ÉTUDE BIBLIQUE.
Parmi les erreurs que l'on a reprochées aux enseignements apostoliques, il en est une qui porte sur un point très important. On dit que les écrivains sacrés ont induit l’Église en erreur, sur l’époque du retour du Seigneur, et qu’en annonçant son arrivée comme prochaine, ils se sont mis dans la fâcheuse position d’être démentis par l’événement.
Ce reproche est-il fondé?
En elle-même et indépendamment du point de vue apologétique, cette question est du plus grand intérêt pour nous. Essayons de la résoudre.
Un point sur lequel il faut, avant tout, s’entendre, c’est que le moment de l’arrivée personnelle du Seigneur est présenté, dans le Nouveau Testament, comme tout à fait incertain.
Nous ne citerons pas les paroles de Jésus-Christ rapportées dans Marc XIII, 32 (Math. XXIV, 36) qui seraient concluantes: «Quant à ce jour et à cette heure-là, nul ne le sait, ni les anges qui sont dans le ciel, ni le Fils, mais le Père seul;» parce que nous ne voulons pas examiner ici la question de savoir si une prophétie qui renferme des expressions comme celles-ci: «En vérité je vous dis que cette génération ne passera pas, que toutes ces choses n’arrivent,» peut se rapporter à l’objet que nous avons en vue.
Mais qu’il ne s’agisse dans la prophétie à laquelle appartient cette déclaration (Math. XXIV, 1-44; et Marc XIII 1-32), que de la destruction de Jérusalem, et d’une venue spirituelle de Christ, comme certains interprètes le prétendent; ou, comme d’autres le veulent, que nous ayons ici une de ces prophéties dans lesquelles des événements essentiellement un, mais qui appartiennent à des époques différentes de l’histoire du développement du royaume de Dieu, sont réunis, confondus, dans un même tableau sans perspective: ce qu'on ne peut contester, c’est qu’au moins la fin du chap. XXIV de St. Matthieu depuis le vers. 43, et les 30 premiers vers, du chap. XXV, qui se termine par la description d’une des grandes scènes du jugement à venir, se rapportent à la venue personnelle du Seigneur.
Or l’incertitude de l’époque de ce retour exprimée au vers. 44 (chap. XXIV): «Le Fils de l’homme viendra à l’heure que vous ne savez pas,» répétée au vers. 50, est répétée encore, avec une solennité croissante, à la fin de la parabole des vierges: «Vous ne savez ni le jour, ni l'heure où le Fils de l’homme viendra.»
C’est l’enseignement même qu’un des traits de cette parabole présente sous la forme la plus vive, puisque c’est au milieu de la nuit, pendant que toutes les vierges, sages et folles, sont également endormies, que retentit le cri du joyeux cortège: «VOICI L’ÉPOUX.»
Dans une autre occasion (Luc XVII, 20), Jésus interrogé par les Pharisiens, sur l’époque «où viendrait le règne de Dieu,» répond qu’il «ne viendra pas de manière à se faire remarquer» (avec éclat); car, leur dit-il, «le règne de Dieu est au dedans de vous.»
Puis, s’adressant à ses disciples, il leur annonce que le jour du Fils de l’homme «sera comme l’éclair» qui resplendit d’une extrémité du ciel à l’autre (qu’il viendra avec une splendeur éclatante).
Or ce qui se passera dans ce jour du Fils de l’homme, Jésus le compare à ce qui est arrivé au temps de Noé et de Lot, où les hommes, plongés dans leurs occupations ordinaires et dans leurs longs rêves d’avenir et de jouissances terrestres, furent tout à coup enveloppés dans la grande catastrophe qui les fit tous périr, les uns sous une pluie «de feu et de soufre,» les autres dans les flots «du déluge.»
Nous n’avons ici, il est vrai, qu’une partie du tableau, celle qui se rapporte aux méchants; mais en annonçant à ses propres disciples que son jour serait semblable à l’éclair qui resplendit dans les cieux, JÉSUS INDIQUE ASSEZ QUE SA VENUE SERAIT, POUR LES SIENS AUSSI, SUBITE ET INATTENDUE.
Et dans la parabole des vierges, il nous montre toute l’Église surprise par l’arrivée de l’Époux.
St. Paul écrivait dans le même sens aux Thessaloniciens (1 Thess. V, 1-5): «Au sujet des temps et des moments, vous n’avez pas besoin qu’on vous en écrive, car vous savez très bien vous-mêmes que le jour du Seigneur viendra comme un voleur dans la nuit.»
Et s’ils ne doivent pas être surpris par son arrivée, comme on l’est dans la nuit par celle d’un voleur, ce n’est pas qu’ils en connaissent l’époque, mais parce qu’ils sont «enfants de lumière,» et amis de l’Époux; et que, si le Seigneur Jésus, doit à son avènement «exercer la vengeance sur ceux qui ne connaissent pas Dieu et qui n’obéissent point à l’Évangile,» en les punissant, «d’une ruine éternelle de devant sa face, et de devant la gloire de sa force,» il doit «en ce jour-là, être glorifié dans ses saints et rendu admirable dans tous ceux qui croient.»
Aussi était-ce pour qu’ils «ne s’attristassent pas, comme ceux qui n’ont point d’espérance,» que Paul esquissant quelques traits de ces grandes scènes de l’avenir, leur avait fait entrevoir le Seigneur, redescendant du ciel, dans la gloire du Père, «avec un cri de commandement, et une voix d’archange,» et au son de la «trompette de Dieu,» et les enfants de lumière, les uns ressuscités, les autres subitement transformés (1 Cor. XV, 52), enlevés ensemble dans les airs, en glorieuses nuées pour aller à sa rencontre et demeurer TOUJOURS avec lui. (1 Thess. IV, 13-18.)
St. Pierre ajoute son témoignage à celui de St. Paul. En parlant de ce «jour du Seigneur où les deux passeront au bruit de la tempête, et où les éléments embrasés seront dissous, et la terre et les ouvrages qu’elle renferme brûlés,» il annonce qu’il viendra «comme un voleur dans la nuit.»
On peut même ajouter que l’époque de ce grand jour, bien loin d’avoir été révélée, ne paraît pas même avoir été absolument fixée.
Cette assertion peut surprendre. Elle n’est cependant pas plus extraordinaire que toutes celles qui se rapportent aux événements où la souveraineté divine se combine, d’une manière incompréhensible pour nous, à l’action subordonnée, mais réelle, de la liberté humaine «Prophétie n’est pas fatalité; (Trench, Sur les Paraboles.)» ou, dans les mois de St. Augustin: «Prædixi, non fixi. (Cité par le même)»
Tous les croyants sont exhortés par Saint Pierre à «ATTENDRE ET À HÂTER» par leurs prières et une conduite sainte, «L’ARRIVÉE DU JOUR DE DIEU,» où ils seront mis en possession «des nouveaux cieux et de la nouvelle terre» qu’ils attendent selon la promesse du Seigneur.
Le même apôtre avait déjà révélé cet étonnant mystère, dans son discours aux Juifs (Act. III, 19): «Convertissez-vous donc,... afin que vos péchés soient effacés, et que viennent les temps de rafraîchissement, par la face du Seigneur, et qu’il envoie Jésus-Christ,... que le ciel doit contenir jusqu’aux temps du rétablissement de toutes choses» (Ce rapport inattendu entre la lettre et le discours de Pierre, ne mérite-t-il pas d’être pris en grande considération dans l’examen des caractères intérieurs relatifs à l’authenticité si contestée de la seconde Épître?)
Les écrivains sacrés ont donc laissé incertaine l’époque du retour du Seigneur.
Ce n’est pas à nous «de connaître les temps et les moments.» Les anges et le Fils lui-même, ne les ont pas toujours connus. (Marc XIII, 32.)
Aussi, toutes les fois que des interprètes téméraires, au risque de renverser les sages desseins de notre Père céleste, ont tenté de fixer la date de la venue personnelle de Jésus-Christ, l’événement est venu démentir leurs prédictions.
Mais tout en proclamant l’incertitude de l’époque où notre Sauveur doit revenir dans la gloire, les auteurs inspirés n’ont-ils pas du moins annoncé que l’arrivée de Jésus-Christ aurait lieu de leur vivant?
L’idée de la venue prochaine du Messie dans la gloire, était généralement répandue chez ses disciples, à l’époque de son ministère terrestre. Jésus a combattu cette erreur, et déclaré que son jour ne serait pas sitôt manifesté. C’est dans ce but qu’il prononce la parabole rapportée dans Luc XIX, 11-17, où il se compare à un homme de grande naissance, qui s'en va dans un pays éloigné pour y recevoir un royaume, après avoir donné à chacun de ses serviteurs une certaine somme, qu'ils devront faire valoir «jusqu’à ce qu’il revienne.»
La parabole des vierges est aussi destinée à combattre l’erreur d’un prochain avènement.
Il était particulièrement nécessaire de le faire après la prophétie de Math. XXIV, et la déclaration du vers. 34: «Cette génération ne passera point que toutes ces choses n’arrivent.»
Toutes les vierges sont sorties à la rencontre de l’Époux.
Mais il tarde à venir; et c’est à cause de ce retard, auquel les vierges folles ne s’attendaient pas, et en vue duquel elles n’avaient pas fait de provision d’huile, qu’elles ne peuvent entrer dans la salle des noces.
La sagesse des vierges sages a consisté à croire que l'Époux pouvait tarder à venir.
C’est en vue de cette éventualité qu’elles avaient pris de l’huile dans leurs vases.
Dans la parabole des talents, non-seulement le Sauveur se compare à «un homme qui, s’en allant au loin,» donne ses biens à ses serviteurs pour les faire valoir en son absence; mais il ajoute encore expressément que CET HOMME NE REVIENT QUE LONGTEMPS APRÈS. (Math. XXV, 19.)
Les révélations de l’Apocalypse étaient de nature à fortifier l’impression faite par les déclarations du Sauveur. Quel que fût le sens de ce livre mystérieux, les événements qu'il annonce avaient besoin d’un certain temps pour se produire, et par conséquent le Seigneur ne pouvait pas reparaître de sitôt.
C’est de la même manière qu’il faut considérer le IIe chapitre de la 2e épître de Paul aux Thessaloniciens.
Le bruit s’était répandu que le jour de Christ était là; et, comme on peut facilement le comprendre, cette nouvelle avait jeté le trouble dans bien des esprits.
D’où cette erreur était-elle venue?
Quelques interprètes ont prétendu que c’était la première lettre de Paul aux Thessaloniciens (1 Thess. IV, 13-19) qui y avait donné lieu. Paul ne le suppose pas un instant. Il recommande, au contraire, aux Thessaloniciens de s’en tenir aux instructions qu’il leur avait données soit de vive voix, soit dans sa première lettre (II, 15); et il attribue le mal à des séducteurs (II, 3), qui se fondaient sur quelque prétendue prophétie, ou parole inspirée, ou sur quelque lettre faussaire donnée comme apostolique. Et, pour dissiper leur erreur, il leur rappelle ce qu’il leur avait dit, quand il était encore avec eux: que des événements importants, et sur le caractère desquels on ne pourrait pas se tromper, devaient s’accomplir, avant que le Seigneur se manifestât.
«L’homme de péché» devait être révélé auparavant, et «s’asseoir comme Dieu, dans le temple de Dieu.» Une puissance aussi extraordinaire devait employer un temps plus ou moins considérable à se développer, vu surtout le caractère ordinairement progressif de tout ce qui se rapporte ici-bas au royaume de Dieu.
Aussi ne voyons-nous nulle part, dans ses épîtres, Paul préoccupé de l’idée qu’il ne mourra pas, et qu’il sera du nombre de ceux qui seront «transformés» à l’apparition du Seigneur.
«Mourir lui est un gain,» et «son désir est de s’en aller pour être avec Christ, ce qui est beaucoup meilleur.» (Philip. 1,21, 23.)
Et «sachant,» dit-il aux Corinthiens (2 Cor. V, 6, 7, 8) «qu’étant dans le chez nous du corps, nous sommes en voyage loin du Seigneur, nous aimons mieux déloger du corps, et être chez nous auprès du Seigneur.»
C’est à la mort et au paradis que l’apôtre pense. Et la mort qu’il voit devant lui est celle du martyre. «Si même je sers d’aspersion sur le sacrifice de votre foi,» dit-il aux Philippiens, «j’en ai de la joie.» (Philip. II, 17.)
Quand il écrit sa dernière lettre à Timothée, ce temps du martyre est venu: «Pour moi je sers déjà d’aspersion, et le temps de mon départ est arrivé.» Et il distingue, dans cet endroit même, le temps de son martyre, du «jour» où «le Seigneur juste Juge» lui donnera «la couronne de justice» qu’il lui a réservée. (2 Tim. IV, 6.)
Paul n’a dit nulle part que le Sauveur dût reparaître de son vivant, et souvent il a exprimé précisément le contraire.
Toutes ces considérations lèvent le doute que 1 Thess. IV, 15, 17, aurait pu faire naître dans notre esprit. St. Paul, s’identifiant avec le corps de Christ composé des fidèles de toutes les générations, dit nous, en parlant de lui et de laquelle que ce soit de ces futures générations de croyants, et il divise en deux classes les fidèles de tous les temps: ceux qui seront morts avant l’arrivée du Seigneur, et ceux qui alors seront encore vivants: «Nous ne devancerons pas ceux qui se sont endormis.» (1 Cor. XV, 15.) Sera-t-il du nombre des morts qui ressusciteront, ou des vivants qui seront transformés? Ce passage ne le dit point. Pour le savoir, il faut consulter l'ensemble de ses écrits. Nous l'avons fait. Ajoutons que dans 2 Cor. IV, 14, Paul se met, sans restriction, au nombre de ceux qui ressusciteront. Il comptait donc mourir.
C’est par conséquent bien à tort qu’on a reproché à cet apôtre d’avoir affirmé qu’il vivrait jusqu’au retour de Jésus-Christ et d’avoir fait, à l’égard de ce retour, une prophétie que l’événement avait démentie.
L’accusation d’erreur était d’autant plus grave ici qu’il s’agit de choses (1 Thess. IV, 13 sq.) qu’une révélation expresse pouvait seule lui faire connaître, et dont il ne parle qu’en en appelant positivement à «la parole du Seigneur.» (Vers. 15.)
Nous avons peut-être paru perdre de vue plusieurs passages importants du Nouveau Testament qui semblent déclarer formellement le contraire de ce que nous venons d’affirmer, sur le retour du Seigneur. S’ils n'en indiquent pas avec précision l’époque, ILS ANNONCENT DU MOINS SA VENUE COMME PROCHAINE.
1. Jacques dit que «l’arrivée du Seigneur est proche.» ( Jacq. V, 8.)
2. St. Pierre, que «la fin de toutes choses est proche.»
3. St. Paul lui-même s’adresse aux croyants de Corinthe comme à DES PERSONNES QUI ATTENDENT «la manifestation de notre Seigneur Jésus-Christ.» (1 Cor. I, 7.)
4. Avec les amis du Seigneur à Philippes, IL ATTEND DES CIEUX «le Seigneur Jésus-Christ.» (Philip. III, 20.)
5. Il loue les Thessaloniciens (1 Thess. 1,9, 10) de ce qu’ils ont abandonné les idoles «pour être asservis au Dieu vivant et vrai, et pour ATTENDRE des cieux son Fils, qu’il a ressuscité d’entre les morts.»
6. Il demande au Seigneur (2 Thess. III, 5) de diriger leurs coeurs «vers l’amour de Dieu, et vers L’ATTENTE patiente de Christ.»
7. Il recommande à Timothée ( 1 Tim. VI, 14) d’être sans reproche jusqu’à «l’apparition de notre Seigneur Jésus-Christ.»
8. Il écrit à Tite, que «la grâce de Dieu est apparue afin que .... nous vivions, dans le présent siècle, sagement, justement, pieusement, en ATTENDANT l’apparition glorieuse de notre grand Dieu et Sauveur Jésus-Christ.»
9. Et ne devons-nous pas reconnaître qu’un des buts essentiels du passage qui nous a occupés plus haut (1 Thess. IV, 13-19), est de mettre les fidèles auxquels il est adressé en face des scènes du grand jour de Christ, comme en face d’un ordre de choses dont ils devaient attendre l’apparition?
L’auteur de l’épître aux Hébreux confirme toutes ces révélations:
«ENCORE UN PEU, TRÈS PEU DE TEMPS,
ET CELUI QUI VIENT ARRIVERA, ET IL NE TARDERA PAS.»
Notre grand Souverain sacrificateur, après avoir offert, dans l’humble robe de lin de sa nature humaine sans tache, le sacrifice expiatoire qui nous a ouvert l’accès du trône de la Grâce, va sortir du sanctuaire céleste, où il intercède encore pour nous, et reparaîtra dans toute la splendeur de ses vêtements de gloire, pour prononcer sur les siens la bénédiction éternelle, et les mettre en possession de l’héritage de Dieu.
Tout cela semble renverser ce que nous avons établi, et révéler, dans le Nouveau Testament, non seulement d'un auteur à l’autre, mais chez le même écrivain, des enseignements contradictoires.
Mais une même chose ne peut-elle donc pas être grande ou petite, selon le point de vue sous lequel on l’envisage? — Nous sommes sur le bord de l’océan, et pendant que ses vagues énormes, «que Dieu seul peut dompter,» viennent se briser à nos pieds, nos regards ravis s’étendent sur l’azur de ses plaines sans bornes.
Ce spectacle sublime réveille dans notre âme le sentiment de l’infini, et nous nous prosternons en esprit devant celui qui a créé l’immensité.
Et pourtant nous ne voyons, dans ce moment, ni les montagnes gigantesques, dont les cimes percent les nuages, ni tout ce monde de collines et de plaines sans fin, par lesquelles elles descendent jusqu’à la mer. Quelle est donc vaste, cette terre, qui, dans le grand spectacle que nous avons sous les yeux, ne nous offre encore qu’une bien petite partie des merveilles qu’elle renferme!
Mais transportons-nous au point de vue de la science, et plaçons-nous seulement dans l’étoile fixe la plus voisine de nous. La terre et tout le système solaire ne sont plus qu’un point perdu dans l’immensité des cieux.
Chacun de ces points de vue a sa vérité. La connaissance de l’une ne nous empêche pas de tenir compte de l’autre.
Il en est de même du temps. Pour un être d’un jour, un siècle est une immensité.
Pour un être IMMORTEL qui juge du temps d’après l’éternité, les siècles qui se sont écoulés depuis le commencement de l’histoire de notre race, ne sont que «comme le jour d’hier qui n’est plus, comme une veille de la nuit;» et les périodes innombrables qui peuvent être encore nécessaires à l’humanité, pour accomplir ses destinées, ne sont que comme le jour de demain, qui s’enfuira avec la même rapidité que celui d’hier.
C’est le point de vue de Dieu, et par conséquent des apôtres inspirés par le Saint-Esprit, quand ils nous parlent de la proximité du jour de Christ. Aussi Pierre (2 Pier. II, 9) ne veut-il pas que nous ignorions, relativement à l'avènement du Seigneur, que devant lui «un jour est comme mille ans, et mille ans comme un jour.»
Le moment viendra où ce sera notre propre point de vue. Lorsque, du haut des rivages de l’éternité, nous jetterons nos regards en arrière sur les scènes du temps, non seulement tout le cours de notre vie, mais les longs siècles qui ont été nécessaires au développement du règne de Dieu parmi les hommes et à l’accomplissement de ses desseins, ne nous paraîtront que comme un point dans l’immensité de la durée.
Et que savons-nous si la mort, qui nous menace sans cesse, ne nous transportera pas déjà au point de vue de l’éternité et de Dieu?
Qui oserait affirmer que l’âme, une fois séparée du corps et de tous les phénomènes de cet univers, et placée ainsi en dehors de tous les moyens naturels et artificiels de mesurer la durée, conserve encore la conscience distincte du temps, et que, dans les délices du paradis, mille ans ne soient pas pour elle comme un jour?
Lorsque, tout liés que nous sommes encore à l’organisme qui nous met en communication avec le monde visible, nous nous laissons profondément absorber par une pensée ou par un sentiment, ne perdons-nous pas la conscience du temps qui s’écoule, et ne sommes-nous pas, en quelque sorte, momentanément transportés en dehors de ces lois de l’univers?
S’il en est ainsi, la mort, en nous introduisant dans l’éternité, va nous transporter dans un ordre de choses où les périodes qui doivent s’écouler ici-bas avant que le Seigneur revienne, quelque longues qu’elles puissent être, ne dureront pour nous qu’un moment; en sorte que, par le jour de la mort qui est si près de nous, nous touchons au grand jour de la résurrection et de l’arrivée du Sauveur.
À ce point de vue aussi, ne devait-il pas nous être annoncé que son avènement est proche?
Mais nous n’insistons pas sur cette idée, et nous nous en tenons aux considérations que nous avons présentées plus haut:
AU POINT DE VUE DE L’ÉTERNITÉ ET DE DIEU, point de vue qui sera un jour le nôtre, et qui devait être celui des hommes inspirés par l’Esprit de Dieu, «L’ARRIVÉE DU SEIGNEUR EST PROCHE.»
C’est à ce point de vue que la foi doit nous transporter dès à présent; car:
c’est
«par
la
foi que
nous
devons marcher,
NON «par la vue.»
Par la foi, nous devons franchir la distance, quelle qu’elle soit, qui nous sépare encore du grand jour de la résurrection.
Par la foi, les enfants de Dieu de toutes les générations doivent tenir leurs yeux fixés sur «la bienheureuse apparition de leur grand Dieu et Sauveur Jésus-Christ.»
Cette vue anticipée de la gloire les console dans leurs afflictions, les encourage dans leurs combats, les remplit de joie par l’attente de la gloire qui sera révélée dans leur Sauveur et dans ses saints, et les excite à faire valoir avec activité les talents qui leur ont été confiés par le Maître, pendant son absence.
Et comme ils sont avertis qu’il peut tarder y ils se gardent de la conduite présomptueuse des vierges folles, et en allant à la rencontre de l’Époux, ils prennent de l’huile dans leurs vases.
Résumons.
Les prophéties semblent annoncer à l’Église de longues périodes d'existence sur la terre, des jours de tentations et de périls, plus redoutables que tous ceux qu’elle a traversés jusqu’ici; mais des jours aussi de bénédictions merveilleuses dont les siècles précédents n'auront pu voir que l’aurore.
Toutefois nous pouvons nous tromper sur le sens des prophéties.
L’époque de l’avènement du Seigneur est incertaine. Les événements peuvent se dérouler plus rapidement que nous ne le pensons, et le Seigneur reparaîtra dans la gloire au moment où nous nous y attendrons le moins.
Mais, qu’au point de vue des phénomènes de ce monde visible, «qui n’est que pour un temps,» l’intervalle qui nous sépare encore de ce glorieux événement, soit considérable ou non, l’Église, par la foi, doit en attendre toujours la manifestation, et avoir ses lampes allumées et sa provision d’huile sainte.
Attendre le Seigneur et travailler «jusqu’à ce qu’il vienne,» tel a été un des caractères essentiels de l’Église apostolique, et ce caractère doit être celui de l’Église de Jésus-Christ dans tous les temps.
Il n’a pas manqué à la foi du grand apôtre. Au moment même où il parlait de son prochain martyre, et où il allait entrer dans le paradis, il avait les yeux fixés sur le grand jour du retour du Seigneur. (2Tim. IV, 8.)
Et maintenant n’admirerons-nous pas que, dans un sujet si délicat, et où l’erreur était si facile, les écrivains inspirés, bien loin d’égarer l’Église, comme on le leur a reproché, par des enseignements que l’événement aurait démentis, aient su lui révéler ce qu’elle devait connaître, lui cacher ce qu’elle devait ignorer, et, tout en lui montrant la vérité relative, qui est une partie de la vérité, la tenir en présence de la vérité absolue, qui est la vérité de la vérité, l’aliment substantiel de la foi?
Et nous étonnerons-nous que St. Paul, précisément sur ce point, se soit solennellement réclamé de «LA PAROLE DU SEIGNEUR?»
H. BIAUDET-CLÉMENT.
Le chrétien évangélique 1858
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