnes bornées. Maintenant elles reconnaissent avec angoisse qu'elles-mêmes ont agi follement, tandis que leurs compagnes ont été prudentes. Leur folie a aussi été un levain qui a fait lever toute la pâte. C'est cette folie qui est cause qu'elles se sont contentées de leur provision d'huile, si vite épuisée, dans l'espoir insensé de pouvoir en trouver en elles-mêmes. Cette même folie les pousse maintenant à s'adresser à leurs soeurs pour obtenir d'elles l'huile qui leur manque. Elles s'appuient sur le bras de la chair. Que ce soit là le sens de leur demande, c'est ce qui ressort de la réponse que le Seigneur met dans la bouche des vierges sages : Nous ne le pouvons, de peur que nous n'en ayons pas assez pour vous et pour nous. Car, ordinairement, parmi les chrétiens qui sont les oints du Seigneur, il y a une communication mutuelle de dons spirituels, afin que la foi en soit fortifiée.

C'est précisément une telle communication qui doit augmenter la plénitude de l'Esprit chez ceux qui donnent et chez ceux qui reçoivent. En effet, d'après la promesse du Seigneur, des fleuves d'eau vive doivent découler du corps des croyants. Or, ceux-ci ne seront pas appauvris par cet écoulement. Ils en seront au contraire, enrichis. Dans le règne de Dieu, on ne s'appauvrit pas en donnant, surtout quand il s'agit de dons spirituels. Au contraire, plus on donne, plus on peut donner. Par conséquent, lorsque les vierges sages expliquent aux folles qu'elles ne peuvent pas leur donner de leur huile, de peur d'en manquer elles-mêmes, cela ne peut signifier que ceci : C'est que les folles voudraient s'approprier la vie spirituelle pleine de foi des sages, et en profiter, sans avoir elles-mêmes besoin de se nourrir de la Parole de Dieu, sans être obligées de crucifier le vieil homme avec ses passions et ses convoitises, sans livrer les rudes combats de la sanctification. Mais cela ne se peut pas. Notre chair ne peut pas être tuée par une repentance étrangère, pas plus que nos péchés ne peuvent nous être pardonnés par la foi d'autrui. Les relations de l'âme croyante avec le Seigneur sont absolument personnelles, et ne peuvent pas profiter aux autres.

Allez plutôt vers ceux qui en rendent et en achetez. Par ceux qui en vendent, il faut entendre ceux qui enseignent la Parole de Dieu, les apôtres, les prophètes, qui conduisent les âmes à l'Époux. C'est l'explication la plus naturelle. Mais pendant qu'elles en allaient acheter, l'Époux vint ; et celles qui étaient prêtes entrèrent avec lui aux noces, et la porte fut fermée : Les sages étaient prêtes parce que leurs lampes, pleines de l'huile sainte, étaient allumées, parce que, malgré leur pauvreté spirituelle, le Saint-Esprit plaidait leur cause devant le Seigneur, par des soupirs qui ne se peuvent exprimer. Alors la porte fut fermée par la main de celui qui ferme et personne n'ouvre.

Après cela, les autres vierges vinrent aussi et dirent : Seigneur, Seigneur, ouvre-nous. Mais il répondit : Je vous dis en vérité que je ne vous connais point. Ordinairement la voix de l'épouse est agréable à l'époux lorsqu'elle s'écrie : Que mon bien-aimé vienne dans son jardin et qu'il mange de ses fruits délicieux. (Cant. des Cant. IV, 16). Et lorsque l'Esprit et l'épouse impatiente disent : Seigneur Jésus, viens, il répond avec joie : Oui, je viens bientôt. Mais le « Seigneur, Seigneur » des vierges folles, avec leurs lampes ne plaît point à l'Époux ; car personne ne peut dire que Jésus est le Seigneur que par l'onction de l'Esprit. Il est vrai que toute langue doit le confesser comme le Seigneur, et tout genou se ployer à son nom ; mais ceux qui ne le feront pas avec des coeurs tremblants de joie, le feront en tremblant d'angoisse et demeureront exclus de la salle des noces pour l'éternité. Les vierges folles se présentent sans huile devant la porte de cette salle. Les mouvements de l'Esprit ont cessé ; l'amour s'est refroidi ; le gage de la fidélité est perdu. Aussi le Seigneur ne les reconnaît pas. Il y eut un temps où elles confessaient le Seigneur de coeur et de bouche, où elles avaient fermé leurs coeurs aux attraits du monde. Et maintenant elles sont exclues pour toujours des joies du banquet nuptial ! Quelle terrible fin !



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116. Le jugement dernier.

(Matth. XXV, 31-46.)


 Après avoir exhorté ses disciples à la vigilance, le Seigneur dirige leurs regards vers le jugement qu'il exercera lors de son avènement. Or, quand le Fils de l'homme viendra dans sa gloire avec ses saints anges, il s'assiéra sur le trône de sa gloire. Et toutes les nations seront assemblées devant lui ; et il séparera les uns d'avec les autres, comme un berger sépare les brebis d'avec les boucs. Et il mettra les brebis à sa droite et les boucs à sa gauche. Ainsi il y aura encore un jugement universel et public dans lequel toute l'humanité comparaîtra devant Christ son Sauveur, son Roi et son Juge. Car le Sauveur du monde est aussi son juge. Et le jugement sera prononcé en raison des dispositions du coeur de chacun envers sa personne.

Alors le Roi dira à ceux qui sont assis à sa droite : Venez, vous les bénis de mon Père, possédez en héritage le royaume qui vous a été préparé depuis la création du monde ; car j'ai eu faim et vous m'avez donné à manger ; j'ai eu soif et vous m'avez donné à boire ; j'étais étranger et vous m'avez recueilli ; j'étais nu et vous m'avez vêtu ; j'étais malade et vous m'avez visite ; j'étais en prison et vous êtes venus me voir. Alors les justes répondront : Seigneur, quand est-ce que nous t'avons vu, avoir faim et que nous t'avons donné à manger ? Ou avoir soif et que nous l'avons donné à boire ? Et quand est-ce que nous t'avons vu étranger et que nous t'avons recueilli, ou nu, et que nous t'avons vêtu ? Ou quand est-ce que nous t'avons vu malade et que nous t'avons, visité, ou en prison et que nous sommes venus te voir ? Et le Roi leur répondant leur dira : Je vous dis, en vérité, qu'en tant que vous avez fait cela à l'un de ces plus petits d'entre mes frères, vous me l'avez fait à moi-même. Jésus se regarde comme un malade dont les souffrances dureront jusqu'à la fin du monde ; car tout le mal qui arrive à ceux qui croient en lui, le fait souffrir lui-même. La tête ressent toutes les douleurs des membres. Ainsi, les croyants ont en tout temps l'occasion de témoigner, par des actes, de leur foi en leur Sauveur et de leur amour pour lui. Personne, sans doute, ne peut mériter la félicité éternelle, par les oeuvres d'un miséricordieux amour. Car cette félicité n'est pas une récompense, elle est un héritage. Elle nous est accordée comme un don de la grâce. Toutefois, lorsque nous croyons de coeur en lui, c'est un besoin pour nous de lui montrer, par des actes, notre reconnaissance et notre amour. Car si la foi n'est pas agissante par la charité, elle est morte. La foi sans les oeuvres est morte, mais aussi, réciproquement, les oeuvres sans la foi sont mortes.

Plusieurs diront en ce jour-là : « Seigneur, Seigneur, n'avons-nous pas fait plusieurs miracles en ton nom ? » Mais il leur répondra : « Je ne vous ai jamais connus. » Et l'apôtre Paul nous dit que donnât-on tous ses biens aux pauvres, sans la foi en Jésus, cette générosité n'a aucune valeur devant Dieu. C'est pourquoi ces deux choses marchent inséparablement unies : une foi vivante et des oeuvres de charité. Or, nous pouvons reconnaître si notre charité est de bon aloi, en la comparant à celle des élus qui sont à la droite de Christ. Ils demandent avec étonnement quand ils ont témoigné leur amour au Sauveur. Ils n'en savent rien ; mais le Seigneur le sait. Celui qui, au nom de Jésus, traite avec amour ceux qui ont faim ou soif, qui sont malades ou étrangers ou prisonniers, sa main droite ignore ce que fait sa gauche. L'oeil de l'humilité ne se voit pas lui-même.

Ensuite, il dira à ceux qui sont à sa gauche : Retirez-vous de moi, maudits, et allez dans le feu éternel préparé au diable et à ses anges. Car j'ai eu faim, et vous ne m'avez pas donné à manger ; j'ai eu soif et vous ne m'avez pas donné à boire ; j'étais étranger et vous ne m'avez pas recueilli ; j'étais nu et vous ne m'avez pas vêtu ; j'étais malade et en prison et vous ne m'avez pas visité. Et ceux-là lui répondront aussi : Seigneur, quand est-ce que nous t'avons vu avoir faim, ou soif, ou être étranger, ou nu, ou malade, ou en prison et que nous ne t'avons pas assisté ? Et il leur répondra, : Je vous dis, en vérité, qu'en tant que vous ne l'avez pas fait à l'un de ces plus petits, vous ne me l'avez pas fait non plus. Et ceux-ci s'en iront aux peines éternelles, mais les justes s'en iront à la vie éternelle. Le Sauveur leur est resté étranger. Il leur a manqué l'oeil de la foi pour reconnaître Jésus dans les pauvres et les misérables, et ils ne leur ont témoigné aucun amour. C'est pourquoi ils seront éternellement séparés de Jésus. Que celui qui jusqu'à présent n'a pas travaillé à son salut avec crainte et tremblement, et qui croit cependant que le ciel ne saurait lui échapper, et que la damnation n'est que pour les criminels, pour les gens qui ont passé leur vie dans des péchés grossiers et des désordres scandaleux, que celui-là se retire dans la solitude et lise et relise sérieusement ces paroles du Seigneur.

Ceux que le Père envoie aux peines éternelles ne sont nullement des criminels ; ils n'ont absolument rien fait d'extraordinaire. Ce qui attire la condamnation sur eux, ce sont uniquement des péchés d'omission. Qui n'a pas connu Jésus ayant faim et soif, qui n'a pas aimé le Sauveur nu et malade, sera condamné. « Celui-là pèche qui sait faire le bien et qui ne le fait pas. » Si nous ne voyons parmi les chrétiens qui nous entourent, que des pécheurs, alors nous passons froidement à côté d'eux. Nous sommes témoins de leurs souffrances ; mais est-ce que cela nous regarde ? Mais dès que nous reconnaissons en eux Jésus notre Sauveur bien-aimé, notre consolation pendant notre vie, et notre espérance dans la mort, quelle joie et quel honneur de pouvoir prendre soin de lui dans la personne de ceux qui lui appartiennent ! Tu te plains de ne pas le connaître, et voici, tu le rencontres partout sur ton chemin. Tu crois en lui et tu ne le reconnais pas ! Si tu ne le reconnais pas ici dans les malheureux, il ne le reconnaîtra pas non plus là-haut dans la gloire.

C'est pourquoi, souhaitons que cette voix ne se taise jamais dans nos coeurs : Vous ne me l'avez pas fait non plus, afin que nous devenions de plus en plus sérieux dans notre vie chrétienne. Seigneur, aide-nous, Seigneur, aie pitié de nous !

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