Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

CHAPITRE I

suite

-------

La jeunesse de Jésus jusqu'à la tentation.

3. La conception par le Saint-Esprit.


Ce qui avait été perdu par les premiers hommes devait être abondamment réparé par l'oeuvre de la Rédemption.

L'homme pécheur est par sa naissance un enfant de la mort. Pour remédier à ce déplorable état, qui durait depuis des siècles, il fallait qu'une puissance de vie vint d'en haut et fût inoculée à l'humanité. Bien plus : il fallait non seulement que les puissances de la vie, mais encore que la source même de toutes ces puissances, la Vie éternelle, personnelle et divine (Jean I, 4), apparût dans ce monde de péché et de mort. - L'Amour éternel, du haut de son trône céleste, a abaissé ses regards sur les misères des hommes, et son coeur a été ému d'une telle compassion, qu'il s'est senti pressé de les secourir. - Il réfléchit, et voici, la chute de l'homme était si profonde, la culpabilité de cette créature formée, à l'image de Dieu était si énorme, qu'elle ne pouvait être expiée que par le Fils même de Dieu. Ce qu'aucun homme ne pouvait faire, quelque excellent qu'il fût, a été accompli par notre Emmanuel (Esaïe VII, 14), l'Homme-Dieu, Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme. Personne ne pourra, en aucune manière racheter son frère, ni donner à Dieu sa rançon, car le rachat de leur âme est trop cher et il ne se fera jamais (Ps. XLIX, 8. 9). Le Fils de Dieu voulait non seulement opérer ce rachat, mais encore rétablir en sa personne la relation entre l'homme et Dieu, afin que par Lui, des puissances régénératrices pussent affluer dans toute l'humanité, et que le royaume de Dieu pût être fondé sur la terre. C'est pourquoi le Fils de Dieu ne s'est pas associé à un homme quelconque, mais Il s'est fait homme Lui-même. La Parole a été faite chair et elle a habité parmi nous (Jean I, XIV). Il s'est anéanti Lui-même en prenant la forme de serviteur et en se rendant semblable aux hommes (Philip. II, 7).

Cette incarnation du Fils de Dieu n'était possible que parce que l'homme était créé à l'image de Dieu. Mais c'est là le grand, le profond, l'inexprimable mystère : Dieu manifesté en chair (1 Tim. III, 16). Mais plus a été profond l'abaissement du Fils de Dieu, plus vif est l'éclat dont brille son amour par cette manifestation.

Cette incarnation eut lieu de la manière suivante : Un ange vint vers Marie, une descendante de David, qui était fiancée à un charpentier nommé Joseph et lui dit : Je te salue, toi qui es reçue en grâce ! le Seigneur est avec toi ; tu es bénie entre les femmes (Luc I,33).
L'humble Marie fut effrayée par cette salutation ; mais l'ange la rassura en lui disant : Marie, ne crains point, car tu as trouvé grâce devant Dieu. Et tu concevras et tu enfanteras un fils à qui tu donneras le nom de Jésus. Il sera grand et sera appelé le Fils du Très-Haut, et le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David, son père. Il régnera éternellement sur la maison de Jacob, et il n'y aura point de fin à son règne (Luc I, 30-33).

Marie ne douta pas, bien qu'elle ne comprit pas. Alors elle dit à l'ange : comment cela se fera-t-il, puisque je ne connais point d'homme ? (I, 34). L'ange lui répondit : Le Saint-Esprit surviendra en toi et le Très-Haut le couvrira de soin ombre ; c'est pourquoi aussi le saint enfant qui naîtra de toi sera appelé le Fils de Dieu (v. 35).

Il fallait que l'Homme-Dieu, qui devait délivrer l'humanité pécheresse fût pur, saint, et naquit sans péché. Celui qui se chargeait de nous racheter de nos péchés ne pouvait pas être engendré par une génération pécheresse. Comme homme, il fallait qu'il eût pour mère une femme, mais il ne pouvait pas être engendré selon des voies naturelles et avoir pour père un homme, s'il ne devait pas, dès les premiers moments de sa vie terrestre, sentir en lui l'attrait du péché.

L'incrédulité s'attache à cette conception par le Saint-Esprit et déclare impossible qu'une vie humaine soit appelée à l'existence sans la coopération d'un homme.
Mais tout est possible au Dieu Tout-Puissant. Il a créé Adam non seulement sans la coopération d'un homme, mais encore sans la coopération d'une femme. Il a créé, Eve avec la coopération d'un homme, mais sans le secours d'une femme. On doit par conséquent pouvoir admettre qu'il a créé Jésus sans la coopération d'un homme, bien qu'il se soit servi d'une femme. Il a opéré ce miracle dans le corps de Marie par la puissance créatrice du Saint-Esprit.

Marie se confia avec une sainte candeur à la volonté de Dieu. Voici, je suis la servante du Seigneur, qu'il m'arrive selon que tu as dit (Luc I, 38). L'ange se retira, et elle se trouva de nouveau seule. Le serviteur s'éloigne lorsque le Maître approche : Jésus était conçu.
Nous lisons dans les Évangiles que les gens le désignaient constamment comme le fils du charpentier Joseph. Et l'incrédulité s'en prévaut pour nier la conception surnaturelle du Sauveur. Que Jésus fut regardé par le peuple comme le fils de Joseph, cela est tout naturel. Cela se voit encore aujourd'hui. Lorsqu'un homme adopte et élève un enfant étranger, comme le sien propre, il tient à ce que cet enfant porte soit nom.

Marie ne pouvait pas publier le miracle divin qui s'était opéré en elle sans s'exposer aux plus injurieux soupçons. On cache ces choses, et on les réserve pour les coeurs bien disposés, qui sont en état d'adorer la merveilleuse puissance créatrice de Dieu. - Mais afin que Joseph, le fiancé de Marie ne l'abandonnât pas et n'attirât pas sur elle l'opprobre public, Dieu lui fit connaître la vérité par un ange. Alors Joseph prit sa femme avec lui, mais il ne la connut pas jusqu'à ce qu'elle eut enfanté son fils premier-né (Matth. I, 25). Et elle l'appela Jésus, nom qui lui avait été donné par l'ange, avant qu'il fût conçu dans le sein de sa mère. Car c'est Lui qui sauvera son peuple de ses pêchés (Matth. 1.21).



.

4. Annonciation de la naissance de Jean-Baptiste.

Luc I, 5-80.


Dieu avait fait cette promesse par le prophète Malachie : Voici, je vais envoyer mon ange et il préparera la voie devant moi, et aussitôt le Seigneur que vous cherchez et l'ange de l'alliance que vous désirez entrera dans son temple (Mal. III, 1).

Quatre cents ans s'étaient écoulés et aucun prophète n'avait parlé à Israël. Dans les montagnes de Juda, probablement dans la ville Lévitique d'Hébron, vivait, au temps d'Hérode, un sacrificateur nommé Zacharie avec sa femme Elisabeth. Ils étaient tous deux justes et craignant Dieu, et observaient tous les commandements et toutes les ordonnances du Seigneur d'une manière irrépréhensible, en attendant la consolation d'Israël. Ils n'avaient point d'enfants, car Elisabeth était stérile, et ils étaient tous deux avancés en âge. Souvent ils avaient prié Dieu de leur donner des enfants, car ils savaient que les enfants sont une bénédiction et que ce fruit du mariage est une récompense (Ps. CXXVII, 3). Mais il semblait que leurs prières ne seraient jamais exaucées.

Or, il arriva que Zacharie, suivant le rang de sa famille, entra dans le temple du Seigneur pour offrir les parfums. Alors un ange lui apparut, se tenant debout du côté droit de l'autel des parfums, et lui dit : Zacharie, ne crains point, car ta prière est exaucée, et Elisabeth ta femme t'enfantera un fils, et tu lui donneras le nom de Jean. Il sera pour toi un sujet de joie et de ravissement, et plusieurs se réjouiront de sa naissance. Car il sera grand devant le Seigneur ; il ne boira ni vin ni cervoise et sera rempli du Saint-Esprit dès le sein de sa mère ; il convertira plusieurs des enfants d'Israël au Seigneur leur Dieu et il marchera dans l'esprit et dans la vertu d'Elie, pour ramener les coeurs des pères vers les enfants et les rebelles, à la sagesse des justes, afin de préparer au Seigneur un peuple bien disposé (Luc I, 13-17).

Quelle joie ne lui eût pas causé ce message s'il lui avait été apporté quelques années plus tôt. Mais maintenant, il lui semblait qu'il était trop tard. Une telle faveur lui paraissait impossible. Aussi exprime-t-il ses doutes en disant à l'ange : À quoi connaîtrai-je cela, car je suis vieux et ma femme est avancée en âge ? Mais l'ange lui répondit : Je suis Gabriel, qui assiste devant Dieu, et j'ai été envoyé pour te parler et pour t'annoncer ces bonnes nouvelles. Et voici, tu seras muet et tu ne pourras parler jusqu'au jour que ces choses arriveront, parce que tu n'as pas cru à mes paroles, qui s'accompliront en leur temps (Luc 1).

C'est par la langue qu'il a péché dans le sanctuaire ; c'est par la langue qu'il sera châtié. Lorsque Zacharie sortit pour bénir le peuple, il ne pouvait plus parler et on reconnut qu'il avait en une vision dans le temple. Bientôt il expérimenta ce qu'il n'avait pas cru ; c'est que l'ange lui avait dit, la vérité, car quelque temps après, Elisabeth conçut. Toutefois, quelque grand que fût le bonheur de Zacharie, il ne pouvait pas en parler à sa femme. Son coeur était plein, mais sa bouche ne pouvait pas exprimer ses sentiments, sa langue était liée. Il a obtenu une bénédiction, mais il est châtié par cette bénédiction même. Cette grande joie qu'il était obligé de contenir, était pour lui une peine. Son fils était un prédicateur de la repentance même avant d'être né.

Six mois plus tard, lorsque Marie eut reçu la promesse de devenir l'instrument de l'incarnation du Fils de Dieu, elle se leva et s'en alla visiter sa cousine Elisabeth. Aussitôt que celle-ci eut entendu la salutation de Marie, le petit enfant tressaillit dans son sein, Élisabeth fut remplie du Saint-Esprit, elle éleva sa voix et s'écria : Tu es bénie entre les femmes et le fruit que tu portes est béni. Et d'où me vient ceci, que la mère de mon Seigneur vienne me visiter ? Car la voix de la salutation n'a pas plus tôt frappé mes oreilles, que le petit enfant a tressailli de joie dans mon sein. Heureuse celle qui a cru, car les choses qui lui ont été dites de la part du Seigneur auront leur accomplissement (Luc I, 42-45).

C'est ainsi qu'Elisabeth, cette simple et humble femme, devint prophétesse, comme autrefois Marie et Débora. Mais à peine eut-elle fini de parler, que Marie, dans un cantique de louange, répandit son coeur devant Dieu et dit : Mon âme magnifie le Seigneur, et mon esprit s'est réjoui en Dieu, qui est mon Sauveur ; parce qu'il a regardé la bassesse de sa servante. Et voici désormais que tous les âges m'appelleront bienheureuse. Car le Tout-Puissant m'a fait de grandes choses ; son nom, est saint ; et sa miséricorde est d'âge en âge sur ceux qui le craignent.
Il a déployé avec puissance la force de son bras ; il a dissipé les desseins que les orgueilleux formaient dans leur coeur ; il a détrôné les puissants et il a élevé les petits ; il a rempli de biens ceux qui avaient faim, et il a renvoyé les riches à vide ; se souvenant de sa miséricorde, il a pris en sa protection Israël son serviteur, comme il en avait parlé à nos pères, à Abraham et à sa postérité pour toujours (Luc I, 46-55). Et Marie demeura environ trois mois auprès de son amie, pour savourer avec elle les promesses du Seigneur.

Cependant le terme d'Elisabeth était venu, et elle enfanta un fils. Huit jours après la naissance de l'enfant, lorsqu'il fallut le circoncire et lui donner un nom, la famille voulait l'appeler Zacharie, comme son père ; mais sa mère déclara qu'il serait nommé Jean.

Comme leurs amis étaient étonnés, on fit signe à Zacharie, qui écrivit sur ses tablettes : Jean est soit nom. À l'instant, sa bouche s'ouvrit, sa langue fut déliée et il parlait en bénissant Dieu. Il rend grâce au Seigneur de ce qu'il exécute fidèlement les promesses qu'il avait faites à son peuple par les prophètes, de le délivrer de ses ennemis et de la main de ceux qui l'opprimaient. Puis, il décrit la mission de son fils en ces termes : Et toi, petit enfant, tu seras appelé le prophète du Souverain ; car tu marcheras devant la face du Seigneur, pour lui préparer ses voies, et pour donner la connaissance du salut à son peuple, par la rémission de ses péchés, par les entrailles de la miséricorde de notre Dieu, par lesquelles le soleil levant nous a visités d'en haut, pour éclairer ceux qui demeurent dans les ténèbres et dans l'ombre de la mort, et pour conduire nos pas dans le chemin de la paix (Luc 1, 76-79).

C'est ainsi que le vénérable sacrificateur Zacharie indique quelle était la nature de la repentance que Jean était appelé à prêcher. Ce n'était pas une frayeur semblable à celle de Caïn, inspirée par la colère de Dieu, ni un tremblement ou une angoisse causée par la perspective du jugement, mais une sainte tristesse à salut.

Et le petit enfant croissait et se fortifiait en esprit, et il demeura dans les déserts jusqu'au jour où il devait être manifesté à Israël.



.

5. Naissance de Jésus.


 Comme il était arrêté dans les conseils de Dieu que Jésus naîtrait dans la ville de David, le prophète Michée, inspiré par l'Esprit de Dieu, l'annonça des siècles à l'avance : Et toi, Bethléem, vers Ephrata, quoique tu sois petite entre les milliers de Juda, c'est de toi que me sortira celui qui doit être dominateur en Israël, et ses issues sont d'ancienneté, dès les jours éternels (Michée V, 2).
Ce qui conduisit Joseph et sa fiancée à Bethléem, fut le dénombrement que l'empereur Auguste ordonna en vue de la répartition officielle des impôts, dans toutes les provinces de l'empire romain. Ce dénombrement commença par la rédaction du cadastre, lorsque Quirinus devint pour la première fois gouverneur en Syrie, et fut terminé seulement lorsque ce magistrat occupa ce poste pour la seconde fois. Lorsque Joseph et Marie furent arrivés à Bethléem, Marie mit au monde son fils premier-né, Jésus. Et comme ils n'avaient pas trouvé de place dans l'hôtellerie, vu l'énorme affluence de ceux qui étaient venus dans le même but, elle emmaillota l'enfant et le coucha dans une crèche.

La nouvelle de cet événement fut apportée à des bergers qui paissaient leurs troupeaux dans les plaines de Bethléem, par un ange qui leur dit : Voici, je vous annonce une grande joie, c'est qu'aujourd'hui le Sauveur, qui est le Christ, le Seigneur vous est né (Luc II, 10. 11). La bonté et l'amour de Dieu notre Sauveur ont été manifestés (Tite III, 4) ; mais les habitants de Bethléem, de Jérusalem et de toute la terre dormaient d'un profond sommeil, comme si le petit enfant couché dans la crèche ne les concernait pas. En revanche, à cette même heure, les cieux s'ouvrirent, et des multitudes de l'armée céleste se présentèrent pour honorer ce Roi qui faisait son entrée dans la vie humaine, et pour lui faire cortège, en chantant ce cantique de louanges : Gloire à Dieu au plus haut des cieux, paix sur la terre, et bonne volonté envers les hommes (Luc II, 14).

Telle devait être un jour la mission de l'enfant qui venait de naître ; rétablir l'honneur de Dieu que les hommes avaient foulé aux pieds, apaiser la colère du Saint des saints, rétablir la paix sur la terre, afin que Dieu puisse user de bienveillance envers les hommes. Combien ils sont insensés ceux qui croient qu'au-delà de ce monde visible il n'y a qu'un morne et froid néant, et qui déclarent péremptoirement qu'il n'y a point d'anges ; que n'étaient-ils là pour entendre cette hymne de louanges ! Ils auraient certainement chanté avec les messagers célestes : « Gloire soit à Dieu au plus haut des cieux ! »

Bien que la naissance du Sauveur eût été hautement et publiquement proclamée, personne ne ressentit la grande joie, excepté les coeurs qui attendaient la consolation d'Israël. Les bergers allèrent en hâte à Bethléem, sur l'indication de l'ange. Ils cherchèrent et trouvèrent l'enfant et l'adorèrent. Et comme la bouche ne saurait taire ce qui remplit le coeur, ils publièrent ce qu'ils avaient vu touchant le petit enfant, et devinrent ainsi les premiers missionnaires du Sauveur.



.

6. Circoncision de Jésus et sa présentation au temple.


Par la circoncision qui eut lieu le huitième jour, le Sauveur fut soumis pour nous à la loi. Ce furent les premières gouttes de sang qu'il versa dans ses souffrances subies à notre place. Car il n'y avait rien en Lui d'impur ni de souillé. Il n'avait donc pas besoin de la circoncision pour lui-même.

Lorsque les quarante jours furent accomplis, Joseph et Marie portèrent l'enfant au temple, pour le présenter au Seigneur et pour offrir le sacrifice prescrit par Moïse (Exode XXXIV, 20 ; Nomb. XVIII, 15. 16). À cette occasion, l'enfant fut aussi présenté au petit nombre de ceux qui adoraient Dieu en silence, dans Sion, et qui attendaient la consolation d'Israël. Le cantique d'actions de grâces, que Marie avait chanté, dut résonner de nouveau dans son coeur, lorsque, dans la maison même de son Dieu, elle lui consacra son premier-né.

Il y avait alors dans le temple le vénérable vieillard Siméon, qui avait été divinement averti par le Saint-Esprit qu'il ne mourrait pas avant d'avoir vit le Christ du Seigneur (Luc II, 26). Il avait cherché d'un coeur sincère dans les Écritures pour savoir quand et comment le Sauveur viendrait. Il vint au temple par un mouvement de l'Esprit et vit Marie et son fils. La certitude que cet enfant était le Messie, brilla comme un éclair dans son esprit. Il s'avance vers lui plein d'amour et d'adoration, le prend dans ses bras ; mais une sainte et humble timidité l'empêche de le caresser comme on le fait d'ordinaire aux petits enfants. Il sent que c'est son Sauveur, sa consolation, sa paix et il entonne, lui aussi, son chant de louanges : Seigneur, tu laisses maintenant aller ton serviteur en paix selon la parole, car mes yeux ont vu ton salut, que tu as préparé peur être présente à tous les peuples, pour être la lumière qui doit éclairer les nations et la gloire de ton peuple d'Israël (Luc II, 29-32). Puis il bénit Marie.
Il y avait aussi Anne la prophétesse, fille de Phanuel, qui s'avança vers l'enfant, en louant Dieu et qui parlait de Jésus à tous ceux qui l'attendaient.



.

7. Les Mages d'Orient.


Joseph et Marie retournèrent à Bethléem avec l'enfant. L'ange ayant clairement désigné Bethléem comme la ville de David, ils étaient portés à croire que c'est là qu'ils devaient désormais habiter. Cette conviction était confirmée par la prédication du prophète Michée (V, 1). C'est là qu'ils demeurèrent assez longtemps. D'après saint Matthieu (II, 16) il parait qu'il s'était bien écoulé une année lorsque les Mages vinrent à Jérusalem et demandèrent : Où est le Roi des Juifs qui est né ? (Matth. Il, 2) car nous avons vu son étoile en Orient, et nous sommes venus pour l'adorer.

Que toute la ville de Jérusalem fut troublée par la nouvelle de la naissance du Sauveur, et que cet événement y fut resté jusqu'alors complètement inconnu, cela se comprend très bien, malgré toute la publicité que les bergers et Anne la prophétesse avaient donnée à cette nouvelle, les uns à Bethléem, l'autre à Jérusalem. Il y avait certainement dans ces deux villes un grand nombre d'âmes qui avaient appris la naissance du Messie ; mais c'étaient, comme ceux qui la leur avaient annoncée, des gens simples, de bas état, ignorants et obscurs. Quant aux gens cultivés, ils ne s'en étaient jamais occupés. Nous savons assez comment les gens des villes traitent les croyances et les expériences des bons campagnards. Au moyen de quelques mots tranchants : « rêves de pâtres, bavardages de femmes, » on raille ces choses et on les chasse de son esprit. Seulement, lorsque des savants de haut rang viennent de l'Orient et s'informent du Roi des Juifs nouvellement né, cela fait sensation, et l'on se dit qu'il doit cependant y avoir quelque chose de réel. - Et Jérusalem avait sans doute des raisons pour être effrayée de la naissance de ce Roi. Si Hérode dont les mains étaient toutes dégoûtantes de sang, voyait dans cet enfant un compétiteur au trône, il est probable qu'il se livrerait à de nouvelles cruautés, et chacun devait craindre le soupçon d'être en rapport avec cet enfant redouté.

Les Mages sont envoyés à Bethléem et ils s'y rendent. L'incrédulité se moque du récit d'après lequel l'étoile marcha devant eux jusqu'à ce qu'étant arrivés sur le lieu où était le petit enfant, elle s'arrêta (Matth. II, 9).
Mais le célèbre astronome Kepler dit à ce propos : « La Bible parle des choses de la vie humaine avec des hommes, et comme les hommes ont l'habitude d'en parler. Elle n'est pas un manuel d'optique ou d'astronomie, elle vise un but plus élevé. »
C'est ainsi que nous parlons du lever et du coucher du soleil. Nous savons fort bien que le soleil est immobile ; mais nous exprimons de cette manière ce que nos yeux croient apercevoir. De même les paroles Matth. II, 9 peignent seulement l'impression que l'apparition de l'étoile fit sur les Mages. Pendant qu'ils marchaient, l'étoile semblait marcher devant eux, tandis que c'étaient eux-mêmes qui se mouvaient.

Ils trouvèrent l'enfant et l'adorèrent, puis ils exprimèrent la joie et l'amour de leurs coeurs par les dons de leurs mains. Les présents qu'ils firent à l'enfant devaient, dans les vues de Dieu, servir aux parents pour effectuer leur voyage en Égypte. Quant aux Mages, Dieu leur ordonna de ne plus retourner près d'Hérode, mais de regagner leur pays par un autre chemin.



.

8. La fuite en Égypte.


Furieux d'avoir été trompé par les Mages, Hérode fit mettre à mort tous les enfants mâles de Bethléem âgés de deux ans et au-dessous. Ce furent les premiers martyrs. Les mères qui, dans leurs lamentations sur leurs enfants, ne veulent pas être consolées, ont sûrement béni Dieu plus tard de ce qu'Il les avait rappelés à Lui de bonne heure. En effet, s'ils avaient grandi avec Jésus, combien n'auraient-ils pas été exposés, devant le tribunal de Pilate, à crier comme les autres : Que son sang soit sur nous et sur nos enfants ? L'Eglise se souvient de ces innocents, le lendemain de Noël, à côté de saint Jean et de saint Étienne.

À peine l'enfant est-il né, que ses ennemis en veulent à sa vie. C'est ce qui arrive encore aujourd'hui. Lorsque la vie de Dieu naît dans un coeur, aussitôt celui qui est meurtrier dès le commencement (Jean VIII, 44) cherche à l'étouffer. Mais tous ses efforts sont inutiles. Sans doute l'ennemi peut tuer, et il ne s'en fait pas faute. Quels torrents de sang les persécuteurs n'ont-ils pas répandus ! Mais ils ne peuvent empêcher le règne de Dieu de s'établir sur la terre.

Avant que l'ordre meurtrier ne fût parvenu à Bethléem, Joseph avait déjà été divinement averti de prendre l'enfant et sa mère et de s'enfuir avec eux en Égypte (Matth. II, 13). Dieu choisit. l'Égypte, ce pays plein de corruption, pour servir de refuge à son Fils. L'Égypte était le grenier de l'empire romain dans les temps de disette ; elle devait être, pour le règne de Dieu, l'asile où la sainte semence pût croître et donner au monde le pain de vie. C'est là qu'Abraham se réfugia pendant une famine survenue dans son pays (Gen. XII, 10). C'est là que Jacob put subsister pendant les sept années de famine (XLVI, 6). C'est là que Joseph, Marie et le petit enfant demeurèrent jusqu'à la mort d'Hérode. Après cet événement, il fut divinement averti de se retirer en Galilée, et c'est ainsi qu'il vint habiter Nazareth.



.

9. L'enfance de Jésus.


C'est dans le silence et l'obscurité que Jésus grandit, sous les soins de Joseph et de Marie. L'enfant croissait et la grâce de Dieu était sur lui (Luc II, 40). Il n'est pas devenu notre Sauveur, il est né tel. Depuis le commencement de son existence terrestre, il est le Fils de Dieu fait homme. Mais il est né et a vécu une véritable vie d'enfant ; il a ainsi sanctifié notre enfance. Il est né faible, débile. Il a grandi peu à peu ; il a appris à se tenir debout et à marcher absolument comme les autres enfants. Le coeur de Marie dut battre de joie comme celui de toutes les mères, lorsque Jésus commença à parler, et lorsque les premiers mots qu'il prononça lui arrachèrent à lui-même des cris de joie. C'est ce même enfant dont la vue procura une mort heureuse et paisible au saint vieillard Siméon, le même qui était l'objet des voeux et des espérances des pieux patriarches. C'est cet enfant que tous les anges adorent et qui un jour, assis sur le trône de sa gloire, doit juger les peuples de la terre.

L'enfant se fortifiait en esprit et était rempli de sagesse (Luc II, 40). Sa divinité ne pouvait croître ni se fortifier ; mais il en avait de jour en jour une conscience plus claire. De même qu'il reposait corporellement sur le sein de sa mère, il reposait spirituellement dans le sein de Dieu (Jean I, 18).

La Parole de Dieu était le trésor de Marie, elle la repassait dans son coeur ; elle se nourrissait de l'Ancien Testament. Ainsi, elle put répandre de bonne heure les grains de la divine semence dans le coeur de son enfant, et celui-ci fût bientôt familiarisé avec l'histoire de son peuple. À mesure qu'il prenait conscience de lui-même, se développait aussi en lui la conscience de sa relation exceptionnelle avec Dieu. Sa faible humanité croissait en sagesse, et devenait de plus en plus apte à servir d'instrument au Saint-Esprit qui devait habiter en lui sans mesure. Nous voyons ici que l'humanité, non corrompue par le péché, est tout à fait capable de devenir la demeure du Saint-Esprit. Et plus elle est apte à recevoir ce don, plus glorieusement se manifeste en elle la grâce et le bon plaisir de Dieu.



.

10. Jésus à l'âge de douze ans.


À l'âge de douze ans, l'enfant était considéré comme jeune homme, et devenait disciple de la loi. En cette qualité, il lui était permis d'assister à la fête de Pâques à Jérusalem. Lorsque les jours de fête furent achevés, les parents de Jésus quittèrent la ville sainte, dans la persuasion que Jésus était avec leurs amis. Ne le trouvant pas, ils revinrent à Jérusalem et l'y cherchèrent trois jours. Enfin ils le trouvèrent au temple, parmi les docteurs, les écoulant et leur adressant des questions (Luc II, 44. 47). Marie lui dit d'un ton de reproche : Mon enfant, pourquoi as-tu ainsi agi avec nous ? voici, ton père et moi nous te cherchions, étant fort en peine (48).
Mais il repousse ce reproche avec une candeur enfantine. Il ne comprend pas qu'on puisse le chercher ailleurs que dans la maison de Dieu, Ne savez-vous pas, leur dit-il, qu'il me faut être occupé aux affaires de mon Père ? Ce sont là les premières paroles que nous recueillons de la bouche de Jésus. C'est la première lueur qui brille dans son âme à la faveur de laquelle il se reconnaît clairement et expressément comme le Fils de Dieu.

Auparavant il en avait un pressentiment, et avec la clarté croissante de la conscience qu'il avait de lui-même, un ardent désir s'emparait de lui, d'être au clair sur sa relation avec Dieu. Maintenant il entend dans le temple la Parole de Dieu et il reconnaît en elle la voix de son Père. Il sent dans son coeur comme un aimant qui l'attire vers cette Parole. La Parole qui lui vient du dehors est une bienheureuse confirmation de son sentiment intérieur. Il se reconnaît comme le Fils unique qui est dans le sein du Père. Et il en rend témoignage avec une simplicité et une humilité toutes filiales lorsqu'il dit : Ne savez-vous pas qu'il me faut être occupé aux affaires de mon Père ? - Il est dit que Marie ne comprit pas cette parole (Luc II, 50). Elle comprenait bien les mots. Elle en comprenait sûrement aussi la signification. Ils lui rappelaient la parole de l'ange : Le saint enfant qui naîtra de toi sera appelé Fils de Dieu (Luc I, 35). Cependant elle ne pouvait pas encore sonder toute la profondeur et saisir toute l'importance de cette parole. Ne savez-vous pas qu'il me faut être occupé aux affaires de mon Père ? Telle est la question de l'enfant ; il entend par là que son essence la plus intime est tellement unie à l'essence de son Père, qu'il n'a pas besoin de réfléchir un seul instant, pour savoir où il doit être. Il ne peut absolument pas faire autrement. Il faut qu'il soit là où les affaires de son Père l'appellent.

Cette nécessité, cette obligation, qui s'allient cependant avec la liberté de l'amour qui se donne, dominèrent et pénétrèrent toute sa vie, toutes ses souffrances et sa mort. Lorsque plus tard il vit sur son sycomore, l'homme de petite taille qui désirait ardemment le voir, il lui dit : Zachée, hâte-toi de descendre, car il faut que je loge aujourd'hui dans ta maison (Luc XIX, 5).

En sa qualité de Jésus, il ne peut pas ne pas avoir compassion. Lorsqu'il jette un coup d'oeil sur le monde païen, il dit : J'ai encore d'autres brebis qui ne sont pas de celle bergerie, il faut aussi que je les amène (Jean X, 16). Quel homme pourrait encore être indifférent à l'égard des missions, lorsque ce Il faut de son Sauveur brûle dans son coeur ?

Lors de son dernier voyage à Jérusalem, il dit à ses disciples : Voici, nous montons à Jérusalem, et toutes les choses qui ont été écrites par les prophètes, touchant le Fils de l'homme, vont être accomplies (Luc XVIII, 31). Aucune nécessité extérieure ne le pousse dans la voie des souffrances. Mais il faut qu'il souffre parce qu'il faut qu'il s'occupe des affaires de son Père. Ce qui le contraint à s'engager dans cette voie, c'est son miséricordieux amour pour le monde pécheur.

Chapitre précédent Table des matières Chapitre suivant