Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

III

LA POLICE AVEC NOUS!

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En toutes tes voies, prends conseil de Lui et Il dirigera tes pas. »

Merveilleux instruments que la T.S.F., le téléphone et maintenant la télévision ; sans insister, nous en sommes tous convaincus. Croyons-nous tout autant que l'Esprit de Dieu, si nous le sollicitons, reste aussi entre nos mains un merveilleux moyen d'action ? Point ne s'agit certes de crier en public tous les miracles qu'Il se plaît à accomplir : trop de choses intimes et sacrées refusent la publicité. Pourtant il est probable que bien des scepticismes peuvent s'évanouir si les chrétiens savent parfois redire en toute simplicité tel ou tel fait de leur vie. J'aimerais d'ailleurs insister ici sur un point : les actes les plus inattendus de Dieu emploient souvent les gens les plus ordinaires. Vraiment Dieu peut tous nous utiliser en dépassant cent fois et bien davantage nos pauvres capacités. Comme l'écrivait simplement un saint Paul : « je puis tout par Celui qui me fortifie. »

Voici A. N.... gars de 25 ans. Il venait souvent chez moi me demander aide et conseil pour trouver du travail. Depuis près de douze ans déjà, il gagnait son pain comme matelot, loin de ses parents qui habitaient quelque part au Nord du pays. En causant, j'avais pu m'éclairer un peu sur son passé, malgré toutes ses réticences. Pour le moindre renseignement, je devais insister. Quand j'appris que depuis quatre ans il n'avait plus donné de nouvelles à la maison, je lui en demandais la raison.

- A vrai dire, je n'en ai point, sauf que... je n'ai pas toujours marché droit depuis.

- Entraînement ?

- Non, c'est de ma faute.

- Vous buvez ?

Il en portait effectivement les signes, mais je désirais sa confession.

- De temps en temps.

- Rien autre ?

Le silence, mais ses traits disaient sa souffrance intérieure. Comme il ne répondait pas, j'essayais d'une autre méthode.

- Ecoutez, mon garçon, si vous tenez à avoir mon aide, il vous faut honnêtement me répondre. Où en êtes-vous ? D'abord avec Dieu ? Et aussi avec vos parents ? Certes. je pourrais ne pas le savoir et tout de même vous trouver du travail. Mais en toute votre affaire. un point me chiffonne, qui semble bloquer net tous mes efforts et tous les vôtres.

- Tant pis, dit-il. Si vous voulez mettre le nez dans mes affaires personnelles...

Il n'acheva pas et se leva pour sortir. Mais je crus qu'il bluffait et d'ailleurs me tenais entre lui et la porte.

- Allons, ne faites pas la tête. Laissez-moi devenir votre ami. je n'en veux savoir que tout juste assez de ce que vous appelez vos affaires pour mieux vous guider vers un emploi digne de vous.

Mais il maintint son refus et je dus le laisser partir.

- N'oubliez pas que je suis toujours ici à votre entière disposition. Laissez-moi seulement vous recommander encore d'écrire aujourd'hui même à vos parents.

Quelques jours passèrent qui amenèrent une bonne douzaine de conversations semblables, mais ne me firent pas oublier mon gaillard.

Un matin, ma secrétaire vint m'annoncer qu'il était de nouveau là. J'avais à faire et laissai passer quelques minutes avant de descendre le recevoir dans mon bureau où on l'avait introduit.

Mais voici que, dans l'escalier, ma secrétaire m'arrête et me glisse à l'oreille :

- Vous avez une autre visite, un homme qui porte le même nom, âgé, avec un fort accent du Nord.

- A-t-il dit d'où il venait ?

- Oui, de Grimsby.

A l'instant, je compris que ce pouvait être le père de mon gaillard, mais pourquoi était-il là ?

- Mettez-le à attendre dans la salle à manger, dis-je en entrant dans mon bureau.

Mon jeune gars me parut tout changé, avec un regard maintenant droit. Il me dit avec calme :

- Excusez-moi, Monsieur. J'ai fait la mauvaise tête l'autre jour et J'ai eu tort.

- Peu importe mon pardon, fis-je. Avez-vous obtenu celui de Dieu ? C'est vers Lui que j'aimerais vous voir revenir. Il peut vous aider autrement mieux que moi. Et Il le désire.

- Je l'ai déjà fait, fit-il. Ce que vous m'avez dit l'autre jour m'est allé droit au coeur et... je sais maintenant que Dieu lui-même m'a pardonné. Oui j'ai changé, Mon père et ma mère que j'ai cruellement déçus, je veux me réconcilier avec eux. Il y a deux jours m'a et' donnée comme une grande révélation. Vous m'avez affirmé que je me trouvais en présence de Dieu. Eh bien ! devant Lui j'ai reconnu la mauvaise voie où je marchais. Dieu m'a tout simplement suggère d'écrire à la maison dès que possible et c'est pourquoi je viens maintenant. Il me faut revoir mon vieux père et lui dire mes regrets de leur avoir causé tant d'anxiété. Vous m'avez demandé si ma seule faute tenait à la boisson. Il y a au moins ceci de plus que je leur ai brisé le coeur. Autrefois, je priais souvent. Depuis, à la suite de mauvais amis, je suis allé. presque jusqu'au crime et au suicide. L'autre soir, tous ces souvenirs me sont revenus. Dieu merci, me voici ce matin ici auprès de vous. Aidez-moi à retrouver mon père et tout rentrera dans l'ordre. S'il venait ici, je lui demanderais aussitôt pardon.

- Eh bien ! dis-je, il est justement ici.

A vrai dire, je m'aventurais quelque peu, n'en ayant pas la stricte certitude, mais il me semblait pouvoir l'affirmer.

Le garçon me regarda comme s'il ne comprenait pas.

- Je parle, dit-il, de mon propre père. Il n'est pas ici. Il habite Grimsby.

- Eh bien ! je vous dis que votre père est ici.

- Monsieur, mon père n'a jamais de toute sa vie quitté Grimsby. Que voulez-vous dire ?

- Ecoutez. Vous, vous venez de m'annoncer que vous aviez recherché le pardon de Dieu et l'aviez obtenu. Vous avez ajouté que si votre père se trouvait ici, vous lui demanderiez aussi pardon, Eh bien ! je réponds que votre père en ce moment est à Londres et que vous pouvez le voir dans un instant.

J'affirmais ceci d'un ton assuré, persuadé que le vieux Monsieur avec son fort accent nordique, dans la pièce voisine. ne pouvait être autre que le père de ce garçon. Comment se trouvait-il là, par exemple, je l'ignorais. Mais pendant que mon jeune ami restait là debout, encore incrédule, j'allai vers la salle à manger.

- Bonjour, Monsieur. Cherchez-vous votre fils et s'appelle-t-il par hasard A. N... ? demandai-je sans autre préambule.

Le vieil homme me regarda comme frappé de stupeur, chercha ses mots et finit par articuler :

- Oui, c'est certain, mais je n'y comprends rien. Bien sur, je cherche Alfred, mais j'ignore même comment je me trouve là.

Je le pris par le bras et l'introduisit dans mon bureau. Le père et le fils étaient trop stupéfaits pour pouvoir parler. Enfin le garçon dit simplement :

- Père, pardonne-moi ! Dieu déjà m'a pardonné.

Le vieil homme restait là, debout, la tête de son garçon appuyée sur son épaule, de grosses larmes au coin des yeux. Il me regardait d'un air suppliant comme pour me prier de dire à sa place les mots qu'il fallait dire en pareil cas.

Je leur avançais deux chaises. je vis le père prendre entre ses mains la main de son grand fils comme s'il était encore un tout petit garçon. Alors je rompis le silence.

- M. N.... puis-je vous demander maintenant de m'expliquer comment vous êtes arrivé ce matin jusqu'ici ?

Car il faut bien avouer que la tournure des événements m'avaient moi-même éberlué. Sur le dire du fils, j'avais cru que jamais son père ne quittait son village et d'ailleurs son accent, ses manières, son costume, tout le prouvait. Je ne puis même pas ici transcrire de mémoire les expressions du terroir dont il se servit pour s'expliquer. Il raconta :

- Depuis près de trois ans et demi, chaque jour, la maman et moi nous avons prié Dieu de nous faire retrouver le garçon. C'est notre unique enfant et vous n'en auriez pas trouvé de meilleur avant son départ en mer. Nous l'avions supplié de ne pas partir. Ses deux grands-pères y sont morts. Mes trois frères et les quatre frères de ma femme, tous aussi perdus en mer. Sa maman avait une haine terrible contre l'océan et vous devinez notre crainte en voyant Alf prendre la même voie. D'abord il écrivit gentiment. Puis les lettres s'espacèrent, plus courtes, parfois étranges. Il ne parlait presque plus de lui et pas comme nous aurions voulu. Un jour tout cessa - on nous renvoya nos lettres : il avait quitté son bateau. Nous écrivîmes partout en vain, à la compagnie, à la police, à l'Armée du Salut. On en devenait malade, mais sans cesser de prier Dieu. Des amis nous aidèrent mais jamais aucune nouvelle.

Hier soir donc, après avoir fini notre culte, quelque chose me dit - « Ton garçon est à Londres. Vas-y. Tu le retrouveras. »

Je ne m'arrêtai pas à cette idée et me déshabillai. -Mais on aurait dit comme une voix précise qui me répétait : « Va à Londres. Va à Londres. » Alors je dis : « Ecoute, mère. J'ai idée que notre Alf. se trouve en ce moment à Londres et qu'il me faut sans tarder l'aller chercher. Il est peut-être en danger. »

Ma femme me regarda comme si j'étais devenu fou.

- Londres, dit-elle. tu n'y es jamais allé. Comment peux-tu penser pareille chose ?

- Je ne sais pas, dis-je, mais j'y vais.

- Comment ? Pas ce soir tout de même. Mets-toi au lit. Tu te fais des idées.

Mais je m'habillai à nouveau et découvris qu'un train de nuit partait encore pour Londres et je le pris.

(Le garçon, pendant ce temps, écoutait les yeux écarquillés.)

- J'arrivai au matin à la station de King's Cross, de bonne heure et me demandais si je ne faisais pas une grosse bêtise. jamais je n'avais mis les pieds à Londres. jamais je n'avais voyagé bien loin de Grimsby. J'y suis né, marié, établi de toujours. -Et maintenant que faire ? Par où commencer ? je m'assis sur une borne et priai. Puis je demandai à un porteur où se trouvaient les Docks.

- Lesquels ? me répondit-il.

- Je... je ne sais pas. Peut-être les Docks de Londres.

Etonné, il m'expliqua qu'à Londres il y a des centaines de docks, tous avec un nom spécial. je lui répondis que j'arrivais de Grimsby pour chercher mon fils. Il me regarda perplexe. Bref, il me conseilla d'aller dans l'East End et m'indiqua comment prendre le métro Jusqu' a la station d'Aldgate. J'y allai pour m'y trouver aussi empêtré qu'avant. je pris même une mauvaise direction et dus revenir sur mes pas. Enfin j'abordai un agent de police pour lui demander le chemin des docks. Ce grand gaillard me dévisagea du haut de sa taille comme si je me moquais de lui :

- Les docks ? Lesquels ? fit-il tout comme mon premier porteur et j'entendis un passant dire près de moi.

- Hein ? vise le poteau tout frais débarqué de sa cambrousse. Il demande les docks au flick et sait même pas lequel.

Mais le policeman me prit par le bras, me conduisit dans un coin tranquille. Allait-il me mener au poste ?

Il avait l'air brave homme, me fit répéter ma question et comme je lui parlais d'Alf. il dit

- Ah bon ! je vois.

Et tirant de sa poche un carnet, il déchira un feuillet, y écrivit votre nom et adresse, puis me dit :

- Camarade, voilà où il vous faut aller. Si vous voulez chercher votre gars. là on vous aidera. Et que Dieu vous bénisse.

Ça doit être un brave coeur, ce sergent de ville et Dieu doit le connaître car me voici maintenant chez vous et j'ai tout juste retrouvé Alf.

Quant au garçon. il pleurait et riait tout à la fois.

Le père reprit :

- Quand j'ai sonné ici, la dame à l'entrée m'a fait peur. A peine lui ai-je dit qui j'étais et ce que je voulais, elle m'a planté là, courant dans la maison sans un mot d'explication. Enfin peu importe. Mais je n'aime pas beaucoup ces manières de Londres. Bien sûr, maintenant que Alf. est là, tout est bien. Et Dieu fait bien tout ce qu'il fait.

Quelques heures plus tard, père et fils quittaient ensemble la capitale pour leur Lincolnshire natal, en même temps qu'un télégramme pour la même destination :

« Reviens ce soir. Alfred retrouvé. Bénissons Dieu. »

Entre temps, il apparaissait évident non seulement que le Seigneur nous avait permis de retrouver ce garçon mais que lui-même, bouleversé, avait vraiment tourné son coeur vers Dieu.

Souvent ainsi des gens tout à fait ordinaires servent d'étonnants instruments a la Providence. Pensez à cet agent de police dont nul ne saura sans doute jamais le nom - tout juste au moment voulu, il a eu l'inspiration nécessaire.

Ne croyez-vous pas que nous devrions être prêts, si nous voulons aussi aider à chercher les fils perdus, prêts à répondre aussitôt quand Dieu nous appelle à la rescousse ?


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