Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

XIII

L'INFLUENCE

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Les femmes qui s'insurgent contre l'autorité oublient la valeur de l'influence. L'influence de la femme est certaine, immense, universelle; cette influence bonne ou mauvaise s'exercera-t-elle pour Ici, bien ou pour le mal? voila le point important.

La femme demeure-t-elle l'être frivole que veut la tradition, la femme devient-elle l'être mercantile que crée notre siècle d'argent, condescend-elle à se faire l'être politique et peu féminin que cherchent à fabriquer certains réformateurs, cette influence-là sera fatale. Avec la femme instruite, capable, aimante et chrétienne, au contraire, l'influence portera des fruits si beaux, qu'en fait de reforme elle ne laissera plus rien à désirer.

L'homme a l'autorité. Par le charme, par la promptitude intuitive, par la facilité d'élocution, par les délicatesses d'une conscience dont le frottement avec les affaires extérieures n'a pas usé les angles vifs, par l'existence plus recueillie, par un contact plus habituel avec les notions morales, par l'innocente finesse, par l'ardeur, par l'élan, par les tendresses qu'elles inspirent et qu'elles ressentent, par ce grand monopole. de l'éducation qui leur appartiendra toujours, les femmes ont l'influence.
Dieu, qui a tout bien fait, a mis l'influence en face du pouvoir; et nous répétons après Vinet : « Si la femme est mécontente de son partage, j'ose dire qu'elle n'y entend rien ! »
Les hommes ont, il est vrai, promulgué les lois, ils ont écrit les livres, de là cet injuste amoindrissement de la mission féminine qu'on signale avec raison aujourd'hui. Mais ni les moeurs, ni les lois, ni les livres ne se font en dehors de l'influence des femmes; elles y travaillent sans le savoir; elles consentent encore plus qu'elles ne subissent.
Une nullité rachetée par des compliments ! voilà ce qui a été proclamé d'une part, et trop accepté de l'autre. C'est donc aux femmes qu'il appartient d'opérer la bonne émancipation des femmes. C'est à elles qu'il appartient de chercher le sérieux des occupations de la vie. Dès qu'elles le voudront réellement, sitôt que toutes aspireront à cette égalité qui réside dans l'intimité conjugale, dans l'association croissante des pensées des travaux, la révolution féminine du XIXe siècle s'accomplira d'elle-même.

Les hommes distingués, a-t-on dit, sont toujours les fils de leur mère; ajoutons, pour être justes, qu'ils sont les maris de leurs femmes. Un homme mal marié ne sera jamais complet. Par quoi remplacer cette tendresse, cette conscience en éveil, cette franchise aimante, ce coeur loyal et fidèle ces encouragements, cette atmosphère pénétrée de poésie et de vérité, cette énergie, cette douceur, tout ce pur, tout ce vivifiant Éden au milieu duquel notre être entier se dilate, se fortifie et s'ennoblit?

Où manque la femme avec ses aspirations au bien, avec ce besoin de perfection qu'elle sent pour ceux qu'elle aime, le mari et les enfants ne rencontrent plus que des complaisances funestes ou que d'hostiles sincérités. La race des enfants gâtés et des brutaux se forme ainsi; ils n'ont pas connu l'être qui chérit, qui réchauffe, qui résiste en souriant, qui blâme en pleurant qui soutient, qui console, toujours là, faible et fort, sérieux, gracieux, la vraie moitié de l'âme humaine!

Ce qu'il y a d'admirable dans le relèvement que les femmes ont raison de chercher pour elles-mêmes, c'est qu'il entraînera le relèvement des hommes. L'homme, en reléguant la femme dans la sphère des futilités, l'homme s'abaissait aussi; il abaissait sa famille, son amour, sa vie morale, le cours de ses pensées, l'avenir de ses enfants; il abaissait jusqu'aux inspirations de la poésie; c'était une pauvre, compensation de se réserver certains droits et d'accaparer les affaires. Dès l'instant où l'influence morale remportant sa victoire sur la force, le rôle de la femme remontera à son vrai niveau, tous les niveaux remonteront par le même fait. Il y aura un progrès dans les études, dans les affections, dans les éducations, dans les familles, dans les bonheurs. La femme, en reprenant sa place, remettra l'homme à la sienne; l'idéal humain se relèvera pour tous.
Mais qu'elle ne sorte pas du sanctuaire! Lorsque la femme se mêle publiquement de la chose publique, elle se fêle en quelque sorte; la cloche ne rend plus un son juste et pur. Il faut que la femme placée en dehors du détail des affaires, interrogée comme les Gaulois interrogeaient les druides se juge au moyen de ce don admirable qu'elle a reçu de Dieu : le don d'intuition. C'est ainsi, non autrement, qu'elle exercera sur la chose publique une influence droite et généreuse, une influence bénie, considérable, et dont on ne se passerait pas impunément. Quand les femmes auront concentré sur l'amélioration de la vie de famille, les efforts qu'elles perdent à la poursuite d'un rôle politique, les hommes, retenus au foyer par ce charme nouveau, sentiront se resserrer les liens de l'union; l'association des idées naîtra, le cercle étroit de l'existence féminine s'élargira, une forte, une saine action s'exercera; les affaires publiques n'y échapperont pas plus que le reste, et les femmes voteront alors comme elles doivent voter, très-modestement, mais très-réellement.
Ne l'ont-elles point fait? Qui serait assez naïf pour croire que jusqu'ici les femmes n'ont pas voté? Elles ont voté de la bonne manière, par l'influence discrète et cachée. Il y a bien plus de votes féminins qu'on ne l'imagine au fond de nos scrutins. Soyez tranquilles, les urnes électorales en renfermeront davantage. encore, lorsque l'Évangile, pleinement reçu, aura réalisé entre les époux devenus chrétiens les miracles d'une intimité véritable et sanctifiée.

Vous qui, au nom des femmes, demandez la moitié des votes, vous n'oubliez qu'une chose, c'est que les femmes sont épouses, qu'elles sont mères et qu'elles élèvent la totalité du genre humain! Au lieu de ces éducations relâchées ou livrées à des mains étrangères trop usitées aujourd'hui, que les femmes ressaisissent les rênes, qu'elles reprennent possession de leurs enfants, qu'elles se consacrent à eux, qu'elles leur enseignent le respect, l'obéissance, le devoir, qu'elles obtiennent du père son action directe sur ses fils et sur ses filles, que dans la maison règne la foi, que le Seigneur Jésus y soit aimé, qu'on y serve Dieu, qu'on prie, qu'on sente la valeur des âmes, qu'on jouisse d'un bonheur élevé, et les femmes, j'ose l'affirmer, feront mieux que gouverner le monde, elles le sauveront.

Il y a des hommes grossiers, je le sais; il y a des vies détraquées, il y a des existences et des caractères que détruisent les cafés et les cabarets. Le club qui supprime la vie de famille, règne en maître dans plus d'un pays; la mode - et les honnêtes femmes y ont pris peine - entoure les femmes déshonnêtes d'une sorte d'auréole qui éblouit; le vice défait les ménages et brise les coeurs Nos émancipatrices s'inquiètent fort peu de cela; on dirait que le droit de suffrage répond à tout, suffit à tout, réformera tout!
Ici encore nous en appelons à l'influence; une seule peut rendre le logis attrayant, le foyer intime et doux, la modestie plus séduisante que l'effronterie, elle seule a la clef d'or, la clef de la bonne vie, de la belle de l'idéal par les pures amours.
Et ne venez pas dire que préoccupé de la situation normale, le. mariage; j'oublie ou je méconnaisse là vocation des femmes célibataires! La femme qui ne s'est pas mariée parce qu'elle avait le coeur haut placé et que ce coeur, n'a pu rencontré ce qu'il cherchait; la femme, qui ne s'est pas mariée parce que, noblement loyale, elle n'a pas voulu, livrer sa main sans donner ses affections; la femme qui ne s'est pas mariée parce que les exigences d'un père, parce que la pauvreté peut-être, parce qu'un devoir de consécration l'ont enchaînée, cette femme a sa mission, n'en doutez nullement : elle exercera son influence, large, directe et bénie. Voyez l'action de la soeur sur les frères, de, la fille sur le père, de l'âme sympathique sur les amis!

Voyez le long cortège des misères et des souffrances, comme il connaît le chemin de ce logis, comme il y rencontre des compassions et des larmes, comme il y trouve ce que ne lui donneraient pas des maisons mieux ensoleillées ou des coeurs plus heureux. Allez, ni cette vie-là ne s'est rétrécie, ni ce coeur né s'est refroidi, ni cette intelligence ne s'est appauvrie; si tout a souffert, tout a grandi!
Ne dites pas que la jeunesse et que la beauté seules exercent l'influence. La mission de la femme, telle que Dieu l'a faite, telle que certains réformateurs voudraient aujourd'hui la défaire, est si grande, qu'elle se maintient absolument indépendante de la jeunesse et de la beauté. Elle a des sources plus profondes. Ne le connaissez-vous point, ce charme de la femme dépourvue d'éclat, mais qu'illumine la flamme intérieure? ne le connaissez-vous point, ce charme de la femme âgée, éternellement naïve et jeune? Ne vous êtes-vous pas sentis touché, enlacé? N'avez-vous point laissé à l'écart les plus jolies poupées, pour ces laides ou pour ces vieilles auprès desquelles on trouve des idées, de l'indulgence, de la charité, de la conscience, de la vie enfin?
Le charme, il faut redire le mot, le charme est là. Et avec le charme l'influence, avec l'influence l'avenir.

Croyez-moi, vous toutes qui avez reçu de l'Évangile une telle part, ne rêvez pas de nos grossiers conflits, n'étendez pas la main pour saisir nos droits; vous laisseriez échapper votre trésor, notre espérance, le bonheur de tous!
Pour la seconde fois, les portes du paradis se fermeraient sur la race humaine.

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