On pourrait se demander à quoi rime tout ce déploiement de vaillance,
toute cette dépense d'énergie que d'aucuns qualifieraient de
gaspillage, car n'aurait-on pu leur trouver ailleurs un emploi plus
fécond ? Sur ce point, citons les résultats enregistrés par M. Saker
lui-même. Après quatre ans d'Afrique, il a fini par fixer le douala,
en a établi la grammaire ; il a traduit et imprimé en cette langue une
partie du Nouveau Testament et créé trois livres scolaires. Déjà en
octobre 1849, les élèves indigènes de l'école missionnaire commencent
à lire la Bible en anglais.
« Le 5 novembre 1849, écrit-il, est un jour
mémorable dans les annales de la Mission Baptiste au Cameroun, car
c'est la date du baptême dans les. eaux du fleuve, de Smith, le
premier converti sur place qui ait résolu de rendre ce témoignage
public. »
L'après-midi de ce même jour fut consacré à la
formation d'une Église dont M. et Mme Saker, Horton Johnson et sa
femme, et le néophyte Smith constituèrent le noyau. Cette journée se
termina par un service de Sainte Cène.
«Je viens donc de le vivre, ce jour tant désiré, où
j'ai enfin pu poser les assises d'une oeuvre solide au Cameroun et
fonder une Église chrétienne. Ah, si je pouvais maintenant voir cette
Église s'étendre et gagner jusqu'à mille âmes ! Mon espérance n'est
pas vaine, car l'Esprit de Dieu est à l'oeuvre; plus de vingt
personnes sont en quête du salut et boivent littéralement mes paroles
quand je leur explique l'Évangile. Les traits de férocité qui
défiguraient ces visages humains s'adoucissent peu à peu en une
expression d'innocence et de candeur ; et ceux qui, naguère, en
voulaient à ma vie, me demandent maintenant
« Que dois-je faire pour être sauvé ? »
Est-il besoin d'un autre témoignage de l'efficacité
de l'oeuvre de M. Saker ? Ainsi encouragé par des résultats tangibles,
il continue à se dépenser avec constance pour gagner ces âmes à Dieu.
Mais la santé de Mme Saker et celle du petit
Fernando donnent de l'inquiétude. Un nouveau séjour en Angleterre
s'impose. Mme Saker s'embarque avec son fils en février 1854. Nouvelle
séparation, nouvelle solitude pour son mari. Pourtant, M. Saker n'a
pas le temps de s'apitoyer sur lui-même. Écoutons-le : « J'ai de la
besogne jusque par-dessus la tête, et le coeur plein de sollicitude
pour toutes les familles qui se sont jointes à nous et dont je dois
assurer la subsistance ; et puis il faut avoir l'oeil à tout,
surveiller le travail d'apprentis dont les coups d'essai sont rien
moins que des coups de maître, quelle que soit leur évidente bonne
volonté, suppléer aux lamentables défections de ceux qui bâclent leur
travail ou le désertent, faute d'avoir le coeur à l'ouvrage.
En l'absence de Mme Saker, la petite indigène
qu'elle avait initiée au ménage reste seule à la tâche de préparer les
repas pour vingt personnes chaque jour; or, on ne peut rien acheter
sur place et parfois il faut envoyer un garçon en tournée toute une
matinée pour trouver de quoi faire un seul repas. Il faut, veiller
aussi constamment sur les vêtements pour les préserver des mites et
des rats. La construction surtout réclame une attention de tous les
instants, les terrassements, les fondations, la maçonnerie, le soudage
des barres de fer en faisceau pour former des poutres solides, tout
cela exige un soin, une précision, une technique que l'oeil vigilant
et la main exercée du missionnaire sont seuls à pouvoir assurer. Bien
d'autres incidents réclament son attention : c'est une blessure à
bander, une fièvre à calmer, un membre déchiré par un crocodile à
amputer, un combat à faire cesser, une querelle à mort à composer, des
conseils à donner aux rois et aux chefs tourmentés de problèmes
temporels et spirituels, l'imprimerie à diriger, et surtout et
par-dessus tout, la Bible à traduire . . . »
Au plus fort de ces travaux absorbants, M. Saker fut appelé d'urgence
au chevet de son petit garçon dont l'état ne laissait plus d'espoir.
Toute la science médicale appelée à son secours s'avérait impuissante
à le sauver d'une mystérieuse maladie tropicale. M. Saker s'embarqua
donc pour l'Angleterre en juillet 1855 dans l'espoir de revoir encore
l'enfant vivant. Hélas, cette maigre consolation lui fut refusée.
Quand il arriva, le Seigneur avait déjà rappelé à Lui cette petite
âme. Ce fut une cruelle épreuve pour les Saker qui avaient fondé tant
d'espoirs sur la précieuse petite vie pour le service de Dieu et
l'avenir de la mission. Mais ils savaient que la main qui frappe est
bien plus souvent encore celle qui bénit, et ils acceptèrent
humblement ce nouveau deuil.
Du reste, rien désormais ne pouvait détourner M.
Saker de l'oeuvre qui vivait en lui et dont la vision le soulevait
au-dessus des possibilités humaines. Aussi le voyons-nous, quatre mois
après, reprendre encore une fois avec sa femme le chemin de l'Afrique.
Ils y abordent en février 1856 et, cette fois, reçoivent de la
population un accueil enthousiaste. Quel heureux contraste avec celui
du début, onze ans auparavant ! Toutes les activités interrompues
reprennent aussitôt de plus belle et bénéficient d'une ardeur
renouvelée, d'une énergie accrue par ces quelques mois de repos mérité
et bienfaisant.
En mai 1858, M. Saker fit une visite au poste de Clarence. Il y
prêcha le dimanche matin sur « Christ, le fondement » (1, Cor., III :
11), et le soir sur « Arrêtez et sachez que c'est moi qui suis Dieu »
(Ps. XIVI : 11).
Le lendemain, il était occupé à charger des
provisions dans le bateau pour rentrer au Cameroun, lorsqu'il aperçut
un navire qui approchait de l'île et qui se trouva être de mauvais
augure. C'était un bâtiment espagnol, le Balboa, ayant à bord Don
Carlos Chacon, commandant de l'escadre navale espagnole et gouverneur
général des îles espagnoles de la côte ouest-africaine. Il amenait
avec lui six prêtres jésuites et était chargé de faire exécuter les
ordres de la Couronne. Il proclama la religion catholique seule
autorisée à Fernando Po, à l'exclusion de toute autre, exactement
comme dans le royaume d'Espagne.
À cette nouvelle, M. Saker fut frappé de l'à propos
de son message de la veille: « Arrêtez et sachez que c'est moi qui
suis Dieu, » et il décida de tenir une réunion de prières ce même soir
à sept heures.
Le 24 mai, le gouverneur manda M. Saker et lui fit
savoir que les jésuites étaient outrés de trouver des missionnaires
hérétiques dans l'île et qu'ils allaient sans tarder en extirper le
protestantisme. Ils refusaient de reconnaître les libertés accordées
aux termes de la constitution de 1843.
« J'étais souffrant cet après-midi-là, note M.
Saker, et pensais m'absenter de la réunion du soir ; mais, tandis que
je méditais sur les événements, le verset 7 du chapitre 3 de
l'Apocalypse s'imposa à mon esprit et une voix au-dedans de moi
semblait dire: « Va, porte ce message à ce peuple : C'est moi qui ai
les clefs. » J'oubliai vite mon indisposition et me rendis à la
réunion. J'y parlai longuement et avec puissance à une assemblée
attentive, jusqu'à près de neuf heures. Tous les amis de la mission y
étaient accourus, tous croyant se réunir pour la dernière fois.
Dernière ou non, j'ai le coeur en repos : Jésus a la clef !
« Les prêtres vont de maison en maison, annonçant
qu'ils baptiseront bientôt tous les enfants. En ville, les Espagnols
s'emparent sans compensation de toutes les volailles, canards, oeufs,
ignames, qu'ils trouvent. Ils ont fait savoir qu'une proclamation
serait faite aujourd'hui à midi. Une furieuse tempête s'est
entre-temps déchaînée et c'est sous une pluie torrentielle que
quelques habitants, parmi lesquels certains de nos amis, se sont
assemblés pour entendre le décret. A leur retour, les femmes étaient
en larmes. je leur lus Esaïe, XXVI : 20 : "Va, mon peuple, entre dans
ta chambre . . . » Après une courte allocution et de ferventes
prières, je renvoyai nos amis chez eux. »
« Le dimanche suivant, un grand silence régnait
dans la colonie de Clarence; on n'entendait plus les chants et les
prières qui, encore tout récemment, montaient de la chapelle et de
l'école en sons joyeux; les fidèles s'étaient groupés dans les maisons
et y tenaient des réunions en particulier et sans chanter. Ils
ignoraient encore, pourtant, qu'à bord des vaisseaux espagnols les
chefs se préparaient à débarquer des troupes qui avaient ordre de tuer
ou de saisir toutes les personnes rassemblées pour un service
religieux. Le silence qui régnait partout avait déjoué leurs plans,
dont M. Saker lui-même n'eut connaissance que plus tard. Quelle ne fut
pas sa joie de constater alors que le message que Dieu lui avait donné
pour les chrétiens de Clarence, avait empêché ceux-ci de braver
l'opposition, prévenant ainsi un conflit où beaucoup d'entre eux
auraient trouvé la mort.
Pour les aider pendant que ces lois restrictives
restaient en vigueur, il fut convenu que les services religieux se
tiendraient dans la jungle à quelque distance de la ville. Là, au
moins on pouvait chanter et prier sans crainte d'attirer la
malveillance des persécuteurs.
Entre-temps, les missionnaires faisaient des
démarches pour obtenir que l'exécution du décret soit suspendue
jusqu'à ce que les habitants aient pu communiquer avec la Cour
espagnole. On n'avait guère d'espoir de rien obtenir, mais cela
gagnait un temps précieux. En effet, un nouveau problème s'imposait à
M. Saker : qu'allait devenir ce groupe de chrétiens ? Toutefois, il ne
s'abandonnait pas à l'inquiétude : il savait que leur sort était entre
les mains de Dieu et qu'Il saurait les tirer de ce mauvais pas. Déjà
ne leur avait-Il pas envoyé M. Saker juste au moment critique ? Ces
gens s'en émerveillaient et, entourant le missionnaire, lui
demandaient, intrigués : « Comment saviez-vous qu'il fallait venir à
Clarence juste maintenant ? Avant que nous n'ayons eu le temps de nous
effrayer, vous étiez déjà venu à notre secours ! »
Le consul britannique donna, en l'occurrence, de
précieux encouragements, mais c'est à M. Saker qu'incombait la tâche
d'assurer l'avenir de ces colons chrétiens et, en vérité, nul pionnier
n'était mieux qualifié que lui pour inspecter les emplacements
susceptibles de leur donner asile, et pour faire un choix judicieux.
Il connaissait assez la côte du continent pour avoir la certitude
qu'elle recelait quelque part un endroit sûr où aménager un port et
implanter une colonie. Enfin arriva la réponse définitive du
gouverneur : il interdisait aux missionnaires de rester dans l'île. M.
Saker rassembla tout son petit troupeau, le mit au courant de la
situation et on résolut de quitter en masse ces rivages devenus
inhospitaliers dès qu'on aurait trouvé, pour y fixer la colonie, un
coin propice, en terre libre, où elle pourrait jouir des libertés
civile et religieuse.
Et telle est la profonde sagacité de M. Saker, la
largeur et la puissance de sa vision d'avenir, qu'il écrit à son
comité pour le mettre au courant, et ajoute : « En ce qui concerne les
futurs arrangements, Jésus sera notre guide. Priez pour que nous
soyons dirigés dans le droit chemin. Voici quelques idées : le
Cameroun . . . est un pays plein d'avenir au point de vue missionnaire
et une porte ouverte sur l'intérieur du pays. Il nous faut maintenant
un port où nous ayons la protection de la métropole ; ... on pourrait
installer un dépôt de charbon pour la Marine, un port sûr pour nos
navires marchands, un port franc pour le commerce des rivages voisins,
un asile inviolable pour les opprimés et les esclaves. Voilà les
grandes lignes du programme. Mais, en tout premier lieu, il nous faut
trouver un refuge où chacun puisse d'abord adorer Dieu en toute
liberté, puis trouver du travail et, s'il se peut, prospérer. »
Cette lettre n'était pas écrite depuis deux jours
que M. Saker, sans attendre la réponse, prend l'initiative d'aller
explorer la région montagneuse du Cameroun, avec ses escarpements
rocheux surplombant la mer ou venant y mourir, ménageant entre eux des
baies, des anses, des îles ignorées.
Il part un beau matin, si préoccupé de son projet
qu'il en oublie de déjeuner. Il part dans un frêle canot qui doit le
conduire de Clarence à la côte ouest-africaine à travers 30 kilomètres
de détroit où la mer est si tumultueuse qu'il reste quatre jours en
route, ballotté sur les vagues, exposé aux intempéries tropicales,
sans nourriture, en danger de mille morts.
Débarqué à Bimbia, il s'abouche avec le chef de
l'endroit, le roi William et obtient une promesse de vente de terrain
dans la baie d'Amboise. Puis, il revient à Bethel préparer les
éléments d'une grande salle à monter sur l'emplacement qu'il trouvera,
afin d'y loger les premiers émigrants. Encore souffrant des suites de
sa récente traversée, il repart pour Bimbia et, à peine à terre,
oubliant encore de manger, se met en route pour la baie d'Amboise. Il
s'en va par monts et par vaux, à travers ravins et rivières, escalade
crêtes et falaises. Au déclin du jour il tombe dans un précipice,
s'accroche à des racines, se retrouve sur un fond de roches noires que
lèche une marée menaçante comme un monstre savoure d'avance, à petits
coups de langue, une proie inespérée. Il faut à tout prix trouver une
issue, fuir une mort certaine; tout autour les parois sont à pic; mais
vers l'ouest s'estompe, dans une dernière lueur du couchant éteint, la
ligne brisée d'un contrefort plongeant dans la mer.
Là est le salut ; il faut contourner le
promontoire. Il tâtonne dans la nuit survenue, s'aidant des genoux et
des mains sur les roches arrondies et glissantes et, en deux heures de
cette acrobatie, parvient à doubler le cap hors de la portée de l'eau
perfide.
Tout le reste de la nuit, il grelotte à la belle
étoile. Le lendemain, couvert de boue, les vêtements en lambeaux et
les mains déchirées, il arrive enfin à Amboise Bay et reste confondu
devant la providence de Dieu qui lui fait trouver là le lieu idéal,
préparé depuis des millénaires : pas d'habitants, un pays richement
boisé et d'aspect fertile. Un peu plus loin, dans un repli de terrain,
apparaît la plus belle plage de tout le littoral, une grande étendue
de sable, une eau profonde que ne viennent pas agiter les grands
remous de l'océan. « je voulais trouver juste un bout de côte où l'on
pût seulement atterrir, dit-il, et voilà que Dieu me mène à cette
magnifique plage de près de 3 kilomètres, abritée du large et assez
vaste pour y mouiller quelque mille bateaux. Les brises marines la
rafraîchissent de jour et, la nuit, le vent de la montagne y souffle
dans toute sa pureté. Climat parfait ! »
Tout réconforté de cette trouvaille, il revient à
Clarence l'annoncer au petit groupe qui attend. . . . Trois nouveaux
navires de guerre espagnols sont arrivés. Il est grand temps de leur
soustraire leur proie. Mais comment transporter sur un seul canot
minuscule toute une colonie à travers la houle du sinistre détroit?
Le 9 juin, il retourne à Amboise Bay et prend
officiellement possession du terrain, sur lequel lui et ses compagnons
se recueillent un instant en prière pour le succès de l'entreprise.
Geste touchant, il donne à cet endroit le nom de Victoria, en songeant
à la bonne et gracieuse souveraine de son pays lointain. Puis,
fébrilement car le temps presse, il se met à défricher avec l'aide
d'un groupe d'indigènes. Il faut abattre des arbres, brûler la
broussaille, assainir le sol, faire de la place pour bâtir des
maisons. De Bethel on apporte des matériaux. Bientôt quelques
bâtiments s'élèvent sur la clairière, dont une chapelle. Et tout de
suite, les services religieux sont institués : cultes du dimanche,
réunions du mercredi et du vendredi, école, tout comme à Clarence.
M. Saker en outre construit une route d'accès à la
rivière distante d'environ 500 mètres. Il trace la rue principale de
la ville future, et prospecte les alentours.
Pendant les premiers mois de 1858, sa femme tomba
gravement malade ; il dut la faire transporter à Sierra Leone, où il
l'embarqua pour l'Angleterre.
Revenu seul à la brèche, il continue sa besogne
avec l'aide de tout un personnel qu'il a lui-même initié, formé,
façonné, et qui le décharge de bien des travaux manuels. Il mène de
front les trois stations de Clarence, de Bethel et de Victoria où se
poursuit, sous sa direction et surveillance, la préparation du refuge
destiné aux chrétiens de Clarence. Il va les voir, un jour, et encore
une fois arrive juste à temps pour faire face à de nouvelles
difficultés.
Le gouverneur espagnol venait de lui adresser sur
place une lettre réquisitionnant tout le terrain de la mission et lui
enjoignant d'avoir à vider les lieux immédiatement. Un exode en masse
s'imposait. Il envoie dire à tous les fidèles que ceux qui veulent
quitter Clarence doivent le lui signifier dès le lendemain en
indiquant leurs noms, le nombre de personnes dans chaque famille et la
valeur de leur maison.
Le jour suivant, il va trouver le gouverneur et
parlemente, lui exposant ses préparatifs à Victoria. Le gouverneur est
très courtois, cordial même, mais ses ordres sont formels ; il
pourrait même expulser tous ces chrétiens séance tenante ! Il comprend
les difficultés de transport et regrette de n'avoir pas de bateau à
mettre à la disposition des bannis. M. Saker, laissé ainsi à ses
propres ressources, dut faire la navette entre Clarence et Victoria,
passant chaque fois dans son canot trop petit et chaque fois
surchargé, quelques-uns des émigrants et leurs bagages. Cela n'alla
pas sans incidents dûs surtout à l'inclémence des éléments. Mais tout
a une fin, même les tours de force ; et le 16 janvier, 1859, M. Saker
enregistre enfin avec satisfaction que le transfert de la colonie de
Clarence est heureusement terminé.
Ainsi, grâce à lui, 90 personnes venaient
d'échapper à l'extermination.
Malgré les fatigues que lui avait causé cette
entreprise, et dont on se demande comment il a pu les supporter, il
recommence à Victoria ce qu'il a fait à Bethel ; il crée de toutes
pièces une deuxième station missionnaire pour assurer un refuge
inviolable à ces enfants du Seigneur. Puis il donne à la colonie
quelques règles de conduite simples et équitables, qui doivent lui
assurer paix et prospérité. Et c'est là le couronnement de son oeuvre,
où éclate plus encore qu'en toute autre chose, la profonde sagacité de
ce grand pionnier de l'Évangile.
L'effort que lui a coûté ce transfert reste comme
buriné dans sa chair : « J'ai peiné jour et nuit, écrit-il, j'ai usé
ma vitalité jusqu'à l'extrême limite, mes yeux et mes mains aussi. »
Il a bien mérité de son Seigneur, et le comité de Londres le reconnaît
en ces termes, dans un rapport daté de 1860 : « Il est difficile de
décrire M. Saker, tant ses travaux sont nombreux et variés. Si l'on
considère les circonstances de ses débuts et l'oeuvre extraordinaire
qu'il a accomplie et qui, sous certains aspects, relève des plus
hautes connaissances scientifiques, on se rend compte qu'il est plus
qu'un missionnaire éminemment qualifié ; il est véritablement l'un des
hommes remarquables de notre époque. »
Chapitre précédent | Table des matières | Chapitre suivant |