Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

Récentes découvertes (1920-1939) - (suite)


P. - Ras-Shamra

Les fouilles de Ras-Shamra ne nous mettent pas, comme tant d'autres, en face d'une ville mentionnée dans la Bible ; et cependant elles offrent un grand intérêt pour l'étude des écrits sacrés de l'Ancien Testament. Elles ont renouvelé notre connaissance de la Phénicie à une époque peu connue de son histoire, et à une époque qui correspond à peu près à celle de la domination des Hyksos en Egypte. Elles ont surtout révélé un certain nombre de mots et de coutumes qui confirment la législation mosaïque, et surtout la législation dite « sacerdotale », particulièrement honnie des critiques.

Ras-Shamra se trouve en Syrie septentrionale, en face de l'île de Chypre. Les fouilles, commencées en 1930 par deux archéologues français MM. Schaeffer et Chenet, donnèrent bien vite des résultats fort intéressants. On découvrit des tombes royales riches d'objets précieux, et un temple. On y découvrit aussi de nombreuses tablettes en caractères cunéiformes alphabétiques. Certaines de ces tablettes étaient des exercices d'écriture faits par des écoliers, d'autres des dictionnaires ou des ouvrages de référence. D'autres donnaient la liste des vaisseaux qui entraient dans le port, car Ras-Shamra était un port important (1) à cause de sa position, face de l'île de Chypre et sur la principale route du nord de la Syrie. Ces tablettes donnent l'écriture de huit langues, parmi lesquelles il faut noter le sumérien, langue plus ancienne que le babylonien, l'égyptien et ses hiéroglyphes, le hittite, le babylonien cunéiforme et surtout l'hébreu archaïque écrit en caractères cunéiformes.

Ces tablettes sont surtout intéressantes par les détails qu'elles nous apportent sur les coutumes religieuses à Ugarit vers 1900, c'est-à-dire après Moïse. Elles font allusion à des sacrifices qui rappellent ceux du Lévitique, des Nombres et du Deutéronome. Les expressions employées pour désigner ces sacrifices, dans l'hébreu archaïque de ces tablettes, sont identiques à celles du texte original hébreu de l'Ancien Testament. Ces sacrifices sont : le sacrifice pour le délit, le sacrifice de prospérité, les saintes offrandes, l'offrande tournoyée, l'offrande des premiers fruits, l'holocauste, les sacrifices consumés par le feu, l'offrande pour l'expiation de l'âme, l'offrande de la nouvelle lune. Il est facile de trouver dans les trois derniers livres du Pentateuque la mention de sacrifices qui font penser à ceux de Ras-Shamra, réserve faite de la perfection spirituelle du code mosaïque comparée au paganisme du code phénicien.

Non seulement le code mosaïque trouve son expression déformée à Ras-Shamra mais aussi le sanctuaire lui-même. Nous trouvons dans les tablettes d'Ugarit des allusions au Parvis de la Tente sacrée, au Lieu saint des Lieux saints, à la Table d'or du sanctuaire, au prêtre, appelé « Kohen » comme chez les Israélites, à l'Arche de l'Alliance, au nombre sacré Sept..

« D'après les informations que nous possédons, écrit Sir Marston, il semblerait que les auteurs de ces tablettes, traitant de cérémonies et de rites païens, se soient inspirés pour une grande part des sacrifices et des rites institués par Moïse. » Et il ajoute un peu plus loin : « Les conclusions de la critique, qui placent à une date tardive le rituel mosaïque et le culte du Tabernacle paraissent ridicules à la lumière de cette nouvelle découverte (2). »

C'est l'effondrement total de la théorie chère à Wellhausen et à ses trop nombreux disciples, théorie d'après laquelle le rituel attribué à Moïse, le « code sacerdotal » ne pouvait être son oeuvre, et devait avoir été imaginé de toutes pièces, à la fin de l'Exil ou après l'Exil, par des prêtres juifs imbus de ritualisme et de cléricalisme oppresseur. Cette théorie qui faisait du Lévitique un tissu de mensonges, et attribuait la partie la plus importante de la législation dite mosaïque à des ambitieux et à des fourbes, ne résiste pas à l'argument fourni par Ras-Shamra. Qui osera encore parler des « résultats acquis », de la « critique scientifique » ? Que de livres, que d'articles de revues, que d'Encyclopédies et de Commentaires se révèlent maintenant sans valeur parce qu'ils ont voulu s'appuyer sur le fondement vermoulu d'un système que tous les faits contredisent.

Les tablettes de Ras-Shamra glorifient le Pentateuque d'une autre manière, par l'imperfection même, le paganisme polythéiste et grossier de leur religion, comparé avec la haute spiritualité, la sainteté souveraine de la législation mosaïque. Les prêtres d'Ugarit se sont sans doute inspirés de Moïse, mais sans pouvoir lui ressembler, n'étant pas soumis comme lui aux inspirations de l'Esprit du vrai Dieu. Citons à ce sujet l'un des rédacteurs de la « Revue Biblique », R. de Vaux (octobre 1938). Il parle des cinquante dieux et de ces déesses en honneur à Ras-Shamra et dont les noms apparaissent sur les tablettes : « Tous ces dieux s'affrontent en des combats épiques. Ils naissent, se marient et vivent comme des hommes. Comme eux ils ont leurs passions, et souvent ils sont plus violents et plus sanguinaires. Il y a un abîme entre cette conception de la divinité et celle qui a prévalu en Israël, et cette transcendance est le sceau de Dieu apposé à la révélation de l'Ancien Testament. A lire ces poèmes, on comprend la répulsion que les vrais fidèles du Yahvisme, que les grands prophètes ont éprouvée pour ces cultes. Ils étaient d'ailleurs si solidement implantés en Canaan que la conquête israélite ne les a pas déracinés, qu'ils se sont maintenus sur les Hauts-Lieux et qu'à certaines époques ils ont contaminé le culte du Yahvé et ont pénétré jusque dans le Temple de Jérusalem. Le sentiment de cette opposition, c'est actuellement le principal intérêt des textes de Ras-Shamra pour les studieux de l'Ancien Testament. »

Note.

a) On trouve dans le panthéon de Ras-Shamra plusieurs divinités mentionnées dans l'Ancien Testament ; entre autres Dagon, Baal, Ashérat et ses filles Anat (à laquelle des Israélites, offraient des gâteaux à l'époque de Jérémie) et Shapash, flambeau des dieux, la déesse solaire. A l'époque de la décadence religieuse qui a précédé l'Exil, les femmes de Jérusalem portaient des croissants de lune et des petits soleils d'or et d'argent (Esaïe, III, 18).

b) Certaines expressions bibliques très rares se trouvent sur les tablettes d'Ugarit ; ainsi l'expression « chevauchant sur les nuées » du Psaume LXVIII, 5. Des métaphores bibliques apparaissent aussi sur les tablettes ; ainsi l'expression « placer sa face vers », dans le sens de se diriger vers. On retrouve dans les tablettes certaines figures de style (expressions balancées, synonymes) et certaines figures de prosodie qui apparaissent aussi dans la Bible.

c) Les tablettes décrivent la cuisson d'un chevreau dans le lait de sa mère. Ce lait devait servir à un charme et une telle pratique était expressément interdite aux Israélites (Exode, XXIII, 19 et Deutéronome, XIV, 21). Elles font aussi allusion aux offrandes présentées au soleil, à la lune, aux étoiles sur le faîte des maisons. Le Deutéronome (IV, 19), en interdisant ce culte idolâtre, ne mentionne pas le faîte des maisons, parce que les Israélites vivaient alors sous des tentes ; mais cette pratique est condamnée plus tard par Jérémie et Sophonie.


Q. - Mari

Mari, ville perdue depuis des siècles et récemment retrouvée, n'est pas mentionnée dans la Bible; mais elle touche à la Bible de bien des manières et les amis des Ecritures doivent se réjouir de cette découverte qui, indirectement mais réellement, confirme plusieurs informations bibliques. C'est une joie particulière pour nous de savoir que les fouilles de Mari ont été dirigées par un protestant français, un pasteur, M. André Parrot. Le livre si intéressant que M. Parrot a consacré aux travaux de la Mission qu'il conduisait a été couronné par l'Académie Française. Une ombre pèse malheureusement sur ce livre et sur ces travaux: le 3 avril 1936, deux membres de la Mission de Mari, MM. André Bianquis et Paul François, sont morts victimes d'un accident d'automobile, aux environs de Mari. Saluons la mémoire de ces vaillants héros, de ces nouveaux martyrs de l'archéologie ajoutés à tant d'autres.

Les fouilles commencées en 1933 sur le Tell Hariri, sur les rives du Moyen-Euphrate, à 11 kilomètres au nord-ouest d'Abou-Kemal, se sont révélées, dès le début de janvier 1934, très fructueuses. Elles ont permis de découvrir les ruines d'un temple de la déesse Ishtar et d'un palais ; elles ont révélé la richesse et l'importance de cette ville au IIIe millénaire. « Mari, écrit M. Parrot, était située à un emplacement idéal. C'était la ville de transition, sur la grande route des échanges entre le Golfe Persique et la Méditerranée, entre le monde sumérien et le monde égéen (3). »

L'intérêt des découvertes de Mari réside surtout pour nous dans le fait qu'elles nous révèlent la situation économique, sociale et surtout politique de cette ville à l'époque d'Abraham. En effet, il est constamment question dans les nombreuses tablettes trouvées à Mari du roi Hammurabi (I'Amraphel du chapitre XIV de la Genèse), contemporain d'Abraham. Nous assistons aux rapports de plus en plus confus et tendus entre le roi de Mari Zimrilim et Hammurabi, roi de Babylone. La correspondance de Zimrilim. avec Hammurabi montre clairement que ce dernier se joue de son allié et prépare peu à peu son effondrement. Nous savons que le roi de Babylone finit par dévoiler son jeu et, dans la 33' année de son règne, mit en déroute les troupes du roi de Mari. Deux ans après, il rasait les murs de Mari.

Les 25.000 tablettes retrouvées dans le palais de Mari étaient dispersées dans plusieurs chambres. Elles touchent à des sujets très divers : documents de comptabilité, contrats, textes divinatoires, et surtout des lettres, correspondance entre Zimrilim et Hammurabi, entre le roi de Mari et ses fonctionnaires ou ses chefs de troupe, entre notables. Ces lettres nous permettront de pénétrer dans la vie intime de toute une civilisation contemporaine du fondateur du peuple israélite. Elles nous montrent le degré avancé de cette civilisation, son organisation sociale, son activité diplomatique, sa législation civique et religieuse.

Plus encore, ces lettres nous font connaître environ 150 noms de pays et de villes inconnus jusqu'ici. On y trouve aussi de nombreux noms de personnes dont plusieurs aussi nous étaient inconnus. Elles offrent une grande variété de rédacteurs, des rois, des femmes nobles, surtout des fonctionnaires qui envoient au roi de Mari des rapports sur les missions dont ils sont chargés.

Dans plusieurs lettres, le roi de Mari, se sentant menacé par des hordes de brigands, supplie le roi de Babylone de lui envoyer du secours. M. Parrot cite dans son livre (4) une missive d'allure diplomatique d'un ambassadeur de Zimrilim auprès de Hammurabi et qui rend compte à son maître de sa mission délicate. Il se plaint de la duplicité de Hammurabi qui ne tient pas ses promesses et semble vouloir abandonner Zimrilim à ses difficultés grandissantes.

La lettre qui nous a le plus intéressé et qui a paru dans le Bulletin de 1937 de l'Académie des Inscriptions est celle d'un certain Itur-Asdu au roi de Mari. Nous la transcrivons ici parce qu'elle nous paraît de nature à nous faire mieux comprendre le chapitre XIV de la Genèse et ce qu'il nous apprend des coalitions de rois.

Voici cette lettre : « J'ai rassemblé les rois de Sarmaneh et je leur ai fait comprendre l'affaire par ce discours. Il n'y a pas un seul roi qui, à lui tout seul, soit réellement puissant! Dix ou quinze rois suivront Hammurabi, le Babylonien; autant suivront Rîm-Sin, le Larséen; autant suivront Ibal-pî-el, l'Esnunnakien; autant suivront Amût-pî-el, le Qatanéen; dix rois suivront Iarimlim, le Iamhadéen. »

Cette page rappelle beaucoup certains traits du chapitre XIV de la Genèse ; ces associations de rois dressées les unes contre les autres font penser aux associations du chapitre XIV ; en particulier le verset 1 qui donne des noms de rois coalisés et indique Hammurabi parmi eux: « Dans le temps d'Amraphel (Hammurabi), roi de Schinear (Babylone) ; d'Arjoc (5), roi d'Ellasar (Larsa) ; de Kedorloamer Koudour'-Logamor), roi d'Elam ; et de Tidéal, roi de Gojim, il arriva qu'ils firent la guerre à Béra, roi de Sodome; à Birscha, roi de Gomorrhe; à Schinéab, roi d'Adma; à Schémeéber, roi de Tseboïm, et au roi de Béla, qui est Tsoar. » (XIV, 1-2).

N'est-il pas admirable que les lettres de Mari soient venues de nos jours apporter un témoignage de grande valeur à la véracité d'un chapitre si souvent contesté ; chapitre qui, avec celui des nations (Genèse, X) est l'une des pages historiques les plus précieuses du Pentateuque. La plupart des noms mentionnés dans le chapitre XIV ont été identifiés. Le jour n'est sans doute pas loin où ils seront tous identifiés.


R. - Ur

Ur (Our) des Chaldéens

Nous complétons ici les informations que nous avons déjà données sur les fouilles d'Ur, à propos d'Abraham. Ces fouilles se sont révélées de plus en plus riches en révélations de la plus haute importance.

Les fouilles du professeur Léonard Woolley, d'Oxford, ont permis de refaire, en une mesure, l'histoire du « Ziggurat » et du célèbre Temple de la Lune. Nous sommes heureux de donner ici les extraits d'un article de M. Woolley lui-même, dans le Times.

« L'expédition commune du British Museum et du Musée de l'Université de Pensylvanie a repris au mois de novembre 1924 son oeuvre à Ur et on peut aujourd'hui se rendre compte des progrès accomplis dans l'exhumation des monuments de la cité d'Abraham incendiée.

« La saison dernière, nous avons mis à jour le « Ziggurat », immense masse de briques, une seconde tour de Babel qui dominait la ville. Mais, bien que nous ayons creusé profondément, nous avons trouvé que les fondations étaient élevées au-dessus du niveau du sol et qu'elles reposaient sur une plate-forme artificielle. Cette année, notre principale tâche est de découvrir ce qu'étaient les environs du Ziggurat s'il était un monument isolé ou s'il faisait partie d'un édifice considérablement plus complexe.

« Le travail commença au nord-est de la tour, entre la tour elle-même et le mur de l'enceinte sacrée qui fut découvert dans la première période des recherches. Nous trouvâmes tout d'abord des édifices de date postérieure: les quartiers habitables et les magasins à provisions des prêtres qui, dans la période persique, restèrent attachés aux temples, peut-être déjà ruinés, et qui recueillaient la dîme de l'huile et du grain que de rares adorateurs offraient encore au dieu suprême, la lune. Derrière ces monuments se trouvait une grande cour, bâtie par Nabonidus, lorsqu'il restaura le Ziggurat, terrain ouvert couvrant tout l'espace entre la tour et le mur d'enceinte, que l'on reconnut comme appartenant à la dernière période babylonienne.

« Sous le sol de cette cour, on trouve les ruines de ce qui devait être une grande rangée de maisons datant du XVIe siècle avant Jésus-Christ. Au-dessous se trouvent encore d'autres vestiges de murs de briques. D'après les inscriptions gravées sur des cônes d'argile, ces fondations furent élevées par les rois d'Isin et de Larsa, qui gouvernèrent Ur 2000 ans avant Jésus-Christ.

« Ce fut lorsque nous eûmes creusé sous la couche datant de la période du roi de Larsa que nous trouvâmes l'objet essentiel de nos recherches : le mur de la terrasse d'Ur-Engur, le constructeur du grand Ziggurat lui-même. C'était un mur massif, incliné, tranchant à l'intérieur, comme il convient à un mur retenant une plate-forme et construit en briques non cuites.

« Rangés en lignes et à intervalles réguliers, on avait scellé des cônes entaillés d'argile cuite. Leurs sommets formaient des motifs et leur base portait le nom du roi et une inscription dédiant ce bâtiment à la lune. Pour la première fois, ces cônes inscrits furent trouvés en position et l'on put se rendre compte de leur usage réel. Pour la première fois, nous pûmes nous faire une idée de ce qu'était un Ziggurat dans sa position primitive quand, en l'an 2300 avant Jésus-Christ, Ur-Engur « construisit une terrasse, la remplit avec de l'argile raffinée et plaça la maison au centre ».

« Des fouilles dans la partie sud-est du Ziggurat fermée par le temple d'E-nun-mah, qui fut découvert il y a deux ans, ne furent pas moins intéressantes. Il y a deux chambres principales avec des murs de brique cuite d'une surprenante épaisseur, qui sont tout à fait contraires à l'apparence insignifiante de ce qu'on supposait être une petite maison très ancienne ; les deux principales portes sont très larges et, de la première chambre, deux passages en forme d'arches donnent accès aux autres chambres, dont les murs sont de terre.

« Le tout repose sur un petit plateau et on est très surpris de trouver sur les briques cette inscription : E-dublalmah (le hall de la justice). Lorsque les plans furent tracés, on se rendit exactement compte de la nature de ce lieu. La porte de derrière avait été bouchée par un mur plus ancien et les chambres latérales de terre cuite avaient été construites sur les ruines du double mur dans lequel le portail de la tour était situé à l'origine.

« Des découvertes plus récentes, même sur le plateau plus élevé, ont confirmé ce que le plan montrait. Des inscriptions plus fraîches sur les briques parlent du portail, des fortifications et de la terrasse sur laquelle le chemin du portail est situé. Dans l'une des arches de porte, nous avons trouvé une magnifique poignée de pierre verte, en forme de serpent, avec un trou au sommet de la tête dans lequel le pivot de la poignée tournait. Sinbalatsu-ikbi, le gouverneur assyrien d'Ur en l'an 650 avant Jésus-Christ, avait fait graver une longue inscription rappelant la restauration de la tour tombée et la création de nouveaux portails faits de bois précieux des contrées étrangères, de bronze, d'argent et d'or.

« Nous devons maintenant continuer nos recherches en vue de découvrir le portail original et son emplacement. Nous savons que 2000 ans avant Jésus-Christ, il avait été réparé par Ishme-dagan, roi de Larsa, et qu'en 1600 avant Jésus-Christ, il était en ruines. Ses fondations furent alors fortifiées et un mur de protection fut bâti par Kuri-Galzu, le roi kassite. Un millier d'années plus tard, Sinbalatsu-ikbi le reconstruisit et il servait alors comme grand portail du Temenos, la porte qui probablement fermait la voie sacrée, et par cette porte, les jours de fête, la procession sortait de la terrasse centrale.

« Mais ce qui est actuellement au-dessus du niveau du sol représente le hall de la justice dans la dernière période babylonienne. Il se peut que ce soit Nebucadnetsar qui construisit la spacieuse cour devant ces portes, et les pavés des chambres latérales portent le sceau de Nabonidus, roi de Babylone (550 avant Jésus-Christ). Une énorme masse de briques bloque l'ancienne entrée. Les murs de 8 à 10 pieds de haut sont ceux que Kuri-Galbu restaura. »

Voici encore un article du Christian Herald (26 juin 1926)

« Les excavations opérées sur l'emplacement de la cité permettent de remonter dans son histoire depuis le régime perse jusqu'à une époque préhistorique assez lointaine pour qu'on ne puisse lui assigner la date précise. L'immense masse de briques de la Ziggourat, sorte de tour de Babel, dominait la cité. On a découvert que les fondations de cette tour reposent elles-mêmes sur une plate-forme artificielle au-dessus de la plaine : elle était donc construite sur les débris d'une autre Ziggourat élevée vers l'an 3000 avant Jésus-Christ. Les fouilles ont mis à jour, à la surprise des savants, des murs de briques de boue arrondies au sommet et placées de champ comme des arêtes de poisson, disposition marquant la période de 3300, époque de la 1" dynastie.

« Bien plus, il se trouve encore d'autres murailles, à 7 mètres au-dessous de celles-là, qui appartiennent à une époque où l'usage des briques moulées, même celles d'argile grossière, était l'exception, et où l'on se bornait à entasser une argile ferme et desséchée, mélangée à une sorte de boue de mortier, genre pisé, que l'on a de la peine à distinguer aujourd'hui du sol qui l'entoure. Le Dr Woolley a retrouvé les limites de cette terrasse préhistorique ainsi construite, sur laquelle bâtirent les rois postérieurs de la III' dynastie, qui en élevèrent le niveau en remplissant de débris et de boue les intervalles des murailles.

« Quant à la Ziggourat qui est encore debout aujourd'hui, les murs et les terrasses en sont faits de briques cuites et de bitume ; beaucoup de tablettes déposées dans l'édifice ont encore des traces de ce bitume, celui qui se trouve dans les lacs du désert qui sont encore aujourd'hui un trait caractéristique de la région. C'est exactement la matière dont parle la Genèse (XI, 3) à propos de la Tour de Babel: « La brique leur tint lieu de pierre et le bitume de mortier. »

« Ce bâtiment, commencé par le roi Ur-Engur, vers 2300 et terminé par son petit-fils, était consacré à la déesse de la Lune. Il subit plusieurs mutilations graves au cours des invasions, comme en font foi un certain nombre d'inscriptions des reconstructeurs, ainsi que nombre d'objets précieux, de tablettes et statues en diorite ou albâtre, de beaux vases de pierre avec dédicaces de divers souverains à partir de Pan 2700.

« La découverte sensationnelle a été celle de la grande stèle d'Ur-Engur, datant de la deuxième moitié du troisième millénaire, large de 1 m. 50 et haute peut-être de 5 mètres, sculptée des deux côtés d'une série de scènes historiques en bandes horizontales. Elle se range, comme la stèle des vautours au Louvre, parmi les reliques les plus importantes de l'art sumérien. Les reliefs font ressortir les soins d'Ur-Engur pour son peuple dans les canaux d'irrigation qu'il fit creuser, et sa piété pour la déesse dans la grande Ziggourat qu'il fit construire. Un relief unique montre le souverain devant la divinité et au-dessus de sa tête un ange non ailé descendant du ciel et tenant un vase d'où s'épanche de l'eau tombant sur le sol. Une figuration aussi gracieuse d'ange est exceptionnelle dans l'art du pays.

« D'autres scènes représentent des sacrifices aux dieux, des stades de la construction de la tour. Elles révèlent un maître sculpteur et constituent les spécimens les plus imposants de la grande Mésopotamie antique.

« Beaucoup d'autres objets contribuent aussi à faire revivre des circonstances de cette époque lointaine ; par exemple, un relief d'albâtre représente un bateau de roseaux relié à une cabine où l'on voit un homme debout, un sanglier, une oie et, attachés à la poupe, deux poissons. Le Dr Woolley voit là une illustration probable de la vie dans les marécages du sud de la Mésopotamie vers l'an 3000 au plus tard.

« Il a pu reconstituer ainsi quelque chose de la vie très mouvementée qui s'agitait autour de cet énorme temple babylonien, à la fois sanctuaire, palais, usine et magasin, tel un château-monastère du moyen âge, avec prêtres, choeurs, trésorier, ministres de la guerre, de la justice et de l'agriculture, contrôleurs, chef de harem, »directeur de pêche, de dépôts alimentaires, etc., innombrables esclaves, hommes et femmes employés aux diverses industries, dont la principale était le tissage. On a retrouvé les indications de la quantité de laine fournie par mois et par an aux 165 femmes ou jeunes filles de l'un des établissements, la quantité, la qualité et le poids des tissus fabriqués par elles, la proportion tolérée de gaspillage inévitable, les rations accordées comme salaire au taux de 4 mesures d'huile par jour pour les adultes, 2, 1 1/2 ou 1 pour les enfants, et 1 aussi seulement pour les femmes âgées ; les lettres de crédit des esclaves envoyés au loin au nom de la maison, bref, les éléments variés et précis d'une vie intense vécue dans les murs du sanctuaire. »

De nouveaux détails ont été donnés sur ce temple magnifique :

« On trouve aussi dans le temple, sur une stèle de pierre noire, le récit des victoires de Hammurabi, le grand roi et législateur de Babylone.

« Les fouilles les plus récentes ont mis au jour un système de drains analogues aux drains indo-sumériens, ainsi que les cuisines du temple. Dans celles-ci sont des fours destinés à recevoir des récipients de diverses grandeurs. Il y a encore des pots d'argile intacts, la table à découper avec les entailles des couteaux, un four à pain, des meules, un évier, un réservoir à eau.

« Dans ce temple, on a également trouvé le premier cercueil de métal qu'on ait jamais vu en Mésopotamie. En feuilles de cuivre battu, merveilleusement agencées, il contenait les restes d'une femme, ses corbeilles à ouvrage, bijoux, ustensiles de bronze. On pense qu'il date de 700 ans avant Jésus-Christ. »

L'année 1928 a été particulièrement féconde en découvertes. La première est celle d'une tombe royale du quatrième millénaire avant Jésus-Christ, qui date sans doute de quatorze à quinze siècles avant Abraham. Cette tombe contient des trésors de grande valeur.

« Elle ne contient pas le corps du roi, qui a dû être dérobé, mais en revanche un grand nombre d'objets qui indiquent une civilisation très avancée, en particulier une harpe d'un modèle inconnu jusqu'ici et magnifiquement travaillée avec des incrustations d'or et de lapis-lazuli.

« Un chariot a en outre été découvert dont toutes les parties construites en bois ont malheureusement disparu, mais il subsiste des ornements merveilleusement riches. Des têtes de lion en or aux yeux de lapis-lazuli garnissent le pourtour du char et, sur le devant, se trouvent deux superbes têtes de panthères en argent.

« D'autres tombes ont été visitées. Un grand nombre d'objets d'or, d'argent et de cuivre se trouvent dans ces tombes, dont la découverte servira à lever en partie le voile qui recouvre cette civilisation sumérienne qui nous est à peine connue par quelques passages d'Hérodote. »

Dans une autre tombe, les archéologues ont trouvé soixante squelettes. Tout fait penser que ces squelettes sont ceux des soldats et des serviteurs et servantes du roi qui, d'après la coutume atroce, ont dû suivre leur maître dans la mort. Cette scène lugubre montre combien le paganisme était cruel et montre aussi que la civilisation remarquable qui apparaît à Ur, tout au long de son histoire, cachait une profonde grossièreté de moeurs et de croyances. Ainsi apparaît, une fois de plus, la nécessité au sein de l'Antiquité, d'une révélation divine. Ce n'est pas dans la superstition et l'immoralité chaldéennes qu'Abraham « le père des croyants », aurait pu trouver les sublimes vérités qu'il a transmises à ses enfants spirituels ; pas plus, d'ailleurs, qu'il n'aurait pu les trouver dans la superstition et l'immoralité égyptiennes, Abraham a été à l'école du Dieu vivant et sa religion est la vraie parce qu'il l'a reçue du Ciel et non point de la Terre.

Nous résumerons cet exposé des fouilles d'Ur, en Chaldée, en donnant ici la conclusion d'un article que le professeur Woolley a fait paraître dans le numéro d'août 1928 de cette admirable Revue américaine: The National geographie Magazine (6).

« Notre tâche consiste à ressusciter en quelque sorte le passé et déjà, après cinq saisons de travaux, nous le pouvons en une large mesure.

« Il nous serait facile si l'espace nous le permettait, de décrire ici la Tour d'Ur telle qu'elle se dressait autrefois, avec les processions somptueuses des prêtres de la déesse de la Lune montant et descendant son triple escalier et parvenant, en passant par les terrasses plantées d'arbres, jusqu'au sanctuaire rempli de joyaux qui couronnait l'édifice. Cette Tour pouvait, certes, se comparer à celle de Babylone. Nous pourrions décrire l'immense parvis qui se trouvait aux pieds de la Tour, et qui se remplissait d'adorateurs apportant leurs offrandes au dieu ; voici les ânes chargés de sacs de grain, de jarres d'huile et de fromages ; voici les serviteurs du temple pesant les ballots de laine, les scribes inscrivant les dons sur leurs tablettes d'argile humide et donnant ensuite leurs reçus aux paysans affairés.

« Nous pourrions aussi décrire les temples divers, leur architecture, leurs prêtres en fonction, les femmes occupées au tissage, les surveillants chargés de diriger leur travail.

« Nous pourrions aussi dépeindre la vie des habitants d'Ur au temps d'Abraham, dans leurs maisons à deux étages, maisons en briques avec leurs galeries boisées et avec leurs chapelles privées pour le culte domestique. »

La mention du roi Belschatsar comme dernier roi de Babylone (Daniel, V) s'est trouvée confirmée... à Ur. Les archéologues ont en effet, découvert dans les ruines d'Ur quatre cylindres en argile cuite au nom du roi Nabonidus, au sujet de la reconstruction du temple de la déesse Sin (la Lune), et qui contient une prière du roi à cette déesse en faveur de son fils, Belschatsar. On a trouvé également une inscription relative à un achat de terrain effectué par Belschatsar et une autre relative à une somme d'argent qui lui était due (7).

Ainsi les attaques de la critique particulièrement hostile au livre de Daniel se sont montrées sans fondement.


1) Le nom du port était, à l'époque des tablettes, Ugarit, nom qui figure dans plusieurs documents égyptiens.

2) « La Bible a dit vrai », p. 217, 219.

3) André PARROT, Mari, p. 30.

4) « Mari », p. 231.

5) Arjoc est identifié avec Rim-Sin, mentionné dans la lettre.

6) Page 226, Archeology, the mirror of the Ages.

7) Un archéologue a écrit récemment : a Il est inutile maintenant de combattre certaines théories hostiles au chapitre V de Daniel. car les inscriptions babyloniennes ont clairement révélé que Belschatsar était le nom du fils aîné de Nabonidus, du dernier roi de Babylone. »

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