SECTION III - Introduction spéciale aux Epîtres , depuis la première aux Thessaloniciens jusqu'à Jude. ( Suite)

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     § 181. Epître aux Colossiens (Rome, an 62). - Colosse était une des principales villes de la Phrygie, contrée alors très-riche et très-fertile, quoique aujourd'hui, sous le joug musulman, en majeure partie inculte. Paul visita deux fois cette province (Actes, XVI, 8; XVIII , 23; mais on ne sait pas s'il poussa jusqu'à Colosse. L'ensemble de l'épître ferait supposer que non (voyez, en particulier, II, 1). Quoi qu'il en soit, il est certain qu'il fit la connaissance de plusieurs chrétiens de cette ville , entre autres d'Archippe, un de leurs pasteurs, et de Philémon , qui sont expressément désignés. Les Colossiens , ayant appris l'emprisonnement de Paul , lui envoyèrent Epaphras, leur pasteur, pour le consoler et l'informer de leur état: celui-ci, peu après son arrivée à Rome, fut à son tour aussi mis en prison (Phil. , 24).

    Cette épître fut écrite durant la première captivité de Paul à Rome (I , 24; IV, 18), probablement dans les commencements, à la même époque que celles aux Ephésiens et à Philémon ; car toutes trois paraissent avoir été envoyées par les mêmes messagers, Tychique et Onésime, ce dernier retournant à Colosse auprès de son maître Philémon. Le rapport fait sur l'Eglise par Epaphras avait été de tout point satisfaisant. Il perce cependant , dans la lettre de Paul, quelques craintes au sujet des faux docteurs, qui tendaient à combiner avec le christianisme les spéculations des philosophes (II, 4-8) et des observances superstitieuses (II, 16).

    La frappante ressemblance qu'il est facile de remarquer entre cette épître et celle aux Ephésiens , indique quelque similitude dans les tendances et dans la position des deux Eglises.

    Ces deux épîtres doivent , en effet , être lues simultanément.

    L'une est le commentaire de l'autre, » suivant l'observation de Michaélis. Toutes deux sont d'ailleurs très-riches en manifestations de la gloire de l'Evangile.

    Cette épître devait être envoyée à Laodicée, et les Colossiens devaient recevoir des Laodicéens l'épître qui avait dû être envoyée directement à ces derniers , probablement celle aux Ephésiens.

    L'épître se divise en deux parties principales : l'une doctrinale, l'autre pratique.

    I. Après les salutations d'usage, Paul exprime sa reconnaissance envers Dieu pour les effets produits par l'Evangile au milieu des Colossiens ; il raconte comment il prie, avec une constante sollicitude , pour qu'ils continuent de faire des progrès en toute connaissance spirituelle et dans la pratique des vertus chrétiennes (I, 1-14) ; il expose les gloires divines et médiatrices du Rédempteur , et donne une vue sublime de toute la doctrine de la réconciliation par Christ , tant dans son étendue, comme embrassant tous les êtres créés, que dans son application individuelle aux croyants par leur conversion personnelle à Dieu (1, 14-21). Il parle ensuite de ses propres travaux et de ses souffrances comme apôtre des Gentils, et manifeste la sollicitude la plus vive pour leur stabilité et leur persévérance (I , 21 ; II, 5).

    Il les met ensuite en garde contre des erreurs particulières ; leur montrant que ni les spéculations philosophiques, ni les ordonnances et les traditions humaines, ni les austérités ascétiques ne peuvent élever l'âme vers les choses d'en haut et la rendre capable de réaliser les choses invisibles et éternelles. D'un autre côté , ajoute-t-il , nous avons en Christ un parfait salut; la foi en lui, non-seulement nous réconcilie avec Dieu, mais, en nous unissant à un Rédempteur élevé au ciel, elle dirige nos pensées et nos désirs vers les choses qui sont en haut (II, 6; III, 4).

    Il. Dans la seconde partie, il développe d'une manière pratique la doctrine qui précède; il fait ressortir l'opération de cette foi vivifiante, qui subjugue les penchants de la vieille nature pécheresse, qui produit et entretient la sainteté du nouvel homme sous tous les rapports, et surtout qui féconde l'amour fraternel en l'exerçant par l'adoration en commun et par l'édification mutuelle (III, 4-16). il donne de courtes directions pour l'accomplissement des devoirs domestiques (III, 18-25; IV, 1), exhorte les Colossiens à la persévérance dans la prière et l'action de grâces, et à une conduite sage, ferme et sérieuse devant le monde (IV, 1-6). En finissant, il fait mention de Tychique et d'Onésime, qui pourront donner aux Colossiens de complètes informations sur sa situation ; et il envoie des salutations, de la part de ses compagnons d'oeuvre et de la sienne, à diverses personnes , entre autres à leur pasteur Archippe, ajoutant , au moment de signer la lettre, une touchante invitation à se souvenir de ses liens (IV, 6-18). - Comment. de Steiger.

    Lisez et comparez : I, 1, 3, 9, 19, 21, 24; II, 1, 6, 8, 16, 20, III, 4, 5, 12, 16, 18, 20, 22; IV, 1, 2, 5, 7, 10, 15, 18.

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    § 182. Epître à Philémon (Rome, an 62). - Ce modèle inspiré ,de correspondance chrétienne privée fut adressé par l'apôtre Paul à Philémon, l'un de ses convertis résidant à Colosse (comp. versets 2, 10, 19, avec Col. , IV, 9, 17), dont on ne sait, du reste , rien de plus que ce qu'on peut déduire de cette lettre. On a supposé qu'il était ancien ou diacre de l'Eglise, et qu'Appia était sa femme. Archippe paraît avoir été pasteur de Colosse (Col., IV, 17).

    Cette épître fut évidemment écrite (voyez versets I, 10, 23) et envoyée à la même époque que celle aux Colossiens (voyez Col. , IV, 8. Comp. aussi versets 23 , 24 , avec Col. , IV, 10-14). Onésime, le sujet de cette épître et le porteur des deux, était un esclave (probablement un serviteur dans la maison) de Philémon , qui , s'étant enfui de chez son maître, s'était réfugié à Rome , et là avait été converti par le ministère de Paul (verset 10). Peu après, Paul, pensant qu'il était juste qu'il retournât auprès de son maître , écrivit cette lettre élégante et persuasive , dans le but de lui assurer une bienveillante réception.

    Après une salutation affectueuse de sa part et de celle de Timothée , l'Apôtre rend grâces à Dieu pour tout le bien qu'il a entendu dire de Philémon comme chrétien. Il aborde ensuite, avec beaucoup de délicatesse, le sujet principal de sa lettre ; il sollicite, comme « ancien , et même maintenant prisonnier » pour leur foi commune, ce que comme apôtre il aurait pu ordonner. Reconnaissant le tort d'Onésime , il mentionne l'heureux changement qui s'est opéré en lui ; il suggère à Philémon l'idée chrétienne que cette fuite a été permise de Dieu pour le bien du maître aussi bien que pour celui de l'esclave; et il le supplie de recevoir Onésime, non plus comme un esclave, mais comme un frère croyant. Il lui offre enfin , et d'une manière très-délicate , de lui tenir compte du dommage qu'il peut avoir éprouvé, en même temps qu'il lui rappelle les grandes obligations qu'il a lui-même envers l'Apôtre.

    Cette courte lettre est inappréciable comme exemple de l'humilité, de la courtoisie et de la liberté qui doivent exister dans les relations d'amis chrétiens ; on ne peut supposer autrement, sinon que la douceur et la prudence avec lesquelles l'Apôtre plaida la cause du fugitif eurent un plein succès.

    Lisez les versets 1, 4, 8 , 21, 23, 25. Comparez, sur l'esprit de l'ensemble de cette épître, 1 Tim., VI, 1, 2. Jacq., I, 9-11. Philip. , II, 3-8. - Méditations de Rochat.

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    § 183. Epître aux Philippiens (Rome, an 63). - Philippe, ville de Macédoine, l'ancienne Crénidés, agrandie «abord par Philippe, roi de Macédoine, et quelque temps après déclarée colonie par Jules César , qui donna à ses habitants les droits et privilèges de citoyens romains , est désignée comme la première ville en Europe qui ait reçu l'Evangile, Paul y ayant été conduit par une direction spéciale du Saint-Esprit , contrairement à ses premiers plans (Actes , XVI). En arrivant à Philippe , Paul, suivant son usage habituel, s'adressa d'abord aux Juifs ; ceux-ci , toutefois , paraissent avoir été peu nombreux. Ceux qui se rendaient pour le culte, à un lieu de prière situé hors de la ville, étaient surtout des femmes ; une d'elles, une pieuse étrangère d'Asie, fut la première convertie au christianisme. Les travaux bénis de Paul et de Silas, et la persécution qui s'éleva contre eux et provoqua leur départ , sont racontés dans les Actes, chapitre XVI. Paul visita de nouveau Philippe avant son premier emprisonnement. à Rome , comme on le voit par Actes, XX, 1, 2, 6. Lors de son premier départ , il semble avoir laissé Luc en arrière à Philippe (XVI, 12; XVII, 1). Il parait encore que Luc, qui était avec l'Apôtre au début de son emprisonnement à Rome (Actes, XXVII. Col. , IV, 14) , l'avait quitté au moment où Paul écrivait aux Philippiens (II , 20, 21).

    Cette épître fut manifestement écrite de Rome (voyez chap. I, 12-14; IV, 22) , et probablement pendant la dernière partie de la première captivité de l'Apôtre dans cette ville ; car Paul , à l'époque où il l'écrivait, prévoyait une heureuse et prochaine solution de son procès, et comptait d'être rendu à la liberté (I, 25, 27; Il , 23, 24). Elle paraît avoir été écrite à l'occasion du retour d'Epaphrodite, que l'Eglise de Philippe avait envoyé à Rome avec une contribution pécuniaire pour subvenir aux besoins de l'Apôtre durant sa captivité, et qui , pendant qu'il s'acquittait avec zèle de cette mission , était tombé dangereusement malade. Cette nouvelle affligea tellement les Philippiens, que Paul se décida à le renvoyer , pour son entier rétablissement, plus tôt qu'il n'avait pensé (II , 24-30). - Voyez Rilliet, Commentaire sur les Philippiens.

    L'Eglise de Philippe paraît avoir été une des plus pures et des plus généreuses de cette époque. Ses membres montraient la plus grande tendresse pour Paul. Deux fois pendant qu'il était à Thessalonique, et une fois à Corinthe, ils lui avaient libéralement envoyé, pour fournir à son entretien, des collectes considérables, et l'Apôtre avait accepté ces dons pour éviter que l'Evangile devînt une charge pour de plus nouveaux convertis (IV, 15, 16. 2 Cor. , XI , 9). Ils avaient en outre supporté joyeusement diverses épreuves et afflictions par fidélité pour leur Sauveur (I, 28-30). Leur conduite avait été en tout point si exemplaire , qu'il avait toujours eu sujet de se réjouir à cause d'eux. Aussi, dans cette épître, son coeur se répand-il en pieuses actions de grâces et en cordiales recommandations, sans négliger toutefois ni les exhortations, ni les conseils.

    L'épître peut se diviser en trois parties -

    I. Après une affectueuse salutation , Paul exprime sa reconnaissance envers Dieu pour les Philippiens et son désir ardent de les voir croître en connaissance et en sainteté ( I, 1-11). Pour qu'ils ne se laissent pas abattre par la pensée de sa position, il les assure que, loin d'avoir nui à la cause de l'Evangile, son emprisonnement lui a été plutôt favorable ; car quelques-uns ont puisé de la hardiesse dans ses liens, tandis que d'autres ont prêché Christ avec tir esprit de dispute, il est vrai , mais ils l'ont prêché. Et pourvu que Christ soit annoncé et glorifié , que ce soit par les travaux de Paul ou par son martyre, ou autrement encore , il sera lui-même plus que content. Il regarde la première solution comme plus probable, et exhorte les Philippiens à conserver, quoi qu'il arrive , une conduite digne de l'Evangile, à demeurer fermes et courageux , unis, généreux et humbles, imitant l'exemple de leur Seigneur et Sauveur; il leur rappelle que leur constance et leur fidélité sont sa plus sainte récompense. Il promet de leur envoyer bientôt Timothée ; il donne la raison pour laquelle il envoie Epaphrodite, et décrit en quelques mots le caractère de l'un et de l'autre (I , 12 à II).

    II. Il exhorte les Philippiens à se réjouir de leurs priviléges comme chrétiens, et à se tenir sur leurs gardes vis-à-vis des docteurs judaïsants , qui se prévalaient de distinctions humaines et légales , dont il aurait pu lui-même se prévaloir plus qu'eux ; mais ce qui autrefois aurait eu pour lui de la valeur, il le regarde maintenant comme complètement inutile et même nuisible , en comparaison de l'excellence de la connaissance de Christ; sa sainte ambition est de tendre à la perfection , et il presse les Philippiens d'agir dans un même esprit ; il oppose à cet esprit la conduite des faux docteurs dont il a déjà parlé, et contre lesquels il a déjà essayé de prémunir les Philippiens (III à IV, 1).

    III. Exhortations particulières et conseils à quelques membres de l'Eglise. - L'Apôtre ajoute ensuite des exhortations générales relatives à la joie, à la modération, à la prière et à l'action de grâces, ainsi qu'à l'étude et à la pratique de tout ce qui est vrai, juste, pur, aimable et digne de louange (IV, 2-9). L'épître conclut par de profonds remerciements pour les preuves réitérées d'affection, de soins et de sympathies qu'il a reçues des Philippiens , et pour lesquels il s'est réjoui à cause d'eux. Il insinue d'ailleurs avec une noble délicatesse qu'il est content dans la disette comme dans l'abondance, et termine par des salutations et la bénédiction (IV, 10-23).

    A lire et à comparer : I, 1, 12, 15, 21, 27; II, 1, 5, 12, 17, 19, 25; III, 1 , 2, 12, 15; IV, 2, 4, 6, 8, 10, 15, 20, 21, 23.


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