Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

CHAPITRE VII.

Dans quel esprit doit-on lire la Bible?

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«Prenez garde comment vous écoutez,» disait le Seigneur à ses disciples (Luc, VIII, 18.). Prenez garde aussi comment vous lisez II ne suffit pas, pour être converti et sanctifié par la Bible, de la lire: il faut la bien lire.

Plusieurs manquent à ce devoir, et s'étonnent ensuite des grands effets qu'on attribue à l'étude de la Parole sacrée. Il y a longtemps que nous la lisons, disent-ils, et elle nous laisse toujours à peu près dans le même état spirituel. Ce que la Bible fait pour les autres, si l'on doit vous en croire, pourquoi ne le fait-elle pas pour nous?

C'est que vous la lisez mal. La bonne semence est dans l'Évangile; elle y est la même pour tous; le maître de la moisson est disposé à la répandre dans le cœur de tous: seulement il y a diversité de terrains, et l'on comprend ainsi comment elle porte du fruit dans l'un, et non dans l'autre. C'est le Seigneur qui nous l'explique dans la parabole du semeur (Matth., XIII, 3-23.).

Une pieuse disposition d'esprit est si nécessaire dans cette étude qu'elle nous fait trouver en quelque sorte une Bible toute nouvelle. Un homme du monde, étant entré dans une église, entendit lire deux ou trois chapitres du Nouveau-Testament. Il fut étonné de ce qu'il entendait.

Ce n'est pas là ma Bible, pensa-t-il en lui-même; je n'y ai jamais rien vu de semblable; le lecteur n'y a-t-il pas ajouté de son chef les passages dont j'ai été frappé? — Il retourne chez lui, prend sa Bible, et y voit, sans un mot de plus ni de moins, tout ce qui l'avait si vivement ému dans le temple. D'où venait la différence? C'est que, dans sa maison, il avait lu l'Écriture d'un œil distrait, sans recueillement, sans prière, et que dans la maison de Dieu, il avait prié et écoulé sérieusement.

Pour savoir dans quel esprit il faut lire la Bible, rendons-nous bien compte de l'objet que nous devons nous proposer en la lisant. Cet objet se réduit à deux points: connaître la vérité et y obéir. Jésus les a réunis dans cette déclaration: «Si vous savez ces choses, vous êtes bienheureux, pourvu que vous les fassiez (Jean, XIII, 17.)

Or, tant que nous sommes abandonnés à nos seules forces naturelles, nous ne pouvons remplir ni l'une, ni l'autre de ces conditions. Quoique la Bible soit généralement claire dans les choses de doctrine et de morale, comme nous l'avons déjà prouvé, nous sommes incapables d'en avoir sans le secours de Dieu cette intelligence vraie et spirituelle, qui seule constitue pour nous la connaissance de la vérité; et lors même que nous en saisirions quelque chose, notre cœur ne voudrait pas y obéir. Il résulte de là que notre premier devoir, pour lire avec fruit la divine Parole, c'est de prier.

Un moine, nommé Fulgence, prêchant sur cette question de Pilate: Qu'est-ce que la vérité? prit un Nouveau-Testament, et, le montrant à ses auditeurs, s'écria: La vérité est ici, mes frères. Mais, ajouta-t-il avec tristesse, en remettant le Nouveau-Testament où il l'avait pris, c'est un livre fermé. — Oui, ce moine parlait juste, la Bible est fermée pour quiconque prétend la lire sans implorer la grâce d'en haut. Mais non, elle n'est pas fermée pour celui qui prie. La prière fait mouvoir la main puissante qui détache les sceaux de la Bible, et nous en ouvre les trésors.

Que pourrions-nous voir sans le soleil? En vain l'univers serait plein des œuvres les plus merveilleuses, en vain nous aurions en nous-mêmes l'organe de la vue: tout serait plongé pour nous dans les plus profondes ténèbres. Il en est ainsi de la Parole de Dieu. Elle est pleine de révélations excellentes, et nous avons des facultés intellectuelles qui doivent nous aider à les discerner. Mais nous ne le pouvons que lorsque le Saint-Esprit, soleil du monde moral, se lève dans notre âme. C'est l'apôtre saint Paul qui nous fournit cette comparaison: «Dieu qui a dit que la lumière resplendît des ténèbres, écrivait-il aux Corinthiens, est celui qui a relui dans nos cœurs pour manifester la connaissance de la gloire de Dieu qui se trouve en Jésus-Christ (2 Cor., IV, 6.)

Rappelez-vous la prière du Psalmiste: «Dessille mes yeux, afin que je regarde aux merveilles de ta loi;» et celle de l'Apôtre pour les Éphésiens, afin que Dieu illuminât les yeux de leur entendement. Rappelez-vous les deux disciples sur le chemin d'Emmaüs, Lydie et tant d'autres, qui ne comprirent l'Évangile qu'après que le Saint-Esprit leur eut ouvert le cœur (Ps. CXIX, 18; Ephés., I, 16-18; Luc, XXIV, 45; Act., XVI, 14; etc.).

Avez-vous donc prié, au moment de lire les Écritures? L'avez-vous fait en vous souvenant que votre intelligence est obscurcie par le péché, qu'elle n'a pas en soi la force de connaître salutairement les révélations de Dieu, et que le Père des lumières peut seul la lui donner?

Je demande plus. Avez-vous prié en lisant les Écritures? Pendant que le Seigneur vous parlait, avez-vous parlé vous-mêmes au Seigneur dans de ferventes supplications? Une grande partie de la Bible est composée de prières, et on ne peut les bien lire sans prier aussi, du moins par une courte et vive aspiration, qui s'élève du fond du cœur pour monter jusqu'au trône de l'Éternel.

Avez-vous prié, enfin, après avoir fermé les Écritures? La vérité ne demeure en nous qu'autant que le Seigneur daigne l'y graver de sa propre main; elle n'est puissante qu'autant qu'il l'accompagne de la vertu de son Esprit. Avez-vous donc supplié Celui de qui vient toute grâce excellente, de vous garder par sa Parole dans le temps même où vous en êtes séparés!

Si vous avez pris la Bible comme un autre livre; si vous êtes venus à elle, non avec ce sentiment de pauvreté spirituelle qui nous fait tout attendre de Dieu, mais avec l'orgueil d'un pharisien qui, enflé de sa propre sagesse, ne sollicite pas le Seigneur de lui accorder la sienne, je ne m'étonne pas que la lecture de la Bible ait été stérile pour vous. N'ayant rien demandé, vous n'avez rien pu recevoir.

Gardons-nous de penser, néanmoins, que la prière toute seule, sans aucun effort de notre part, nous fera lire avec fruit les saints livres. Jamais, dans les choses spirituelles, Dieu n'agit envers nous de cette manière. Son intervention ne rend pas la nôtre inutile; elle la suppose tellement, au contraire, que si nous ne sommes pas ouvriers avec lui, il ne sera pas lui-même ouvrier avec nous.

À la prière il faut donc joindre la méditation, par où j'entends, non seulement l'attention de l'esprit, mais celle de l'âme tout entière, qui, se dégageant de ce qui pourrait la troubler, se recueille et se concentre dans la lecture de la Parole sacrée. Voilà le concours de l'homme: concours obligatoire, si l'on réfléchit que c'est Dieu qui s'adresse à nous, et qu'il y a de l'impiété à ne pas lui prêter une sérieuse attention; concours indispensable pour assimiler à notre propre substance, s'il est permis d'ainsi parler, le pain de vie que le Seigneur nous offre dans les saintes Écritures.

Ces deux devoirs se soutiennent et se fécondent réciproquement.

  1. Prier sans méditer, c'est vouloir anéantir sa prière.

  2. Méditer sans prier, c'est prétendre se passer de Dieu.

Dans l'un et l'autre cas, il y a insuffisance.

On a eu raison de le dire: «La prière et la méditation sont comme les deux pieds qui nous font avancer. La méditation nous fait voir ce qui nous manque, et la prière obtient de Dieu qu'il ne nous manque rien.»

Un des plus savants hommes du dix-septième siècle, Jean Selden, s'entretenant quelques jours avant sa mort avec deux dignitaires ecclésiastiques, leur raconta qu'il s'était occupé de presque toutes les sciences humaines, et qu'il possédait des milliers de livres et de manuscrits, mais que, de tous ses livres et de toutes ses études, il n'avait pas autant retiré que d'un seul endroit de la Bible. Et quel était ce passage? Le voici: «La grâce de Dieu, salutaire à tous les hommes, a été manifestée, nous enseignant qu'en renonçant à l'impiété et aux passions mondaines, nous vivions dans ce présent siècle sobrement, justement, religieusement: en attendant la bienheureuse espérance, et l'apparition de la gloire du grand Dieu et notre Sauveur Jésus-Christ, qui s'est donné soi-même pour nous (Tite, II, 11-14.)

Peut-être avons-nous lu vingt fois ces paroles sans y puiser ni lumière, ni encouragement à la vie chrétienne, tandis que Jean Selden, dont la science était supérieure à la nôtre, y trouvait plus que dans tous les volumes de sa vaste bibliothèque. À quoi tient cela? C'est qu'il avait profondément médité sur ce texte, et que nous avons probablement négligé de le faire. La méditation est comme une charrue qui, à mesure qu'elle creuse la terre plus avant, sert à la couvrir d'une plus riche moisson.

Aucun endroit de la Bible ne vous a-t-il frappés de la même manière? Avez-vous pu la lire, page après page, ligne après ligne, sans éprouver le besoin de suspendre votre course pour réfléchir? Ne vous êtes-vous jamais involontairement arrêtés, l'esprit éclairé tout à coup d'un trait de lumière, le cœur pénétré d'une vive émotion, en vous écriant: C'est là que je cherchais?

Que vous dirai-je alors? Vous n'avez pas encore lu la Bible comme vous auriez dû la lire. Vous ne savez pas méditer. L'Écriture est devant vous, mais votre pensée n'est pas devant elle. Vous êtes présents de corps, mais votre âme est errante, loin du Seigneur, loin du livre qu'il a inspiré, dans Ies affaires et les passions du monde. Qu'est-ce donc que votre lecture? Une simple apparence, une fiction vaine. En réalité, vous ne lisez rien: les mots passent sous vos yeux comme des ombres insaisissables, et vous laissent aussi vides qu'avant d'avoir commencé.

Oh! qu'il en serait autrement avec une méditation ferme et patiente! Il n'y a guère de verset qui ne pût vous suggérer d'utiles réflexions. Vous vous diriez: Je suis cet homme-là; voici une réponse à mes doutes; voici un remède pour la plaie de mon âme; cette idée, elle était en moi, mais confuse, et maintenant elle est éclaircie; cette espérance était flottante dans mon cœur, et maintenant elle est assurée. Par ce moyen vous grandiriez sans cesse en lumière, en foi, en sainteté, en ressemblance avec Dieu. Toute votre vie s'y emploierait sans pouvoir épuiser les richesses de la Bible; car plus on y prend, et plus elles surabondent.

Nous savons bien que ce devoir de la méditation est difficile à pratiquer. Notre intelligence est naturellement mobile et inconstante. Elle n'aime pas à se fixer sur un objet pour en atteindre le fond; elle semble même se faire je ne sais quel triste jeu, quand nous voulons l'arrêter sur une idée, de courir vers une autre. Mais demandons l'appui du Seigneur pour lutter avec énergie contre les distractions qui nous viennent assaillir. Ne quittons aucun chapitre, et, s'il est possible, aucun verset, avant d'y avoir trouvé ce qu'il peut nous donner: un nouvel argument contre le mal, un nouveau gage de notre salut, un nouveau motif de faire le bien, une nouvelle source de paix et de consolation. Étudions enfin la Bible comme si elle était écrite pour nous seuls, et nous réaliserons ce vœu de l'Apôtre pour les Colossiens: «Que la Parole de Christ habile abondamment en vous avec toute sorte de sagesse (Col., III, 16.)

Cependant la méditation pourrait encore nous égarer, si le Seigneur n'accordait à nos prières une autre disposition très précieuse pour l'étude des Écritures: un esprit simple, un œil simple, la candeur du petit enfant qui écoute et croit ce que son père lui dit, sans tordre ses paroles, sans y donner péniblement un autre sens que celui qui se présente le premier.

Rien de plus rare, malheureusement, que cette simplicité d'esprit. On vient à la Bible avec un système tout fait d'avance. On appartient à une école, à une secte, et l'on veut à tout prix que les saints livres nous confirment dans nos idées. Au lieu de parler comme le Seigneur, nous prétendons que le Seigneur parle comme nous.

Il résulte de ce renversement des rapports qui doivent exister entre Dieu et l'homme, que non seulement on ne permet plus à la Bible de dire ce qu'elle dit, mais qu'on lui fait dire ce qu'elle ne dit pas. Et, ce qui est le plus déplorable, c'est qu'on le fait souvent à son insu, en croyant être dans le vrai: tant l'homme est exposé à se tromper, quand il accepte le joug d'une opinion humaine, quand il ne va point à Dieu comme un serviteur docile qui veut tout apprendre de lui, et ne rien apprendre que de lui!

Il n'y a pas d'imposture qui n'ait allégué des passages tronqués de la Bible pour s'établir dans la chrétienté; il n'y a même de crime qui n'ait essayé de se justifier par quelque texte de la sainte Parole, en l'arrachant de sa place et en le défigurant. Les apôtres Pierre et Jude signalaient déjà des personnes ignorantes et sans piété, qui tournaient en dissolution la grâce de Dieu, et tordaient les Écritures à leur propre perdition (2 Pierre, III, 16; Jude, 4.). Que diraient-ils aujourd'hui que dix-huit siècles d'interprétations contradictoires ont passé sur la Bible, comme un torrent fangeux et dévastateur?

Quand nous ouvrons le livre du Saint-Esprit, dépouillons-nous donc de tous ces systèmes humains qui se placent entre nous et la vérité. Que l'homme se taise quand Dieu parle!

Imitons les Thessaloniciens dont il est écrit: «Vous avez reçu la parole de la prédication de Dieu; vous l'avez reçue, non comme une parole des hommes, mais ainsi qu'elle est véritablement, comme une parole de Dieu, laquelle aussi agit avec efficace en vous qui croyez (1 Thess., Il, 13.)

Sans aller jusqu'au point de faire violence au texte sacré, pour étayer des impostures et des passions, il y a encore une manière de lire la Bible qui est opposée à cette simplicité d'esprit.

Elle consiste à soulever partout d'interminables questions, et à ne chercher que des sujets de controverse pour y faire briller son talent de dialectique. Prenez les déclarations les plus claires, celle-ci par exemple: «Vous êtes sauvés par grâce, par la foi; et cela ne vient point de vous, c'est un don de Dieu;» ou cet autre passage: «Ne vous conformez point à ce présent siècle (Ephes. II, 8; Rom. XII, 2.);» que de subtilités on va imaginer là-dessus! que de laborieuses distinctions! que d'arbitraires limites on posera de sa propre autorité sur le salut par grâce, par la foi, et sur ce qui est ou non conforme à ce présent siècle! La Bible n'a-t-elle donc été écrite que pour nous faire déployer toutes les ressources d'une argumentation déliée et dissolvante? Autant vaudrait soutenir que l'air nous a été donné, non pour le respirer, mais pour en faire l'analyse chimique.

Ce n'est pas que nous blâmions l'esprit de critique dans l'étude de la Bible. Il peut rendre de bons services, quand on y apporte de pieuses intentions, un jugement droit et une constante sobriété. Mais comprenons bien qu'il doit être toujours accompagné de la simplicité d'esprit. Cette dernière disposition fait même pénétrer la première plus profondément dans la connaissance des Écritures. Comprenons encore que, s'il y a un temps pour s'occuper des questions difficiles de dogme, d'histoire, de prophétie, il y en a un autre pour se nourrir tout simplement de la divine Parole. «Nos facultés mentales sont si bornées, a dit Mme Fry, que du moment où nous commençons à faire de la critique, nous cessons de sentir.»

N'allez pas non plus vous attacher exclusivement à des faits peu connus de l'Ancien-Testament, à des singularités qui sont instructives à leur manière et en leur place, mais qui, étudiées en dehors de tout le reste, ne servent qu'à détourner votre pensée de ce qui est essentiel. Nous avons connu de pareils lecteurs de la Bible. Ils pouvaient réciter, point par point, ce qu'on faisait autrefois dans la Judée, et ne savaient pas ce qu'eux-mêmes devaient faire aujourd'hui! Ils étaient savants dans les annales des juges et des rois d'Israël, mais ne connaissaient rien de leur état de péché, ni de l'économie de la rédemption en Jésus-Christ! Soyez donc plus simples, encore une fois, et cherchez par-dessus tout, avec sincérité et candeur, la vérité qui peut vous convertir et vous sauver.

Mais ce qu'il y a de plus important pour bien lire la Bible, c'est une conscience droite et humble. Nouvelle grâce que nous devons demander au Seigneur.

Les scribes et les docteurs de la loi avaient beaucoup lu la Bible; ils en portaient des passages aux bras et au front sur de larges phylactères; ils la citaient fréquemment, comme nous le voyons dans leurs entretiens avec Jésus et les apôtres. Cependant toute cette science ne leur servit de rien, parce qu'ils étaient justes à leurs propres yeux, et que ce qu'ils cherchaient le moins dans les saints livres, c'est précisément ce qu'ils auraient dû y chercher, ce qu'ils y auraient trouvé avec un cœur plus humble: le pardon de Dieu.

Il en est de même au temps actuel. Ceux qui disent: Quel mal ai-je fait? qu'a-t-on à me reprocher? ne suis-je pas honnête homme? ne puis-je pas comparaître sans crainte devant le tribunal du Seigneur? ceux-là liront en vain les Écritures.

Non, la Bible n'est pas faite pour vous, qui persistez dans la fausse idée de votre propre justice. Elle est placée à une autre extrémité du monde religieux et moral; elle vous parle une langue étrangère.

Entre la Bible et vous il y a un grand abîme, et certes ce n'est pas elle qui le franchira pour se précipiter à votre suite dans une voie d'illusion et de mensonge. Aussi longtemps que vous resterez sur votre terrain, vous ne pourrez ni la comprendre, ni l'aimer.

Suppliez donc le Dieu des miséricordes de mettre en vous un cœur humilié et repentant, qui soupire après le pardon, qui ait faim et soif de la justice. On ne vous verra plus alors prendre la Bible avec une sorte de répugnance, l'ouvrir d'une main distraite, la lire à la hâte, la fermer avec une satisfaction mal déguisée, en un mot faire une œuvre de contrainte pour tromper votre conscience. Vous lirez cette bonne Parole avec amour, avec une sympathie sans cesse renaissante; et, au lieu de considérer cette étude comme un fardeau, vous en jouirez comme d'un privilège. On n'a pas besoin d'ordonner à un fils exilé de lire les lettres de son père, ni a un homme coupable et condamné d'écouter la proclamation d'amnistie de son souverain.

Vous devez solliciter aussi l'esprit d'obéissance. Accomplir ce que Dieu veut, sans dispute, sans réserve et sans partage, c'est une condition fondamentale pour l'intelligence des Écritures, parce que c'est le grand objet pour lequel nous les avons reçues.

«Si quelqu'un veut faire la volonté de celui qui m'a envoyé, dit Jésus-Christ, il reconnaîtra si ma doctrine est de Dieu, ou si je parle de mon chef. Mettez en pratique la Parole, dit l'apôtre saint Jacques, et ne l'écoutez pas seulement, en vous séduisant vous-mêmes par de vains discours (Jean, VII, 17; Jacq., I, 22.).

Cette disposition est si nécessaire que, n'eussions-nous gardé l'esprit de révolte qu'à l'égard d'un seul commandement, cela suffirait pour frapper toute notre lecture de stérilité. Car il faudrait nier ce commandement par quelque sophisme. Une mauvaise raison en exigerait d'autres pour se maintenir elle-même; et, d'erreur en erreur, de résistance en résistance, la force des choses nous pousserait à rejeter toute la Parole de Dieu.

Tenez-vous en garde contre une si fatale expérience. Que votre volonté, quoi qu'il vous en doive coûter dans certaines circonstances, soit entièrement soumise à celle de Dieu, et vous De craindrez plus d'aller à la lumière, et elle vous sanctifiera en vous éclairant. «Celui qui s'adonne à la vérité, dit le Seigneur, vient à la lumière, afin que ses œuvres soient manifestées, parce qu'elles sont faites selon Dieu (Jean, III, 21.).

Cette droiture de cœur vous fera trouver dans la Bible d'innombrables sujets d'application personnelle. Vous les saisirez avec joie, parce que vous aurez l'intention ferme d'en profiter.

Oh! que la Bible est salutaire pour celui qui se pose humblement, sincèrement, devant elle, et s'y contemple sans cesse comme dans un miroir!

Plus d'une fois, un seul passage de l'Écriture, ainsi appliqué à la conscience, a produit des conversions remarquables. Un homme, qui s'est illustré par des poésies religieuses, avait traversé de longues années de doutes et d'angoisses. «Enfin, dit-il, arriva l'heureux jour qui devait briser mes chaînes, et me convaincre de la libre miséricorde de Dieu en Christ. Je m'étais jeté sur un siège dans un état d'abattement difficile à décrire; et, apercevant la Bible. Je voulus encore essayer si elle pouvait me faire quelque bien. Le premier verset que je lus était celui-ci: «Dieu a établi de tout temps Jésus-Christ pour être une propitiation par la foi en son sang, afin de montrer sa justice, par la rémission des péchés précédents, selon la patience de Dieu (Rom., III, 24.)À cette lecture mon cœur fut ouvert, et comme illuminé des rayons d'en haut. Je sentis que Christ avait pleinement satisfait pour mes péchés, que mon pardon était scellé dans son sang, et que la justification qui vient de lui est complète. Tout ce que j'avais entendu auparavant me revint en mémoire, et j'acceptai pleinement l'Évangile du salut.»

Un impie avait arraché un feuillet de sa Bible pour en faire une enveloppe, et allait le mettre en pièces, lorsqu'un de ses amis lui dit: Ne déchire pas cela, c'est une portion du livre qui contient les paroles de la vie éternelle. — L'incrédule, quoique mécontent de ce reproche, replia le feuillet. Quelque temps après il pensa en lui-même: Voyons donc ce que c'est que cette vie éternelle dont ce livre doit nie parler. Il reprit la feuille de sa Bible, et les premiers mots qui lui tombèrent sous les yeux étaient les dernières lignes du prophète Daniel: «Pour toi, va à ta fin; néanmoins, tu te reposeras et demeureras dans ton état jusqu'à la fin de tes jours (Dan., XII, 13.).» Il se demanda aussitôt quel serait son état à la fin de ses jours, s'il ne se convertissait point, et cette sérieuse enquête personnelle sur la déclaration du prophète le conduisit aux pieds du Rédempteur.

Prières continuelles, méditation soutenue, simplicité d'esprit, humilité et droiture de conscience, application de l'Écriture à notre état personnel et à notre conduite: telles sont, en résumé, les conditions d'une bonne et pieuse étude de la Parole de Dieu. Allons à la Bible pauvres et nus, et elle nous couvrira du manteau de la justice de Christ. Demandons-lui tout ce qui nous est nécessaire, et elle nous le donnera. Si notre âme est vide et affamée, elle la rassasiera des biens de la maison de l'Éternel. Si notre pensée est flottante, elle la fixera au rocher des siècles. La Bible fera toutes ces choses pour nous, avec l'efficace du Saint-Esprit; elle en fera même de plus grandes, s'il est possible, mais a cette condition que, renonçant à nos idées présomptueuses, nous acceptions le plan que Dieu a formé pour nous rendre saints dans cette vie, et heureux dans la vie à venir.

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