Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

CHAPITRE XVIII

Dédicace du temple de Mens.

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Durant son séjour à Mens, Neff avait prêché dans un « antique édifice qui avait fait partie d'un château de Lesdiguières », que la commune loua d'abord, puis acheta en 1821. Mais l'édifice trop petit et délabré, tombait en ruines. En 1826, il fut restauré et agrandi.

« Le dimanche 12 novembre 1826 fut fixé pour en faire l'ouverture et la dédicace à l'Eternel. »

Neff fut invité à cette solennité ; il y vint en plein hiver, franchissant le fameux col d'Orcières, accompagné de dix guides, la plupart robustes chasseurs de chamois, trouvant « quatre ou cinq pieds de neige toute fraîche tombée et point de chemin tracé... Nous sommes restés six heures et demie pour le descendre, c'est-à-dire qu'il a fallu tout le jour pour faire un trajet qui se fait ordinairement en quatre ou cinq heures...

« Je suis resté à Mens douze jours à l'époque de la dédicace ; la neige, tombée dans les Basses-Alpes, qui séparent l'Isère de la Drôme, a empêché les pasteurs du département d'y venir, à l'exception d'un vieillard de Châtillon. Nous n'avons donc été que cinq ; mais au moins n'avons-nous pas eu le crève-coeur d'entendre des prédicateurs à la mode, comme cela serait sans doute arrivé, s'il avait fait beau temps. »

Pas de prédicateurs à la mode

Neff prêcha à cette occasion sur I Pierre, II, 5-10. Il s'arrêta particulièrement au développement du verset 5 : Vous-mêmes, comme des pierres vivantes, édifiez-vous pour former une maison spirituelle qu'il rapprocha d'Ephésiens II, 20-22.

Pour permettre d'étudier la pensée de Neff, nous reproduisons le fragment qui est resté de cette prédication :

Le véritable sanctuaire

« Le temple de Jérusalem était un lieu tout particulièrement honoré de la présence de l'Eternel ; rien d'impur n'y devait entrer. On s'y occupait exclusivement du service de Dieu ; c'est là qu'Il était loué, adoré, béni, c'est là qu'Il rendait ses oracles, répandait ses bénédictions... L'Eglise appelée un Saint Temple, un tabernacle spirituel, doit présenter tous ces caractères en perfection et en réalité, comme le temple en type et en figure... Or, quelle Eglise, à prendre ce mot dans une acception ordinaire, quelle agrégation d'hommes pécheurs nous offrira cette réalité, et nous paraîtra digne d'être appelée la Maison de Dieu en esprit, le Tabernacle du Dieu vivant ?... (Ici le prédicateur jette un coup d'oeil rapide sur l'histoire de l'Eglise en général, les erreurs, les scandales, la corruption, les schismes, etc.).

« Où trouverons-nous ce divin sanctuaire ? Dans l'assemblée des premiers nés et des milliers d'anges, dans la Jérusalem d'en-haut. Là, mille fois mieux qu'en Sion, Dieu est servi, loué, béni ; ce sanctuaire céleste et spirituel est formé de la totalité des êtres purs qui trouvent en Dieu leur bonheur. La gloire de Jéhovah le remplit et l'éclaire, et se réfléchit sur chacune des pierres vives dont il est formé... Son amour les unit, les embrase... Le Roi de gloire habite au milieu d'eux, se réjouit de leur félicité, et se plaît à écouter le concert éternel de leur reconnaissance... Tel est le temple que Dieu habite, le seul qui soit digne de Lui...

« Que seront donc les diverses églises où l'Evangile est prêché sur la terre ? Quand on élevait le magnifique temple de Salomon, toutes les pierres, tous les bois qu'on y apportait étaient si bien taillés et préparés, qu'on n'y entendait, dit l'historien sacré, ni marteau, ni hache, ni aucun instrument de fer. (I Rois VI).


CL. Ch. Martel
TEMPLE DE MENS

Les chantiers

Mais il n'en était pas ainsi, bien certainement, dans les carrières de marbre, ni au Liban, où l'on coupait les cèdres, non plus qu'aux ardentes fournaises entre Succoth et Tsarthan, où l'on fondait l'airain pour les vases sacrés... Ainsi, dans le Ciel, ce majestueux sanctuaire s'élève sans bruit, sans effort, tout y arrive pur et parfait. L'Epouse de l'Agneau n'a ni tache, ni ride, ni rien de semblable ; mais dans ce monde impur et ténébreux, carrière obscure, d'où le grand Architecte veut bien tirer quelques pierres pour son édifice, que trouverons-nous, sinon des chantiers dressés pour un jour, où tout paraît en mouvement et en désordre ?... Que de pierres informes, de rebuts, de débris inutiles, que d'objets d'un usage passager!... Combien d'arrangements purement provisoires !... Que de mercenaires, d'étrangers occupés dans ces carrières, comme les ouvriers d'Hiram, et qui, comme eux, n'entreront jamais dans le sanctuaire !... Que de dissensions entre les ouvriers, même les plus fidèles ! que de conjectures, de discussions vaines au sujet du but final et du plan du grand Architecte, qui n'est connu que de Lui seul !... Chercherons-nous dans ce chaos la véritable Eglise, le temple spirituel ?... Voudrons-nous la composer de l'ensemble de tous ces blocs informes, ébauchés, ou seulement de ceux qui nous paraîtront déjà préparés par le Maître? ... Essaierons-nous de réunir dans un ordre commun tous ceux que nous trouverons disposés dans chacune des diverses carrières ouvertes en mille endroits du monde ? Ou, ne pouvant y parvenir, nous efforcerons-nous au moins de les grouper en divers tas, comme ces pierres déjà taillées qu'on assemble pour les toiser avant que de les mettre en oeuvre ?...

L'architecte

« Oh ! que le céleste Maître est bien plus sage!...

Tandis que nous nous disputons sur la prééminence de tel ou tel chantier, et que d'autres se consument pour y introduire un ordre parfait, le divin Salomon parcourt en silence cette vaste exploitation, choisit, marque, enlève, et place dans son édifice les matériaux préparés au milieu de tous les frottements, assignant à chaque pièce le lieu qui lui est propre, et pour lequel Il l'a destinée... Telle est, mes bien-aimés frères, la grande idée que nous devons nous faire de ce tabernacle céleste, de cette maison spirituelle de Dieu, de cette Eglise universelle, tant militante que triomphante, dont nous reconnaissons l'existence dans le symbole apostolique... Oh ! combien nous paraîtront alors pitoyables les orgueilleuses prétentions de telle ou telle Eglise, à l'universalité, ainsi que les interminables disputes sur la succession, la hiérarchie et la discipline, qui, dans tous les temps, comme encore aujourd'hui, ont divisé et troublé les fidèles ! ...

Préparons des matériaux

Travaillons plutôt, dans la carrière où nous sommes placés, à préparer le plus de matériaux possible ; et surtout prions le Seigneur qu'il fasse de nous tous des pierres vives pour son édifice ! Amen ! »


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