Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

I. - LA CRÉATION

La science moderne reconnaît de plus en plus la vérité de la première page de l'Ecriture Sainte. Il a fallu arriver au XIXe et au XXe siècles pour découvrir certains faits physiques que la Bible avait depuis des siècles exposés avec une exactitude surprenante, qui montre pleinement l'action de l'Esprit de Dieu sur le narrateur. Ce n'est pas le lieu, ici, d'entrer dans le détail de l'étude des confirmations scientifiques du récit de la création ; il nous suffira de dire que la science est d'accord avec la Bible pour proclamer que l'oeuvre créatrice a procédé par étapes ; que le globe terrestre a tout d'abord été informe, inconsistant ; que la terre a été couverte par les eaux et enveloppée de ténèbres; que la lumière est apparue bien avant le soleil, que le règne végétal a précédé le règne animal, que l'apparition du système solaire a rendu possible la vie supérieure du règne animal, représenté tout d'abord par les monstres marins, les oiseaux, les reptiles, puis par les quadrupèdes, les mammifères ; et enfin que l'homme est venu après ces diverses créations d'ordre végétal et animal.

Cet accord, que nous ne faisons qu'indiquer, mais qu'il serait facile d'exposer plus longuement, est tout à fait remarquable, lorsqu'on considère l'ancienneté du document biblique et surtout lorsqu'on le compare avec les autres cosmogonies antiques. Aucune de ces cosmogonies, pas même la babylonienne, ne peut supporter le moindre examen scientifique ; mais le document biblique est pris au sérieux, et de plus en plus, par les géologues, les astronomes et les physiciens. Les cosmogonies païennes sont pleines de détails étranges, puérils et se font toutes remarquer par cette conception essentiellement anti-scientifique qui consiste à voir des divinités dans les forces de la nature.

La théorie païenne ferme la porte à toute vraie science ; la révélation biblique mène à la science en libérant la pensée humaine de cette antique tyrannie du naturisme qui a caché la nature à l'homme en obligeant l'homme à se prosterner devant elle. Voici, par exemple, le langage de la première tablette de la légende babylonienne. « ... Tiamât (l'abîme) fit surgir la Vipère, et le Serpent, et le dieu Lakhamu, le Vent Sauvage, le Chien dévorant, le Scorpion-Homme, le puissant Vent de Tempête, le Poisson-Homme, la Bête Cornue... Ils portaient l'arme qui n'épargne pas ; ils ne fléchissaient point dans la bataille... » Quel contraste entre ce langage fantastique qui nous montre des dieux qui se battent, et le récit biblique qui nous montre que ces soi-disant divinités ne sont que des éléments physiques que la Bible appelle simplement, scientifiquement : ténèbres, lumière, terre, mer, plantes, soleil, étoiles, animaux. Dans la Genèse rien qui ressemble à cette mythologie absurde ; nous sommes en face de la réalité même, exprimée en des termes qu'un savant moderne ne dédaigne pas d'employer.

Mais surtout, quel contraste entre la théologie du texte sacré et celle du texte cunéiforme. Le texte sacré nous met en présence de Dieu, du Dieu unique, du Dieu qui crée de sa propre volonté, qui crée « ex nihilo », c'est-à-dire qui inaugure vraiment, qui est un initiateur et non point un continuateur, qui n'est point précédé par une matière éternelle, mais qui précède Lui-même la matière ; un Dieu Tout-Puissant, sage, prévenant, aimant, qui a un plan, une pensée, qui a un but vers lequel Il se dirige, qui fait tout concourir vers ce but, qui se réjouit pleinement de ce qu'Il fait, de tout ce qu'Il fait et le trouve « bon », et même « très bon » ; un Dieu qui est vraiment le Maître, l'Ordonnateur, qui parle et la chose arrive, et non pas une sorte de demi-dieu hésitant, craintif, menacé à chaque instant de disparaître ou de se décourager dans son entreprise.

 

Avec le récit chaldéen, quel spectacle ahurissant de dieux et de déesses qui se font concurrence les uns aux autres, qui se haïssent furieusement et cherchent constamment à se nuire! Nous donnerons ici quelques extraits de ces tablettes d'après la traduction officielle du British Museum, parue en 1921.

« Les dieux vinrent à l'existence... Le dieu Lakhmu et la déesse Lakhamu furent appelés à resplendir, ils reçurent un nom. Ensemble ils crûrent en stature; ils devinrent grands. Anshar et Kishar vinrent à l'existence, et d'autres en dehors d'eux. De longs jours s'écoulèrent, les années s'accrurent. Le dieu Ana, leur fils, l'égal de ses pères, fut créé. » (Y' tablette).

 

Le sujet principal du récit babylonien est la lutte formidable entre la déesse Tiâmat, la déesse du grand abîme, et Marduk, le fils de Ea. Voici un épisode de cette lutte, qui se termine par la victoire de Marduk.

« Marduk parla... Quand les dieux virent le résultat des paroles de sa bouche, ils se réjouirent et l'adorèrent en disant : « Marduk est roi! » Ils lui donnèrent le sceptre, le trône... l'arme sans rivale, l'arme qui détruit l'ennemi, disant: « Va, enlève la vie de Tiamât ; quand le vent emporte son sang dans l'abîme. » (40 tablette).

 

On a trouvé d'autres fragments de légendes babyloniennes de la création ou plus exactement d'autres récits de luttes entre les dieux. Il est probable que chaque ville avait sa légende et que, dans chaque légende locale, le dieu de la ville était spécialement exalté. En réalité, aucune légende babylonienne ne se propose de raconter la création, mais bien plutôt de glorifier telle divinité aux dépens de telle autre. Citons à ce sujet le commentaire très frappant que donnent les éditeurs du « British Museum » dans leur publication du récit babylonien : « Une étude attentive des textes des sept tablettes de la création... montre que le principal objet de cette légende était la glorification du dieu Marduk le fils de Ea (Enki), comme vainqueur du dragon Tiâmat, et non point l'histoire de la création des cieux, de la terre et de l'homme. La création proprement dite n'est mentionnée que comme un exploit de Marduk dans la 6' tablette, et la 7e tablette est entièrement consacrée à l'énumération des titres honorifiques de Marduk. il est probable que chaque grande ville de Babylonie, tout en acceptant la forme générale de la Légende de la Création, faisait du plus important des dieux locaux le héros de cette Légende.

« On a depuis «longtemps compris que la prééminence de Marduk dans la Légende était due à l'importance politique de la ville de Babylone. Nous savons que dans la ville de Assur, le dieu Assur, le dieu national d'Assyrie, occupait dans les textes de la Légende, en usage en ce pays, la position que Marduk occupait dans quatre des Légendes reçues à Babylone. (Voir les fragments du texte assyrien décrits dans l'Index: au livre de Ebeling, « Keilschrif ttexte auss Assur », Leipzig, 1919 (1).»

Ainsi les Légendes babyloniennes nous présentent les rivalités de leurs dieux et cherchent à donner la gloire au dieu qui est en honneur en tel pays et à telle époque. Que nous sommes loin de la magnifique vision de la Genèse, de la vision du Dieu unique, universel, seul Créateur, seul Maître, plein d'amour pour l'oeuvre de ses mains, plein d'amour pour toutes ses créatures qui, toutes, procèdent de Lui et Lui appartiennent.

Il est bien certain que le récit biblique ne procède pas du récit babylonien. Qui aurait jamais pu transformer le fleuve fangeux des traditions païennes en cette source pure qu'est la tradition mosaïque ? Comme nous le verrons à propos des récits du Déluge et du Code de Hammurabi, le texte sacré est absolument indépendant du texte profane, car il lui est infiniment supérieur et, sur certains points, nettement opposé. Jamais la vérité n'a été redevable à la superstition, jamais l'histoire n'est sortie de la fable. La fable est souvent un hommage rendu par le mensonge à la vérité, mais elle n'est jamais génératrice de vérité.


NOTE. - Les « sept tablettes de la création » ont été trouvées entre les années 1848 et 1876 par les archéologues Sir Layard et George Smith. En 1873 et 1874, George Smith put trouver d'autres fragments de la fameuse Légende babylonienne.

M. Pinches a aussi découvert, vers la fin du siècle dernier, des tablettes très anciennes qui remontent à la période sumérienne ; elles sont beaucoup moins étendues et manifestent le même polythéisme et le même matérialisme que les premières. Enfin, on a trouvé récemment quelques tablettes spécialement assyriennes qui donnent la place d'honneur à Assur. Le professeur S. Langdon, d'Oxford, vient de publier, en 1923, une nouvelle édition de la Légende babylonienne qui tient compte de ces diverses découvertes et qui constitue le document le plus complet et le plus solide sur cette question, dont beaucoup ont le tort de s'occuper sans la connaître vraiment.

Aucune des découvertes récentes ne nous apporte un texte plus intéressant, moins polythéiste, moins matérialiste que les sept tablettes de George Smith. Le récit sacré reste, et restera toujours, sans rival.

1) The Babylonian Legends of the Creation. British Museum. 3 (Londres, 1921).

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