Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

IV

LES GERMAINS

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Notre esprit a besoin, pour se reposer, d'un spectacle moins répugnant.
Les moeurs des Germains, si bien décrites par Tacite, nous le fourniront.
Elles forment avec les coutumes grecques et romaines le contraste le plus absolu.
On le sent, Dieu tient en réserve cette race-là, cette honnêteté-là, pour rajeunir les nations décrépites, pour y féconder l'Évangile, pour y retrouver l'individu, pour y relever la famille, pour rallumer en un mot les purs foyers.
Faites-y attention, n'est-ce pas le rôle que remplissent, aujourd'hui comme alors, les peuples germaniques, les peuples anglo-saxons?

Un de nos traits les plus saillants, à nous autres latins, c'est la perpétuelle ironie qu'excite chez nous le mariage. Bonheur, malheur, tout sert de prétexte à nos sarcasmes. Ceux-là même qui ne se moquent point restent frivoles. Pas de bonnes histoires s'il n'y a quelque mari trompé au bout. L'éternelle aventure de l'éternel roman éternellement le même nous ramène invariablement l'adultère sous toutes les formes, à toutes les sauces, dans tous les milieux. Notre littérature en vit, ou plutôt elle en meurt. Raillé, léger, flottant, le lien conjugal n'étreint plus. On s'arrange d'ailleurs pour le rendre aussi ténu que possible. Le premier soin quand on l'accepte, c'est de lui soustraire les grands côtés de la vie, c'est d'en détourner les plus intimes besoins du coeur.
La race germaine, au rebours, met ses aspirations, rattache son avenir à ce fait, immense pour elle de l'union des deux âmes, de la fusion des deux existences, de l'intimité du nid conjugal, avec les tendres sollicitudes pour tout ce qu'abrite son duvet.
La race germaine apporte au mariage, à l'acte suprême, à l'événement décisif, un profond sérieux.
Elle en attend tout, félicité, énergie, progrès. Elle n'en détourne rien, ni le coeur, ni les volontés, ni la soif de l'idéal (1).
L'indépendance germaine, qui a respecté l'individu, a conservé la famille. Le despotisme latin, qui a écrasé l'individu, a du même coup mutilé la famille. Les attitudes se sont maintenues. L'histoire future dira où se trouvait l'avenir.
Je ne veux rien exagérer.

Les Germains de l'antique Germanie ne possédaient pas la famille intacte. Bien que la monogamie fût le fait habituel chez eux, elle n'était pas la règle absolue. Bien que le divorce formât l'exception, le divorce existait. Les Germains, en outre, versant, au rebours des autres peuples, du côte des respects exagérés, presque de l'adoration envers les femmes, avaient méconnu tout autant que ceux-ci le caractère sacré de l'union formée par la volonté divine et sur le plan divin. La femme, chez eux, sortait du rôle que lui a donné son créateur. Prophétesse, prêtresse, organe privilégié des oracles célestes, elle quittait, pour saisir de haute main la chose publique, cette ombre où Dieu l'a placée; elle répudiait les devoirs tout intérieurs dont Il a fait sa part et son bonheur; elle entrait dans les domaines réservés à l'homme, et y exerçait une autorité qui ne lui sied nullement.
Ceci dit, maintenons la supériorité germaine en tout ce qui tient à l'union conjugale, et par elle a un sens moral.

La chasteté de ce peuple frappait Tacite, le Romain accoutumé aux impuretés de son pays. Il la signale, en intègre historien qu'il est: « Chez ces gens-là, dit-il, point d'adultère. Ces gens-là ne rient pas du vice! Être corrompu et corrompre ne s'y nomme pas la mode du siècle! Le mariage parmi ces gens-là, est si solennel, si vrai, si profondément enraciné, que les veuves se remarient rarement. De même qu'elles n'ont qu'un seul corps et qu'une seule âme, elles prennent un seul époux. Leur pensée ne va pas au delà. »
Il semble qu'un dernier souffle, exhalé par l'Eden à jamais fermé, vienne rafraîchir notre coeur.

. 1. Si le protestantisme, à sa honte, et par un excès de réaction contre Rome qui en fait un sacrement, a compromis le mariage, en Allemagne et ailleurs, en autorisant le divorce suivi des secondes noces; si les hautes classes allemandes, qui venaient, au siècle dernier, chercher en France les modes avec l'incrédulité, ont profité de la permission, et cela d'une manière scandaleuse; le peuple, le gros, le vrai de la nation, la race, a résisté.
Ajoutons que l'Evangile remis en vigueur accomplit en Allemagne de même que partout, son oeuvre de réformation. En réalité, le divorce suivi des secondes noces disparaît des moeurs. Laissez faire l'Evangile il disparaîtra des lois.
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