Le droit de vote forme le principal article des
réclamations féminines. Aux États-Unis,
la proposition n'a été rejetée
qu'à une faible majorité. En Angleterre, bien
que la haute cour de justice ait repoussé une
requête analogue, les inscriptions déjà
faites dans quelques comtés sont demeurées
valables jusqu'à la fin de l'année
(1).
Les femmes inscrites
ont pris part aux élections. À Manchester et
ailleurs, accueillies aux applaudissements de la foule, on
s'est disputé leurs suffrages.
Je n'ai nulle envie de déclarer ceci ridicule
: Vous riez de ce qui vous tuera! disait Proudhon.
On nous demande si le plus ou moins de vigueur
physique influe sur le droit de suffrage?
Non sans doute; il serait absurde et brutal de
repousser le suffrage des femmes sous prétexte que
les hommes ont de leur côté la force des
muscles. Toutefois la faiblesse relative des femmes, leurs
maladies fréquentes, leurs grossesses, ne sont-elles
pas les indications providentielles du rôle
intérieur et paisible que Dieu leur a
réservé? Ne ressort-il pas de là que la
vie publique avec ses agitations, avec ses devoirs dont
l'accomplissement ne comporte pas d'interruptions n'est
point leur fait, tandis que visiblement appropriée
à la constitution de l'homme, elle forme sa tache
ici-bas?
Argumentez-vous de la force que déploie la
femme dans le travail de l'accouchement, dans les soins de
l'allaitement, dans le train de guerre de l'éducation
et du ménage , dans l'exercice de la charité,
dans la lutte contre des souffrances où son courage
dépasse le nôtre? Nous répondrons que
cette force, qui n'est pas inférieure, est
différente, qu'elle est féminine, qu'elle est
adaptée aux devoirs féminins, et qu'il serait
par conséquent étrange d'en
méconnaître et d'en violenter les
applications.
Soit! dit-on. Mais alors, si la complexion des
femmes
les porte réellement à la vie
d'intérieur, si elle leur interdit réellement
la vie publique; laissez agir cette nature. La loi n'a pas
à s'en mêler. Point de système
protecteur; la liberté de commerce suffit pour que
chacun produise selon ses moyens; les femmes produiront de
la vie intérieure et non de la vie publique;
n'établissez ni droit au profit des uns, ni
interdiction au détriment des autres que chacun garde
le champ libre devant soi!
L'argument est ingénieux, rien de plus; en
l'appliquant d'une manière générale, on
supprimerait toutes les lois positives; à commencer
par le mariage légal, car si la nature porte au
mariage, il se fera; à finir par la
propriété légale: car si la nature
porte à la propriété, elle se
maintiendra!
Sans compter qu'établir le suffrage des femmes
c'est prendre une mesure directe, positive, provocatrice,
qui loin de laisser faire et de laisser passer, suivant la
formule, revêtira par cela seul qu'elle existe
l'apparence d'un devoir.
L'humanité est une ! s'écrient encore
les partisans du droit des femmes; pourquoi la diviser?
J'adopte la définition. L'homme est un: homme
et femme.
Mais l'unité même dont on argumente nous
conduit à cette conclusion, que la totalité
est représentée par la partie, qu'il ne
saurait y avoir antagonisme habituel et normal entre les
deux fractions solidaires d'un même tout, que par
conséquent le vote de l'homme contient celui de la
femme, chaque moitié accomplissant dans
l'intérêt commun les fonctions auxquelles il
est le plus propre. Ceux qui, sous prétexte
d'unité, supposent la lutte des intérêts
et veulent armer la femme pour défendre ses droits,
sont justement ceux qui nient l'homme un, sous la forme de
deux sexes.
On se retourne, et l'on déclare que lorsqu'il
s'agit d'une classe entière ou pour mieux dire d'une
moitié du genre humain, qui en cette qualité a
des intérêts particuliers à
débattre, l'égalité civile et
l'égalité politique ne sont pas
séparables!
La réponse se trouve dans les faits: les deux
égalités sont si séparables qu'elles
ont été souvent séparées.
En France, l'égalité civile existe pour
tous les citoyens depuis la Révolution de 1789; or,
depuis ce temps-là, l'égalité politique
est loin d'avoir régné chez nous, ce qui
n'empêche pas l'égalité: civile de s'y
être très-fermement et
très-sûrement maintenue.
En Angleterre, si l'égalité civile
n'est pas absolue, il s'en manque peu; or
l'égalité politique, c'est-à-dire le
suffrage égal de tous les citoyens, n'y est point
admis.
En Italie, en Belgique, dans d'autres pays,
l'égalité civile subsiste entière, et
pourtant point d'égalité politique, point de
suffrage universel.
Je ne vois pas, dès lors, comment
l'universalité du suffrage serait plus
nécessaire pour maintenir l'égalité
civile des femmes que pour maintenir celle des nombreuses
classes d'hommes auxquelles on n'attribue pas le droit de
voter.
On prétend que désarmées,
c'est-à-dire privées de
l'égalité politique, les femmes ne sauraient
compter sur la générosité des hommes
pour leur conserver l'égalité civile!
Encore ici les faits répondent.
Qui a poussé presque toutes les
législations dans le sens de l'égalité
civile pour les femmes? Qui réclame aujourd'hui
même le complément de cette
égalité? Qui propose en Angleterre la
modification ou la révocation des anciennes lois
contraires au droit de propriété chez les
femmes mariées ? qui, sinon les hommes ? Je ne le
mets pas sur le compte de leur
générosité; il n'est pas
nécessaire d'être généreux pour
se décider à être juste; mais enfin,
voilà les faits. Ajoutons que les femmes votent
réellement car leur influence vaut l'autorité.
L'égalité civile fortement voulue par toutes
les femmes ne sera en aucun pays refusée quatre jours
par les hommes.
L'erreur fondamentale consiste à imaginer
obstinément un antagonisme. Les hommes d'un
côté, les femmes de l'autre. Deux armées
en présence! On ne peut confier sa cause aux mains de
l'ennemi !
S'il en allait de la sorte, nous serions bien
à plaindre. Les bases mêmes de
l'humanité, telles que Dieu les a établies,
s'en trouveraient ébranlées. Dès lors
ne parlons plus de mariage, de famille, d'éducation
commune des enfants; entre ennemis, ces choses-là
sont hideuses et impossibles.
C'est parce que nous partons d'une idée
contraire que nous arrivons à une idée
opposée : le suffrage de l'homme suffit, parce que
l'homme n'est pas l'ennemi de la femme, ni l'époux de
l'épouse, ni le père de la fille, ni le
frère de la soeur.
Ne l'oubliez point, en réclamant
l'égalité politique, vous compromettez
l'égalité civile. Si un obstacle en effet,
peut ajourner ce légitime progrès, c'est la
menace des bouleversements monstrueux que l'on s'efforce de
provoquer, cette menace discrédite les demandes les
plus raisonnables que l'on verrait marcher en une telle
compagnie; le mouvement tout entier deviendrait suspect,
non-seulement aux yeux des hommes, mais aussi et surtout,
j'en suis sûr, aux yeux des neuf dixièmes des
femmes. Dans leur indignation, dans leur
dégoût, résolues à ne pas quitter
le foyer pour la place publique, décidées
à conserver intacte leur belle royauté du
dedans, elles répudieraient toute idée de
réforme, quelle qu'elle fût, et se
rattacheraient passionnément au statu quo!
Vous prétendez réaliser le suffrage
universel! vous ne l'aurez pas; les femmes vraiment femmes
n'exerceront pas ce droit; elles n'affronteront ni le bruit,
ni les contacts brutaux de la vie publique; à
supposer même qu'elles en aient essayé un jour,
effarouchées, désireuses de conserver leurs
délicatesses, elles se hâteront de regagner
leur nid, elles s'y cacheront et n'en sortiront plus. An
lieu du suffrage universel, vous aurez organise ce qu'il y a
de pis au monde, le suffrage d'une minorité, la
minorité des esprits dévoyés, des
existences risquées, des femmes qui n'ont rien
à perdre; pour satisfaire cette
minorité-là, la minorité des femmes
politiques, vous aurez compromis dans son ensemble la
gracieuse influence et la noble vocation de la femme.
Quoi qu'il arrive d'ailleurs, et le droit de vote
dût-il être emporté d'assaut, je ne crois
pas à sa durée.
L'influence des femmes ayant abdiqué et la
force régnant seule, les forts, c'est-à-dire
les hommes, reprendront ce qu'ils auront cédé,
sitôt qu'ils éprouveront une gêne ou
qu'ils apercevront un inconvénient. L'effet, en tout
cas, sera tellement désastreux qu'on reculera
d'épouvante. on ne porte pas impunément la
main sur la distinction absolue des sexes, base divine de la
famille et du corps social.
Après les côtés monstrueux, les
côtés ridicules ne tarderont point à
paraître, la raillerie s'en mêlera, le bon sens
fera au suffrage féminin une guerre acharnée;
cette surprise de l'opinion aura la durée des
surprises. Mais dans quel état se trouveront les
femmes après cette mauvaise victoire suivie d'une
mauvaise défaite! Elles auront reculé,
immensément reculé. La bataille finie, leurs
blessures ne se fermeront pas du jour an lendemain; on se
souviendra longtemps des excentricités, des
prétentions extravagantes. Pour avoir conquis pendant
une heure un rôle qui n'était pas le leur, les
femmes, je le répète, auront compromis d'une
façon durable la belle mission qui leur appartient.
Un grand nombre d'entre, elles sortiront de là
irritées, criant à l'abus de la force,
à l'injustice, plus préoccupées que
jamais de la vie publique, plus détournées que
jamais des devoirs de l'intérieur L'hostilité
aura, dans une certaine mesure, remplacé l'union; un
trouble profond se sera produit, le respect aura disparu,
les vrais progrès se seront indéfiniment
ajournés.
Si, contrairement à mes prévisions, le
progrès menteur remportait d'une manière
définitive, si les femmes acquéraient
irrévocablement le droit de vote, j'ose à
peine dire quelle disproportion s'établirait entre ce
qu'elles auraient gagné de la sorte et ce qu'elles
auraient perdu.
Ce qu'elles perdraient, indépendamment des
choses éternelles, ce serait ici-bas la vie de
famille, la tendresse élevée de leurs maris,
l'obéissance de leurs enfants, toute la vie morale,
tout le bonheur idéal, toute l'éducation,
toute l'influence, toute cette action bénie
qu'exercent les sentiments religieux lorsqu'ils rayonnent
dans le coeur d'une femme, lorsqu'ils éclairent et
qu'ils réchauffent son intérieur.
Mettez en regard le droit de vote, et dites si le
frisson ne vous prend pas !
N'oubliez point qu'aux, temps orageux, les femmes
votant, la passion votera. S'agit-il de guerre? Les femmes
sont plus belliqueuses que nous : rappelez-vous les
Grecques, les Romaines, les Germaines, les Gauloises;
rappelez-vous les quenouilles envoyées aux jeunes
gens pacifiques; sans remonter aussi haut, rappelons-nous
les derniers événements, l'ivresse de la
poudre, la soif des émotions, le culte de
l'épaulette, les emportements, les rages impuissantes
sous couleur de patriotisme outragé! S'agit-il de
révolution? d'horribles figures, violentes et
acharnées, des phalanges de furies l'écume
à la bouche, le couperet en main, toujours
prêtes à pérorer, à voter,
à tuer, reprochent aux hommes leur mollesse et nous
font reculer de dégoût !
Ne l'oubliez pas non plus, le vote des femmes dans
tous les pays catholiques sera dicté par le
clergé.
Il vaut la peine d'y réfléchir.
Expédition du Mexique, expédition de
Cochinchine, expédition, de Rome, guerre
déclarée à la Prusse, sans le vote,
nous leur devons cela. Avec le vote, nous leur devrions la
constitution d'une Europe latine en lutte contre l'Europe
protestante, peut-être l'intervention de nos
armées en Orient où elles auraient à
soutenir la mission catholique, peut-être nos
armées en Italie pour y revendiquer le pouvoir
temporel du pape, peut-être nos armées en
Espagne, si l'Espagne s'ouvrait trop largement à
l'Évangile !
Ajoutons que les questions politico-religieuses sont
les seules capables de déterminer la grande
majorité des femmes à voter malgré
leurs répugnances instinctives et que le
clergé les y pousserait.
Lé vote mène directement aux fonctions
publiques.
Comment établir une distinction entre ces deux
qualités : électeur et éligible? Au nom
de quel principe refusera-t-on d'admettre le résultat
d'une élection qui porte telles femmes à
telles ou telles charges civiles ou politiques? Du moment
où la vie publique leur est ouverte, dès
l'instant où leur mission ici-bas est
remplacée par une mission nouvelle, calquée
sur celle des hommes, je vous défie de dire au droit
des femmes : Tu n'iras pas plus loin ! Que leur manque-t-il
pour être élues; la capacité? nous avons
prouvé le contraire; le temps? mais les grands
devoirs de la chose publique passent avant les petits
devoirs de ménage, Le principe une fois posé,
que vous le vouliez ou non, il faut aller jusqu'au bout.
C'est la condamnation des gens qui en posent de mauvais.
Vous aurez des femmes avocats, vous aurez des femmes
députés, vous aurez des femmes préfets,
ministres, ambassadeurs; pourquoi non? le mal a sa logique
tout comme le bien. Vous aurez des femmes assises au banc
des jurés; d'autres siégeront en
qualité de juges que feront-elles lorsqu'on
prononcera le huis clos? Demandez-le aux partisans de leurs
droits politiques !
Demandez aussi comment elles concilieront les
obligations de la vie extérieure avec certains
devoirs inévitables de la vie intérieure. La
grossesse et l'allaitement, qu'on me permette d'y revenir,
chez une femme député ou ministre, chez une
femme juré, professeur, avocat, cela ne laisse pas
que de présenter quelques inconvénients.
Mettons la vocation extérieure au plus bas; on se
figure malaisément la femme électeur, son
poupon sur les bras, foulée et bousculée dans
la salle du scrutin!
Il faut choisir. Même avec une complète
égalité d'aptitudes, on ne peut tout faire
à la fois. Les femmes doivent, ainsi que nous, se
contenter d'un des deux rôles.
Notez-le bien, la vie publique est d'autant moins
conciliable avec la vocation des femmes, que cette vie se
fait de plus en plus exigeante. Les institutions libres
multiplient les devoirs des citoyens; ce sont des
élections ce sont des commissions, ce sont des
réunions préparatoires, ce sont des conseils
municipaux, ce sont des conseils d'arrondissement et de
département; ce sont des enquêtes, des
assemblées pour étudier les questions; ce sont
des clubs pour les attaquer ou les défendre; ce sont
des journaux, des revues, des circulaires aux
électeurs. Et l'on voudrait que le logis, on voudrait
que les enfants, sans parler du mari, s'accommodassent de
tout cela! À moins que le mari, par un juste retour
des choses d'ici-bas, après avoir longtemps veille
aux intérêts de l'État, ne surveille le
pot-au-feu et ne donne la bouillie aux marmots !
On nous cite des votes qui n'ont rien à faire
avec la vie publique; à Paris, le vote des femmes
dans la société des gens de lettres; à
Vienne, dans les élections municipales, le vote des
femmes propriétaires d'immeubles. Ces
votes-là, chacun le sent, ne compromettent en aucune
façon le caractère féminin.
Je connais une association de secours mutuels entre
femmes, où l'on a commencé par faire
délibérer les maris et les frères,
puis, trouvant plus juste de laisser les femmes examiner et
décider ce, qui les regarde, on leur a remis le
gouvernement de leurs propres affaires. Ainsi se
présente le droit de. suffrage dans une de ses
applications légitimes et naturelles.
Le vote des femmes, admis par plusieurs
Églises libres, ne m'alarme pas davantage. Au sein
d'assemblées peu nombreuses et quand il s'agit
d'intérêts qui touchent de partout à la
vie intime, l'opinion des femmes peut s'exprimer par un
bulletin sans que la vocation spéciale de la femme en
reçoive d'atteinte ou que le sanctuaire domestique
s'en trouve violé.
La veuve hongroise qui vient accidentellement
remplacer son mari mort et qui vote en silence, ait nom des
intérêts de sa famille, pour l'élection
des combats, ne cesse pas de concevoir son rôle de
femme dans le sens normal du mot.
Telle femme du moyen âge, investie d'un fief,
commandait à des hommes : elle avait ses vassaux, ses
ministres et ses armées; telle autre, en
qualité d'abbesse, exerçait une
autorité considérable et dirigeait parfois
même des couvents de moines. Mais ces anomalies
n'atteignaient nullement le principe; l'idée de
transformer la mission providentielle de la femme n'entrait
dans l'esprit de personne, et les femmes qui remplissaient
ces charges étranges n'auraient pas plus compris les
théories modernes, que les femmes strictement
renfermées dans le, cercle des plus humbles
devoirs.
Reines d'Égypte et d'Assyrie,
impératrices de Byzance, princesses indoues qui
mènent et malmènent les populations du fond de
leur harem, tous ces exemples, bons ou mauvais, vrais ou
faux, de Séminaris à Irène, d'Elisabeth
à Catherine II, de Victoria à la reine
Isabelle d'Espagne, ne changent, rien à la question.
Impératrices, reines ou régentes, toutes
gouvernent à titre exceptionnel. Leur plus ou moins
de capacité, leur plus ou moins de succès
n'ont altéré en quoi que ce soit le
caractère féminin. Pas un de ces faits
historiques n'a compromis la situation
générale des femmes; pas une de celles. qui
échappaient à la règle commune n'en a
tire de fausse conséquences, Rien ici ne ressemble
à cette confusion des rôles qui porterait
atteinte au plan divin.
Il y a eu des hommes aussi, appelés par des
circonstances non moins exceptionnelles à remplir des
fonctions féminines, à devenir de vraies
mères, à s'occuper des soins les plus
minutieux concernant le ménage et les enfants; en
tirerez-vous cette conclusion que la mission de l'homme est
une mission intérieure, qu'il est fait pour manier
l'aiguille ou pour diriger les détails de la
nursery?
En fait de vocations extérieures comme en fait
d'égalité civile, le point d'arrêt se
pose à cette limite précise que la femme ne
franchit point sans perdre son caractère de femme,
sans compromettre sa mission naturelle, sans répudier
la loi de Dieu.
Aux États-Unis, des centaines de jeunes filles
prennent leur diplôme de médecin. En France,
à l'École de médecine, quelques femmes
ont commencé de suivre les cours, plusieurs ont
passé les examens avec distinction. Si, comme on le
dit, il ne s'agit que de fournir aux autres femmes des
docteurs appartenant au même sexe, s'il ne s'agit que
de, sauvegarder par là. des délicatesses
légitimes, tout est bien, nous n'avons rien à
objecter, et quand l'Amérique se propose de diriger
une partie de ces femmes docteurs vers la Chine et vers
l'Orient, où leurs connaissances médicales
leur ouvriraient la porte des harems, nous ne pouvons
«applaudir à cette extension du champ de travail
féminin. Mais qu'on ne nous parle pas de: femmes
avocats ou de femmes prédicateurs; ici
l'incompatibilité se dresse, car ici la femme
s'évanouit, pour ne laisser devant nous qu'un homme
en jupons.
Parvenez-vous à vous représenter la
jeune fille. prédicateur? Vous
représentez-vous la femme pasteur dont le mari prend
place parmi les simples fidèles? Je me borne à
indiquer, je n'appuie pas.
L'Écriture au reste tranche la question :
« Je ne permets pas à la femme de parler dans
l'Église (2).
» « Que la femme écoute l'instruction en
silence, avec une entière humilité
(3).
»
L'Amérique et l'Angleterre ont plus d'une fois
éludé la défense; celle-ci n'en demeure
pas moins formelle, et notre bon sens, nos instincts
élevés, le respect même que nous inspire
la belle et modeste action de la femme, tout nous affirme
que le silence en public grandit son rôle, car il
protège son caractère, que l'âme comme
la voix féminine perd son timbre dès qu'elle
s'enfle pour dominer, au lieu de garder la note harmonieuse
et secrète au lieu de conserver le son
mélodieux et discret qu'on écoute, justement
parce qu'il ne s'impose pas, et qui fortifie,
précisément parce qu'il ne s'efforce que de
consoler.
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