Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

VI

Le « Plus que vainqueur... »

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Son caractère.

 

Le « plus que vainqueur » n'est nullement un être étrange, mystérieux, ou merveilleux, - pas plus que ne le sont les autres créations de Dieu, une plante par exemple, ou une fleur, ou un fruit. Il sera merveilleux, oui, comme le sont tous les ouvrages du Créateur mais tout, chez lui, sera si naturel, si simple, qu'il paraîtra aussi « ordinaire » qu'une marguerite des champs. Beaucoup ne reconnaîtront pas en lui un fils de Dieu, pas plus qu'on n'a reconnu cette nature divine chez Jésus-Christ. Souvent même ce seront les « connaisseurs » en matière religieuse qui le reconnaîtront le moins. Il fera des oeuvres semblables en leur nature à celles de son Maître, mais peu de personnes auront « des yeux » pour les voir. Et plus il en fera, plus on le regardera comme « une brebis destinée à la boucherie. »

Son obéissance à Dieu ayant revêtu le caractère absolu, il y aura dans son caractère et dans sa vie quelque chose de cette simplicité parfaite qu'on voit dans la nature.

Il ne sera ni plus ni moins qu'un fils de Dieu. Mais quel ciel de grâce et de gloire et quelles solennelles obligations ce mot ne renferme-t-il pas pour ceux qui, se considérant comme ne s'appartenant plus, mais comme des « rachetés », comme la propriété d'un autre, - ne voudront envisager leur vie sur la terre sous un autre jour, jugeant de leurs droits et de leurs devoirs exclusivement à la lumière de ce titre de « FILS DE DIEU ».

Rachetés à un grand prix, ils ne vivront que pour glorifier Dieu dans leurs corps qui sont sa propriété. Glorifier Dieu, glorifier Dieu, voilà leur but unique.




Dans ce dernier chapitre je veux surtout indiquer quelques-uns des traits de la vie intérieure de ce fils de Dieu, de ce « plus que vainqueur ».

Et pour cela je retournerai au point de départ et je demanderai: Comment, de quelle manière Adam a-t-il perdu sa royauté et sa domination, comment a-t-il cessé d'être dans le sens spirituel un fils et un vainqueur, comment, en un mot, de vivant et régnant qu'il était, est-il devenu mort et esclave ?
Adam tomba simplement en cessant d'écouter Dieu, et de demeurer dans la confiance absolue en lui.
Il ouvrit ses oreilles à la voix du démon. Il eut foi en lui, il lui obéit, et « le jour même », il mourut. Son corps demeura vivant, mais Adam mourut au point de vue spirituel.
Et « comme en Adam tous meurent » (de la même manière qu'ils sont morts en lui), de même en Jésus-Christ ils revivent. Ils revivent par un acte de confiance et d'obéissance absolues. Ils « demeurent en Jésus » de même. Adam est mort le jour même de son acte de doute et de désobéissance, et, pour devenir chrétien, on passe par un « jour » de conversion; car quelque longue qu'ait été la conviction du péché qui l'a précédé, cette conviction aboutit pourtant à un moment décisif.

La conversion ne peut être, au fond, qu'instantanée. Adam a eu son « jour » de perdition; le chrétien a son « jour du salut ». Il a un anniversaire spirituel aussi bien qu'un anniversaire naturel. Comme les Israélites il peut célébrer le jour de sa sortie de dessous le joug de l'esclavage. « Vous conserverez le souvenir de ce jour et vous le célébrerez... » disait Moïse.

Il n'y a eu rien de compliqué dans les causes de la chute d'Adam, et il n'y a rien de compliqué dans le salut. Le point central de l'un et de l'autre fait est un acte précis et définitif de confiance et d'obéissance. Tout dépend quelle est la personne qui est l'objet dé cet acte. Dans le cas d'Adam, c'était la foi au démon qui faisait appel à ses désirs naturels, lui demandant de les soustraire à l'obéissance à la loi de Dieu. Dans le cas du chrétien, c'est juste le contraire. Il s'abandonne à Dieu, croit en lui et soumet à ses lois, d'une manière absolue, tous ses désirs naturels. Et comme je le disais à la fin du chapitre sur « la sainteté », il ne confond pas ces désirs humains et naturels avec le péché. Il n'y a pas plus de péché en eux qu'il n'y en avait dans ceux d'Adam.

Le « plus que vainqueur » est donc un homme qui n'écoute que Dieu. Il ne s'écoute pas; il n'écoute pas le démon; il écoute Christ en lui, il écoute cette nouvelle et divine vie qui est venue régner au dedans de lui. Il regarde à Jésus vivant en lui. Pour toutes choses, il s'en réfère à Jésus. Il vit pour Jésus. Il vit par Jésus. Il demeure en Jésus. Il écoute Jésus.
Voilà pourquoi, au commencement du dernier livre de la Bible, l'Apocalypse, où, d'un bout à l'autre, il n'est question que de vie et de victoire (comme, au jardin d'Eden, il a été question de mort et d'esclavage), Jésus-Christ répète sept fois : « A celui qui vaincra », et, à cette parole, il associe sept fois la suivante: « A celui qui a des oreilles ».

Le vainqueur est un être qui n'a des oreilles que pour Dieu. Il en était ainsi d'Adam avant sa chute. Mais, si au point de vue physique, nous nous trouvons dans une position inférieure à celle d'Adam, étant moins parfaits que lui, nous sommes dans une position spirituelle supérieure, ayant Jésus-Christ comme Vie en nous. Écouter cette VIE au dedans de nous, tout soumettre à son gouvernement, c'est être un vainqueur et un plus que vainqueur.
Jésus Christ nous a rachetés par son sang pour nous soustraire d'une manière absolue à toute domination du péché ou du démon. À l'abri, sous l'aspersion de son sang, vivant de sa vie, nous devons nous attendre constamment à une victoire entière sur toutes les puissances des ténèbres qui menacent nos âmes.




Le voilà, le « plus que vainqueur », le combattant du royaume de Dieu, le chevalier de la croix, sans peur et sans reproche. SANS PEUR : délivré « pour le servir sans crainte »; SANS REPROCHE : « en marchant devant lui dans la sainteté et dans la justice, tous les jours de notre vie. » (Luc I, 74-75.) - « Purs et irrépréhensibles » - est une autre description du chevalier. En voici d'autres :

« Soyez toujours joyeux. Priez sans cesse. Rendez grâces en toutes choses. » (1 Thess. V, 16-17.)

« Que le Dieu de paix vous sanctifie lui-même tout entiers, et que tout votre être, l'esprit, l'âme et le corps, soit conservé irrépréhensible, lors de l'avènement de notre Seigneur Jésus-Christ! Celui qui vous a appelés est fidèle, et c'est lui qui le fera. » (1 Thess. V, 23-24.)

« Sans crainte - toujours joyeux ! » Ces mots à eux seuls supposent que le péché a disparu du coeur, car partout où est le péché, il y a la crainte, et là où le péché existe, il ne peut y avoir la vraie joie.




Sa vie intérieure.

Voici quelques-unes des formes intérieures que prend cette vie et cette grâce que l'apôtre Jean désigne sous le nom de l' « amour parfait ». Elles suffiront à mettre en lumière quelques aspects intimes de cette vie d'abandon absolu, de cette vie de foi et d'amour. Un grand nombre de témoins qui ont vécu à diverses époques, ou qui vivent aujourd'hui, sont d'accord sur les traits principaux de l'état d'âme produit par l'entière sanctification.

L'homme sanctifié a nettement conscience de vivre intérieurement dans l'état de l'amour parfait. Il ne peut trouver en lui rien qui soit contraire à ce principe, Chaque croix lui semble avoir pour résultat de faire ressortir son état de mort au monde. Et plus la croix est élevée, plus ce fait se détache devant ses yeux spirituels, de même que la croix du Christ, dressée sur le sommet du Calvaire faisait voir à tous sa victoire.
Il a conscience d'être « sanctifié ». Dieu lui a donné sa paix, une paix parfaite, selon sa promesse. Son âme est comme un sanctuaire où règne un calme saint et sacré, un ciel intérieur que les méchants ne troublent plus et où l'esprit fatigué se repose.
Il « aime » Jésus. Il « hait » sa propre vie. Il peut dire de lui-même : « Je ne connais pas cet homme. » Il liait la « chair ». Il hait tout ce qui pourrait élever ou honorer la vie propre. Il a en horreur la gloire humaine. Il hait tout élément d'alliage dans le service de Dieu. Il a la passion de ce qui est pur - et de voir Dieu seul glorifié. Tous ses efforts tendent constamment à ce que l'élément divin triomphe et règne dans toute activité religieuse. Ceci est un besoin intérieur impérieux chez lui. Il est pénétré au dernier degré du sentiment que dans la mesure où il y a des éléments d'alliage dans une oeuvre religieuse, il y a 'juste dans cette mesure des éléments de faiblesse qui amèneront infailliblement les chutes et les châtiments - avec tout leur triste cortège d'arrêts, de reculs et de pertes. Sa croyance intransigeante est celle-ci : Seul ce qui est pur est fort.
Il ne sent pas le besoin lui-même d'encouragement humain quelconque. Il peut s'en passer absolument. Il a peur de tout appui de ce genre. Il est convaincu que l'encouragement humain serait un élément inférieur à celui où Dieu lui demande de vivre, et cela ternirait la joie qu'il éprouve à ne dépendre pour son encouragement que de Dieu seul. Le besoin de le glorifier ainsi est souvent si puissant, qu'il aimerait que toutes les conséquences des fautes de ses frères tombassent sur lui, et qu'il voudrait pouvoir porter tous leurs découragements sur son coeur. La croix est toute sa joie et toute sa gloire intérieure.
Il est affranchi de la crainte. Il est souvent émerveillé de voir cc, que Dieu peut faire dans ce domaine, pour une âme sanctifiée. S'il a un petit mouvement passager d'appréhension - plutôt physique qu'autre chose, - ce sentiment est immédiatement noyé et perdu dans la foi absolue qui règne intérieurement, dans cette assurance que Dieu est au-dessus de toutes choses, et que toutes choses doivent concourir an bien.

Si la pression des circonstances extérieures fait plier pendant un instant les nerfs, pour ainsi dire - de son esprit ou de son corps, en un mouvement d'appréhension, le ressort de l'amour parfait et de la foi illimitée affirme son ascendant et le vrai fond de son être triomphe. Le mouvement a été nerveux, c'est-à-dire purement physique, et n'a eu aucun caractère moral.

Dieu est sa passion. Il n'aime pas ses bien-aimés moins, pour l'aimer lui, davantage, - au contraire, sa capacité d'amour pour eux et pour tous ses frères est infiniment augmentée par sa fidélité à son « premier amour ».
Quelquefois le sentiment de l'amour de Dieu est si puissant en lui, qu'il doit demander à son Seigneur d'en diminuer l'intensité; il lui semble qu'il pourrait mourir de bonheur.
C'est comme si un océan cherchait à se déverser à travers un étroit canal. Souvent le sentiment de la présence de Dieu dans son âme est absolument inexprimable. Généralement ces moments de béatitude précèdent ou suivent immédiatement les croix les plus lourdes et les plus grands dépouillements. Il fait l'expérience que décrit l'apôtre Pierre : « Vous réjouissant d'une joie ineffable et glorieuse », et cela précisément dans « les épreuves. » (I Pierre 1, 9.)
Il est délivré des « réactions », car Dieu le garde de faire quoi que ce soit dans une force charnelle. Quand on fait tout en lui et par sa force, on n'est pas sujet aux réactions. Les réactions trahissent toujours l'existence d'un élément d'alliage dans l'activité religieuse qui les a précédées.
Il est mû par une sainte ambition de se livrer journellement en libation pour le peuple de Dieu. C'est là sa joie. Cela fait son ciel. Il voit derrière chaque croix qui l'attend, une nouvelle pentecôte, et derrière chaque pentecôte, le salut d'âmes immortelles, de centaines d'âmes peut-être.
Il accepte dans la paix tous les bouleversements.
Il a conscience que c'est Jésus qui est assis sur le trône de sa volonté, et qui tient tous les fils de son être. Il y a un grand silence dans son âme. Un grand repos occupe toute la place et toute sa pensée.
Il est toujours prêt à paraître un fou ou un fanatique aux yeux des hommes en servant son Dieu. Il est affranchi du souci de « l'opinion. »

Dieu, son Dieu, est un univers de lumière, de paix et de satisfaction qui peut l'enrichir même dans la perte de tout. L'Éternel a élevé son âme au dessus de toutes les vagues et de toutes les tempêtes. Il ne redoute plus rien. La volonté de Dieu est son ciel.
Il ne dévie pas du chemin droit et étroit par une sympathie qui n'est pas en Dieu. Il faut que sa pitié ou sa sympathie soient pures. Devons-nous nous apitoyer sur ceux que Dieu discipline, façonne au fond de son creuset?... Attention!
Il peut tout supporter. Les faits journaliers le lui prouvent. Dieu l'a établi dans cette paix qui surpasse toute intelligence. Toutes choses lui sont égales. Rien ne le dérange ou ne le trouble.




Ses déserts intérieurs.

Un des aspects les plus caractéristiques de cette vie est celui qu'on pourrait désigner sous le nom de DÉSERTS intérieurs.

La marque distinctive de ces déserts consiste dans l'absence totale de tout sentiment de la présence de Dieu, de la possession de sa force ou de sa sagesse; c'est le vide, c'est le néant, c'est le dépouillement intérieur le plus absolu.
C'est souvent juste au moment où Dieu place un travail particulièrement éprouvant devant lui que l'homme de Dieu passe par un de ces déserts, par exemple avant de se tenir à la brèche en public pour son Maître, ou avant quelque travail spécialement difficile de cure d'âme.

Avant que l'âme connaisse mieux les voies de Dieu, ces déserts peuvent l'effrayer; elle est tentée de se replier sur elle-même, de douter ou de juger de son état spirituel d'après cette absence de tout sentiment. Plus tard, elle comprend que ces déserts constituent le régime nécessaire à l'homme de Dieu, qu'ils renferment la plus grande grâce, en ce qu'ils créent le milieu intérieur le plus propre à l'exercice d'une foi absolument pure, et l'âme apprend à se dire dans de pareilles épreuves de foi : « Voici le moment où tu vas pouvoir glorifier Dieu en comptant sur lui sans avoir un appui quelconque; voici le moment ou il peut t'utiliser pour son service au plus haut point, puisque tu dépendras uniquement de lui. Il a, pour ainsi dire, les coudées franches dans ton âme, il s'y trouve de tous côtés entouré par le vide au sein duquel il met sa gloire à créer toutes choses. Dès lors tout ce que tu feras sera purement en Lui. Il sera pour toi sagesse et force. »
Dans ces moments-là, il ne reste au « plus que vainqueur » que les promesses de Dieu. Le désert où Jésus a passé les quarante jours est un exemple de cet état intérieur. Il ne nous y reste, comme à Lui, que les promesses. Elles doivent nous y suffire comme à Lui. Aussi l'âme qui a appris à comprendre les voies de Dieu ne se sent-elle jamais aussi forte que dans ces moments-là, précisément à cause du dépouillement qui la rend absolument dépendante de Lui. Que fait-elle alors? elle fait acte de foi pure, elle dit: « L'Éternel pourvoira »; elle va de l'avant, sans voir ni sentir, comptant uniquement sur Dieu, et le résultat dépasse toujours son attente.

Les plus grandes oeuvres que l'homme de Dieu est appelé à faire, sont généralement précédées par un de ces déserts; et c'est aussi ordinairement dans ces lieux arides qu'on est assailli par les plus cruelles tentations, par les accusations de toutes sortes venant du démon. Il cherche à tout placer sous un faux jour, à nous faire douter concernant les voies de Dieu à notre égard; et si, à ce moment-là, les événements nous apportent des souffrances ou si les hommes nous font subir quelque injustice, le démon ne manque pas de s'élancer avec la rapidité de l'éclair pour enlever d'assaut la citadelle de notre âme, cherchant à y faire pénétrer une pensée de mécontentement, de murmure, ou un sentiment d'aigreur.

Le milieu propre à l'épreuve de la foi et à ces victoires absolues de l'âme, dans lesquelles Dieu se glorifie le plus, est premièrement le désert, et ensuite l'assaut du démon dans ce désert même, où l'âme est privée de tout. Les attaques de l'ennemi en ces moments-là sont furieuses, désespérées et adaptées avec une grande habileté aux circonstances spéciales du moment.
C'est alors que nous sommes assaillis « par les traits enflammés du malin. » Quelle description parfaite que celle-là - donnée par l'apôtre Paul. D'abord un « trait » qui part, rapide comme la foudre, sans avertissement, pour nous atteindre par surprise. Puis c'est un trait « enflammé. » Le démon cherche à incendier notre monde intérieur par une flamme de l'enfer, une flamme de l'égoïsme - une flamme de ressentiment, d'impatience, de murmure envers Dieu, à cause des épreuves du moment. Mais béni soit l'Éternel, le bouclier de la foi peut arrêter et éteindre tous les traits enflammés du malin, et c'est le seul bouclier qui puisse le faire. Notre seule sécurité repose dans cette foi inébranlable qui voit Dieu dans tout ce qui nous arrive et croit que tout ce qu'il permet est pour sa gloire et pour notre bien.

L'homme sanctifié sait distinguer entre la tentation et le péché. Il ne tombe pas dans le piège qui consiste à croire que c'est de son propre fonds, de son propre coeur, que viennent « les traits enflammés. » Il sait que, comme le dit Saint-Paul, ces traits « viennent du démon » - ils viennent du dehors et non du dedans.




La vie de la foi pure et de l'amour pur, quoique ayant dans son fond une joie et une paix divines, n'est pas exempte des luttes et des angoisses à la surface. La vie du vrai chrétien est toujours, sous une forme ou sous une autre, une vie de souffrances; mais au milieu de cette vie, et surtout après avoir passé par un de ces « déserts », l'âme est visitée par des ondes de joie véritablement célestes.

La vie de la foi pure est infiniment la plus saine. Dans la vie où l'on s'appuie encore sur les sentiments, il y a toujours de l'indulgence pour soi-même. La vie de la foi est, pour ainsi dire, une nourriture austère qui ne flatte pas le palais. Se complaire, chercher son plaisir dans les sentiments ou les émotions provenant d'une joie ou d'un bonheur spirituels - c'est se donner une vie qui est l'opposé de celle de la foi.
Mais, en même temps, il ne faudrait pas penser que la vie intérieure de l'homme de Dieu soit une vie sèche ou mécanique, loin de là. Jésus dit qu'il aura en lui une source d'eau vive qui jaillira en vie éternelle. Il se nourrit de la « manne cachée ». Il a conscience que la vie divine en lui le nourrit, le soutient, le satisfait, le porte, et répand dans son âme un sentiment de paix, de bien-être et de force indescriptible. Souvent aussi il a conscience de la manière la plus distincte de la présence de cette merveilleuse vie surnaturelle, non seulement nourrissant, abreuvant, fortifiant l'âme, mais vivifiant le corps aussi. Il n'y a pas de doute que Dieu est tenu de nous donner la force pour tout travail qu'il réclame de nous.

Cette conscience de la vie divine en lui devient également nette et claire d'une manière remarquable lorsqu'il est appelé à prier pour des malades ou à leur imposer les mains pour leur guérison. La vie divine se manifeste quelquefois, en ces occasions-là, d'une manière si forte qu'il sent très nettement se produire en lui un renouvellement de forces physiques.




Dans le travail.

Quelques aspects de l'expérience intérieure de l'homme de Dieu appelé à prendre part à des réunions publiques :

Lorsqu'il n'a devant lui aucun service actif (parler, prier, par exemple) son état intérieur est le repos, la paix, une paisible méditation dans la lumière divine, l'adoration et la prière silencieuse. Il soutient de toutes ses forces ceux qui conduisent l'attaque. Il est toujours pénétré de la grandeur de l'occasion présente pour l'accomplissement du bien, en sorte qu'il ne peut faire autrement que prier intérieurement et avec force pendant tout le temps que dure la réunion.

Lorsqu'il a à parler, à prier, il a souvent conscience d'une espèce de sainte force qui s'élève au dedans de lui, une espèce de pression qui augmente à un tel degré qu'il ne peut être soulagé qu'en épanchant les sentiments de son âme comme en un torrent.
Quand il a à parler en public, ou à une âme, individuellement, la pensée et l'expression, le fond et la forme viennent souvent sans préparation et sans efforts, coulant de source, de telle sorte qu'il sent que ce n'est pas lui, mais Dieu en lui, qui parle. C'est comme le vent qui souffle où il veut; son âme entend le son de la voix de l'Esprit, mais elle ne sait d'où il vient, ni où il va.
Il est amené souvent à dire des choses dont il ne saisit pas tout de suite la raison, mais, ensuite, il voit qu'elles s'adaptaient aux besoins du moment ou de l'individu d'une manière très remarquable.

Lorsque, dans une réunion, il n'a pas l'occasion de prier à haute voix, le besoin de prier est quelquefois si impérieux, la pression de l'amour, de la foi, si grande, qu'il ne peut presque s'empêcher de gémir.

Souvent l'esprit de prière est comme un véritable torrent ou une tempête dans son âme. C'est une faim si dévorante et une soif si ardente de voir le règne de la justice s'étendre dans le monde, que l'âme ne peut la comparer qu'à une véritable famine.
Si, après avoir fait de son mieux dans le service de son maître, on le blâme, on le juge mal, il ne sent aucune souffrance pour lui-même., et combien moins un sentiment de révolte! Il est libre de lui-même, dans un état d'indépendance complète. Sous ce rapport, son unique préoccupation est ce qui regarde les intérêts du règne de Dieu - et pour cela, il sent tout, très fortement, toujours.
Et précisément, sur ce point-là, il voit Dieu continuellement glorifié. Il voit sa main souveraine mettant tout en règle, lorsque deux personnes sincères ont des manières de voir différentes. Celui des deux points de vue qui prévaut en dernière ligne se trouve bientôt être le meilleur, et Dieu bénit l'une dans le triomphe de ses plans, et l'autre dans sa soumission joyeuse. Ainsi l'on voit toutes choses concourir au bien des deux intéressés et en même temps à l'avancement du règne de Dieu.

Jésus-Christ lui est fait sagesse. Il a la conscience de ne manquer jamais de rien. Dieu pourvoit littéralement à tous les besoins de son esprit, selon la richesse de sa grâce en Jésus-Christ, de moment en moment. Au fur et à mesure que chaque minute se présente avec ses devoirs et ses occasions, la grâce et l'inspiration divines satisfont tous ses besoins, que ce soit pour parler dans une réunion ou s'occuper d'un cas difficile dans la cure d'âme. En vérité, ce n'est plus lui qui vit, mais Christ qui vit en lui. Il est « mort » et « sa vie est cachée avec Christ en Dieu. »
Dieu lui donne des victoires remarquables, dans les cas les plus difficiles, en réponse à la prière de l'intercession. Il lui donne de voir que les paroles qu'il met dans sa bouche viennent bien de lui, puisqu'elles LIBÈRENT.

Son ambition est d'être un homme auquel Dieu ne peut rien refuser.




L'homme sanctifié est averti intérieurement qu'il doit être constamment revêtu de toutes les armes de Dieu, afin de pouvoir tenir contre les « ruses du diable. »
Une de ces ruses consiste à chercher à lui faire mettre en doute la réalité de sa consécration à Dieu.

Il y a deux parties contractantes dans l'alliance entre l'âme et son Dieu. Le démon est constamment occupé à accuser la bonne foi de l'une ou de l'autre. Tantôt, comme dans le jardin d'Eden, c'est Dieu qu'il accuse devant l'homme, et quand celui-ci a triomphé de cette tentation, et demeure ferme dans sa confiance en son Seigneur, alors le démon se retourne contre lui et veut l'accuser devant Dieu, disant que sa consécration à son Maître est une illusion. Il doit alors refuser de discuter la question avec le démon et s'en tenir fermement au fait qu'il s'est donné à Dieu, et veut encore et toujours sa volonté.

L'homme de Dieu va donc de l'avant, sourd à la voix du démon, et dans une foi aveugle, tenant toujours la question de sa consécration pour réglée définitivement, une fois pour toutes, et celle de la fidélité de son Dieu également. S'il sent le besoin de définir nettement sa situation intérieure, voici, en quelque sorte, son langage; c'est le langage ferme et viril de la foi : « Je dois être saint, et je le suis puisque je le veux, et puisque Dieu le veut. »
Ce n'est pas étonnant dès lors que le démon s'efforce de mettre en question la réalité de notre « je le veux. » Mais l'âme ne prend pas la voix du démon pour la sienne propre ni pour celle de Dieu. Elle sait qu'il est « l'accusateur des frères » - des frères cadets de Jésus-Christ, et qu'il usurpe constamment l'office de procureur du Roi, en se déguisant en ange de lumière et en prétendant être vraiment soucieux de la réalité de notre consécration à Dieu. Ne confondons donc pas la voix du démon avec celle du Saint-Esprit. Elles diffèrent du tout au tout. Le Saint-Esprit nous indique Jésus constamment comme un parfait Sauveur, et dirige notre regard sur lui.
Ce n'est que dans le chemin de la foi virile que l'âme peut être gardée du péché et préservée des traits dit démon.

En fin de compte, le langage de la foi revient toujours à ceci : « Je veux être saint, donc je le suis par ta puissance, car tu es fidèle à ta promesse. »
Voilà la base de la foi pour le côté intérieur : être bon.

Il en est de même pour l'autre côté de la vie, faire le bien, Voici encore le langage simple et affirmatif de l'homme de Dieu : « Je suis à toi et tu es à moi. Devant chaque devoir actif de faire ta volonté, j'affirme également que je puis. Par ta grâce j'ai la force de faire tout ce que tu demandes de moi. Tes commandements sont des promesses, et si tu mets un devoir devant moi, c'est une preuve que j'ai en moi ta force à un degré suffisant pour l'accomplir. Je dois, donc je puis. »

En somme, la loi qui régit la vie de l'homme sanctifié est celle-ci : « Il te sera fait selon ta foi. »




Sa vie de prière.

Le « plus que vainqueur » est puissant dans la prière. C'est peut-être l'arme sur laquelle il compte le plus dans sa lutte contre les puissances des ténèbres, en privé et en public.
Il sait distinguer nettement entre les différentes sortes de prières. Lorsqu'il entend quelqu'un prier il sait discerner ce qui est réel et ce qui est factice dans la prière.

Il y a trois sortes de prières:

I. Les prières charnelles; c'est-à-dire des prières purement humaines, où seul, l'esprit naturel de l'homme parle, sans être le moins du monde sous l'influence du Saint-Esprit. Ce sont des prières sans âme et sans ailes.

Il. Les prières mixtes. Ce sont les prières d'âmes non entièrement sanctifiées. Quiconque possède le Saint-Esprit peut encore entendre le cliquetis de l'outil, le grincement du mouvement mécanique, certains accents de la volonté propre ; il y découvre une énergie un tant soit Peu charnelle, et une certaine dose de calcul humain.
Il s'y trouve, il est vrai, un certain souffle de vie néanmoins, on y sent le mélange, et ces prières ne peuvent être que très médiocrement efficaces.

III. La prière dans le Saint-Esprit, la prière qui jaillit de l'âme, sous l'influence de l'Esprit Divin qui la contrôle, qui l'anime, qui lui imprime ses mouvements; et quand bien même ces prières doivent nécessairement passer par un canal humain, on sent qu'elles jaillissent d'une source divine et que, venant de Dieu, elles doivent nécessairement être exaucées par Dieu. C'est des prières de ce genre que Jésus a dit : « Quoi que ce soit que vous demandiez, croyez que vous le recevez, et vous l'avez. »
L'âme se sent alors autorisée à dire : « Je sais que tu m'exauces toujours! » Cette prière dans le Saint-Esprit vient purement de Dieu, elle jaillit de la source de la vie éternelle dans le coeur. Venant de Dieu, elle va à Dieu. C'est la prière « de grande efficace ».
Elle a sa base dans l'abandon et la soumission absolue.

La preuve s'en trouve dans les passages suivants:

1° Ce que Jésus-Christ disait, quant à ses relations avec son Père : « Je sais que tu m'exauces toujours. parce que je fais toujours les choses qui te sont agréables. »

2° Et ensuite, quant aux relations du disciple avec son Maître :
« Si vous demeurez en moi, demandez tout ce que vous voudrez, et vous le recevrez. »

Il y a donc une condition attachée à la prière efficace; c'est de demeurer en Christ. Oh! combien cela veut dire : demeurer en Christ! Combien absolument il faut la pensée constante de Lui, l'adoration constante de l'âme s'élevant à Lui, la préoccupation constante, continuelle, de Sa gloire, de Son honneur,de Sa renommée, la sensibilité extrême quant à Ses droits, à Ses intérêts, la passion de Lui donner le salaire de ses souffrances, le désir de se voir et de voir tout effacé devant Lui, la joie indicible qui s'élève dans le coeur lorsqu'Il est glorifié, lorsqu'Il est rendu visible pour ainsi dire, lorsque Sa présence devient, sensible à tous, dans une assemblée. Ce sont-là quelques-uns des indices de l'état intérieur de ceux qui « demeurent en Lui ».

Quoi de plus naturel que ceux dont la passion est de glorifier Dieu et de le voir glorifié, puissent s'attendre toujours à ce que leurs prières soient exaucées; car ils ne savent prier que pour ce qui contribue à sa gloire.
Oh! que de temps et de forces sont perdus dans des prières charnelles et purement humaines! dans des prières qui ne peuvent être exaucées! des prières nées exclusivement de l'esprit naturel et qui ne sont que « chair ». Seul ce qui est né de l'Esprit est Esprit. Cela est vrai de la prière aussi.

Un trait entre d'autres marquant la différence entre ces deux sortes de prières, est celui-ci : L'âme qui prie « dans la chair » pense à sa prière, l'âme qui prie dans l'Esprit pense à son Dieu.
Dans l'une on se regarde soi-même, dans l'autre on regarde son Dieu et on s'oublie soi-même. Dans la véritable prière, l'âme s'oublie, se perd, et s'abîme en son Dieu.

L'âme de l'homme de Dieu est remplie d'une soif ardente, insatiable, inextinguible, de voir Dieu glorifié, de voir venir son règne. Et c'est à coup de prières, de prières du genre que nous venons de décrire, que le « plus que vainqueur » bat en brèche les positions ennemies dans le monde des ténèbres. Il ouvre le chemin de l'Évangile par des prières toutes de feu et de foi. Il sait lutter à genoux jusqu'à ce qu'il reçoive l'assurance de l'exaucement.
Le Saint-Esprit n'ayant plus d'obstacle à enlever en lui, peut couler librement par le canal de son âme en prières efficaces, en prières d'intercession. Et prier comme Dieu l'entend - c'est vaincre.




Son attitude vis-à-vis du bonheur humain.

Cette vie exige une marche continuelle dans le renoncement. L'homme de Dieu est averti intérieurement contre le danger du bonheur humain. Il sait que, pour l'âme apostolique, le bonheur provenant des liens de famille, d'amitiés terrestres, de la société, le bonheur que l'on trouve dans les milieux conformes à ses goûts, ou dans les circonstances agréables à la nature humaine - ce bonheur-là peut constituer le plus grand danger, non seulement pour son âme mais aussi pour son ministère. Il sait que ceux qui possèdent la plus grande puissance spirituelle et la plus grande influence pour Dieu sont ceux qui consentent aux plus grands sacrifices des affections terrestres légitimes, qui acceptent les séparations, les éloignements, les solitudes, par amour pour Dieu et pour les perdus.
C'est l'exemple de ces âmes apostoliques qui fortifie et encourage, peut-être au loin, tel serviteur ou servante de Dieu appelés à marcher dans un chemin solitaire, où ils doivent faire taire la voix de bien des affections naturelles, dans leur effort pour « chercher et sauver ce qui est perdu. »

Le bonheur humain, le bien-être constituent un des plus grands dangers pour l'homme de Dieu dans ce monde. La puissance et l'influence spirituelles sur les autres ne s'acquièrent qu'au prix du renoncement. L'homme de Dieu ne doit jamais oublier qu'il est un enfant d'Abraham, et qu'il doit prendre Abraham pour modèle, soumettant toutes les affections à la loi suprême du sacrifice.

Entre nous et les nôtres doit toujours se trouver Dieu; nous ne devons posséder quoi que ce soit ou qui que ce soit sauf en lui et pour lui. Laisser enchaîner nos coeurs par les affections terrestres, c'est encourager d'autres à y chercher leur bien et leur bonheur. Laisser Dieu intervenir entre nous et les nôtres pour faire avec eux et avec nous toute sa volonté, c'est encourager d'autres à croire que Dieu peut être tout pour eux aussi. Seul l'homme de Dieu, affranchi de cette manière-là, aura du coeur et du temps pour aider ceux qui ont besoin de son ministère, et pour former d'autres âmes apostoliques pour la carrière de « pêcheurs d'hommes ».

Jésus, le Diapason céleste.

Oh ! que ne pouvons-nous apprendre
Un des sublimes chants des cieux!
Oh ! que ne pouvons-nous entendre
Un écho lointain des Saints-Lieux !
Ces hymnes purs, qu'en ta présence,
Chantent les anges dans ton ciel,
Un accord vibrant, tendre, intense,
Du divin cantique éternel.

Mais s'élevant d'une humble étable,
Quel est ce chant mélodieux,
Cette musique incomparable,
Ce souffle qui descend des cieux ?
D'en liant la plus pure harmonie
Vient Jusqu'à nous dans, un Enfant,
C'est la Parole, c'est la Vie,
C'est l'Amour, l'Amour triomphant.

Jésus !... ton nom à mon oreille
Résonne comme un saint accord
Sa musique en mon âme éveille
Comme un écho de l'autre bord.
Jésus ! ... nom plein de l'harmonie
Dont vibre le ciel - ta « Maison
C'est la parfaite symphonie
L'universel diapason.

Du péché la voix discordante
Trop longtemps a rempli nos coeurs,
Sa note sinistre et puissante
Couvrait ta voix de ses clameurs
Mais an son de ton doux langage
Mon coeur brisé s'ouvrit à toi,
Dans mon être apaisant l'orage,
Tu rétablis l'accord - mon Roi !

Que la note en Eden perdue,
La note qui s'appelle Amour,
En toi, Jésus, redescendue,
Vibre en mon âme chaque jour
À tous les coups que l'on me donne,
Au choc du plus terrible trait,
Que cette note au loin résonne
Amour... amour... amour parfait

Encore, encore, élève encore
Ton chant de saint amour mon coeur,
Toute la nuit, jusqu'à l'aurore,
Chante ton Dieu, ton Dieu Sauveur.
Bientôt dans la nuit de ce monde
Poindra le matin éternel,
Sur toi déversant, comme une onde,
Le chant céleste, universel.





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