DANIEL,
chap. IX.
Un nouvel horizon s'ouvre au
neuvième chapitre. Il est nécessaire
de nous arrêter un instant et de jeter un
regard sur le chemin parcouru jusqu'ici, pour
reconnaître le revirement qui s'est
opéré dans l'interprétation
progressive du livre de Daniel.
Qu'avons-nous vu dans ces huit
premiers chapitres ? Deux camps qui se dressent,
l'un en face de l'autre, clairement marqués
par des images et des événements
toujours nouveaux. Nous avons vu «les
dominations, les princes de ce monde, et les
autorités » en révolte contre
Dieu. D'une part : Nébucadnetsar, Belsatsar,
Darius, l'État païen avec sa
prétention totalitaire sur les corps et les
âmes - d'autre part : Daniel, «l'un des
prisonniers de Juda », Daniel avec ses
coreligionnaires, le peuple de Dieu dans la
captivité de Babylone, l'Église de
Christ opprimée et persécutée,
au milieu d'une grande puissance ennemie de Dieu.
Là, « les Chaldéens, les voyants
et les astrologues» dans
leur grande perplexité, ici le
prophète et mandataire de Dieu, avec la
claire lumière de la
révélation qui lui est
donnée.
Il était inévitable et
bien compréhensible que toute notre
sympathie allât à Daniel et à
ses coreligionnaires. Nous nous vîmes, en
qualité de membres de l'Église,
côte à côte avec Daniel et le
peuple de Dieu captif, engagés dans le
même combat, soumis aux mêmes tourments
et bénéficiant des mêmes
promesses du secours divin. Le jugement de Dieu sur
Babylone et sur sa grande puissance mondiale fut
aussi pour nous une consolation toujours nouvelle
en considération des
événements mondiaux et
ecclésiastiques du temps présent.
Nous avons reconnu que «si grands sont la
puissance de Babylone sur le monde et le nombre de
ses ruses, qu'il n'y en eut jamais de pareils sur
la terre». Mais nous avons pu entendre que sur
le trône, dressé dans le ciel et sur
la terre, est assis un être qu'aucune
puissance ne peut surpasser : «Car c'est
à toi qu'appartiennent dans tous les
siècles le règne, la puissance et la
gloire».
Ici intervient le tournant
nouveau.
Ce revirement est préparé et
annoncé dans les chapitres
précédents et principalement dans le
chapitre huitième
(versets
12, 13) et maintenant il est
arrivé. Jérusalem est devenue l'objet
du jugement divin. Le prophète voit dans ce
chapitre le jugement de Dieu. Cette fois, le
jugement ne s'exerce pas
sur
la Babylone impie mais sur la pieuse
Jérusalem. Ce n'est pas sur la haute statue
de Nébucadnetsar, mais sur la sainte
montagne de Sion que s'étend la nuée
d'où descendent les foudres de Dieu. Ce
n'est pas non plus pendant le festin de Belsatsar
«qu'apparaît l'extrémité
d'une main écrivant sur la chaux de la
muraille »
(chap.
V) mais pendant les
fêtes sacrées du temple de la
communauté élue.
Si la communauté de Dieu
languit depuis des années dans la
captivité, l'esprit de violence de Babylone
et son impiété n'en sont pas seuls
responsables. La faute n'est pas moins grande du
côté des persécutés. Ce
qui concerne les deux fronts n'est pas si simple,
car ces deux fronts ne sont pas nettement
séparés l'un de l'autre. Il n'y a pas
que de la lumière d'un côté et
des ténèbres de l'autre. Des ombres
s'étendent aussi, et non moins, sur le front
des croyants. L'Église de Dieu vit dans un
monde de péché et Dieu, en tant que
juge, doit prendre parti contre elle. Si le combat
de Dieu et sa victoire sur les
ténèbres
(chap.
VIII) dépendaient d'un
«front chrétien», il est certain
qu'il se verrait abandonné au moment
critique. Car il nous manque « les vertus
requises aux soldats » pour la guerre sainte.
Le prophète dit « Nous », il parle
maintenant à la première personne :
«Nous avons été rebelles »
(5).
Cela signifie en d'autres termes
: Nous, tes soldats, nous sommes
des déserteurs!» «Nous - nous! -
n'avons pas écouté la voix de
Dieu»
(6).
Nous sommes des rebelles dans la
troupe des combattants pour Dieu. Il en est ainsi
de ceux qui habitent Jérusalem!
Il ne pousse pas de froment sans
mauvaises herbes : «Le royaume des cieux est
semblable à un homme qui a semé une
bonne semence dans son champ. Mais, pendant que les
gens dormaient, son ennemi vint, sema de l'ivraie
parmi le blé, et s'en alla. Lorsque l'herbe
eut poussé et donné du fruit,
l'ivraie parut aussi. Les serviteurs du
maître de la maison vinrent lui dire:
Seigneur, n'as-tu pas semé une bonne semence
dans ton champ ? D'où vient donc qu'il y a
de l'ivraie ? Il leur répondit : C'est un
ennemi qui a fait cela. Et les serviteurs lui
dirent : Veux-tu que nous allions l'arracher ? -
Non, dit-il, de peur qu'en arrachant l'ivraie, vous
ne déraciniez en même temps le
blé. Laissez croître ensemble l'un et
l'autre jusqu'à la moisson, et, à
l'époque de la moisson, je dirai aux
moissonneurs : Arrachez d'abord l'ivraie, et
liez-la en gerbes pour la brûler, mais
amassez le blé dans mon grenier »
(MATTH.
XIII).
C'est ce que voit le
prophète. C'est ce fait nouveau qui est
survenu. Daniel se sent comme un capitaine qui se
prépare à lancer une troupe en
avant-garde dans le combat, et qui, à son
effroi, constate que l'ennemi est dans sa propre
troupe. Oui, il est comme un
médecin qui, lors de l'irruption d'une
épidémie, commence à lutter
contre la maladie et constate un jour que la
contagion l'a atteint. Daniel a été
chargé de dire, de la part de Dieu, à
Nébucadnetsar : « Abattez l'arbre, et
coupez ses branches; secouez le feuillage, et
dispersez les fruits »
(chap.
IV), mais il constate que la
branche sur laquelle il se tient lui-même est
sciée. Il n'y a aucune branche en ce monde
sur laquelle nous puissions nous asseoir. Elles
sont toutes entamées par la scie. Aucune
société, aucune communauté
spirituelle, aucune appartenance à une
Église, ne peut nous servir de point
d'appui. Même la conscience d'être un
élu ou d'avoir une vocation de
prophète ne peut être une sauvegarde,
car toutes ces branches sont un jour des branches
sciées. De toute façon, il n'y a rien
sur quoi nous puissions construire. L'unique appui
efficace du prophète n'est pas de ce
monde.
Cette constatation ne peut que
causer une grande angoisse au prophète. Dans
ce chapitre, un changement semble s'être
opéré dans la personnalité de
Daniel. S'il avait gardé jusqu'ici un
sentiment de force et de justice personnelle, il
n'ose plus, désormais, y prétendre.
Daniel nous est montré comme un homme qui ne
peut plus que tendre vers Dieu des mains vides dans
la prière, dans la supplication. « Je
tournai ma face vers le Seigneur Dieu pour lui
présenter des requêtes et des
supplications, en jeûnant et en prenant le
sac et la cendre »
(3).
Sa prière est une des
confessions des péchés les plus
saisissantes qui soit dans la Bible. Daniel ne
trouve presque pas assez de mots pour
décrire le péché. Et, certes,
ce ne sont pas seulement des paroles qui se
trouvent ici. «Nous avons péché,
nous avons été méchants et
rebelles, nous nous sommes détournés
de tes commandements et de tes ordonnances»
(5).
Le péché vint des
classes supérieures : « Seigneur,
à nous la honte et la confusion, à
nos rois, à nos chefs et à nos
pères, parce que nous avons
péché contre toi »
(8).
Mais le peuple a
péché également. Il n'y a
aucune exception, «tout Israël a
transgressé ta loi »
(11).
L'homme,
qui a vu les rois
trembler et s'abattre, se tient ici brisé
devant Dieu pour ses propres péchés
et pour ceux de son peuple.
Les mots «c'est pourquoi»
martèlent la prière de Daniel, comme
des lanières cinglent le dos du
pénitent. «Nous n'avons pas
écouté ta voix - c'est pourquoi nous
avons vu fondre sur nous les menaces et les
malédictions dont parle la loi de Moïse
»
(11).
«
Nous n'avons pas
imploré l'Éternel, notre Dieu, nous
ne nous sommes pas détournés de nos
iniquités, et nous n'avons pas
été attentifs à sa
vérité. C'est pourquoi
l'Éternel. a fait fondre sur nous de telles
calamités ; car l'Éternel notre Dieu
est juste dans toutes les oeuvres qu'il
accomplit»
(13,
14). Il n'y a pas d'effet sans cause. La
cause
première est toujours le
péché. Que personne ne demande
«pourquoi ?» Daniel affirme pourquoi
Jérusalem est détruite et son peuple
en captivité.
La communauté fut
jetée dans la fournaise
(ch.
III). Mais nous la voyons ici
dans une fournaise d'une nature
particulière, la fournaise du
péché personnel et du
péché collectif. Daniel fut
jeté dans la fosse aux lions
(chap.
VI). Mais ici, la fosse qui
s'est ouverte sous ses pas est plus sombre que
celle du chapitre VI. C'est la «fosse de
destruction », le «bourbier fangeux»
du péché personnel et du
péché du peuple, une fosse dont les
parois sont sans aspérités
(PSAUME
XL). Il y eut une
délivrance dans la fournaise et dans la
fosse aux lions. Mais y aura-t-il une
délivrance de la fournaise de l'enfer ?
Parce que Daniel a vu la flamme qui ne consume pas
et les lions qui ne dévorent pas, il ose,
encore ici, espérer et croire en une
délivrance du péché. Il ose,
même ici, intercéder pour son peuple
en une supplication saisissante : « Seigneur,
exauce ! Seigneur, pardonne ! Seigneur, sois
attentif ! 0 notre Dieu, agis et ne tarde pas !
Pour l'amour de ton nom, fais resplendir ta
présence sur ton sanctuaire
désolé ! Car ton nom est
invoqué sur ta ville et sur ton peuple
»
(19).
Cette confession de Daniel
contient
les traits essentiels de la confession des
péchés de l'Église dans tous les siècles et dans
tous
les peuples. La confession des péchés
- le péché étant comme la
racine de tout mal - est précisément
la vocation et la mission de l'Église
à l'égard du monde. C'est la
caractéristique du monde de nier le
péché, car il tente soit de taire le
mal, soit de le placer sur le compte des autres
lorsqu'il lui est dévoilé.
Actuellement, un courant passe sur les nations, qui
fait que non seulement chaque peuple conteste son
péché et s'en décharge, mais
que la notion biblique du péché se
perd et qu'elle est combattue. Ce rejet de la
conception du péché se nomme «
christianisme positif » et c'est ainsi que le
loup pénètre dans la bergerie en
vêtement de brebis.
Dans cette situation
particulière, c'est la mission de
l'Église d'affirmer, avec Daniel, ce qui
parmi les nations du vingtième siècle
commence à être puni comme un crime de
haute trahison: «Nous avons
péché» - nous, pas les autres !
- « nos rois, nos chefs et nos pères
»
(8).
Nous sommes responsables du fait
que notre peuple soit outragé par tous ceux
qui l'entourent. C'est pour cette raison
qu'«il a fait venir sur nous une grande
calamité, une calamité telle qu'il
n'en est jamais arrivé de semblable sous le
ciel».
Ce qui différencie
l'Église du monde, n'est pas qu'elle soit
moins coupable que lui, mais que, par la parole de
Dieu, elle reconnaisse son péché. Le
monde ne le reconnaît pas et même ne
peut le reconnaître,
Comment le pourrait-il ? Mais
l'Église est en ce monde le lieu où
le péché est reconnu et
confessé. Là, où il n'y a plus
de confession des péchés, il n'y a
plus d'Église. C'est pourquoi
l'Église est aussi le lieu où doit
retentir, incessamment, cet appel clair et
intelligible : Il n'y a aucun autre moyen efficace
de combattre les crises de tout genre que la
confession des péchés, le pardon et
le retour à Dieu.
C'est également la mission de
l'Église à l'égard du peuple
de proclamer l'espérance du pardon.
L'espérance est le don de l'Église au
peuple. Si l'Église n'espérait plus,
qui pourrait encore espérer ? Si Daniel
perdait le courage de prier, qui pourrait l'avoir
encore ? La mission essentielle du chrétien
est d'être celui qui espère.
L'espérance se distingue de l'optimisme du
monde en ceci qu'elle discerne le mal dans sa
pleine réalité mais qu'elle
espère «malgré tout». La
dernière espérance de Daniel à
l'égard de son peuple est dans cette
certitude : «Ton nom a été
donné à ta ville et à ton
peuple »
(19).
Notre
génération
aussi a été baptisée au nom de
Dieu. Si arrogante et rebelle soit-elle, elle porte
au front le signe de son alliance avec
Dieu.
Dès le début de ce
chapitre et dans la suite, une question reste
inquiétante et insoluble pour le
prophète: Combien de temps le jugement de
Dieu sera-t-il maintenu sur Jérusalem ?
Combien de temps «le grand
malheur» qui a atteint la communauté
durera-t-il ? Daniel a vu en vision
(chap.
VIII) «le roi arrogant et
rusé », le roi qui paraîtra
à la fin des temps, « au temps de la
colère ». Ce chapitre se termine ainsi,
«j'étais stupéfait de ce que
j'avais vu, mais personne ne s'aperçut de
mon trouble »
(chap.
VIII, 27). Dans sa
perplexité, le prophète cherche le
conseil et la réponse dans les Saints Livres
de son peuple. Il tombe sur une parole sortie de la
bouche du prophète Jérémie :
« Les Israélites devront servir le roi
de Babylone pendant soixante et dix ans. Mais
lorsque ces soixante et dix ans seront
écoulés je ramènerai le roi de
Babylone chez lui». Le prophète se
prend à réfléchir à
cette prophétie; si elle s'avérait
exacte, lé temps de la liberté du
peuple serait proche, car les soixante et dix ans
seront bientôt écoulés. Ceci
est le sens de ces paroles : « La
première année de Darius... moi,
Daniel, je vis par les Livres qu'il devait
s'écouler soixante et dix ans pour les
ruines de Jérusalem, d'après le
nombre des années dont l'Éternel
avait parlé à Jérémie,
le prophète»
(1,
2).
Nous voyons le prophète,
préoccupé par la question qui
s'empare de l'esprit des hommes, dans les temps de
détresse et de jugement spécialement;
question qui se pose presque à chacun de
nous aujourd'hui, exprimée ou
inexprimée. Jusques à quand ?
(comparer au Ps.
XIII). C'est la question que le
malade pose au médecin,
lorsqu'il se rend à la consultation. Lorsque
j'entendis la semaine dernière ces
mêmes mots, prononcés par une femme
dont le mari est au chômage depuis trois ans,
je réalisai, dans cette question
frémissante, l'angoisse de toute la crise
mondiale. La question du prophète - bien que
dans un sens un peu différent, mais non
moins angoissant - est la question que le monde se
pose toujours à nouveau.
«Jusques à quand ?
» Qui répondra à cette question
? Pouvons-nous agir autrement que le
prophète qui obtint si souvent - au travers
des visions, des songes et des messagers
célestes - des réponses directes de
Dieu, et qui pourtant se résout à
chercher humblement une réponse dans «
les Livres».
La détresse des temps nous
pousse à nouveau vers « les Livres
». Maintes fois dans ces derniers temps nous
sommes remplis d'une joie puissante, simplement par
le fait qu'il existe une Bible et que nous pouvons
l'ouvrir et la lire. Depuis longtemps nous ne
saurions plus ce que nous devons penser, si nous ne
pouvions chercher directement conseil dans la
Bible, qui devient pour nous une lumière, un
flambeau à nos pieds dans les
ténèbres. Partout où «les
Livres» ne peuvent plus ou ne peuvent pas
encore être ouverts, règne le
doute.
Il n'est encore personne qui
n'ait
pas trouvé de réponse «dans les
Livres». Le prophète aussi en
reçoit une. En réponse à ses
questions, à ses méditations,
à sa prière de
confession et de supplication, Dieu fui envoie un
messager céleste, l'ange Gabriel. Celui-ci
transmet l'ordre au Très-Haut, non à
la fin de sa prière, mais sitôt qu'il
a commencé à prier. « Dès
que tu as commencé à prier,
l'Éternel a prononcé une parole»
(23).
Quel
prodigieux encouragement
à la prière faite avec foi
!
La réponse transmise au
prophète par l'ange rappelle la
réponse que Jésus donna un jour
à Pierre, alors que celui-ci lui demandait
s'il était suffisant de pardonner à
son frère sept fois par jour: «Non pas
sept fois, mais septante fois sept fois. » De
même le prophète reçoit ici la
réponse que la captivité de
Jérusalem ne durera pas seulement soixante
et dix ans, mais soixante et dix semaines. Si une
semaine représente sept années,
soixante et dix semaines représenteront
à peu près cinq cents ans, un temps
qu'un homme ne peut en aucun cas vivre ni voir.
« Il a été fixé en faveur
de ton peuple et de ta ville sainte soixante et dix
semaines au terme desquelles le péché
sera effacé »
(24).
Il est vrai qu'avant même
l'expiration de ces cinq cents années les
murailles de Jérusalem seront reconstruites.
Ceci correspond exactement à ce que le
prophète Jérémie avait
prévu. «Les places et les remparts de
Jérusalem seront rebâtis, mais en des
temps difficiles »
(25).
Malgré
la reconstruction
extérieure de Jérusalem ce ne sera
pas un temps de bénédiction.
Malgré le service de Dieu, la
Parole de Dieu sera rare dans le pays pendant des
siècles et la bouche de la prophétie
restera muette. Mais à la fin de ces
«temps difficiles » Dieu enverra «
l'Oint, le Conducteur »
(25).
Alors « le péché
sera effacé et l'iniquité
expiée, la justice éternelle sera
manifestée, la vision et la prophétie
seront accomplies et le Saint des saints sera
oint»
(24).
Si
ces paroles, remplies de
l'Esprit de Christ, ne désignent pas
directement la personne de Jésus de
Nazareth, elles la font pressentir et il serait
difficile de ne pas penser à Christ
lorsqu'il est dit: «Alors les transgressions
ainsi que les péchés cesseront et la
justice éternelle paraîtra
».Cette autre parole désigne
également le Christ :
L'Oint sera mis à mort,
n'ayant pas de successeur »
(26).
L'abomination
et la
désolation régneront dans le lieu
saint. Il nous est difficile de ne pas penser
à la condamnation du «Saint des
saints» par le souverain sacrificateur et les
anciens. Lorsqu'il est dit, «au milieu de la
semaine, il fera cesser le sacrifice et
l'offrande», nous pensons au moment où
le voile du temple s'est déchiré,
annonçant par là la fin de l'ancienne
alliance, car le sacrifice a été
accompli une fois pour toutes, par
Jésus-Christ.
« Le peuple d'un chef qui
surviendra détruira la ville et le
sanctuaire et ce chef finira par être
emporté, comme par une inondation;
jusqu'à la fin régneront la guerre et les
dévastations qui ont été
décrétées»
(26).
Cette
parole ne devrait-elle
pas être mise en regard de la
prédiction de Jésus-Christ sur la
destruction de Jérusalem : «
Jérusalem, qui tues les prophètes et
qui lapides ceux qui te sont envoyés,
combien de fois ai-je voulu rassembler tes enfants,
comme une poule rassemble ses poussins sous ses
ailes, et vous ne l'avez pas voulu ! Voici, votre
maison vous sera laissée déserte...
»
C'est ici la réponse à
la question Jusques à quand? » Par
cette réponse, l'espérance d'une
prochaine restauration de Jérusalem et de
son peuple est ôtée au
prophète. Mais d'autre part il lui est
donné la promesse - qui surpasse toute
attente - qu'en réponse à ses
supplications, le pardon des péchés
lui est accordé. « Les transgressions
cesseront, l'iniquité sera expiée et
la justice éternelle viendra »
(24).
C'est
un miracle infiniment
plus grand que celui de la délivrance de la
fosse aux lions.
Beaucoup de temps s'écoulera
encore jusque-là. Mais le prophète
garde la certitude que le salut viendra. Dieu a un
plan qu'il exécutera au travers des temps,
bien au delà de la brève mesure de
notre vie humaine. Ceci est la signification des
chiffres qui nous sont donnés ici et
là par les prophètes. Ils ne doivent
pas nous pousser à des calculs arbitraires.
Notre raison humaine est trop faible pour saisir
les calculs de Dieu; ne nous y
risquons pas! La certitude que Dieu agit
conformément à un plan qui comprend
des temps déterminés doit nous
suffire. Il y a une attente, jusqu'à ce que
les temps soient accomplis, « mais pour ce qui
est du jour et de l'heure, personne ne le sait, ni
les anges, ni le Fils ».
Le temps le plus proche et le
plus
éloigné s'étend devant les
peuples et les souverains comme un sombre tunnel.
L'humanité s'avance, pleine d'orgueil et de
désespoir, à travers ces
ténèbres sans espérance. Mais,
au sein de cette humanité aveugle marche une
multitude qui sait «par les Livres » que
le tunnel a une issue, et qui connaît celui
qui l'a percée. Elle sait qu'un jour
paraîtra, soudain, la sortie du tunnel et que
le Christ attend là les nations et leurs
souverains. Mais jusqu'à ce jour, cette
multitude sait «par les Livres» qu'elle
vit, d'heure en heure, de la miséricorde de
Dieu envers les pécheurs. Lorsque le dernier
jour sera venu, à la fin des temps, on
n'adorera plus dans les temples construits de main
d'homme et alors s'accomplira le plan souverain de
Dieu:
«Puis je vis un ciel nouveau et
une terre nouvelle; car le premier ciel et la
première terre avaient disparu, et la mer
n'était plus. Je vis la cité sainte,
la Jérusalem nouvelle qui descendait du
ciel, d'auprès de Dieu, prête comme
une épouse qui s'est parée pour son
époux. Et j'entendis une forte voix qui
venait du trône et qui
disait: Voici le Tabernacle de Dieu au milieu des
hommes ! Il habitera avec eux, et ils seront son
peuple ; Dieu lui-même sera avec eux. Il
essuiera toute larme de leurs yeux, et la mort ne
sera plus. Il n'y aura plus ni deuil, ni cri, ni
souffrance, car les premières choses auront
disparu »
(Apoc.
XXI).
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