Je ne prétends pas, tant s'en faut, que
les forts soient toujours grossiers et que les
faibles soient toujours charmants ; je crois au
contraire aux affinités qui unissent les
qualités de l'esprit et celles du coeur;
l'intelligence, l'énergie et la bonté
peuvent très-bien se donner la main, et d'un
autre côté les défauts vont parfois de conserve;
il
n'est
pas rare que les natures bornées soient en
même temps les moins aimables, les plus
entêtées, les plus orgueilleuses, Mais
c'est ici qu'éclate
précisément l'action protectrice de
la famille : elle nous connaît, parce qu'elle
s'est donné la peine de nous étudier
en nous aimant et parce qu'elle suit les moindres
mouvements de nos âmes depuis que nous sommes
au monde; aussi sait-elle ce qu'il faut combattre,
ce qu'il faut corriger, chez les faibles et chez
les forts ; elle veille sur ceux qui ont beaucoup,
elle tâche d'enrichir ceux qui ont peu; enfin
tous sentent, et ceci est immense, qu'ils sont
égaux devant son amour. N'est-ce rien de
ramener à l'amabilité, à la
défiance de soi, au respect des autres,
à la pratique des humbles devoirs, ce jeune
homme auquel s'ouvre une carrière brillante
et qu'enivrent les applaudissements? N'est-ce rien
de relever graduellement ce jeune homme que les
insuccès ont écrasé, sur
lequel le monde a prononcé un jugement sans
appel et qui peut-être au malheur
d'être impropre à la vie joint le
malheur plus grand d'avoir peu de coeur? Son coeur
s'éveillera au contact
d'une tendresse qui ne se lasse point, son
intelligence s'ouvrira sous l'influence de ceux qui
vont cherchant pour lui un moyen d'exercer ses
facultés et de se rendre utile ; ils
cherchent et ils trouveront.
Toute famille n'accomplit pas ces
miracles. Lorsqu'on vise au commode, on n'a garde
d'entreprendre l'oeuvre la plus difficile et la
plus ingrate qui se rencontre dans le champ de
l'éducation. Les parents qui ont
renoncé à leur tâche et qui se
reposent taudis que des précepteurs ou des
collèges sont censés élever
leurs enfants, ne se tourmentent pas de tant de
questions. S'ils ont un fils qui remporte beaucoup
de prix et qui promette de faire son chemin, ils
s'en félicitent sans trop s'informer des
conséquences morales que le succès
peut produire en lui ; s'ils ont un fils impropre
à l'étude, ils s'en désolent
et en viennent peut-être à l'aimer
moins. Quant à s'occuper de cette
intelligence, de cette âme, quant à
soutenir, à guider à porter en
quelque sorte dans leurs bras ce pauvre petit qui
n'a qu'eux seuls pour l'aimer, il va sans dire que
l'idée ne leur en vient pas.
L'éducation est chose sérieuse, et
quiconque s'est démis de sa charge aux mains du
socialisme
scolaire hésite à retourner aux
devoirs dont il comprend instinctivement les
difficultés et la durée.
L'égalité dont nous
parlons n'existe guère que dans les familles
où règne l'intimité
chrétienne des époux. Là le
devoir occupe sa place, la première,
là ou sait le prix des âmes. Bien
au-dessus des distinctions vulgaires entre les
filles et les garçons, entre les
aînés et les cadets,
s'élève le rapport établi par
la loi divine entre les parents et les enfants. Ce
rapport demeure immuable, quels que soient les
enfants, en dépit de leurs fautes et de
leurs défauts.
La famille telle que nous l'avons vue se
constituer sous nos yeux, aura peut-être des
préférences; il est difficile de ne
pas aimer ce qui est aimable et de ne pas se sentir
repousse par ce qui est maussade et mauvais..
Cependant les sympathies ne changent rien au
devoir, et d'ailleurs n'importe-t-il pas
d'éviter ce qui exciterait des sentiments de
jalousie chez nos enfants'? Nous le sentons,
l'égalité est ici une des formes du
devoir. Il importe que nul ne soit et ne se croit
exclu de notre tendresse. Si les torts d'un enfant
entraînent leurs
justes conséquences, s'il y perd pour
quelques jours sa part de caresses, rien n'est plus
naturel, c'est un châtiment, et la place du
châtiment est marquée dans nos
familles, il fait partie intégrante de la
moralité du foyer. Néanmoins
l'égalité fondamentale demeure : les
mauvais et les bons sont nos enfants et ils le
savent.
Je voudrais étudier de plus
près cette grande égalité, non
moins précieuse assurément que celle
du collège, et
très-différente.
Voici, à côté de
l'enfant remarquable, bien doué,
supérieur, sympathique, celui qui semble ne
devoir pas faire beaucoup d'honneur au nom qu'il
porte. Les parents éprouveront avant tout le
besoin de ne marquer aucune distinction entre eux
deux ; ils n'auront garde de décourager
celui qui bientôt, à divers signes,
découvrira son infériorité.
Que ces frères s'aiment, ce sera
déjà beaucoup ; la tendresse a ses
délicatesses et ses divinations, même
dans l'enfance ; le plus fort aidera le plus
faible, le niveau finira peut-être par
s'établir. Puis, le faible ne sera pas
faible en tout, on découvrira sa
spécialité, on lui donnera la joie de s'élancer à
son
tour dans la direction qui lui est propre.
Il est des enfants maladifs.
L'éducation publique a pour eux des
infirmeries, ses compassions se bornent là.
Incapables de suivre, ils traînent à
l'arrière-garde, en attendant l'heure
où on les abandonnera. Les armées en
marche n'ont pas le temps d'être tendres;
tant pis pour le soldat qui n'a pas de bonnes
jambes! il restera au bord d'un fossé, les
ambulances (quand il y en a) le recueilleront une
ou deux fois et il finira à l'hôpital.
- Ces procédés sommaires ne sont pas
en usage dans la famille ; elle réserve ses
meilleurs soins à ses infirmes. Qu'ils
guérissent ou non, elle ne les mettra certes
pas au dernier rang ; elle leur donnera, à
eux surtout, le doux sentiment de
l'égalité, elle saura leur persuader
qu'ils sont utiles. Et ils le sont en effet, vous
pouvez m'en croire; grâce à eux, la
famille a fait un pas en avant. Qui n'a
considéré avec émotion ces
pauvres crétins du Valais, qu'entoure
l'affection et presque le respect des leurs?
Superstition A part, n'est-il pas touchant d'aimer
ainsi ceux qu'accable une infirmité
dégoûtante et sans remède? Ils
ne servent à rien, il
faut les nourrir, on est pauvre ; n'importe,
l'infortuné n'apercevra jamais au travers
des brouillards de son intelligence engourdie que
des visages bienveillants et amis.
Mais la famille a, nous l'avons dit, un
problème plus difficile à
résoudre. À l'égard de
l'enfant borné ou de l'enfant infirme, son
devoir est clairement tracé; elle ne peut
éprouver, elle n'éprouve aucune
hésitation. L'enfant méchant ne
fera-t-il pas fléchir le principe de
l'égalité ?
Le méchant n'est pas celui qui
contrarie nos plans, qui ne se plie pas à
nos vues, qui n'adopte pas nos idées. Les
parents sont appelés à accepter de
telles douleurs, quoiqu'elles soient grandes; ils
savent distinguer entre une indépendance
excessive et une révolte, entre un esprit
faux ou une imagination égarée et un
parti pris de faire ce qui est mauvais.
Un enfant peut nous être peu
sympathique et ne pas être méchant; il
peut avoir beaucoup de vices et ne pas
mériter encore cette qualification. Nous
connaissons trop notre propre coeur, nous nous
souvenons trop de notre jeunesse, nous avons trop
lu l'Évangile, pour croire à l'innocence des
enfants; nous n'ignorons pas que le
péché est déjà à
l'oeuvre dans ces jeunes âmes. De quel droit
donc nous étonnerions-nous de rencontrer
chez les nôtres ce que nous avons
rencontré chez nous-mêmes, l'influence
des mauvais penchants? La famille n'est-elle pas
chargée de la combattre, de
l'étouffer sous une influence
meilleure?
Mais il y a des enfants qui ne sont pas
seulement vicieux, ils sont méchants.
Hostiles, secs, déjà endurcis dans le
mal, ils semblent prendre à tâche de
répondre à l'affection par
l'insensibilité. Sous quelle forme la
famille maintiendra-t-elle vis-à-vis d'eux
le principe de l'égalité ?
Ici est la merveille. Je connais un
procédé fort commode qui, grâce
à Dieu, n'est point à l'usage des
vraies familles. L'indifférence au mal non
permet d'être bons, je me trompe,
d'être faibles et égoïstes
à notre aise. - Ne faut-il pas que jeunesse
se passe ! Exigerons-nous que nos enfants nous
obéissent comme des esclaves !
Prétendrons-nous être aimés
d'eux comme ils le sont de nous! Est-ce que la
tendresse remonte ! Et autres phrases toutes
faites, qui sont au service de
quiconque veut se dispenser de ses devoirs de
père.
Si nous pouvions voir les ravages
qu'elle fait, cette fausse et abominable tendresse,
nous reculerions épouvantés. Les
enfants ne s'y trompent pas ; ils ne confondent pas
les mauvaises complaisances et l'affection; ils
savent peu de gré aux parents qui ne les
défendent pas contre leur
méchanceté, de peur de leur causer de
la peine. Nous devons causer de la peine à
nos enfants ; il importe, plus que je ne puis le
dire, qu'ils n'apprennent pas de nous à
appeler le mal bien et le bien mal.
L'égalité dont je parle
n'exige pas, tant s'en faut, que nous traitions de
la même manière l'enfant qui nous
satisfait et celui qui nous mécontente ;
elle n'exige qu'une chose : l'un et l'autre
sentiront qu'il n'y a rien de capricieux en nous;
nous ne cédons pas à des
préférences, nous remplissons un
devoir.
La tendresse affligée est encore
et plus que jamais de la tendresse. Qu'il nous
serait doux de n'être plus comme notre coeur
est prêt, je ne dis pas à aimer, mais
à manifester son affection ! Pour aimer sévèrement,
il
faut aimer beaucoup : demandez aux mères. Et
pourquoi n'ajouterais-je pas : demandez aux
enfants? Un instinct secret les avertit de ce qui
se trouve derrière cette
sévérité; ils ont lu dans ces
regards, où la sainte aversion du mal ne se
trouve pas seule; ils ont deviné en partie
les angoisses de ces âmes en deuil.
Oui, en deuil : les pères, les
mères pleurent leur enfant
égaré, comme ils pleureraient leur
enfant mort. Mais ils ne se bornent pas à
pleurer, ils agissent. Qui aimera ce malheureux,
s'ils ne l'aiment pas? Qui travaillera à le
ramener, s'ils n'y travaillent pas? Ils y
travaillent jour et nuit. Comment? C'est le secret
de la famille. Elle aime; donc elle ne se rebute
jamais. Où la parole a échoué,
les prières triompheront. L'amour est fort,
il est patient, et selon la parole de
l'apôtre, « il espère tout.
» Ne dites pas à une mère que
son fils est incorrigible ; y a-t-il des fils
incorrigibles pour les mères? Il faut,
entendez-vous bien, Il faut qu'il se corrige, et il
se corrigera. Pourrait-elle vivre, la mère,
si elle en doutait un moment? Le fils de ses
entrailles, elle ne l'emporterait pas avec elle dans
l'éternité,
devant le trône de Dieu ! Je vous dis que
cela ne se peut pas et qu'aucune mère
chrétienne ne renoncera à son oeuvre.
Elle a des trésors inépuisables de
tendresse, de pitié, de vigilance, de
persévérance confiance
passionnée. Vous la croyez à bout de
ressources? Non, elle poursuivra son fils
jusqu'à ce qu'elle le tienne entre ses
bras.
La compassion de la mère pour
l'enfant méchant est un des grands
spectacles d'ici-bas. Victor Hugo l'a compris
lorsque, racontant le premier meurtre, il
écrivait ces vers :
Ils pleuraient tous les deux, aïeux du genre humain,
Le père, sur Abel, la mère sur Caïn.
« La mère sur Caïn.
» C'est son droit, à elle, de pleurer
sur celui-là. L'infortune navrante,
insondable de la méchanceté trouble
son pauvre coeur. Larmes amères, larmes
fécondes souvent, et que Dieu recueille dans
ses vaisseaux ! Si les Caïns finissent par
courber la tête, c'est qu'une mère,
qui aime en dépit de tout, a accumulé
sur leur front les charbons ardents de son
indestructible charité.
Et voilà la magnifique
égalité que nos enfants ne
connaîtraient pas sans la famille. Elle
dépasse de bien loin l'égalité
superficielle du collège et du monde elle ne
rebute ni les faibles, ni les incapables, ni les
disgraciés, ni les infirmes, ni les
maussades, ni les méchants. Les
méchants! que deviendraient-ils s'il n'y
avait quelqu'un pour les aimer? Christ n'est-il pas
mort pour les méchants? Serait-il venu
sauver des justes, par hasard? Nous-mêmes,
lorsque sa grâce a touché notre
âme, qu'étions-nous donc? La
mère chrétienne d'un enfant
méchant sait qu'elle a été
méchante, elle aussi, vis-à-vis de
son père céleste, et que l'amour seul
a pu la vaincre.
Aimer les méchants, le Dieu de
l'Évangile a fait cela. Et en faisant cela,
il a fondé la merveilleuse
égalité des âmes. Toutes
perdues, toutes sauvées, coûtant
toutes le même prix, toutes appelées
à la même sainteté, à la
même éternité, au même
bonheur, elles se valent.
Nous entrevoyons déjà, si
je ne me trompe, le sens profond
de ce mot éducation, que n'épuisent
assurément pas les leçons des
maîtres et la surveillance des proviseurs.
Après avoir rendu justice au collège,
nous avons commencé à rechercher
quelles sont les choses qui constituent
l'éducation et qu'on n'apprend pas au
collège. Poursuivons; nous parviendrons
ainsi à nous rendre un compte moins
incomplet des devoirs des parents.
Parmi les choses qui ne s'apprennent pas
au collège, je nommerai d'abord l'affection.
S'il me fallait indiquer l'origine de ce ton sec et
déplaisant qui nous choque chez beaucoup
d'enfants aujourd'hui, je n'hésiterais pas
à dire qu'ils ont été
entièrement abandonnés à
l'éducation publique; en d'autres termes,
qu'ils n'ont pas été
élevés. Ils sont tranchants, ce sont
de petits hommes, ils ont un certain esprit, ils
font des mots et on les cite, leur prétendue
naïveté est elle-même
tournée à l'effet; ne leur demandez
pas la vraie candeur, ils en sont à cent
lieues.
Que c'est triste ! Ceux qui aiment les
enfants, et je suis du nombre, découvrent
avec douleur qu'il n'y a presque plus d'enfants;
ils se trouvent comme dépaysés au,
milieu de jeunes messieurs qui daignent à
peine jouer, qui après dîner iraient
volontiers au fumoir, qui parlent avec aplomb de
sujets auxquels ils n'entendent goutte, qui se
forment dès leur enfance au rôle
abominable où s'absorbera peut-être
leur vie - affirmer, paraître, cacher son
ignorance derrière son effronterie, vivre de
phrases apprises, de connaissances superficielles,
d'opinions reçues, choisir ses croyances
comme on choisit ses habits, d'après la
mode.
L'artificiel nous envahit. Pourquoi?
Parce que nous ne sommes pas «
élevés. » Si le monde s'empare
de nous à treize ou quatorze ans, si l'abri
de la maison paternelle nous fait défaut,
nous ne pourrons pas, cela est évident,
échapper à la fausse distinction,
c'est-à-dire à ce qu'il y a de moins
distingué Ici-bas. Pour arriver au vrai
comme il faut, pour échapper au banal, au
factice, nous avons besoin d'une famille.
La famille est l'asile du naturel.
Là habite la grande sincérité,
parce que là habitent les grandes
affections. Là s'épanouissent les
vrais enfants ; là se déploie le
ravissant spectacle des adolescences naïves, ardentes,
ouvertes aux
nobles
ambitions ; là déborde la vie. C'est
tout simple, le coeur s'est ouvert, l'enfant qui a
une famille a appris la tendresse.
La tendresse s'apprend. Livré
à lui-même l'enfant ne deviendrait
rien moins qu'aimable ; égoïste,
occupé de soi, il serait bientôt ou
brutal ou roide. Ah, ne lui ôtez pas les
caresses de sa mère. Des caresses, cela fait
tant de bien! Il est si doux de se sentir
aimé ! Vous avez vu les fleurs s'ouvrir
à la chaleur du printemps ; il doit y avoir
de même un printemps de la vie, un printemps
avec ses fleurs, avec sa tiède
atmosphère qui fond les glaces et fait
circuler la sève.
C'est ainsi que s'ouvre l'âme de
nos enfants; ils s'habituent à la tendresse,
à l'expansion. Une habitude, c'est quelque
chose. Nos meilleurs sentiments se transforment en
habitudes, en nécessités
premières, en instincts, et ils n'en valent
pas moins pour cela; nous ne faisons tout à
fait bien que ce que nous sommes arrivés
à faire sans effort et pour ainsi dire sans
y penser.
Heureux enfants, qu'on aime et qui
aiment, qu'on caresse et qui caressent, qui pensent
simplement, sentent simplement,
qui n'ont pas perdu la candeur de leur âge!
Ils entrent dans la vie par la porte dorée,
et c'est la bonne, c'est celle des enfants. les
afflictions que Dieu place déjà
peut-être sur leur chemin, ils ont à
leur portée un trésor de naïves
félicités, leur joie resplendit
à travers leurs larmes.
Et comme ils sont gardés !
L'enfant qui a appris la tendresse peut aller
à l'école, au collège; il y
mènera la famille avec lui, son coeur ne
cessera pas de battre pour elle. Cela ne le
préservera pas de toutes les fautes j'en
conviens ; mais cela le préservera des
fautes sèchement accomplies, des fautes sans
repentir. Il sera exposé à la
tentation, non à la dégradation. En
dépit de ses défauts et même de
ses vices, quelques émotions de pitié
filiale viendront réveiller en lui la
conscience un moment assoupie. L'amour nous
préserve de certaines
déchéances; il fait vibrer au fond de
notre âme les cordes délicates et
généreuses, il ne nous permet pas de
nous plaire dans ce qui est vil.
Et notez ceci, les enfants qui savent
aimer ne sont pas pour cela des enfants amollis. Si
l'un descendait fond de cette question de la
mollesse (j'y reviendrai peut-être tout
à l'heure), on trouverait qu'elle provient
bien plutôt de ce que les familles
n'élèvent pas, que de ce que les
familles élèvent trop. Rien n'a plus
favorisé les éducations
énervantes de notre temps que l'habitude
prise par les parents de renoncer à leur
mission. Lorsqu'un collège est chargé
de faire ce qu'il ne fera jamais, il en
résulte que l'éducation
véritable est absolument supprimée.
Dès lors aussi la famille, qui compte sur
les précepteurs ou les maîtres et qui
désire ne se réserver que la partie
agréable des rapports avec les enfants,
répugne à montrer vis-à-vis
d'eux la moindre vigueur. Si l'école et le
collège les élèvent, la maison
paternelle ne se croit appelée qu'à
les amuser, à les gâter. Et elle les
gâte, dans le sens le plus complet du mot, et
à côté des leçons
d'énergie qu'ils peuvent recevoir par leur
contact avec d'autres enfants leurs égaux,
ils reçoivent d'autres leçons, trop
bien comprises. Il ne sortira peut-être pas
de là des hommes femmes, des poltrons, et
c'est quelque chose; il en sortira des
égoïstes, des êtres incapables
d'un dévouement héroïque, que
dis-je? d'un sacrifice, d'un effort. Plaignons ces
enfants qui n'ont eu ni père ni mère
et dont le coeur ne s'est pas mis à battre
auprès d'autres coeurs. Ce qu'on leur a
enlevé, rien ne le leur rendra jamais ; la
marque ineffaçable sera jusqu'à leur
dernier jour. Dieu a voulu qu'il y eût du
duvet dans tous les nids ; le jeune oiseau a besoin
de se sentir abrité dans cette douce
retraite sous l'aile de sa mère; cela ne
l'empêchera pas de s'élancer un jour,
hardi, puissant, dévorant de son vol
l'espace et défiant la
tempête.
Il peut y avoir des nids et du duvet
dans les plus humbles demeures. C'est encore ici
une des formes de cette égalité
chrétienne que nous retrouvons partout sur
notre chemin et dont la famille est la
personnification suprême. De même que
les biens matériels les plus
nécessaires et les meilleurs, le soleil,
l'air, les eaux jaillissantes, sont au service de
tout le monde, de même les biens moraux les
plus excellents sont offerts à tous:
l'Évangile et la famille. La famille ne
s'achète pas au marché, ou à
la Bourse; on n'en a pas plus quand on est riche,
on n'en a pas moins quand on est pauvre, Je sais
telle famille d'ouvriers où les enfants sont
élevés, comme ils ne sont pas certes
dans la plupart des palais. Ils suivent
l'école en veste de bure, qu'importe,
à leur retour au logis ils trouvent chaque
soir des bras ouverts, du bonheur, de fermes et
tendres directions, une Bible qu'on médite
avec respect, la prière commune de la
famille, et cette prière du lit que la
mère murmure en les embrassant.
L'instruction varie avec nos ressources,
l'éducation ne varie pas. Dieu n'a pas
permis un tel privilège.
Il y a, dit-on, des familles indigentes
où l'éducation est forcément
négligée, parce que le père et
la mère sont obligés de donner tous
leurs moments au travail! - Je réponds, en
premier lieu, qu'il y a aussi des familles
opulentes où le mari est si bien
absorbé par ses affaires, par sa
carrière, par des nécessités
de représentation, où la femme
succombe si bien sous le poids de son
ménage, de ses visites de ses
correspondances, de ses relations sociales, que
l'un et l'autre sont hors d'état de
descendre à la sphère intime
où figurent leurs devoirs de père et
de mère. Proportion gardée, je ne
crois pas que les pauvres qui ne savent comment
élever leurs enfants soient plus nombreux
que les riches qui prétendent, et
prétendent très-sérieusement,
qu'il leur est impossible de s'en occuper.
Je réponds, en second lieu, que
l'industrie, ce fait moderne, n'ayant pas
trouvé en face d'elle la famille, a en effet
exercé des ravages monstrueux. C'est dans un
autre travail que j'aurai à aborder sous
toutes ses faces l'étude palpitante de la
question sociale. Les classes ouvrières
souffrent, un mal incalculable s'accomplit. Mais
comment s'accomplît-il? Tout repose si
complètement sur la famille, que l'ennemi
n'avance qu'après l'avoir supprimée ;
Il renverse le rempart avant de
pénétrer dans la place. Le crime
actuel de l'industrie, c'est qu'elle repousse
l'atelier de famille, qu'elle prend à part
le mari, la femme, l'enfant, qu'elle les
déshabitue de la vie intime, qu'elle
disperse le foyer. Plus de ménage, plus de
mariage souvent; par conséquent, plus
d'éducation.
C'est le crime de l'industrie, ai-je
dit; c'est aussi le crime de la famille. Elle
aurait dû, elle aurait, pu se
défendre. Reconstituée, elle se
défendra. Il est des séparations
qu'on n'a pas le droit de lui demander et
auxquelles elle n'a pas le droit de consentir. Ce
qui l'attaque dans son essence est mauvais. En ne
cédant pas aux tentations qui la
compromettent, elle ne protégera pas
seulement son sanctuaire, son bonheur, ses
éléments de sanctification et de
progrès, elle protégera aussi son
gagne-pain. Unie, elle fera ses conditions;
pulvérisée, elle passe sous les
fourches caudines. Unie, elle connaîtra les
bienfaits de l'économie et du bon ordre ;
pulvérisée, elle paye l'effroyable
budget de la débauche, elle perd son argent,
sa santé, sa moralité, elle descend,
toujours plus misérable, jusqu'aux derniers
degrés de la corruption et du
désespoir.
Ayons des familles, nous n'aurons plus
l'extrême misère. Ayons des familles,
nous n'aurons plus ces populations entières
où se font chaque jour plus rares les
pères et les mères, les
épouses et les maris. Il n'est que trop
certain, hélas, que l'éducation ne survit pas à
la famille
; sous ce rapport, la pauvreté telle qu'elle
existe dans certains centres industriels (1),
est
un fait
exceptionnel, horrible, qui appelle une puissante
réaction. Si l'on n'y prend garde, la
famille achèvera d'y sombrer, et il n'y
restera rien qui ait forme humaine. Cela donne le
frisson.
Mais à part ce cas unique, cet
attentat social dont personne ne peut se dire
innocent, que je dénonce ici, que je
dénoncerai encore plus loin, qu'il faut
dénoncer partout et toujours, jusqu'à
ce qu'il ait cessé, il demeure certain que
l'éducation, qui est un devoir pour tous,
est en même temps un devoir praticable pour
tous. Toute vraie famille élèvera :
riche ou pauvre, il n'importe. À moins de
tuer la famille, on ne parviendra pas à
mettre en péril l'égalité
parfaite dont elle est le gardien. L'apprentissage
de la tendresse, de l'obéissance, du
respect, de la piété est aussi facile
(au moins aussi facile) sous le toit du paysan et
de l'ouvrier que
sous
celui des grands de la terre.
Que réclame-t-il, en effet?
Beaucoup d'argent? Beaucoup de loisirs? Beaucoup de
professeurs et de leçons? Non, certes. Il ne
réclame que ceci : un père et une
mère.
Un père et une mère! Je ne
peux décidément pas aller plus loin
sans décharger mon coeur et sans dire ce que
j'éprouve à la rencontre de ces noms
sacrés. Je ne définirai rien, soyez
tranquille; il est des choses qu'on sent et qu'on
ne définit pas.
Je n'irai donc point chercher si la
mère est l'affection et le père
l'autorité. Pour ma part, j'en doute un peu,
je me souviens de l'autorité des bonnes
mères, et je me rappelle aussi que
l'affection des pères est une des plus
profondes, des plus égales, des plus
délicieuses qu'il y ait ici-bas. C'est quand
on l'a perdue que l'on comprend ce qu'elle vaut,
cette affection irremplaçable qu'on trouvait
toujours prête à tout, qui nous a
cherchés, qui nous a prévenus, qui
nous a supportés, qui nous a
préférés, qui nous a comme
enveloppés depuis que nous sommes au monde. Le
jour où elle se
retire, un vide se fait, nous nous sentons seuls.
Avec quelle amertume de coeur chacun de nous
s'aperçoit alors qu'il est devenu à
son tour chef de famille !
Il faut dire cela de l'amour paternel,
parce qu'on ne lui rend pas toujours justice. Quant
à l'amour maternel, il est presque superflu
d'en parler. J'en parierai cependant, j'ai besoin
d'en parler. L'un et l'autre ont le double
caractère d'être
très-prévenus et
très-clairvoyants. Notre père et
notre mère nous voient en beau (c'est bien
doux; nous ne le trouverons guère ailleurs),
et cependant aucun de nos défauts ne leur
échappe ; ils nous aiment tant ! Leur
tendresse est si fidèle! Ils ont pour nos
âmes une si haute ambition ! Cette tendresse
est un fort levier qui remue et bouleverse nos
inerties, nos égoïsmes et nos
lâchetés.
Ici se lève devant nous, n'est-il
pas vrai, l'image vénérée de
notre mère. C'est notre mère qui nous
a faits dans l'acception complète de ce mot.
Et sa maternité morale n'a été
ni la moins importante, ni la moins douloureuse.
Comme tout repose sur la femme au sein de la
famille, tout
repose sur les mères en matière
d'éducation. Chaque
génération, pendant ses
premières années, leur appartient
presque exclusivement; et plus tard encore, et
toujours, elles sont là.
Qui décrira ce qu'une mère
peut faire pour ses enfants, pour ses fils aussi
bien que pour ses filles ? Les hommes
supérieurs, on l'a dit, sont tous les fils
de leurs mères. Il est des qualités
de droiture, de conscience, et ne craignons pas
d'ajouter de courage, que les mères seules
savent mettre dans une jeune vie. Vous connaissez
l'héroïsme des mères. Vous savez
aussi et leur angélique patience et leurs
généreuses colères. Ce n'est
pas elles qui pactiseront avec le mal. Que
veulent-elles donner à leurs enfants? Des
succès? Oh non, mieux que cela, un coeur, un
caractère, une noble existence ici-bas, une
éternité là-haut. Elles
élèvent.
Élever! Quelle parole ! Et la
chose n'est pas moins grande. Sous l'influence
incomparable de la mère, l'entant monte, il
arrive aux régions supérieures,
toujours guidé par cette forte et douce
main, toujours soutenu, porté
peut-être par ces bras débiles
et puissants. Près
d'elle, il a puisé une science dont aucun
professeur ne lui donnera jamais la moindre
idée, il a compris ce qu'est le devoir, ce
qu'est le don de soi, ce qu'est le charme d'aimer,
ce qu'est la joie de faire le bien.
Il a appris ce qu'est l'esprit de
famille. Ah, qu'il ne l'oublie jamais! L'esprit de
famille ne s'acquiert qu'au foyer, et ceux qui
l'ont ne s'avancent pas désarmés au
milieu du monde.
L'esprit de famille ne se confond point
avec l'orgueil du nom. Dans notre attachement aux
souvenirs de nos ancêtres il y a d'ordinaire,
à côté d'un sentiment
légitime, d'autres sentiments qui ne le sont
guère. Si nos pères ont rendu des
services au pays, si leur mémoire est
honorée, s'ils nous ont transmis un
héritage d'honneur ou même
d'illustration, c'est un privilège dont il
nous est bien permis d'être heureux; c'est
aussi une responsabilité. Entre cette joie
sérieuse et les sottes vanités la
distance est grande. Connaissez-vous rien de plus
misérable qu'un beau nom
lâchement porté? Nous avions à
nous en montrer dignes ; mais non, le rude labeur
de la vie nous déplaît. Au lieu de
tenter de vaillants efforts, nous aimons mieux
mener une vie facile, usant de l'héritage de
gloire comme de l'héritage d'argent, pensant
sans doute que nos pères ayant
amassé, il ne nous reste qu'à
dépenser. Or, la gloire se dépense
plus vite encore que les écus. Que de gens
ruinés! Je plains les descendants inutiles
d'un noble citoyen ; je le, plains surtout s'ils se
figurent qu'ils sont quelque chose.
Tenir à son nom dans ce
sens-là, arborer son nom comme on mettrait
une décoration à la
boutonnière de son habit, ce n'est pas avoir
l'esprit de famille. Il a l'esprit de famille,
celui dont le coeur est attaché à la
maison paternelle par d'indestructibles liens. Elle
l'attire, il se préoccupe de tout ce qui s'y
passe, il ne se trouve nulle part aussi heureux.
Quand on me dit d'un jeune homme qu'il a la passion
de vivre au milieu des siens, je me sens
prévenu en sa faveur.
Tant d'autres s'ennuient au logis! Tant
d'autres ne s'amusent qu'à la condition de
le quitter! Des soirées, des parties de plaisir,
le
théâtre, les voyages, ce qu'on voudra,
pourvu que ce ne soit pas le logis. On donne
satisfaction aujourd'hui à ce triste besoin,
en procurant aux jeunes gens un appartement
à part, en leur assurant aussitôt que
possible une existence indépendante.
L'indépendance est bonne, et les
parents sensés ne la marchanderont pas
à leurs fils ; ils sauront relâcher
les rênes et leur apprendre à juger
par eux-mêmes, à prendre des
résolutions, à gouverner un peu leur
vie.
Ce mâle exercice de la
volonté fait partie des éducations
bien dirigées. Mais les jeunes gens dont la
naissante énergie est ainsi mise en jeu sont
précisément ceux qui tiennent le plus
aux joies du foyer.
L'indépendance n'est pas
l'isolement. Voyez-les revenir sans cesse à
ce centre de la famille, qui est aussi leur centre
à eux. Ont-ils des difficultés, des
tentations, des doutes, des chagrins, des joies,
ils les apportent là. Si vous leur
ôtiez ce lieu, unique au monde, ils
éprouveraient les douleurs de l'exil. lis
ont besoin de leur père et de leur
mère, de leurs frères et de leurs
soeurs; ils ont besoin, et ceci importe, de
l'unité
indivisible qu'on appelle la famille. Chaque
famille est une unité, je dirai presque un
être vivant. Le même sang circule chez
tous ses membres. Il y a là un courant
d'idées, de convictions, de désirs;
il y a des tendances qui sont celles de tous, des
intérêts qui sont ceux de tous ; il y
a des hérédités morales
auxquelles on n'échappe pas. Si
l'individualité réclame sa place,
l'existence collective réclame aussi la
sienne et elle aussi a été voulue de
Dieu.
Quiconque a l'esprit de famille sait
à quel point l'existence collective est
réelle. Nous vivons avec les nôtres et
dans les nôtres. Ce qui se passe à la
maison fait toujours battre notre coeur; les menus
incidents du foyer sont toujours des
événements pour nous.
Ceci est mieux certes que l'orgueil du
nom, mieux que l'esprit de corps. On n'en trouvera
pas l'explication en se tenant à la
superficie des choses; il faut descendre au fond
même de notre être moral pour
comprendre ces habitudes de l'âme.
L'éducation seule le; crée en nous;
l'enfant qu'on a durement livré aux
précepteurs, aux écoles ou aux
collèges ne saurait éprouver de tels
besoins. Comment s'attacherait-il à ce qu'il
n'a jamais connu? Sans famille, point d'esprit de
famille..
.
Parmi les leçons que
l'école publique ne saurait donner, j'aurais
dû indiquer dès le début les
leçons de piété. Des
leçons de religion, oui sans doute; mais
qu'est-ce que cela? Quand un maître ou un
pasteur nous aura fait réciter le
catéchisme, qu'y aurons-nous gagné le
plus souvent? Le christianisme ne s'apprend pas par
coeur; il s'apprend par le coeur, ce qui est bien
différent. Nous ne serons sauvés ni
par des formes, ni par des formules, ni par des
idées, ni par les connaissances de l'esprit;
une croyance fort orthodoxe peut être fort
sèche, fort égoïste, fort
dépourvue d'onction et de vie. Il n'est donc
pas inutile, vous en conviendrez, que Dieu ait
institué, au fond de chaque demeure, un
enseignement admirable de
l'Évangile..
Au fond de chaque demeure, ai-je dit; en
effet, il n'y a point d'exception, la grande
égalité se trouve ici comme partout.
Seulement il est beaucoup de familles qui tiennent
la
piété à distance et qui,
soustraites à son influence, ne sauraient la
communiquer à leurs enfants. Il en est
d'autres qui, sans faire profession trouvent bon de
déléguer à des maîtres
les devoirs les plus essentiels de
l'éducation. Voilà comment il arrive
que, contrairement à l'institution divine
qui mettait une école de piété
dans chaque demeure, le nombre de ces écoles
domestiques est si restreint.
Mais là où elles existent,
il s'accomplit une oeuvre peu bruyante, peu
remarquée, et dont rien cependant
n'égale l'importance et la beauté.
Essayons de nous en rendre compte.
Je ne sais pas à quel âge
précis la mère parlera de Dieu
à son enfant; je sais qu'avant de lui en
parler elle le lui fera sentir, elle le lui
montrera en quelque sorte. Le tout petit enfant
verra déjà sa mère
agenouillée près de son berceau, il
suivra ses regards tournés vers le ciel; il
y aura du ciel dans ses premières il
respirera une atmosphère tout
imprégnée de
piété.
Les mères chrétiennes, qui
croient que le but suprême
de l'éducation c'est le salut de leur
enfant, ne s'occupent guère à
discuter des théories. Que Rousseau ait
fixé à six ans l'âge avant
lequel les questions religieuses ne doivent pas
être abordées, qu'ailleurs il ait
voulu supprimer d'une minière absolue
l'action religieuse des parents, elles ne s'en
inquiètent pas. Leur théorie à
elles consiste à suivre l'impulsion de leur
conscience et de leur coeur. Ce qu'elles ont de
plus précieux, elles ne le donneraient pas
tout de suite à leur enfant! Elles
attendraient froidement l'heure où les
faiseurs de systèmes les autoriseront
à guider vers le Sauveur ces âmes
bien-aimées! Elles retarderaient le jour
où se joindront ces petites mains, sous
prétexte que certaines notions
théologiques ne sont parfaitement comprises
que plus tard !
N'en croyez rien. Elles connaissent
l'être si faible et si borné auquel
elles s'adressent, elles suivent un à un ses
développements et se mettent toujours
à sa portée. Elles lui tiennent un
langage qui est toujours entendu. Si vous pouviez
lire comme elles ce qui se passe dans
l'intelligence de l'enfant, vous seriez
étonné de voir avec quelle
sûreté les idées s'y forment;
il conçoit
déjà que Dieu est bon, que Dieu est
puissant, que Dieu est toujours là et qu'il
l'écoute lorsqu'il s'adresse à
lui.
Avoir prié auprès de son
enfant d'abord, puis avec son enfant, cela est
immense. Non-seulement on a obtenu pour lui
beaucoup de bénédictions, mais on lui
a fait faire, dans les circonstances les
meilleures, son premier cours de religion. Ce sera
le plus important, d'ordinaire; rien dans le reste
de sa vie ne pénétrera si avant,
n'exercera une action si intime et si profonde. La
théologie des mères n'est pas
irréprochable; cependant, à tout
prendre, elle vaut bien, je suppose, la
théologie des docteurs. Ce Dieu vraiment
père, ce Dieu qui aime, qui écoute,
qui protège, ce Dieu penché vers les
petits, c'est bien le Dieu vivant et vrai de
l'Évangile.
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