Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

LE DÉSERT

Nous ne pouvons pas entrer ici dans le détail du voyage des Israélites de la mer Rouge au Sinaï, ni de leur long séjour dans le désert. De nombreuses missions entreprises par des géographes et des archéologues ont parcouru en tous sens la péninsule du Sinaï et ont pu identifier certaines des localités mentionnées dans les livres de Moïse. Sur l'itinéraire suivi par le peuple dans ses pérégrinations l'accord de ces savants n'est pas toujours complet. Il faut se rappeler que, au cours des siècles, des centres d'habitation ont pu disparaître ; de plus, il est manifeste que l'itinéraire des Israélites a été assez compliqué ; il y a eu des allées et des venues inévitables pendant une période de quarante ans. Mais si les spécialistes de la région du Sinaï ne sont pas toujours d'accord entre eux, ils sont unanimes à affirmer l'extraordinaire exactitude des récits bibliques et leur pleine conformité avec tout ce que nous savons du désert et de la vie au désert. La description de cette région telle qu'elle apparaît dans le Pentateuque est saisissante de vérité et de vie. Chaque page est comme un tableau, de telle sorte que le lecteur attentif finit par connaître la région du Sinaï comme s'il l'avait visitée lui-même. En ce qui concerne le voyage de la mer Rouge au Sinaï, l'itinéraire de l'Exode est si précis et si sûr que, maintenant encore, il constitue le meilleur guide pour les explorateurs. En ce qui concerne la végétation de la péninsule, son cIimat, ses particularités telles que les terribles orages, les vents violents, les alternances de montagnes et de plaines, les merveilles de l'eau dans les oasis et de la lumière sur les scènes sauvages, le Pentateuque est une source de renseignements aussi exacts et pittoresques qu'abondants.

Citons à ce propos le témoignage de quelques voyageurs ou archéologues.

Voici ce qu'écrit M. A.-H. Sayce., « Quand nous écoutons le témoignage de la Bible elle-même, lorsque nous donnons au mont Sinaï sa véritable position géographique, les contradictions et les difficultés s'évanouissent, et nous nous rendons compte que le récit se trouve en pleine harmonie avec les données de l'histoire et de la géographie.

« Une fois de plus ce n'est pas la Bible qui manque à satisfaire l'archéologue orientaliste, mais les fausses interprétations que l'on a suggérées de ses récits (1). »

Kyle écrit dans son livre remarquable: « The deciding voice of the monuments » (2) : « De la mer Rouge au centre de la péninsule du Sinaï, la route décrite par la Bible suit, d'étape en étape, l'itinéraire indiqué par la nature et suivi par les caravanes de temps immémorial. Le voyageur discerne à chaque pas l'exactitude des distances indiquées, la précision rigoureuse de la topographie; toute la couleur locale du récit sacré apparaît en pleine lumière. »

Recueillons aussi le témoignage de voyageurs tels que Pierre Loti dans son livre « Le Désert » ou E.-H. Palmer dans son récit si captivant et si instructif « The Desert of the Exodus » (3)... « Quand ils se sont occupés du récit de la vie nomade des enfants d'Israël, les commentateurs rationalistes ont été trompés par leurs préjugés populaires et par l'application des règles du criticisme européen à des documents orientaux ; ils en sont venus ainsi à déclarer que toute cette histoire manquait de vraisemblance et n'était pas digne de foi. La critique de l'école ultra-rationaliste prend pour point de départ une idée fausse : d'après sa manière de voir, le récit biblique nous ferait croire que les enfants d'Israël marchaient en ordre militaire, levant le camp le matin et dressant de nouveau leurs tentes le soir, tous les jours, pendant quarante ans et cela dans l'espace très circonscrit de quelque cent mille carrés. Elle conclut naturellement que c'est improbable au plus haut degré ; après s'être ainsi créé un fantôme imaginaire, elle l'attaque avec ardeur et elle revient du combat, croyant avoir démontré l'inexactitude et l'incrédibilité de l'Ecriture. Pourtant la Bible, si on sait la lire, apparaîtra inébranlable dans ses détails historiques et topographiques. Il n'y a rien d'étrange ni d'absurde dans ce fait que les Israélites se font si aisément à la vie nomade. Ce n'était, après tout, qu'un retour aux habitudes patriarcales, c'est-à-dire, nomades de leur race ; ils marchaient sur les pas de leur père Abraham, le scheik des scheiks. »

Citons enfin M. Edouard Naville dont la compétence en ces matières ne saurait être contestée : Il montre comment la construction du Tabernacle, niée par une certaine critique qui la considère comme invraisemblable à cette époque et dans ce désert, apparaît au contraire parfaitement plausible à ceux qui connaissent la région du Sinaï et son histoire. Il montre aussi combien il est impossible d'admettre que le récit si détaillé de la construction du Tabernacle ait été imaginé par quelque prêtre juif, au retour de l'exil.

« ... La première partie du sanctuaire, regardée comme étant tout spécialement la demeure de Dieu, c'était l'arche... Plus loin il est raconté que l'arche fut faite en bois d'acacia par un homme appelé Betsaleel, de la tribu de Juda... Ainsi l'homme qui doit faire tout le travail de l'arche et du tabernacle est un Israélite de la tribu de Juda ; ce n'est pas un étranger, mais il a sans doute appris son art en Egypte, car tous les genres de travaux énumérés sont exactement ceux dans lesquels excellaient les artisans égyptiens et que les Hébreux avaient sûrement admirés à maintes reprises pendant leur séjour en Egypte. Encore une fois, je pose la question: Comment un auteur de l'époque des rois de Perse pouvait-il savoir le nom de l'artisan à qui fut confié ce travail important ? Comment son nom avait-il été conservé ? et non seulement le sien mais celui de son père et de son grand-père ? Il est certain que ce n'est point par une tradition orale que ces détails ont traversé sept à huit siècles...

« ... Ils feront une arche de bois d'acacia... » Nous ne trouvons pas l'acacia parmi les matériaux employés à la construction du temple... Lorsque les Israélites s'établirent en Palestine, l'arbre regardé comme s'appropriant le mieux à un édifice sacré et digne de cet emploi était le cèdre... Au contraire, le cèdre n'apparaît pas dans la construction ni de l'arche, ni du tabernacle. Tous deux doivent être faits en bois d'acacia. L'acacia est un arbre du désert du Sinaï il devait être assez abondant à cette époque, puisqu'il est ordonné aux Israélites d'apporter parmi les offrandes du bois d'acacia, sans doute abattu, coupé et ramassé autour de leur campement. L'acacia n'est point un arbre palestinien... Ici, de nouveau, le narrateur est en harmonie parfaite avec les conditions locales, avec la nature du désert et sa végétation. Devons-nous supposer que le soi-disant écrivain post-exilique est si fidèle à son point de vue historique qu'il est capable de décrire un mode de construction hors d'usage depuis des siècles, tant en Palestine qu'en Mésopotamie ? Ne paraît-il pas plus plausible que le narrateur, ayant été lui-même dans le désert, décrit ce qui a frappé ses regards ?

« La vie du désert, avec une forte empreinte égyptienne dans tout ce qui a trait aux arts manuels, voilà ce qui nous frappe dans le récit. Par exemple, dans ce qui est dit du métal. sert à recouvrir des objets faits en bois. Employé tout seul, comme c'est le cas pour le chandelier, l'or est battu. Une seule fois on nous dit que le métal est fondu : « Tu fondras quatre anneaux d'or pour l'arche. » Ceci s'accorde aussi avec l'usage régnant en Egypte. Là-bas, chaque fois qu'un ouvrage de métal devait être un objet de grande dimension, le métal n'était pas fondu, mais battu, travaillé au marteau... Tout le travail commandé et décrit dans le livre de l'Exode pouvait être exécuté par n'importe quel habile artisan au courant de la technique égyptienne. Les quelques outils nécessaires à la menuiserie et à la bijouterie pouvaient être facilement transportés en voyage... Le boisage pour l'arche et le tabernacle est très simple, pouvant être exécuté partout. Il en est de même de la partie métallique. Elle n'est pas compliquée et consiste surtout en travail de métal battu... Le pectoral est tout à fait égyptien. Plusieurs objets similaires, destinés à des rois et à des reines, sont parvenus jusqu'à nous... Aussi, un habile artisan, venant d'Egypte, a-t-il pu facilement ciseler le pectoral pour Aaron.

« ... Toutes les femmes qui avaient de l'habileté filèrent de leurs mains, et elles apportèrent leur ouvrage, des fils teints en bleu, en pourpre, en cramoisi et du fin lin. Toutes les femmes dont le coeur était bien disposé filèrent du poil de chèvre. » (Exode, XXXV, 25-26). Ce travail peut être exécuté dans le désert, et il présente aussi un caractère égyptien. Dans l'antiquité, l'Egypte était le grand centre de la fabrication de la toile... Les femmes israélites avaient probablement apporté d'Egypte le lin qu'elles offrirent pour le tabernacle et qu'elles filèrent... Quant aux tapis de poil de chèvre, la matière première était abondante et facilement transformable en tissu par les femmes... Toute cette description est conforme à la manière de vivre d'une importante tribu nomade.

« Il est raconté que les Israélites quittèrent l'Egypte en emportant beaucoup de choses, et que dans leur hâte d'être délivrés d'eux, les Egyptiens leur donnèrent « des vases d'argent, des vases d'or et des vêtements », ou, comme le dit la version anglaise révisée, « des bijoux ». Il devait en ,être autrefois comme aujourd'hui : les femmes arabes portent souvent sur elles toute leur fortune en bijoux... Dans une tribu nombreuse, si les femmes sacrifiaient généreusement leurs bijoux, cela pouvait se monter à une grande quantité d'or qui, travaillé au marteau, était employé à recouvrir le bois, comme les poutres, de l'arche ou du propitiatoire.

« ... Je dois de nouveau insister sur la remarquable conformité de la description du tabernacle avec les circonstances locales et historiques. Rien, absolument rien, ne révèle un écrivain du Ve siècle, qui eût sans doute subi plus ou moins d'influence de la Perse... Moïse n'est-il point l'homme le plus capable d'écrire un tel récit, de rapporter le nom des artistes habiles qui achevèrent la construction du tabernacle et toutes les oeuvres d'art qu'il renfermait, et d'entrer dans d'aussi petits détails sur les ornements, la couleur et la dimension de chaque rideau et tenture, sur la matière première dont ils devaient être faits ? Pouvons-nous supposer qu'une tradition aussi détaillée ait subsisté plus de huit cents ans sans être écrite (4) ? »


1) Rev. A.-H. SAYCE, The Higher criticism and the verdict of the monuments, p. :271.

2) M. KYLE. The deciding voice of the monuments. p. 2.39.

3) E.-H. PALMER, The desert of the Exodus, t. II, p. 318 et 319.

4) Edouard NAVILLE, Archéologie de l'Ancien Testament. p. 113-143.

Chapitre précédent Table des matières Chapitre suivant