Retournons à Clémence Giraud.
Pendant le temps qui vient de s'écouler,
elle avait fait d'incroyables efforts pour
triompher des difficultés de sa position,
pour sortir de la mort spirituelle où elle
était plongée, pour exercer une
influence nouvelle et chrétienne (elle le
croyait du moins) sur les personnes dont elle
était entourée. À peine Mme
Dubois l'avait-elle quittée, que
Clémence, en rentrant dans sa chambre, avait
répété sa promesse - «
Oui! je lirai ma Bible, je prierai!»
Malheureusement, ce n'était pas
avec un coeur pénétré du
sentiment de son impuissance, ce n'était pas
avec le
regard fixé sur celui qui est le chef et le
consommateur de notre foi, que Clémence
avait renouvelé cet engagement. Son orgueil,
froissé mais non vaincu, s'était
emparé de cette bonne pensée d'une
régénération absolue, et, sous
ce masque, il régnait plus despotiquement
que jamais.
Clémence avait pris la fausse
toute de l'observation rigoureuse des dehors de la
loi, la fausse route du saint acheté par les
oeuvres, et elle n'y rencontrait que des
souffrances. Elle lisait
régulièrement sa Bible, mais elle n'y
venait pas chercher une vue plus claire de son
péché et de la gratuité de
Jésus; non, elle pensait, en parcourant un
ou deux chapitres, faire un acte méritoire,
se mettre en quelque sorte en règle avec
Dieu. Elle passait rapidement sur les versets qui
parlent, de l'impossibilité où nous
sommes de faire le bien; elle voulait marcher, agir
seule; elle prétendait soulever par sa
propre force le fardeau de ses
péchés, et le fardeau, qui retombait
de tout son poids, l'écrasait.
Clémence priait; mais il en
allait de la prière comme de la lecture des
livres saints. Le plus souvent elle disait, ainsi
que le Pharisien : «0 Dieu! je te rends
grâces de ce que je ne suis
pointcomme le reste des
hommes. »
(1)
Si elle
demandait au Seigneur son secours, elle le
demandait comme on demande un service dont,
à la rigueur, on pourrait se passer; elle ne
criait pas à lui comme on crie quand on se
sent périr. Puis, il arrivait
qu'accablée par l'inutilité de ses
efforts, elle murmurait machinalement une vague
confession, de ses fautes, et prenait des
résolutions plus solennelles, toujours
cherchant la force là où elle n'est
pas.
L'étude de la Bible toutefois ne
restait pas sans fruit pour Clémence, Sa
conscience obscurcie par sept années
d'indifférence, s'éclairait peu
à peu; elle devenait plus difficile envers
elle-même; elle se surprenait constamment en
faute, mais cette connaissance de sa misère,
premier degré que l'âme ait à
franchir pour remonter de la mort à la vie;
cette connaissance de sa misère remplissait
la pauvre Clémence d'irritation contre
elle-même et contre les autres; elle prenait
pour des vices nouveaux, ce qui n'était que
la vieille corruption de son coeur mise à
découvert; et plus elle avançait,
plus elle croyait reculer.
Des actes que depuis longtemps elle
voyait accomplir sans
répugnance, maintenant la
révoltaient, parce qu'elle les comparait
à ce qu'ordonne la loi de Dieu. Ainsi,
lorsque le père Giraud, en revenant de la
foire, se vantait d'avoir faufilé une mule
ombrageuse à quelque chaland
inexpérimenté, d'avoir acheté
de quelque niais vendeur une pièce de
bétail à moitié prix;
lorsqu'il se frottait les mains en riant de ses
dupes, et que les valets de la ferme,
rassemblés autour de lui, admiraient sa
finesse; au lieu de rester insouciante comme jadis,
Clémence, scandalisée, mais
scandalisée avec orgueil, adressait de
hautains reproches à son mari, lequel
répondait par un mot ironique, qui mettait
les rieurs de son côté, puis s'en
allait en chantonnant quelque vieux couplet sur les
ridicules féminins.
Quand, au moment de partager les
récoltes avec le propriétaire, le
fermier Giraud parvenait, à force de ruse et
de coquinerie, à grossir sa part aux
dépens de celle du maître,
Clémence, indignée, mais toujours
sèche, fière, prononçait le
mot de vol, et s'attirait quelque sanglante
réprimande.
Il en allait de même pour la
profanation du Dimanche, pour les jurements, pour
les mauvaises lectures, pour les discours
légers ou impies; toujours le blâme
orgueilleux de la part de
Clémence,toujours le
dédain moqueur de la part de Giraud.
De plus, Giraud, comme on pense, ne
perdait pas une occasion de faire remarquer
à sa femme que toute bigote, toute
sucrée qu'elle était, elle
pêchait comme une autre. Sa raideur, ses
vanités frivoles, ses fréquentes
révoltes contre le pouvoir marital, tout
cela était habituellement rappelé
à Clémence devant les habitants de la
ferme ..... car le père Giraud ne se
gênait guère.
Clémence, qui souffrait dans son
amour-propre, souffrait aussi dans sa conscience;
elle sentait vaguement qu'elle faisait plus de mal
que de bien ; qu'en manquant au respect, à
l'affection conjugale, elle se
déconsidérait elle-même,
qu'elle déconsidérait sa religion aux
yeux dé Giraud, aux yeux de ses enfants, aux
yeux de ses serviteurs.
Il faut le dire, cependant,
Clémence remplissait avec exactitude des
devoirs jadis négligés parce qu'ils
étaient dédaignés. On la
voyait plus soigneuse d'établir l'ordre dans
sa maison, plus soumise dans ce qui tenait aux
détails extérieurs de la vie; mais si
elle cherchait à remplir rigoureusement ses
obligations dans ce qu'elles avaient de strict,
elle n'allait pas au-delà. Il n'y avait dans
ce qu'elle faisait ni élan, ni amour, ni
même lesfranches
allures du bon vouloir. On reconnaissait les
oeuvres de l'esclavage, non celles de la
liberté.
Quoiqu'il eût remarqué
cette amélioration, Giraud s'en montrait peu
reconnaissant; il sentait là-dedans quelque
chose de contraint qui lui disait que l'affection
n'inspirait aucun de ces efforts, et il en
profitait pour se dispenser du devoir de la
gratitude. D'ailleurs il pensait que ces
progrès si subits pourraient bien
n'être que l'effet d'un caprice il attendait
pour manifester quelque satisfaction, que le
caprice eût duré longtemps; et puis,
deux ou trois paroles amicales, deux ou trois
encouragements qu'il avait adresses à
Clémence, n'ayant provoqué chez elle
qu'un surcroît de froideur, il s'était
tenu pour averti, et ne donnait plus un signe
d'approbation.
Clémence ne réussissait
pas mieux avec ses enfants. L'aîné,
qui à douze ans venait de faire sa
première communion, ne l'écoutait
qu'avec une sorte de défiance.
Clémence avait essayé de lire avec
lut les livres qu'il recevait à
l'école des Frères, mais a chaque
instant rebutée par de fausses doctrines,
elle repoussait le livre, on entamait une
discussion dans laquelle l'enfant n'entrait qu'avec
répugnance, dont il sortait
scandalisé, et qui,
lorsque Giraud s'en
apercevait, l'irritait toujours, non pas tant
peut-être comme acte de prosélytisme,
que comme manifestation d'une croyance qui devenait
vivante, qui pourrait un jour se faire
gênante.
Clémence avait tout aussi peu de
succès auprès de Pierre, il se
moquait, il est vrai, des ordres et des
défenses de l'Église, qu'il ignorait
parfaitement du reste, car il ne mettait que le
moins possible les pieds à l'école;
mais il se moquait aussi des enseignements de sa
mère, qu'il trouvait d'une
austérité, d'un ennui
révoltants.
C'était naturel :
Clémence, en présentant sans cesse
les épines de son péché au nom
de la religion, écartait chacun de la
vérité.
Hélas ! elle-même
connaissait-elle, avait-elle accepté cette
vérité parfaite? ne
s'était-elle pas arrêtée au
pied de ce mont Sinaï, où
éclaté le tonnerre où la
foudre de la loi sillonne seule les
ténèbres, au lieu de s'en aller au
pied du Golgotha, où resplendit la douce,
l'éternelle clarté du pardon ;
d'où descendent ces mots, notre force et
notre joie : Tout est accompli!
Lorsqu'elle regardait à son
coeur, elle n'y voyait qu'impatience du joug, que
sentiments haineux, que crainte et que
péché.
Lorsqu'elle regardait à ses
enfants, un regret poignant saisissait son
âme l'éloignement de l'un, la
légèreté de l'autre, son
influence perdue pour tous deux, leur avenir
compromis par sa faute, tout la navrait.
Lorsqu'elle regardait à son mari,
sa tristesse devenait accablante. Point
d'amitié, point d'accord, point dé
confiance, point de secours! Que n'eût-elle
pas donné pour trouver dans un époux,
je ne dis pas un chrétien
expérimenté qui fût son guide,
mais seulement un homme compatissant qui
l'écoutât lorsque son pauvre coeur
demandait à s'ouvrir, un homme droit qui
cherchât avec elle la vérité;
moins que cela : tout simplement un homme
appartenant à sa communion avec lequel elle
pût lire de temps à autre un verset de
la Bible, avec lequel elle pût, ne
fût-ce que dans de graves circonstances,
s'agenouiller devant Dieu, sans que ces
désolantes paroles mille fois
répétées : tu as ta religion,
j'ai là mienne , vinssent là
repousser hors de l'union.
II y à des gens qui se
scandaliseront en lisant ceci, qui
s'écrieront qu'on peut prier, qu'on peut
lire la Bible avec un catholique-romain, qu'on peut
avec lui vivre dans une intime communion de
convictions et de pensées. Oui, et nous le répéterons
à
satiété, oui avec un
catholique qui n'est plus catholique.
Quant aux véritables sectateurs
de l'Église romaine, les aimer en
Jésus, prier pour eux, admirer ce qu'ils ont
de bon, penser comme eux toutes les fois qu'ils
pensent comme la Bible, c'est possible, c'est
ordonné; mais vivre avec eux en unité
de foi, cela n'est praticable qu'au moyen du
sacrifice, de l'obscurcissement de tout ce qui,
dans la foi, s'oppose à leurs erreurs. On
aura beau faire, il n'y a qu'une
vérité; on peut passer à
coté, par dessus, par dessous; mais la
doubler, la tripler, la quadrupler; faire une
vérité rationaliste, une
vérité musulmane, une
vérité catholique, une
vérité évangélique, et
leur accorder à chacune la même
confiance, les mêmes droits, c'est sans s'en
apercevoir, les nier toutes.
Clémence, profondément
découragée, se rappela la demande que
Mme Dubois lui avait faite : écrivez-moi.
Elle s'adressa à la gouvernante, lui
dépeignit avec franchise l'état
d'âme que nous venons de décrire, et
en reçut la réponse que nous
transcrivons ici :
« Ma chère
Clémence,
Vous ne voulez donc pas aller à
Christ pour avoirla vie !
Vous persistez donc à chercher des fruits
sur un arbre qui n'a point de racines! Vous refusez
de croire que Jésus vous a rachetée,
que vous êtes son enfant; et
condamnée, perdue, sans espérance
comme vous vous croyez, vous prétendez
produire les oeuvres de l'amour, de la paix, de la
conversion!
Ma chère enfant, ne faites pas
Dieu menteur. Croyez-le quand Il nous dit qu'un
homme ne peut sauver son âme,
(2)
que toutes
les pensées de notre coeur ne sont que mal
en tout temps;
(3)
et croyez-le
encore lorsqu'il nous dit qu'Il est venu non pour
les justes mais pour les injustes,
(4)
que
dès à présent ceux qui ont la
foi sont sauvés,
(5)
qu'ils seront
sanctifiés.
(6)
Oh ! Clémence, quand d'un coeur
humble vous aurez dit amen à ces paroles de
Dieu, quand vous aurez reçu votre
grâce comme un mendiant reçoit le don
que laisse tomber le riche dans sa main, avec la
même simplicité, avec la même
confiance, sans vous imaginer que le Seigneur vous
trompe en vous donnant un faux salut ; alors, mon
enfant, alors vous vous réjouirez d'une
parfaite joie. Vous ne vous irriterez plus, vous ne
vous enflerez plusd'orgueil
sous prétexte de fidélité
à l'Évangile, vous trouverez une
secrète satisfaction à combattre
votre péché, vous serez patiente,
vous serez soumise, vous attirerez les autres
à Christ, et vous ferez tout cela parce que
vous vous sentirez aimée, parce que vous
aimerez.
Si au lieu de montrer de la
sécheresse à votre mari, vous lui
témoignez un attachement sérieux ; si
au lieu de rester froide à ce qui le touche
vous prenez un véritable
intérêt à ses affaires; si au
lieu de le blâmer en public, vous lui
adressez en secret quelques observations rares,
modérées, pleines de douceur, comme
il convient à une femme chrétienne;
Giraud restera-t-il aussi moqueur? continuera-t-il
à vous traiter avec une sorte de
dédain?
Il pourra bien par contenance, par une
fierté mal entendue, conserver quelque temps
la même façon d'agir ; mais dans le
fond, je vous l'affirme, Clémence, il sera
frappé à salut d'un tel
changement.
Que doit-il penser au contraire de
convictions qui vous laissent tous vos
défauts; qui dans ce moment y ajoutent
même des prétentions à le
critiquer, à le dominer.
Que cette foi vous rende humble, qu'elle
répande sur votre visage le doux
éclat de la sérénité chrétienne, sur vos
lèvres le sourire bienveillant de la
charité; dans vos discours la
fidélité sincère et pourtant
point irritante d'un véritable enfant de
Dieu; qu'elle remplisse votre coeur d'une tendresse
désintéressée pour votre mari,
et soyez-en certaine, Clémence, cette foi
transportera les montagnes. Mais pour cela il faut
appartenir à Christ, et on ne lui appartient
que lorsqu'on se laisse racheter par Lui.
Quelques mois de pratique, ma
chère enfant.
Ne parlez jamais à votre mari dit
haut de votre justice, cette justice n'existe pas
plus chez vous que chez lui, que chez moi.
Mettez-vous en face de vos fautes habituelles et ne
vous adressez à Giraud pour lui faire une
observation, que lorsque vous serez bien convaincue
que vous ne valez pas mieux que lui.
Ce n'est pas tout, Clémence, ayez
à coeur le succès du conseil que vous
donnez, de l'effort que vous faites. Ne vous
contentez pas de servir la vérité par
acquit de conscience; choisissez pour la
présenter le moment favorable, disposez les
coeurs à l'entendre, rendez-la attrayante,
on du moins ne la rendez pas repoussante; ne prenez
jamais de cesairs froids ou
revêches, qui effraient un mari, et qui, par
conséquent, le fâchent.
Allez plus loin encore, mon enfant; ce
que vous ne souffrez pas chez vous, supportez-le
chez Giraud. Fermez les yeux sur ses torts, soyez
comme la charité qui ne soupçonne
point le mal. »
(7)
Est-il
moqueur? résignez-vous de bonne grâce
à ses plaisanteries. vous offense-t-il par
un mot injurieux? voyez si le coup a
déchiré l'orgueil ou le coeur. Vous
impose-t-il des devoirs qui vous répugnent ?
cherchez vers Dieu la force de les accomplir
gaîment. Oppose-t-il un refus à de
justes demandes ? renoncez-vous pour l'amour du
Soigneur, car Il s'est renoncé pour l'amour
de vous.
Giraud ne vous comprend pas, Giraud vous
fait souffrir !... Mais vous-même,
Clémence, vous ne vous comprenez pas;
vous-même, vous vous faites souffrir;
travaillez donc sur vous !
Oh mon enfant! aimez le Seigneur ;
à cause de lui, aimez votre mari, et vous
deviendrez bien habile.
Vous avez une belle écriture, les
yeux de Giraud se fatiguent, il est
âgé; pourquoi ne lui proposeriez-vous
pas d'écrire, ses notes, de tenir
ses livres ?... Il aime la
lecture; pourquoi les soirs d'automne, à la
veillée, ne choisiriez-vous pas quelque
ouvrage intéressant, quelque voyage, quelque
récit de missions que vous prêterait
volontiers le pasteur de Saint-Agrève, pour
les lire à haute voix au coin du
feu.
Votre mari est économe;
abandonnez cet amour de la toilette qui convient
mal à une femme chrétienne; prenez
soin de votre ménage; ne laissez rien
perdre; qu'il voie, qu'il sente que quelque chose
de nouveau s'est passé en vous; qu'il soit
entraîné à rechercher
d'où vient ce changement; que votre foi lui
prouve sa vérité par ses
oeuvres.
Je voudrais que, sans vous rebuter, vous
missiez sous les yeux de votre mari quelques
portions de la sainte Écriture. Je voudrais
qu'au lieu de fuir tout entretien sérieux,
vous fussiez prête, en chaque occasion,
à rendre raison de votre croyance avec
douceur. Giraud pourra vous froisser par quelque
parole inconvenante; il pourra vous repousser en
alléguant la différence de vos
communions; mais votre devoir, Clémence,
devoir impérieux, est de présenter la
lumière à l'âme de votre mari,
d'éclairer l'âme de vos deux
fils.
Pour moi, je ne connais pas de puissance
qui ait le droit de vous empêcher de
méditer avec ces derniers la Parole de Dieu,
de prier avec eux et pour eux.
Que votre tâche est belle,
Clémence! amener un époux, amener des
enfants à la vie éternelle! Et cette
tâche ne se borne pas là - vous
pouvez, vous devez vous occuper des domestiques de
la ferme, leur épargner les tentations,
veiller à ce que rien d'immoral ne se passe
entre eux, soigner leurs intérêts
matériels ; n'y a-t-il pas là de quoi
remplir utilement votre vie?
J'ai connu un riche fermier et sa femme,
qui dans les soirées d'hiver donnaient
eux-mêmes des leçons de lecture et
d'écriture à leurs domestiques. La
veillée ne se terminait pas sans qu'on
lût un chapitre de la Bible et qu'on
priât ensemble. Combien il était beau,
l'après-midi du Dimanche, de les entendre
tous, assis devant la ferme, chanter en partie nos
admirables psaumes!
Clémence, votre influence
n'existe pas encore; vous ne pouvez que
témoigner par la transformation de votre
conduite de l'excellence du christianisme
évangélique; mais cela, mon enfant,
cela au moins, faites-le. Faites-le par la force de
Christ. Ne tournez plus autour de vous-même;
marchez droit au Sauveur,
touchez sa robe comme la femme malade depuis douze
années;
(8)
importunez-le
comme la Syrophénicienne;
(9)
ou
plutôt, asseyez-vous à ses pieds ainsi
que faisait Marie;
(10)
écoutez-le quand Il vous dit : Je suis le
chemin, la vérité et la vie: nul ne
vient au Père que par moi;
(11)
et sachez,
Clémence, sachez que Celui qui vous a
donné son Fils vous donnera toutes choses
avec Lui. (12)
Toutes choses! par conséquent la bonne
volonté, par conséquent l'affection,
par conséquent le succès et la
joie!
Adieu, mon enfant, prenez courage;
« vous aurez de l'angoisse au monde, mais
Jésus a vaincu le monde. »
(13)
Un petit envoi de livres accompagnait
cette lettre. Clémence la relut deux fois,
mais la première phrase s'était tout
d'abord enfoncée dans son coeur Vous ne
voulez pas aller à Christ pour avoir la vie
Elle sentit qu'elle n'avait rien compris
jusqu'alors à l'Évangile; elle
parcourut les livres, ils éclaircirent pour
elle bien des obscurités. Cependant elle
s'attacha surtout à la Bible, à ces
psaumes, à ces épîtres,
à ces saintes narrations que tant de
foiselle avait relues, qui
tant de fois, elle le croyait du moins, ne lui
avaient parlé que de justice, que d'oeuvre,
que de châtiments; et elle reconnut que si
toutes en effet parlaient de péché
dans l'homme, toutes parlaient de la
fidélité du Fils de l'homme pour
l'effacer; que si toutes parlaient de la
nécessité d'une conversion, toutes
parlaient de la puissance du Saint-Esprit pour
l'opérer dans le coeur; que si toutes
parlaient de la colère de Dieu contre le
coupable impénitent, toutes parlaient de la
patience de Dieu envers le pécheur
humilié. La pierre angulaire du temple des
Écritures se dressait devant elle, la loi
l'amenait en pédagogue à la
grâce.
(14)
Si cette route nouvelle qui s'ouvrait
devant Clémence était la bonne
route.... nous le laissons à deviner au
lecteur.
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