SECTION V. - Des secours extérieurs qui peuvent être employés pour l'interprétation de la Bible. (Suite 2)

.

§102. Chronologie biblique (suite). - Les titres de ces différents systèmes chronologiques ne sont pas faciles à déterminer. Ceux qui admettent, d'une manière générale, les périodes les plus longues , s'appuient, entre autres motifs, sur les raisons suivantes.

Le texte hébreu a pu être altéré plus facilement que celui des Septante, parce qu'il était beaucoup moins répandu; peu après le commencement de l'ère chrétienne, son usage était restreint aux Juifs seuls, et même aux plus instruits d'entre eux seulement, tandis que la version des Septante était partout et servait pour le culte , soit parmi les Juifs, soit parmi les chrétiens. En outre , les Juifs étaient intéressés à abréger la période qui s'étend entre la création du monde et la naissance de Jésus-Christ, pour faire croire que le temps fixé par leurs prophètes et leurs docteurs pour la venue du Messie n'était pas encore écoulé; tandis qu'on ne peut raisonnablement supposer aux traducteurs de la Bible en grec aucun motif d'altération du texte.

Le chiffre de onze cents ans, assigné par les Septante, le Samaritain et Josèphe à la période qui s'écoula entre le déluge et la naissance d'Abraham , parait bien plus d'accord avec l'ensemble des faits historiques que le chiffre de trois cent cinquante ans donné par le texte hébreu. Ce dernier chiffre est beaucoup trop petit pour expliquer la multiplication et la dispersion des descendants de Noé qui se répandirent sur d'immenses contrées , depuis l'Inde et l'Assyrie jusqu'en Ethiopie, en Egypte et en Grèce, fondèrent des villes et organisèrent de puissantes monarchies à Babylone , à Ninive et en Egypte, sans parler des petites principautés que les descendants de Cam fondèrent dans le pays de Canaan, après en avoir expulsé ses premiers possesseurs.

Les plus longues chronologies donnent à chaque patriarche, à la naissance de son fils aîné, un âge qui est plus en proportion avec la diminution graduelle de la longueur de la vie humaine (1).

A cela on objecte, en faveur des périodes plus courtes :

Les soins scrupuleux et jaloux que les Hébreux apportaient à la conservation du texte original';

2° Les facilités que ce système laisse entrevoir pour la transmission sûre et rapide de la vérité révélée dans les premiers âges, Lémec ayant été successivement le contemporain d'Adam et de Sem, et Sem celui d'Abraham;

La coïncidence, au moins à peu de chose près, de la date fixée pour la création avec une époque astronomique très-remarquable (le grand axe de l'orbite de la terre coïncidant avec la ligne des équinoxes). Voyez les développements dans Hales.

Quant à l'objection tirée de la brièveté de l'intervalle entre le déluge et la naissance d'Abraham, comparée avec l'accroissement de la population sur la terre , on fait observer que les temps modernes offrent des exemples analogues; que le texte hébreu fournit, pour la même période, au moins autant de générations que les Septante, et enfin que l'âge des mariages indiqué par le texte hébreu a permis une reproduction plus rapide de la population.

En somme, comme on le voit, la question reste douteuse, et, sans accepter dans tous leurs détails les calculs d'Ussérius, on peut regarder son système comme offrant au moins autant de garanties que tout autre.

Outre les causes d'erreur provenant de copies inexactes, de variantes, etc., il y en a d'autres en chronologie qui proviennent des différentes manières de calculer le temps.

Les principales ères de l'histoire commencent en des mois différents de l'année. Chez plusieurs peuples on distinguait deux espèces d'années qui commençaient à des époques différentes, l'année civile et l'année ecclésiastique, ou bien encore l'année civile et l'année consulaire. L'année chronologique, d'ailleurs, ne coïncide pas toujours avec l'année astronomique actuelle. L'année julienne, par exemple, comptait trois cent soixante-cinq jours et six heures, c'est-à-dire onze minutes et neuf secondes de trop ; de sorte que, de l'an 1 à l'an 1836, elle aurait été de quatorze jours et demi en avance. Le concile de Nicée en retrancha deux jours et demi; en 1582, Grégoire XIII corrigea le calendrier et gagna dix jours en prescrivant que le 5 octobre portât la date du 15. En Angleterre, le 3 septembre 1751 fut compté comme le 14 , et, en 1800 , le 29 février de l'année bissextile fut omis. C'est ainsi qu'on a essayé de rectifier, par quelques suppressions, les erreurs de l'année julienne, et l'on peut dire que, depuis l'an 1 de l'ère chrétienne jusqu'à aujourd'hui, il y a, à quelques heures près, juste dix-huit cent cinquante-six ans.

Mais d'autres systèmes ont contenu de plus graves erreurs, et il est naturel qu'avec l'impossibilité de les redresser, il se soit glissé dans la chronologie des difficultés presque insolubles.

Notons encore, en ce qui regarde la chronologie biblique, des sources d'obscurité provenant de supputations inexactes ou incertaines.

a) Quelquefois les historiens juifs parlent d'un règne qui s'est continué pendant trois années successives comme ayant duré trois ans, quand il n'a. peut-être duré qu'une année entière et deux fractions d'années; il a pu durer deux ans et dix mois, comme il a pu ne durer qu'un an et deux mois, le dernier de la première année et le premier de la troisième.

b) Ils négligent les fractions et ne tiennent compte que du chiffre principal (Juges, XX, 46, cf. 35).

c) Les fils étant fréquemment associés au trône de leurs pères dans les anciennes monarchies, la durée du règne de l'un est parfois comprise dans la durée du règne de l'autre; d'autres fois, elle en est déduite. C'est ainsi qu'il est dit de Jotham qu'il régna seize ans (2 Rois, XV, 33), et au verset 30 il est parlé de la vingtième année de son règne. Sans doute que, dans ce dernier cas, on compte les quatre ans qu'il régna sous le nom de son père Hosias devenu lépreux, tandis que, dans le premier passage, on ne fait dater son règne que du moment de son avènement personnel. - Cf. encore 2 Rois, XIII, 1 , 10. 2 Rois, XXIV, 8, et 2 Chron. , XXXVI, 9. On explique, de même Dan., I, 1. Jér., XXV, 1, Nébucadnetsar étant roi en même temps que son père lors du siège de Jérusalem. C'est de cette manière aussi que l'on a pu expliquer certaines particularités de détail des tables chronologiques de l'Egypte et des autres contrées orientales.

d) Quelquefois, dans les dates ou dans d'autres supputations numériques, certains termes restant les mêmes, le point de départ varie, on d'autres éléments qui interviennent semblent introduire une contradiction qui disparaît devant un examen plus attentif. Les quatre cents ans de Gen., XV, 13, et les quatre cent trente de Gal., III, 17, aboutissent bien à la sortie d'Egypte ou à la promulgation de la loi qui eut lieu trois mois après; mais , tandis que Paul les compte depuis la vocation d'Abraham, Moïse ne les compte que depuis la naissance d'Isaac. - De même, les soixante-six personnes qui descendirent avec Jacob en Egypte (Gen., XLVI, 26, 27) (ou soixante-dix en comptant Jacob lui-même, Joseph et ses deux fils) ne sont pas en contradiction avec les soixante-quinze personnes de Actes, VII, 14, puisqu'au premier chiffre il faut ajouter les femmes des neuf fils de Jacob, celles de Juda et de Siméon étant mortes et celle de Joseph étant restée en Egypte. - De même encore, nous avons, Esdras, II, 64, et Néh., VII, 66, la mention de quarante-deux mille trois cent soixante personnes revenues de Babylone à Jérusalem ; les détails en chiffre sont donnés pour les tribus de Benjamin et de Juda et pour les prêtres. Ces détails, du reste incomplets, s'élèvent, chez Néhémie, à trente et un mille quatre-vingt-neuf personnes; chez Esdras, à vingt-neuf mille huit cent dix-huit ; mais, si l'on ajoute à Néhémie quatre cent quatre-vingt-quatorze noms qui ne se trouvent que dans Esdras, et à Esdras dix-sept cent soixante-cinq noms qui ne se trouvent que dans Néhémie, on trouve, pour l'un comme pour l'autre, le chiffre égal de trente et un mille cinq cent quatre-vingt-trois personnes, coïncidence d'autant plus remarquable qu'elle porte sur des détails et n'a pu être calculée. Les dix mille sept cent soixante-dix-sept autres personnes, dont le détail n'est pas indiqué, appartenaient sans doute aux dix tribus. C'est ainsi qu'en présence de contradictions apparentes, il est toujours plus prudent de confesser son ignorance et de suspendre son jugement que d'accuser l'écrivain. Jamais contradiction ne parut plus évidente que Ezéchiel XII, 13, et cependant la prophétie fut littéralement accomplie. Sédécias ne vit pas Babylone, et pourtant il y mourut; il était aveugle.

En général, quand on veut établir un système chronologique , il faut se pénétrer de l'importance des deux règles suivantes :

Déterminer avec précision certaines dates ou époques importantes et y rattacher l'ensemble du système. La naissance de notre Sauveur est naturellement le point de départ de toute la chronologie moderne, et en partie celui auquel on rattache la chronologie ancienne. L'année du concile de Jérusalem ou de la mort d'Hérode est la clef de la chronologie des Actes, comme la date de la conversion de saint Paul est la clef de ses épîtres. Pour les Juifs, le retour de la captivité, la destruction de Jérusalem, la construction du premier temple sont des époques capitales auxquelles ils ont rattaché une partie de leur chronologie.

Quand on le peut, il est utile de contrôler par les faits astronomiques, toujours sûrs, les conclusions de la chronologie. La Pâque juive, par exemple, commençait le jour avant la pleine lune de nisan, c'est-à-dire entre le 18 mars et le 16 avril. La lune ne pouvant être éclipsée qu'en son plein , le jour de Pâque, en certaines années, était donc celui qui précédait l'éclipse comprise entre ces deux dates. Or, le jour de Pâque étant le 14 nisan, il est facile, en comptant en arrière, de déterminer quel était le premier jour de l'année. Cinquante jours pleins après Pâque venait la Pentecôte, et au bout de six lunaisons , c'est-à-dire cent soixante-dix-sept jours après la pleine lune de nisan, venait la fête des Tabernacles. La grande fête des Expiations était cinq jours avant, c'est-à-dire le 10 de tisri. M. Greswell s'est servi de ces données à l'appui de sa chronologie. Admettant que notre Seigneur a été crucifié le 5 avril de l'an 30, il a calculé qu'une éclipse mentionnée par Dion devait avoir eu lieu le 1er août 45, et une autre, par Pline, le 30 avril 59. Les tables de Pingré, basées sur des calculs astronomiques, prouvent que des éclipses ont eu lieu , en effet, aux jours indiqués. Le raisonnement de Greswell, du reste, n'est pas complet; car il a oublié de dire quels rapports il peut y avoir entre la date de ces éclipses et celle de la crucifixion.

.

§ 103. Histoire naturelle. - Bien des expressions ou des allusions de l'Ecriture empruntent une force et une beauté nouvelle à la connaissance qu'on peut avoir de certains détails de l'histoire naturelle. Quand il est dit, par exemple, Ps. XCII, 12, que le juste fleurira comme le palmier, l'esprit comprend , d'une manière générale, le sens de la comparaison. Mais, certes, il en saisira mieux encore toute la portée s'il réfléchit que le palmier ne croit ni dans les profondeurs des forêts ni dans de fertiles prairies, mais dans les sables du désert. C'est une fraîche verdure qui s'épanouit au milieu des rochers les plus arides; c'est un phare bienveillant, dit Laborde, qui guide le voyageur vers un endroit où il a des chances de trouver de l'eau. L'arbre est admirable de beauté; sa taille élancée, son dais de feuilles, son panache flottant en ont toujours fait un emblème de la grâce, de la majesté, de l'élévation. Son feuillage est le symbole de la joie et de l'allégresse. Il ne se flétrit jamais, et la poussière ne s'attache pas à ses feuilles ; aussi l'employait-on pour l'ornement des tentes à la fête des Tabernacles (Lév., XXIII, 40) ; la multitude en portait quand elle accompagna le Messie à Jérusalem (Jean, XII, 13), et les rachetés dans le ciel sont représentés tenant des palmes dans leurs mains (Apoc., VII , 9). Quant à son usage, le palmier est sans rival. Au dire de Gibbon, les habitants de la Syrie comptent jusqu'à trois cent soixante manières de l'utiliser en tout ou en partie. Son ombre rafraîchit le voyageur. Son fruit le restaure. Sa présence annonce une source. Ses feuilles servent de nattes. Ses branches sont employées à faire des haies, des clôtures, des murailles; avec les fibres de son tissu, on fait des cordes et des câbles. C'est dans sa vieillesse qu'il porte les meilleurs fruits, et les meilleures dattes ne se cueillent souvent que lorsque le palmier a déjà vécu un siècle. De sa racine sortent de nombreux rejetons qui finissent, en grandissant , par former une forêt (c'est peut-être ainsi qu'il faut entendre le palmier de Débora, Juges, IV, 5). Que d'emblèmes dans tous ces faits ! Combien il est vrai que le juste est un palmier dans le désert de ce monde ! Et, chose frappante aussi, le palmier, autrefois le symbole de la Palestine, a presque entièrement disparu de ce pays.

Le cèdre peut donner lieu à des réflexions analogues. Il était autrefois très-abondant en Palestine, et la Parole de Dieu en fait l'emblème du fidèle. Il aime l'eau, et si la source près de laquelle il a pris naissance vient à tarir, il cesse de croître et finit par mourir. Ses racines s'étendent entre les crevasses des rochers; ses branches s'élancent dans l'espace, presque perpendiculaires au tronc; ses feuilles sont toujours vertes, même au milieu des neiges de l'hiver; son écorce et ses feuilles sont odoriférantes, et l'odeur du Liban était devenue proverbiale; son bois est incorruptible, beau, solide et sans noeuds. Il orne le sommet des montagnes, et quand David l'en fit descendre, ce fut pour orner ses palais, et plus tard l'intérieur du temple de Salomon. Que de rapports avec le caractère et l'influence d'un chrétien fidèle et conséquent !

Deut., XXXII , 11 , renferme plus d'une allusion que l'histoire naturelle de l'aigle peut seule faire comprendre. Quand la mère voit ses aiglons assez forts pour voler par eux-mêmes, elle défait son nid, les chasse et les contraint d'aller s'établir sur quelque rocher voisin; elle plane au-dessus d'eux et leur apprend à voler et à se diriger dans les airs. S'ils sont trop faibles ou trop malhabiles, elle étend ses larges ailes au-dessous d'eux, les reçoit sur son dos et remonte lentement et doucement vers son aire. Si quelque ennemi s'approche, elle s'interpose entre ses petits et le danger; si elle voit leurs ailes faiblir, elle se précipite au-dessous d'eux avec une rapidité surprenante, et, leur offrant un point d'appui , leur permet de reprendre quelques forces. L'aigle est le seul oiseau doué de cet instinct, et les leçons que Moïse veut donner à son peuple en découlent d'elles-mêmes. Dieu a toujours « ému sa nichée; » par des afflictions, il a toujours appelé son peuple, l'ancien Israël ou l'Eglise nouvelle, à sortir d'un lieu de repos fatal à ses vrais intérêts, de l'Egypte , du monde, de sa propre justice. Par l'exemple des hommes pieux, par le spectacle magnifique de sa puissance et de ses perfections, par la vie et le caractère de son Fils, il a plané au-dessus d'eux pendant que son Esprit et ses promesses étaient là pour les soutenir et assurer leur bonheur et leur salut.

Dans les montagnes de la Palestine, l'âne ou le mulet étaient ordinairement préférés au cheval pour l'usage domestique. Aussi des ânes figurent-ils dans l'énumération des richesses des patriarches Abraham et Job (Gen., XII, 16. Job, XLII, 12). Méphiboseth, le petit-fils de Saül, était monté sur un âne, de même qu'Achitophel, premier ministre de David. Sous le règne de Joram même, fils d'Achab, les services de cet animal étaient encore appréciés par !a noblesse. La Sunamite, par exemple, qui paraît avoir été d'un rang élevé, selle son âne et le monte pour se rendre auprès d'Elisée (2 Rois, IV, 8, 24). Plus tard cependant, et déjà à partir du règne do Salomon, le cheval commence à être regardé comme un animal plus noble et plus distingué. Salomon fait venir des chevaux de l'Arabie, et, à l'époque du retour de Babylone, les riches n'avaient plus d'autre monture; tout au plus tolérait-on encore les mulets. Ce fut donc bientôt une preuve de pauvreté ou d'humilité que de paraître en monté sur un âne, et c'est dans ces circonstances, sous l'impression de ce jugement généralement défavorable, que notre Seigneur fit son entrée triomphale dans Jérusalem ; cf. Zach., IX, 9. Matth., XXI, 45.

Les Hébreux se servaient de l'âne aussi bien que du boeuf pour le labour (Esaïe, XXX , 24; XXXII, 20); mais il leur était défendu d'atteler l'un et l'autre à la même charrue, soit pour des motifs d'humanité, à cause de l'inégalité du pas, soit pour rappeler aux Juifs, par un exemple de plus , qu'il ne faut pas associer des choses qui ne vont pas ensemble, et qu'il ne doit y avoir aucune communion entre le peuple de Dieu et les idolâtres.

Issacar est comparé à un âne ossu, sans doute au point de vue de la vigueur et de la force corporelle. Il est dit aussi de lui qu'il aimera mieux plier son dos sous le joug que d'accepter les difficiles conséquences de la guerre; il aimera mieux une paix sans gloire qu'une liberté chèrement conquise (Gen., XLIX, 14). Cette prophétie s'accomplit à la lettre dans l'histoire de cette tribu qui se soumit successivement aux Phéniciens d'abord , puis aux Cananéens. - Une fable bien connue rend témoignage aux vertus pacifiques de cet animal.

La queue des moutons syriens est beaucoup plus grasse que celle, des moutons ordinaires; elle pèse quelquefois jusqu'au quart du poids total de l'animal, et on la regarde comme un mets fort délicat. De là aussi, dans le rituel lévitique, l'ordre d'offrir sur l'autel « la graisse et la queue de la bête jusqu'à l'échine » en sacrifice à l'Eternel (Lév. , III, 9). C'était une offrande de prix. - Dans l'état domestique, la brebis est un animal faible et sans défense; sous ce rapport, elle est complètement sous la dépendance du berger qui lui doit ses soins et sa protection. Sa disposition à s'éloigner du bercail et à vaguer à l'abandon au risque de tous les dangers qui, dans un pays comme la Judée, la menaçaient de tous côtés, est l'objet d'allusions nombreuses et touchantes dans l'Ecriture (Ps. CXIX, 176. Esaïe , LIII, 6). - Le pâtre oriental appelle ses brebis, et elles connaissent sa voix (Jean, X, 11). La connaissance des habitudes de cet animal est nécessaire pour l'intelligence entière de plusieurs passages.

La force et le courage du lion sont bien connus. S'il doit battre en retraite, il se retire la face tournée vers l'ennemi. Quand il a tué sa victime , il la met en pièces et la dévore avec avidité (Ps. XVII , 12. Osée, XIII, 8). Le jeune lion vit de sa chasse et quitte rarement la forêt; mais quand il est devenu plus âgé, il s'aventure dans les plaines et devient dangereux pour ceux qu'il y rencontre; il attaque même les hommes. On comprend ainsi la nuance bien tranchée qu'il y a (Osée, V, 14 ) dans la conduite de Dieu à l'égard d'Ephraïm et à l'égard de Juda; pour les dix tribus il sera un vieux lion, il les dispersera au loin, et leur fera subir une longue et dure captivité ; pour Juda il sera moins sévère, il attendra, leur exil ne commencera que cent trente-trois ans plus tard et ne durera que soixante-dix ans. - Jér., XLIX, 19, ne se comprend que si l'on connaît les habitudes du lion. L'une des retraites favorites de ce roi des animaux était dans les parties basses des environs du Jourdain; mais ce fleuve, comme le Nil, débordant au printemps , chassait ses hôtes de leurs repaires, et ils se réfugiaient sur les collines voisines où ils commettaient de grands ravages. - Les consolations de l'Evangile et la terreur dont il frappera les impénitents, sont appelés un rugissement de l'Eternel ( Joël, Ill, 16). - Les dispositions sauvages et féroces du lion sont souvent prises comme terme de comparaison , et habituellement dans un mauvais sens ( cf. Esaïe, V, 29. 1 Pierre, V, 8 ).

Beaucoup d'autres figures encore sont empruntées à l'histoire naturelle ; l'huile, la myrrhe, le baume de Galaad, la sauterelle, le chameau , la colombe , etc. , sont pris dans un sens emblématique et comme symboles. Il n'entre pas dans le plan de cet ouvrage de nous arrêter plus longtemps sur ce sujet , et d'ailleurs, dans la plupart des cas, l'Ecriture se charge elle-même d'expliquer le sens de ces emblèmes (2).

Depuis que la Bible a été traduite dans les langues modernes, bien des progrès ont été faits soit dans la connaissance de l'hébreu, soit dans la connaissance de l'histoire naturelle orientale. Des erreurs de traduction ont été découvertes, et sous ce rapport, comme la valeur des images dépend en partie de l'exactitude de la traduction , des corrections sont devenues nécessaires. Nous ne pouvons songer même à les indiquer ici ; c'est le travail des dictionnaires et des commentaires , un travail qui laisse encore beaucoup à désirer au point de vue de l'exactitude , car plusieurs des modifications proposées sont purement conjecturales ; d'autres sont négatives et se bornent à constater que la traduction ordinaire est fausse , sans que rien cependant en recommande une autre d'une manière absolue. Pour n'en citer que quelques exemples, il est peu probable qu'il y eût des instruments de musique faits en bois de sapin ( 2 Sam. , VI , 5). Les épines et buissons portent dans l'Ecriture seize ou dix-sept noms différents, et l'analogie des langues orientales ne permet pas de les distinguer les uns des autres. Huit espèces de roseaux sont mentionnées, dont il est impossible de déterminer dans tous les cas la nature particulière. Le cyprès , qui était très-abondant en Palestine , et qui avait , comme bois , une très-grande valeur, n'est jamais nommé dans nos versions ; or, il est peu probable qu'il ne le soit pas dans le texte original. On peut en dire autant des minéraux et du règne animal ; il reste des études à faire.


Table des matières

Page précédente: SECTION V. - Des secours extérieurs qui peuvent être employés pour l'interprétation de la Bible. (Suite 1)

Page suivante: SECTION V. - Des secours extérieurs qui peuvent être employés pour l'interprétation de la Bible. (Suite 3)


.

(1) On peut ajouter comme quatrième raison à l'appui de cette manière de voir, que le mode de numération en usage chez les Hébreux pouvait facilement donner lieu à des erreurs de copistes, volontaires ou involontaires. (Trad.)

.

(2) Voir pour tous ce paragraphe notre Dictionnaire de la Bible, aux différents articles. Trad. )