L'apôtre Paul ayant à exposer aux
Éphésiens les devoirs des
époux, les résumait ainsi :
« Femmes, soyez soumises à
vos maris comme au Seigneur. »
« Maris, aimez vos femmes comme
Christ a aimé l'Église.
»
De l'application de ces deux
préceptes découle l'union telle que
Dieu l'a voulue.
Soumission, amour, intimité,
telle est donc la division naturelle de notre
sujet.
Il faut un chef à la famille. Pas
d'hésitation sur ce point :
l'autorité du mari est nettement
établie par l'Écriture; elle ne
permet pas que la femme aspire à une
situation qui ne saurait lui convenir, elle lui
montre sa dépendance comme l'idéal
auquel elle doit aspirer. Ainsi sont
écartés d'emblée tous les
mauvais désirs, toutes les ambitions contre
nature, tous les conflits que fait naître
l'indétermination des pouvoirs. La femme
chrétienne ne peut pas même imaginer
une interversion des rôles, elle en aurait
horreur, la subordination de son mari lui
imposerait une souffrance, et, j'ose le dire, une
humiliation personnelle.
Allons plus loin : Son amour a besoin de
respect, il faut qu'elle sente près d'elle
une main ferme. La main capable de diriger est la
seule qui sache aussi protéger. Lorsque, par
malheur, cette énergie virile fait
défaut, lorsque le mari est sans
volonté et sans décision, tout
fléchit autour de lui, tout flotte au hasard,
chacun a vaguement
la
conscience d'un désordre; seules, les
situations vraies sont bienfaisantes. Être
appuyé, être gouverné, cela est
sain. Combien de pauvres femmes, auxquelles il n'a
manqué que de trouver un chef dans leur mari
! Elles l'auraient mieux aimé, mieux
estimé, s'il avait résisté
à leurs caprices, redressé leurs
idées fausses, exigé le sacrifice des
habitudes mauvaises ou périlleuses. Combien
d'enfants auxquels il n'a manqué que de
trouver un chef dans leur père ! Sa molle
tendresse les a perdus; sa vigueur les eût
préservés du mal; elle n'eût
pas seulement prévenu certains
écarts, elle eût gravé au fond
de leurs âmes le principe de
l'obéissance, elle leur eût fait
comprendre le devoir.
Mais laissons les enfants, il me suffit
en ce moment de considérer les époux,
Là, l'importance d'une autorité
réelle se manifeste dès le premier
jour, elle est une des conditions fondamentales de
la tendresse, de la félicité, du
progrès. Il y a une hiérarchie dans
le mariage. C'est, au reste, ne l'oublions pas, une
hiérarchie entre égaux ; l'homme voit
dans sa femme « une aide semblable à
lui. » Ainsi l'harmonie des devoirs se maintient :
l'autorité est pénétrée
d'affection, l'obéissance est unie à
la dignité.
Une telle obéissance a sa
grandeur. La femme qui la considérerait
comme un joug compromettrait à la fois et
son propre bonheur et celui de tous les siens.
Qu'elle est noble, au contraire, la position de la
femme soumise, aimant son rôle, joyeuse
d'obéir et d'obéir par amour !
Quelqu'un que je ne veux pas nommer a dit : «
L'amour assujettit notre liberté morale sans
la détruire. »
La famille ne renferme point d'esclaves.
Ceux qui tendraient à transformer la
soumission des femmes en servitude, ont sans doute
oublié leurs mères. Je connais peu de
choses plus belles et plus douces sur la terre que
ce gouvernement domestique, quand il est ce qu'il
doit être: le mari a la décision
suprême, mais rien n'est décidé
par lui qui n'ait été tendrement et
sérieusement débattu à deux, -
l'autorité qu'il exerce est bien plus
reconnue par sa femme qu'affichée par
lui.
Telles sont les merveilles de
l'institution divine elle a concilié la
soumission et la liberté. Affaiblissez l'une ou
l'autre, vous
tomberez
dans un état misérable ; ce seront
tantôt des tiraillements, des
prétentions en lutte, des plaintes, des
récriminations, et tantôt des chutes
profondes. Plus d'union, plus de respect, je n'ai
pas besoin d'ajouter plus d'amour. Que la femme
l'emporte pour son malheur, ou que le mari
réalise, pour son malheur aussi, ses
pensées de despotisme, tous deux se sont
abaissés, le mariage a fait place à
une association bien différente, car le
mariage est atteint dans son essence dès
qu'on touche aux éléments qui le
constituent ; il ne subsiste pas sans
l'autorité et sans
l'égalité.
Et qu'on ne se méprenne pas sur
ma pensée, j'entends que les deux principes
se maintiendront loyalement, ouvertement, en plein
soleil. L'égalité rétablie par
des voies souterraines, l'influence
s'exerçant en dessous, la femme
accomplissant à force de flexibilité
et d'habileté ce qu'elle n'oserait faire
d'une façon moins détournée,
cela n'est ni digne ni bon. Les conseils de ce
genre ont été trop souvent
donnés aux femmes, trop souvent on leur a
montré que les positions difficiles à
emporter de front peuvent se tourner sans bruit, on
leur a
recommandé une douceur assez peu honorable,
selon moi, car elle a le caractère d'une
manoeuvre.
C'est là une morale de mauvais
aloi, contre laquelle on ne saurait assez
protester. Avant tout, soyons vrais. Je comprends
certaines faiblesses, je comprends que des
âmes aux prises avec ces difficultés
que l'ambition traîne à sa suite
finissent par se fausser, je comprends Mme de
Maintenon proposant aux femmes les
procédés dont elle a eu si souvent
besoin elle-même, et leur apprenant que dans
leur situation dépendante « la douceur
est le meilleur moyen d'avoir raison. » Mais
notre modèle est ailleurs et nous puisons
nos inspirations à des sources plus hautes.
Nous parlons ici de devoirs. Or le devoir ne
transige pas, il ne se courbe pas pour se faire
accepter. Le devoir de la femme est de
reconnaître en plein, simplement, joyeusement
l'autorité du mari; le devoir du mari est de
reconnaître en plein, simplement, joyeusement
l'égalité de la femme. Ainsi
s'établira cette dépendance dans
l'égalité dont le monde païen
n'a jamais eu le moindre soupçon et qui forme la
première
assise du mariage selon l'Évangile.
Voyez nos jeunes époux de tout
à l'heure : leur position respective s'est
faite sans effort et sans embarras ; dès les
premiers jours, chacun d'eux s'est senti à
sa place, par cela seul qu'il prenait la place qui
lui est assignée par l'Évangile. Chez
eux l'autorité du mari est réelle,
incontestée; mais ce n'est pas cette
autorité cassante et à
prétentions ridicules qui s'affirme
incessamment afin que nul n'en ignore, c'est
l'expression d'un accord profond et doux. Ils n'ont
qu'une même âme et qu'une même
pensée, comme ils n'ont qu'une même
foi. De qui émanent en réalité
les décisions? Je n'oserais affirmer que
l'influence dominante ait toujours
été celle du chef de la famille.
Quelquefois, souvent peut-être (j'en risque
l'aveu), la femme aura eu l'idée
première, son instinct plus vif aura plus
promptement saisi certains intérêts,
certains devoirs, son sentiment aura
prévalu. Eh bien, tant mieux, si ce
sentiment méritait de prévaloir. Dieu
n'a pas créé l'union si
étroite du mariage, pour que chacun
s'enferme chez soi, l'un gouvernant, l'autre rusant.
Le mari assez sot
pour
gouverner de haut et sans consulter sa femme ne
renoncera pas seulement, à beaucoup de
lumières et à beaucoup de bonheur, il
sera d'ordinaire l'exécuteur
très-humble de la volonté même
qu'il exclut avec fracas. Les maisons où
l'autorité maritale est mise en grande
évidence sont presque toujours celles
où les femmes, tout en invoquant sans cesse
cette autorité et en parlant de leur
obéissance passive, règnent en
souveraines absolues.
Je ne connais pas de spectacles plus
répugnants que, celui-là.
Voilà deux caractères qui s'abaissent
comme à l'envi, l'un dans sa morgue
doublée de faiblesse, l'autre dans la
fausseté, inconsciente peut-être, de
sa détestable habileté. Ah ! les
choses se passent différemment dans la vraie
famille. Tout y est confiance et droiture. Le mari
n'a pas à y défendre une
autorité, plus chère à sa
femme qu'à lui-même; la femme n'a pas
à y conquérir en se cachant une
influence dont son mari connaît la
légitimité et provoque l'action
salutaire. Le dernier mot sans doute y
appartiendra, en cas de dissentiment, à
celui qui porte la
responsabilité; mais les dissentiments sont
rares entre gens qui se chérissent, qui se
parlent à coeur ouvert, qui tiennent
à marcher d'accord et qui prient. Quel
charme dans leurs délibérations
intimes ! Es ont tant de choses à se dire!
Il y a tant de grosses questions à
débattre ! Chaque jour en pose de nouvelles,
et chaque jour aussi le conseil est assemblé
; on discute, on examine le pour et le contre, on
s'anime peut-être, et l'on finit par
s'entendre. Et c'est là qu'on apprend le
mieux à se connaître, à s'aimer
; c'est là que l'union profonde fait du
progrès.
L'union qui demeure à la surface
ne saurait suffire. En retranchant les
délibérations à deux, on
retranche presque tout ce qui fait la sainte et
puissante communauté du mariage. On vit l'un
auprès de l'autre, sans se rencontrer, pour
ainsi dire; on s'habitue à éviter les
sujets sérieux ; on garde pour soi ses
inquiétudes et ses plans d'avenir ; la vie
de famille se fait banale. Elle devait être
quelque chose de mieux.
Je suis toujours surpris de voir
à quel point, sur bien des
sujets, nous sommes demeurés classiques,
dignes Imitateurs des Grecs et des Romains. Le
gynécée antique est encore une sorte
de modèle vers lequel nous tournons
volontiers les yeux.
À Dieu ne plaise que je nie ce
qu'il y a de distinctif dans le rôle de la
femme ! Tandis que nous sommes appelés
à la vie extérieure, elle est
appelée à vivre auprès du
foyer ; l'action politique, la direction des
affaires, le travail du dehors pour l'entretien de
la famille, cela nous concerne seuls. La vocation
de la femme est tout autre; essayons de nous en
rendre Compte.
On nous donne comme un axiome que cette
vocation, humble, subordonnée, purement
intérieure et domestique, ne doit avoir
aucun contact avec le dehors ! C'est avec des
généralisations hasardées et
peu réfléchies comme celle-là
que nous faussons les choses les plus simples. La
règle que l'on pose ainsi comporte plus
d'une exception importante. Quant à moi, je
sais une autre règle qui ne comporte aucune exception
: Il faut que la
femme
fasse en femme tout ce qu'elle fait, en femme,
c'est-à-dire humblement, sans éclat,
évitant d'attirer les regards.
Qu'une femme soit savante, je n'ai rien
à objecter; mais la femme savante est un
être désagréable, justement
ridicule, et que nous livrons aux railleries de
Molière.
Qu'une femme ait des convictions
politiques, qu'elle s'intéresse en patriote
aux destinées de son pays, que les questions
posées dans le monde entier
l'émeuvent par leurs grands
côtés, je m'incline avec sympathie et
respect; mais la femme politique ne m'inspire ni
respect ni sympathie, et je crois que bien des gens
sont de mon avis.
Qu'une femme ait des croyances
religieuses très-accentuées et
très-profondes, qu'elle ait aussi des
croyances philosophiques et que les
problèmes fondamentaux, aient
été ou entrevus ou sondés par
son regard, qui pourrait s'en indigner? Mais la
femme docteur est une sorte de monstre appartenant
aux deux sexes et n'ayant rien de ce qui fait le
vrai mérite de l'un ou de l'autre.
Qu'une femme goûte vivement la
littérature et les arts, qu'elle en parle
avec entrain, avec grâce, avec modestie, elle
ne sortira pas de son rôle; mais la femme bel
esprit nous révolte et nous contriste, elle
a cessé d'être femme, et nous
n'accorderons jamais qu'elle soit
spirituelle.
Je parlais de Molière tout
à l'heure. Ou voit que ma thèse n'est
pas la sienne. Si je déteste autant que lui
la femme savante, je suis bien loin de souscrire
aux anathèmes du bonhomme Chrysale. Qui ne
se souvient de cette boutade admirable :
Nos pères sur ce point étaient des gens bien sensés
Qui disaient qu'une femme en sait toujours assez
Quand la capacité de son esprit se hausse
À connaître un pourpoint d'avec un haut-de-chausse.
Et bien des gens d'applaudir, aujourd'hui encore; c'est la théorie classique, c'est la tradition latine, recueillie et traduite en chansons en épigrammes, en éternelles railleries contre les femmes, par toute notre race gauloise élevée à l'école de l'antiquité. Molière sur ce point n'a fait que suivre le sentier battu, où Rabelais, Montaigne et tant d'autres avaient marché avant lui, où nous marchons après lui, nous qui ne trouvons point mauvais que Chrysale ajoute :
Oui, l'on sait tout chez moi, hors ce qu'il faut savoir;
On y sait comme vont lune, étoile polaire,
Vénus, Saturne et Mars, dont je n'ai point affaire,
Et, dans ce vain savoir, qu'on va chercher si loin,
On ne sait comme va mon pot, dont j'ai besoin.
Il faut protester contre cette énorme
erreur et contre cette criante injustice. Autant
nous devons tenir à n'altérer en rien
le rôle modeste et retiré de la femme,
le rôle que l'Écriture constate
lorsqu'elle lui interdit de parler dans les
assemblées de culte, autant nous devons nous
rappeler que nos femmes sont nos compagnes, nos
égales, douées de facultés
aussi grandes sinon pareilles, chargées de
l'éducation de nos enfants, appelées
à s'associer à nous par le contact
des idées comme par celui des sentiments et
des intérêts.
L'ignorance ne donne pas toutes les
vertus. elle crée souvent des natures
bornées, sèches, cassantes et passablement
orgueilleuses. Je
connais des ignorantes avec lesquelles « le
pot » de Chrysale aurait été
fort compromis, et des femmes instruites qui
s'entendent fort bien au ménage. La cuisine
des femmes distinguées n'est pas la plus
mauvaise, et leurs maisons ne sont pas les plus mal
tenues. Y a-t-il rien d'accompli comme la femme qui
sait beaucoup et ne le fait pas sentir, qui a des
convictions et ne dogmatise pas, qui est au niveau
de toute lecture, de tout entretien, et ignore
elle-même sa supériorité, qui
apporte à son mari, à ses enfants,
à ses amis un riche tribut d'idées,
et demeure simple, naturelle, totalement
dépourvue d'affectation? Voyez-la assidue
à ses devoirs, gouvernant sa maison, femme
essentielle, femme de ménage, femme de
pot-au-feu, et en même temps femme aimable,
esprit cultivé et charmant, ce qui, à
mon avis, ne gâte rien.
Tomberons-nous donc toujours dans la
méthode païenne qui retranchait, au
lieu d'adopter la méthode chrétienne
qui sanctifie? Enfermer les femmes, c'est plus
tût fait; mutiler, rogner, ôter les
moyens d'instruction, interdire les
développements, rien de plus facile. Le difficile
et le
beau,
c'est de concilier l'instruction avec la
réserve, les développements de tout
genre avec la modestie féminine.
Vous ôtez aux femmes
l'activité intellectuelle; savez-vous ce que
vous avez fait? Vous les avez rejetées vers
la frivolité, vers la mondanité la
plus vaine, la plus sotte, la plus dangereuse. Tel
est, notez-le, le résultat net des
théories de Chrysale; elles ne font pas des
ménagères, elles font des femmes
évaporées, pour qui choisir une
étoffe, effacer une rivale, briller dents un
bal devient la grande affaire ici-bas. Elles sont
bien remplies, en vérité, ces
existences qui se composent de visites
reçues et rendues, de soi-disant plaisirs
dont on peut à peine soutenir l'ennui! Elles
sont bien utiles à leur famille, ces femmes
qui mettent leurs fils en pension et ont des
institutrices pour leurs filles, parce que les
devoirs du monde ne leur laissent pas une heure
pour remplir d'autres devoirs, parce que, leur
toilette faite, leurs billets écrits et leur
tournée de salons accomplie, il ne leur
reste ni temps ni force pour leur mari, pour leurs
enfants, pour les pauvres, pour rien de ce qu'il y
a de sérieux ici-bas!
Chrysale a fait un beau profit en brûlant
leurs livres, et sa maison en est vraiment mieux
tenue!
Et toutefois, voici le fait
étrange, Chrysale est content. Oui, les
mêmes hommes qui condamnent l'instruction des
femmes afin qu'elles gardent la maison, qu'elles
surveillent le ménage et évitent le
bruit, trouvent fort naturel que, désertant
le ménage, elles fassent autant de bruit que
possible, pourvu que ce soit sur le terrain de la
mondanité. Il n'y a certes pas de mal
à être belle; mais faire profession de
beauté, c'est bien triste; et pourtant
consultez sur ce point les contemporains de madame
Récamier! Il est une saine
élégance qui inspire le respect; mais
la vie d'une élégante, qu'en faut-il
penser? Cependant je ne vois pas qu'on s'en indigne
beaucoup, si ce n'est quand il faut payer la
couturière ou la marchande de modes. Ces
existences-là sont acceptées, ce
gaspillage du temps, des facultés, du
bonheur domestique, cet oubli des devoirs, cette
abdication de l'être moral, on admet tout
cela.
Et l'on nous répète les
épigrammes vieillies contre l'instruction des
femmes, et
l'on
nous redit que la femme doit éviter tout de
ce qui l'arracherait à l'obscurité
providentielle de son rôle, tout ce qui lui
ferait quitter le foyer, tout ce qui attirerait sur
elle les regards !
Nul n'en est plus convaincu que moi.
Aussi n'ai-je aucune sympathie, je dirais presque
aucune indulgence pour les actes, quels qu'ils
soient, par lesquels les femmes compromettent cette
réserve qui est leur plus précieux
ornement. Je ne leur pardonne pas de porter
atteinte à leur charme, à leur bonne
grâce, et pour tout exprimer en une parole,
à leur caractère
féminin.
Qu'elles restent femmes, et elles
pourront avoir même un rôle
extérieur. Dieu, qui les a appelées
à verser leur sang pour l'Évangile,
leur a confié alors le rôle
extérieur de témoins courageux de sa
vérité; courageuses et modestes,
elles tombaient sur l'amphithéâtre;
Blandine n'avait pas cessé d'être une
humble femme, lorsqu'elle était
livrée aux dents des bêtes
féroces et aux regards d'une populace plus
féroce encore.
Elle reste femme, celle qui va diriger
une école, visiter des malades, consoler des
mourants. Elle ne fait pas de bruit, elle
évite peut-être les comités et
les ventes charitables ; mais elle a une oeuvre
extérieure à remplir, et elle la
remplit. Pensez-vous qu'elle soit moins humble,
moins réservée, moins femme, je
répète le mot, parce que sa douce
voix se sera fait entendre dans quelques pauvres
cabanes et auprès de quelques lits de
douleur?
Et le talent, et l'imagination, et la
poésie, faudra-t-il les proscrire ? Dieu a
confié des dons brillants à une
femme, faudra-t-il étouffer tout cela? En
avons-nous le droit? Ah ! mille fois plutôt
l'étouffer, j'en conviens, que de
compromettre la modestie, l'esprit doux et
paisible, la sainte réserve. Mieux vaut un
écrivain de moins qu'une femme-auteur de
plus. Avant tout, préservons le foyer, ayons
de vraies épouses, de vraies mères,
de vraies familles.
Mais est-il donc impossible de rester
femme, bien femme, et d'exprimer sa pensée?
Lorsque la foi, l'amour et le talent se
rencontrent, ne sauraient-ils rencontrer aussi
l'humilité? Ces choses que les femmes seules savent
dire, et il en
est,
personne ne nous les dira-t-il? Sur ce sujet de la
famille en particulier, devons-nous renoncer
à entendre celles par qui la famille
existe?
Je me refuse le plaisir de traiter ces
questions; il me suffit de les avoir posées.
Pour moi, l'esprit, l'instruction, le talent,
l'imagination ne sont ni des ennemis, ni des
suspects, alors même qu'il s'agit des femmes.
Je respecte, plus que je ne saurais le dire,
l'humble femme, bien ignorante, qui dans son
village remplit tous ses devoirs d'épouse,
de mère, de voisine charitable, de
chrétienne fidèle; et je respecte
aussi l'humble femme (oui, humble, elle l'est
autant que l'autre) qui, placée dans des
conditions différentes et douée
d'autres facultés, donne essor aux
sentiments de son coeur, aux convictions de sa foi,
aux créations de son imagination
poétique, fuyant le bruit, évitant
autant que possible de mettre en avant son nom,
simple, hostile aux prétentions quelles
qu'elles soient, plus étrangère au
bel esprit mille fois que telle ignorante qui s'en
fait accroire. Lorsque je vois une de ces femmes,
assidues à leur tâche, amies de la retraite,
aimables,
répandant chez elles les saines et bonnes
joies, occupées à soulager les
misères, vaillantes, douces, heureuses
d'avoir exprimé ce qu'elles avaient dans
l'âme, plus heureuses encore d'aimer les
leurs et de faire du bien autour d'elles, je sens
que la vraie famille subsiste là.
N'excluons rien, que le mal; ne nous
défions pas des grâces de Dieu. Et
puis, n'oublions jamais que le devoir marche avant
tout, avant le talent, avant les lumières,
avant l'ignorance aussi.
L'Évangile nous met dans le vrai,
parce qu'il nous met toujours en face du devoir.
Comment admirer assez cette fermeté pleine
de mesure avec laquelle les deux bases de la
situation des femmes y sont posées : leur
soumission, leur égalité! Nous n'en
sommes plus ici aux vieilles railleries d'Euripide
et d'Aristophane, si souvent depuis
renouvelées des Grecs; nous n'en sommes plus
à la célébration enthousiaste
de la femme qui ne sait rien et qui s'occupe du
pot-au-feu, nous n'en sommes certes pas davantage
à l'adoration de la femme mondaine, ce
dernier outrage, cet abaissement suprême
après lequel il ne reste
rien ni dans les têtes ni dans les vies
condamnées à la frivolité et
ait néant. L'Évangile nous traite
mieux que le monde ; si j'osais, je dirais qu'il
nous respecte davantage. Devant les deux
époux il place une grande destinée,
de nobles buts à atteindre ici-bas, un
avenir éternel. Qu'ils fassent usage tous
deux des dons que Dieu leur a confiés;
appelés, le mari à une
carrière plus extérieure, la femme
à un rôle subordonné et
soustrait aux regards, qu'ils marchent en
s'entr'aidant, en s'unissant toujours mieux. Nous
avons vu comment l'apôtre expose les
obligations respectives des époux. S'il dit
aux femmes : « Soyez soumises, » il dit
ensuite aux maris : « Aimez. » Ce
devoir-là explique l'autre.
L'amour est donc un devoir. Il nous est
déjà apparu comme charme, comme
bonheur, comme élément essentiel du
mariage; en se montrant à nous comme devoir,
il va nous imposer la nécessité (dont
je me félicite) de nous
répéter à son sujet; il y a
des choses qui sont si bonnes à redire !
D'ailleurs, en disant les
mêmes choses, nous les dirons autrement. Le
point de Nue du devoir est presque nouveau en
matière d'amour. Ainsi
considéré, l'amour achèvera de
prendre la place qui lui appartient. Sa
beauté, sa sainteté, si souvent
méconnues, éclateront à tous
les yeux. Le monde peut railler l'amour, il sait
bien peu ce que c'est. La Parole de Dieu l'honore;
je me trompe, elle le commande, elle ne nous
reconnaît pas le droit de ne point
aimer.
Tant pis pour ceux que je scandalise
peut-être en parlant ainsi 1 L'amour un
devoir, lui qui est tout au plus une faiblesse, lui
qui se relie aux instincts les moins
élevés de notre nature, lui que la
sagesse des philosophes savait fouler aux pieds et
que la sanctification du chrétien doit
à bien plus forte raison regarder du haut en
bas! -Oui, l'amour, l'amour proprement dit, l'amour
sans raffinements subtils et sans fausse
spiritualité, cet amour-là est un
devoir, le premier devoir des époux. Cet
amour-là n'est pas seulement
chrétien; il est une des gloires du
christianisme. Rarement, bien rarement,
l'antiquité païenne a entrevu de loin
quelque chose qui lui ressemblait. Depuis que
Jésus-Christ l'a révélé
aux hommes, il a marqué de sa
présence les époques morales et les
contrées où l'Évangile exerce
une véritable influence. Voulez-vous savoir,
au contraire, à quel signe infaillible on
reconnaît les siècles et les pays
dépravés? On n'y trouve point
d'amour. La femme n'est plus là; la famille
n'est plus là; la galanterie, la
débauche, ont pris la place des saintes
tendresses ; on prostitue un des plus beaux noms
qu'il y ait sur la terre, celui de l'amour. Le fait
est qu'on ne s'aime point; la passion, même
dans le vice, se fait rare alors; les coeurs se
dessèchent, et ce qui domine, ce qui donne
le ton, c'est la raillerie au sujet des femmes,
l'ennui du mariage, le scepticisme revenu de
tout.
Alors aussi la littérature
reflète ce triste état social; vous
chercheriez en vain un drame, un roman OÙ
l'intérêt ne soit concentré sur
des inclinations aussi peu profondes que peu
avouables, quand cet intérêt ne se
porte pas sur de simples questions d'argent ou de
succès. Les grandes tragédies du
coeur, si émouvantes et si pures,
disparaissent des livres comme elles tendent
à disparaître de la
société. La mondanité, dans le sens
le plus redoutable de ce terme, a tout envahi et
tout stérilisé ; l'âme humaine
est devenue incurablement frivole.
Et l'âme frivole est incapable
d'amour. Il y a tant de sérieux, tant de
profondeur en lui ! Il y a tant de grâce
aussi et de fraîcheur ! Parmi les choses
ravissantes d'ici-bas, la plus ravissante n'est-ce
pas lui? La vue de deux jeunes gens amoureux a
toujours éveillé en moi les
idées les meilleures de pureté et de
candeur ; les blasés, les corrompus sont
incapables de pareilles émotions.
Dans l'amour vrai, dans celui qui est un
devoir des époux, il y a de l'estime, de la
confiance, des prières; et il y a aussi ce
goût vif, ce puissant attrait, cette passion
intense, qui remuent les profondeurs de notre
être. Ceux qui, sous prétexte de haute
spiritualité, prétendent
réduire l'amour aux sentiments de
l'âme, entrent dans une voie
périlleuse. Ne soyons pas plus purs, je le
répète, que ne l'est la parole de
Dieu. L'ascétisme, qui veut perfectionner
l'Évangile, nous fait descendre bien plus
bas en aspirant à nous faire monter plus
haut.
Notre pruderie suspecte s'alarme des
expressions du Cantique des cantiques ! Et pourquoi
Dieu ne nous aurait-il pas présenté,
afin de les consacrer, les plus vives images de
l'amour conjugal ? Entre nos jeunes époux
qui s'aiment saintement elles s'échangent
encore aujourd'hui et s'échangeront
jusqu'à la fin des siècles, les
paroles du Cantique : « 0 la plus belle
d'entre toutes les femmes. » « Ton
étendard sur moi, c'est amour. » «
J'ai cherché celui qu'aime mon âme.
» « L'amour est fort comme la mort.
» Quand ces choses-là semblent
ridicules ou quand elles paraissent impures, soyez
sûrs que les moeurs publiques ont reçu
une atteinte profonde. Les coeurs
gâtés se scandalisent de tout.
Faute de comprendre que l'amour des
époux est un devoir, un devoir de leur
Jeunesse, un devoir de leur âge mûr, un
devoir de leur vie entière, bien des
familles tombent dans l'état vulgaire et
prosaïque où le charme disparaît,
où l'on cesse de se goûter, où
il fait sombre et froid autour du foyer. Prenons-y
garde, rien de bon ne se conquiert et ne se garde
sans efforts ici-bas; pour avoir, pour conserver la
vraie famille, il faut que nous
maintenions le mariage tel que Dieu l'a fait. Or,
Dieu, l'a fait avec de l'amour : « Maris,
aimez vos femmes. »
Pourquoi ce commandement s'adresse-t-il
particulièrement à l'homme? Il faut
bien l'avouer, ceci n'est pas à notre gloire
; nous avons besoin, nous, que le devoir d'aimer
nous soit prescrit en termes formels; nos coeurs
sont un peu dépourvus de tendresse;
d'ailleurs l'activité extérieure met
dans nos existences des intérêts et
des sentiments qui tendent sans cesse à y
occuper trop de place. La femme ne court pas le
même danger. « L'amour, disait Mme de
Staël, n'est qu'un épisode dans la vie
de l'homme; c'est l'histoire tout entière de
la vie de la femme. » Si notre part est
quelquefois meilleure, c'est que le devoir d'aimer
se fait comprendre à nous, grâce
à l'Évangile ; et le devoir d'aimer
amène avec lui le bonheur d'aimer; l'amour,
relevé, transfiguré, occupant le rang
qui lui appartient, ne se laisse plus exclure par
les préoccupations secondaires.
Au reste, le commandement d'aimer a
été adressé aussi à la
femme. L'apôtre Paul, écrivant
à Tite, lui disait:
« Apprends aux jeunes femmes à
être sages, à aimer leurs maris.
» Si le devoir dont je parle a dû
être plus souvent rappelé à
l'un des époux, il existe pour tous deux. Je
n'insiste pas sur ce point, personne n'en
doute.
Mais il est un autre point qui demande
explication. L'amour des époux est une
affection qui n'est pas seulement la
première, elle est unique. Dieu l'a voulue
telle, et quiconque oublie cela trouble
profondément la loi de la famille.
Alors se produisent des luttes
intestines (les plus douloureuses) ; nos tendresses
sont aux prises, nos devoirs se heurtent; faute
d'avoir mis à part l'affection unique,
d'autres affections légitimes entrent en
conflit avec celle-là.
Jour terrible que celui où l'on
s'aperçoit qu'on n'est plus d'accord sur
tout ! La place de la femme, celle du mari, cette
place de l'intimité absolue et incomparable,
a été envahie plus ou moins ; un
père, une mère, un enfant, s'y sont
glissés peu_ à peu. Et peu à
peu aussi les coeurs se sont désunis. Ce
n'est encore rien, le mal est réparable,
pourvu qu'on s'y prenne à
temps et qu'on veuille le réparer. Mais il
s'agit de vouloir.
Vouloir faire sa place à notre
femme, à notre mari, ce n'est pas chose
commune, et j'ajoute que ce n'est pas toujours
chose aisée. Il y faut de l'énergie
et une prompte résolution, il y faut d'abord
l'intelligence claire d'un devoir à
accomplir. Ce devoir-ci ne s'accomplira pas sans
effort, nous ne serons pas compris sur-le-champ;
nous affligerons peut-être des êtres
bien-aimés, qui trouveront mauvais de voir
passer quelqu'un avant eux. Les parents ne savent
pas toujours voir qu'en mariant leurs enfants ils
ont renoncé à occuper le premier
rang, qu'un autre est devenu leur confident et leur
guide, que l'intimité des époux est
exclusive de sa nature.
Lorsque les parents ne voient pas cela,
lorsque le fils ou la fille sont obligés de
le leur faire voir, il se produit un froissement
douloureux. Mais cette douleur ne dure pas; les
situations vraies ont leurs privilèges, et
la première émotion passée,
chacun ne tarde pas à sentir ce qu'ont de
salutaire les rapports établis en
conformité sincère avec l'institution
divine. Il n'est pas question
d'ailleurs de ne plus aimer nos parents ou de les
aimer moins; notre tendresse et notre respect
redoubleront au contraire et nous
éprouverons le besoin de leur faire leur
part bien large dans le bonheur nouveau qu'ils nous
ont donné. Rien ne diminue; seulement
quelqu'un est survenu qui a des droits d'un
caractère unique; un sanctuaire s'est
créé, et dans ce sanctuaire il n'y a
place que pour deux.
Je vais plus loin : c'est à nous
à faire accepter notre femme, notre mari, au
sein de notre propre famille. Ceci exige aussi
parfois de la vigilance, de la vigueur, une sorte
de dignité conjugale. Notre intimité
doit être enveloppée de respect; ne la
laissons pas effleurer; si nous permettions
certains propos, si certains sentiments
méfiants ou hostiles se croyaient libres de
se produire devant nous, nous commettrions une
lâcheté et nous manquerions à
un devoir.
Qu'on me permette de m'arrêter
encore un instant sur cet aspect, ordinairement mal
compris, de l'amour des époux.
Vous n'avez pas maintenu la
hiérarchie des affections; celle qui devrait
occuper une place à part, une place unique, se
voit
confondue
avec plusieurs autres; que va-t-il arriver ? Ce qui
vous semble naturel, à vous, ne saurait le
paraître à votre compagne. Elle aurait
trouvé fort simple que votre mère,
par exemple, fût tendrement aimée;
loin de vous pousser à l'aimer moins, elle
voudrait qu'elle vous fût toujours plus
chère, elle ne songe qu'à la
vénérer avec vous, à
l'environner avec vous de ses soins. Mais ou aime
sa mère comme une mère et sa femme
comme une femme; du moment où dans vos
habitudes et dans vos préoccupations la
première envahit le domaine qui n'appartient
qu'à la seconde, où elle
reçoit sa part des confidences
réservées, le coeur de la femme
s'alarme; un principe de désunion s'est
glissé entre elle et vous.
Prenez garde, ces principes-là
sont semblables à l'arbre qui pousse ses
racines près d'une muraille. Tant qu'il est
jeune, la muraille résiste, il se produit
à peine de faibles lézardes; puis la
crevasse augmente, et il vient un moment où
l'arbre, par cela seul qu'on l'a laissé
croître, renverse à ses pieds blocs et
ciment. Les débuts de la désunion ne
sont rien : Il ne s'agit que
d'un sentiment sorti de sa place, qui a
excité des alarmes et auquel vous n'avez pu
vous associer tous deux. Ne pas s'associer en tout,
c'est peu de chose, et c'est beaucoup , ne prenons
à aucun prix notre parti d'un premier
désaccord. Les premiers sont les plus
graves, parce qu'ils ouvrent la vole et
créent des habitudes. Hélas , on
s'habitue fort bien à vivre ainsi à
moitié séparés; on se dit que
la lune de miel ne saurait toujours durer et que
l'union passionnée du commencement doit
faire place à des relations mieux
pondérées. Et la crevasse va de la
sorte s'agrandissant, et l'arbre grossit, et l'on
découvre un beau jour que la muraille jonche
le sol.
La jalousie que font naître de
grossiers désordres n'est pas la seule qui
puisse disjoindre les fortes assises du bonheur
conjugal. Il est des familles bien
réglées, honorables, enviées
peut-être, et où la jalousie fait son
oeuvre de mort. Les coeurs qui se donnent à
plein veulent qu'on leur appartienne à plein
aussi. L'union au rabais ne les contente pas et
leur tendresse ne sait pas vivre dans
l'atmosphère grossière qui convient
à tant de gens Si vous prétendez avoir un vrai
mariage, une vraie famille, et non ce que le monde
entend par ces mots, renoncez au programme facile
que rédige le monde: S'aimer au
début, être convenable plus tard,
garder chacun sa liberté, éviter les
écarts et surtout les scandales. - Non, cela
ne suffit pas vraiment; ce qui vaut beaucoup
coûte quelque chose, et l'amour dont je parle
est exigeant.
Non pas que ses exigences soient des
raffinements des délicatesses
alambiquées et qu'il faille être bien
habile pour le contenter. Rien, au contraire, n'est
simple et naïf comme lui; il vit de franchise,
de loyauté, d'abandon. Mais il lui faut son
droit; il sent, il sait que s'il n'est plus unique,
il cesse d'être ce qu'il est.
Il y a telle famille (qui n'en
connaît ?) où la passion d'une
mère pour son fils a compromis l'avenir d'un
jeune ménage; les choses n'étaient
plus à leur place, le mari était
relégué au second rang; on descend
vite sur ces pentes-là. Ailleurs, et plus
souvent peut-être, l'intervention
indiscrète d'une mère auprès
de sa fille a peu à peu séparé
celle-ci de son époux ; le mari, qui se voyait de
trop dans
certains tête-à-tête, qui
comprenait que les confidences n'étaient
plus pour lui, se détournait toujours plus
du foyer; l'intimité avait disparu, on
tombait vite au niveau de ces unions vulgaires qui
ne sont plus le mariage selon
l'Évangile.
L'Évangile nous ordonne toutes
les grandes ambitions. Ayons celles de l'amour et
du bonheur. Ne nous contentons pas de peu. Aspirons
à beaucoup, c'est le moyen de beaucoup
donner; et c'est aussi le moyen de beaucoup avancer
sur la voie du perfectionnement moral. L'amour, je
le dis sérieusement, est un des plus
énergiques agents de sainteté que
Dieu ait mis sur la terre. Nous le verrons,
à mesure que nous avancerons dans cette
étude, si le niveau de notre amour conjugal
et de notre bonheur de famille
s'élève, le niveau de nos sentiments,
de nos pensées, de nos actes, et, pour tout
dire, le niveau général de notre vie,
ne peut manquer de s'élever en même
temps. Nous assisterons à un des plus nobles
spectacles qu'il soit donné à nos
yeux de contempler ici-bas, celui de la marche
ascendante des âmes. La famille nous le
présentera, par ses devoirs, par ses joies,
par ses douleurs, par sa piété ; nous
monterons avec elle, et nous reconnaîtrons
alors toujours mieux que l'amour des époux
est un devoir.
Qu'ils veillent donc sur leur
trésor; nous ne conservons que ce que nous
nous donnons la peine de garder. Que personne ne se
croie à l'abri des malentendus, des
froissements, des refroidissements que produirait
sa négligence ou sa faiblesse. Appelé
à choisir, sinon entre deux devoirs, du
moins entre les prétentions de deux
affections légitimes qui aspirent à
la première place, personne n'est
dispensé de faire ce choix douloureux mais
salutaire, nécessaire devrais-je dire.
Chapitre précédent | Table des matières | Chapitre suivant |