Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

CHAPITRE II.

Pourquoi la Bible nous a-t-elle été donnée?

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Nous avons vu quels sont les principaux caractères de la Bible, considérée comme Parole de Dieu. Étudions maintenant son contenu de plus près, en répondant à cette grave question: Pourquoi la Bible nous a-t-elle été donnée?

Deux mots suffiraient: le salut éternel de nos Âmes en Christ crucifié, voilà le commencement, le milieu et la fin des Écritures. C'est la grande unité dans laquelle se résume l'inépuisable variété des révélations divines.

La Bible n'est occupée qu'à nous préparer pour le ciel, et cela seul prouverait qu'elle est elle-même venue du ciel. Dans les livres humains, si l'on excepte ceux qui ne sont que des échos affaiblis du volume sacré, qu'est-ce qui tient la première place? Le monde visible, et l'homme envisagé dans son existence présente. Quand les auteurs de ces livres parlent de l'avenir, ils le font en passant, avec hâte et froideur, montrant bien que c'est pour eux une terre inconnue. On remarque le même vice dans tous les systèmes humains de religion. Encore le visible élevé au-dessus de l'invisible; encore l'homme terrestre l'emportant sur l'être immortel. Par un complet renversement d'ordre, ce n'est pas le temps qui s'efface devant l'éternité, mais l'éternité qui s'efface devant le temps.

On a pu l'observer surtout de nos jours. Quel est le premier et le dernier mot de ces prétendues réformes qui s'annoncent avec tant de faste, et qui aspirent à embrasser dans leur conception tout l'homme moral et religieux? N'en est-on pas venu à enseigner que l'exploitation de la matière est notre fin suprême? Triste dégradation de l'humanité! signe trop manifeste de sa déchéance! Au lieu de tourner son regard vers le ciel, l'homme se prosterne devant la poussière, et lui demande sans relâche un bonheur qu'elle ne pourra jamais lui donner.

Mais dans la Bible un autre univers nous apparaît: ce qui était abaissé est relevé, et ce qui était relevé est abaissé.

La vie éternelle reprend la place qui lui est due, et la vie présente n'est que le moyen qui nous y fait parvenir.

Le salut devient quelque chose de si grand qu'il est estimé à un plus haut prix que le monde entier, «Que profiterait-il à un homme, dit le Seigneur, de gagner tout le monde, s'il fait la perte de son âme? Ou que donnerait l'homme en échange de son âme (Marc, VIII, 36, 37.)?» Paroles que Dieu seul a pu prononcer, et dont la Bible n'est, d'un bout à l'autre, que le sublime commentaire.

Cette valeur suprême assignée à la rédemption de l'âme se justifie pleinement devant une intelligence droite et sérieuse; car s'il existe pour nous un avenir infini, et que notre passage sur la terre doive décider si nous y serons heureux ou malheureux, quoi de plus insensé que de nous laisser absorber par les détails de ce court voyage? Et quoi de plus raisonnable que de nous occuper principalement de ce que nous deviendrons au terme de la carrière?

Un homme est dans un pays étranger. Il n'y doit demeurer que deux jours, ou, pour mieux dire, il n'y demeure point: il y passe. Qu'il le veuille ou non, il marche continuellement vers le lieu de son habitation permanente. Une fois arrivé au but, son sort dépendra du chemin qu'il aura suivi. Que va faire ce voyageur? S'attachera-t-il uniquement à rendre sa course commode et agréable? Pourvu qu'il n'endure aucune privation dans sa route, sera-t-il content de lui? Mais ce serait la plus inconcevable extravagance! Deux jours sont si vite écoulés! et dans sa patrie il a de si longues années à vivre! Assurément ce voyageur appliquera toutes les puissances de son esprit, toute la force de sa volonté à entrer dans la bonne voie; et s'il se présente alors un guide qui offre de le conduire en sûreté, avec quelle joie ne se mettra-t-il pas sous sa garde! et combien ne bénira-t-il pas un si généreux bienfaiteur?

Telle est la mission de la Bible. Elle se propose de nous guider vers les demeures célestes. N'accordant qu'une attention secondaire à ce monde où nous ne sommes qu'étrangers et voyageurs, elle nous entretient sans cesse de ce qui nous attend au-delà du tombeau.

Elle nous signale d'avance les adversaires que nous devons rencontrer, et les abîmes où nous serions exposés à périr. Elle nous trace pas à pas, avec une sagesse et une charité admirables, la voie qui mène au bonheur éternel. Et comme nos cœurs sont aisément appesantis par les soucis du voyage, elle nous crie de mille manières, par ses promesses et par ses menaces, au nom de l'amour du Seigneur et au nom de l'avenir de nos âmes: «Ne regardez point aux choses visibles, mais aux invisibles; car les choses visibles ne sont que pour un temps, mais les invisibles sont éternelles (2 Cor., IV, 18.)

En méditant sur ce grand dessein des Écritures, on comprend le mot d'un poète qui, n'ayant emporté que la Bible dans sa solitude, répondait à un ami: «Je n'ai qu'un livre, mais c'est le meilleur.» On comprend aussi la lettre d'une jeune femme, qui envoyait à sa sœur, la veille de sa mort, un Nouveau-Testament: «Ma chère sœur, je vous donne un livre qui vaut mieux que des pierres précieuses. C'est le livre de la loi du Seigneur. C'est le Testament qu'il a écrit pour nous, misérables créatures, et qui peut seul nous diriger dans le chemin de la joie éternelle. Oui, si vous le lisez avec un esprit droit et avec la ferme intention de le suivre, il vous mettra en possession d'une bienheureuse éternité. Il vous apprendra tout ensemble à vivre et à mourir.»

Ce que nous devions d'abord connaître pour sauver nos âmes, c'est le caractère de Dieu. Que saurions-nous, en effet, de notre destinée à venir, sans la connaissance de Celui qui en décide souverainement? Or, dans les Écritures, Dieu nous parle de Dieu en Dieu, selon l'expression d'un pieux écrivain (Quesnel, auteur des Réflexions morales sur le Nouveau Testament.).

La connaissance du caractère de Dieu, cette science des sciences, l'aurions-nous possédée sans la Bible? La nature nous montre bien la grandeur, la puissance et la sagesse du Créateur; mais que nous dit-elle de ses autres attributs, de ceux qu'il nous importait le plus de connaître? Interrogez tout l'univers: y entendez-vous une voix qui réponde à vos doutes et à vos angoisses? La conscience elle-même ne nous révèle pas Dieu tout entier. Elle nous apprend bien, par ses terreurs, que Dieu est un Être juste; mais nous apprend-elle qu'il est miséricordieux? Après avoir crié à l'homme coupable: Le Seigneur doit te punir, lui dit-elle: Il est disposé à te pardonner?

Dieu saint et bon! Dieu de mon âme! je te loue d'avoir daigné te révéler à moi dans ta Parole! Sans elle, je serais errant dans les plus épaisses ténèbres. En vain j'aurais demandé à la terre et au ciel de m'enseigner tes perfections; en vain j'aurais interrogé toutes les facultés de mon être: je n'aurais découvert que des fragments brisés de ta Divinité. Mais avec ta Parole, je te connais, je te possède, et je puis te contempler ici-bas, en attendant d'aller un jour te contempler de plus près dans le royaume des cieux!

Que nous fallait-il encore pour être instruits de la voie du salut? La connaissance de notre propre nature. On serait tenté de croire que la science de l'homme nous est beaucoup plus facile que celle de Dieu; car nous n'avons ici à étudier qu'un être fini, et cet être, c'est nous-mêmes. Qu'y a-t-il pourtant de moins connu à l'homme que l'homme? et sur quel sujet a-t-on imaginé plus de fausses hypothèses, depuis celle du philosophe qui voulait faire de l'être humain presque un Dieu, jusqu'à celle des sensualistes qui en veulent faire presque une brute? C'est que l'homme a peur de se voir tel qu'il est, et cherche toujours à se placer au-dessus ou au-dessous de sa véritable nature. Dans le premier cas, il satisfait son orgueil; dans le second, il se délivre de sa responsabilité.

La Bible seule nous a montré l'homme naturel dans toute sa nudité morale. Elle nous apprend que, déchu de son innocence primitive, il est maintenant asservi au péché. Cette déclaration est solennellement répétée dans les Écritures, d'espace en espace, pour nous bien convaincre que notre nature ne change pas en traversant les siècles.

Et qui peut douter que s'il apparaissait un nouvel envoyé de Dieu, après les dix-huit siècles écoulés depuis saint Paul, il ne portât le même jugement sur le caractère de l'homme? Ni les révolutions des empires, ni les progrès des sciences et de la civilisation ne produisent en lui de changement radical. Ce que l'homme était au jour de la chute, pauvre, aveugle, misérable, et nu; ce qu'il était au temps d'Abraham , de Moïse, de Daniel, et de Jésus-Christ, se retrouve, trait pour trait, dans notre génération, en sorte que la Bible, en nous faisant voir notre état naturel, est un livre à la fois toujours ancien et toujours nouveau.

Mais la peinture de notre misère, si frappante qu'elle soit dans la divine Parole, ne nous précipite pas dans le découragement, parce qu'elle y est accompagnée de la vue des miséricordes du Seigneur.

L'abîme est d'un côté, mais de l'autre est la main secourable qui veut nous en faire sortir. Lisez donc les livres saints pour vous bien connaître; lisez-les pour pouvoir vous connaître sans vous désespérer. «C'est une des merveilles de la religion chrétienne, a dit Pascal, de réconcilier l'homme avec soi-même en le réconciliant avec Dieu, et de lui rendre la vue de soi-même supportable.»

Le troisième objet qui devait entrer dans la science du salut, c'est la loi du Seigneur. Qu'est-ce que Dieu nous ordonne de faire pour atteindre notre dernière fin? Grande question à laquelle, de nous-mêmes, nous n'aurions pu répondre que très incomplètement.

La loi civile ne s'inquiète que des besoins passagers de l'ordre social, et ne peut pénétrer jusqu'aux intentions: elle ne renferme donc qu'une petite partie de nos devoirs.

La loi de la conscience, plus étendue que la loi civile, et plus étroitement unie aux idées religieuses, ne suffit pas encore: une déplorable et constante expérience l'a trop bien prouvé. Quel est le vice que cette loi intérieure n'ait pas autorisé, sous l'influence de l'égoïsme national ou individuel? quel est le crime que l'homme n'ait pas réussi à justifier devant son propre tribunal? Ceux mêmes qui ont pris le nom superbe de sages ou de philosophes, que de fausses vertus n'ont-ils pas vantées! que de vertus réelles n'ont-ils pas méconnues!

Regardez-y attentivement: personne dans l'humanité n'était capable de nous enseigner nos véritables devoirs. Car l'homme étant toujours juge et partie quand il dresse le catalogue de ses obligations, est sans cesse entraîné à faire fléchir la loi morale devant ses passions ou ses intérêts. Dieu seul a pu nous la révéler entièrement, parce que seul il est juge sans être partie, et qu'il a en lui-même la règle absolue de la sainteté.

Aussi l'a-t-il fait, et ses commandements, tracés d'abord sur des tables de pierre, le sont aujourd'hui d'une manière encore plus ineffaçable dans les feuilles de son Livre disséminé d'une extrémité du monde à l'autre. Nul pouvoir humain ne saurait en retrancher un trait de lettre jusqu'à la consommation des temps.

La loi de Dieu est universelle, dans le sens le plus étendu de l'expression. Elle s'adresse à toutes les créatures raisonnables, de tous les siècles, de toutes les conditions intellectuelles et sociales.

On n'a jamais trouvé d'homme si barbare qui n'ait pu se l'appliquer, ni d'homme si éclairé qui n'ait dû s'en servir.

Et non seulement elle embrasse tous les hommes, mais tout l'homme, raison, cœur, conscience, volonté, vie intérieure et extérieure. Elle vient le prendre au berceau, le suit jusqu'à la tombe, l'accompagne au séjour éternel, et monte sur le tribunal du Seigneur pour le juger.

La loi de Dieu est sainte. Point d'accommodement d'aucun genre avec le péché; point de concession pour le mal. Si le Père se réserve de pardonner à certaines conditions, le Législateur est inflexiblement juste, et devait l'être. En nous mettant devant les yeux l'idéal de la sainteté, la loi nous fait découvrir par le contraste la profondeur de notre misère, et nous arrache à la fatale sécurité qui nous endormirait dans les liens de l'iniquité et de la mort. «Nous savons, écrivait saint Paul aux Romains, que tout ce que la loi dit, elle le dit à ceux qui sont sous la loi, afin que toute bouche soit fermée, et que tout le monde soit coupable devant Dieu (Rom., III, 19.)

La loi de Dieu est parfaite. On rapporte qu'un savant jurisconsulte fut conduit à reconnaître la divinité des Écritures par la simple méditation du Décalogue. Il s'était longtemps obstiné dans son incrédulité, malgré les exhortations d'un ami fidèle. Celui-ci revenant un jour le voir, le jurisconsulte lui dit avec effusion de cœur: Je suis chrétien.

Que s'est-il donc passé? demanda son ami, aussi étonné que réjoui de cette nouvelle.

Puis viennent nos devoirs envers le prochain, continua le jurisconsulte, et la seconde table n'est pas moins admirable que la première.

Le Décalogue est donc parfait. Tout y est renfermé dans le moins de mots possible; tout y est excellent et incomparable: rien de trop, rien de trop peu. Certainement, le Décalogue n'est pas une œuvre d'homme; il n'a pu sortir que des mains du Seigneur. Mon ami, je ne doute plus: je crois!

Cependant, la seule révélation de la loi n'aurait, selon le témoignage d'un apôtre, été que le ministère de la condamnation (2 Cor., III, 9.). Nous y aurions trouvé notre arrêt de mort, non le gage de notre délivrance, puisqu'elle déclare maudit quiconque n'observe pas à toute la loi, et que cette entière obéissance nous est impossible.

Pour être le livre du salut, la Bible devait nous indiquer une voie de pardon et de réconciliation avec Dieu. Elle l'a fait, en nous annonçant Jésus-Christ, Dieu manifesté en chair, livré pour nos offenses, et ressuscité pour notre justification. Tout est plein de Christ dans les Écritures, parce que tout y est plein de notre salut éternel.

L'Ancien-Testament offre partout, à qui sait le lire avec l'œil de la foi, des types et des prophéties qui annoncent la venue du Rédempteur. Dans les premiers temps cette grande figure semble couverte d'un voile, qui se lève par degrés, et laisse voir successivement chacun des traits divins dont elle est formée. Le Christ est dans cette parole de l'Éternel que la semence de la femme briserait la tête du serpent. Il est dans la promesse faite à Abraham, que toutes les nations de la terre seraient bénies en sa postérité. Il est dans les sacrifices de la loi mosaïque, qui n'avait que l'ombre des biens à venir. Il est dans les épreuves et dans les joies du peuple d'Israël, dans les saintes effusions du Psalmiste, dans les écrits des Prophètes qui, rendant par avance témoignage, déclaraient les souffrances qui devaient arriver à Christ, et la gloire qui les devait suivre. (Gen., III, 15; XXII, 18; Héb., X, 1; 1 Pierre, I, 11.)

Enfin, au temps marqué, la Parole qui était au commencement avec Dieu, et qui était Dieu, vient habiter avec nous; elle est pleine de grâce et de vérité. Jésus se déclare avec puissance Fils de Dieu par ses miracles, par l'accomplissement des prophéties, par l'autorité de ses discours, par sa charité, par sa sainteté infinie. Il est lui-même la loi vivante. Il prend les plus doux noms pour nous attirer à lui, il s'appelle notre frère, notre ami, l'époux, le bon berger. Il va de lieu en lieu en faisant du bien, et nous donne le bien suprême par sa mort. «Il a souffert pour les péchés, lui juste pour les injustes, dit saint Paul. Il nous a rachetés de la malédiction de la loi, quand il a été fait malédiction pour nous (Gal., III, 13; Jean, I, 1-14; XX, 17; XV, 14; Matth., lX, 15; Jean, X, 11; 1 Pier., III, 18.)

Telle est la doctrine du Nouveau-Testament sur le Dieu-Sauveur; c'est la bonne nouvelle; c'est le salut. Notre œuvre, à nous, est de l'accepter, d'y croire par l'efficace du Saint-Esprit qui nous est promis dans cette même Parole.

Nul autre Évangile que celui-là, ni sur la terre, ni dans le ciel; point d'autre délivrance, ni dans la vie, ni dans la mort, ni dans les profondeurs de l'enfer, ni dans les insondables compassions de Dieu. Rien hors de Christ; mais en Christ tout est accompli.

Lorsque je viens à méditer sur cette délivrance gratuite que le Sauveur nous a acquise par sa mort, deux choses m'étonnent presque également: la grandeur du sacrifice de Jésus, et la grandeur de l'aveuglement des hommes qui refusent de croire à l'Évangile. Qui pourra concevoir tout ce qu'il a fallu d'amour pour faire descendre le Fils de Dieu de la hauteur des cieux jusqu'à notre condition terrestre, et de cette condition même jusqu'à l'ignominie de la croix? Et qui pourra concevoir aussi tout ce qu'il faut d'endurcissement et de folie pour mépriser un si grand salut? Double abîme devant lequel notre esprit se confond!

Le Seigneur et sacrificateur de la nouvelle alliance, qui est avant toutes choses, et par qui toutes choses subsistent; celui qui remplit le ciel de sa gloire infinie, et que nous retrouvons partout dans les saintes Écritures, ne sera-t-il donc absent que de nos cœurs? Et n'apprendrons-nous jamais à lui dire avec les Apôtres: «Seigneur, à qui irions-nous? Tu as les paroles de la vie éternelle (Jean, VI, 68.)

Je me souviens d'avoir lu qu'un homme, ayant senti l'amertume du péché et la redoutable responsabilité qui pesait sur lui, chercha de toute son âme les moyens de s'en affranchir. Les larmes de la repentance coulèrent longtemps de ses yeux, mais elles ne lui donnèrent point de repos; une voix secrète lui disait que pleurer ses fautes, ce n'est point les effacer. Toujours plus abattu, il s'impose de cruelles mortifications; il jeûne, il se meurtrit; il passe de longues nuits, les mains jointes, le front prosterné. Son corps s'épuise, mais la paix ne rentre pas dans sa conscience; il comprend trop bien que ses péchés ne peuvent être expiés par une créature aussi indigne que lui. Pour apaiser le cri de son angoisse, il fait les plus généreux sacrifices; il aide à bâtir des églises, il s'en va lui-même au chevet des malades, et en prend plus de soin qu'un enfant ne ferait de sa mère. Sa charité était si grande que les malheureux s'adressaient à lui dans toutes leurs peines. Mais l'infortuné reste accablé sous le poids du remords. S'il goûte quelque joie en voyant ses frères soulagés, il n'a pas encore cette paix à laquelle il aspire: la justice de Dieu se dresse toujours devant lui menaçante et terrible.

Que fera-t-il? Il a usé de tous les moyens humains, et aucun n'a guéri la profonde plaie de son cœur. Lui faudra-t-il descendre au sépulcre avec son désespoir?

Enfin, il trouve la Bible. Jusqu'alors il savait à peine qu'il y a une Bible dans le monde! II la lit sans en attendre beaucoup; après tant d'amères déceptions, il avait presque perdu la dernière consolation des misérables, celle d'espérer. Mais qui peindra les émotions dont il est saisi, quand il découvre dans les Écritures la doctrine de la rédemption gratuite par la foi au sang de Christ?

Il s'étonne d'une si grande miséricorde: c'est trop de grâce! trop d'amour! N'ayant vu le Seigneur que sous l'aspect d'un juge irrité, son pauvre cœur devait, par degrés, s'accoutumer à le voir comme un père qui se réjouit de pardonner. Mais sur toutes les pages de l'Évangile, c'est le même Dieu d'amour. Ses doutes se dissipent; il s'approche de Christ crucifié, et la paix descend sur lui comme un fleuve. Ah! j'avais soif de cette eau vive, s'écrie-t-il, et maintenant je n'ai plus soif!

Il continue à faire des œuvres de charité, mais dans un tout autre esprit qu'auparavant. Ce n'est plus un débiteur inquiet qui calcule, à chacune de ses actions, si son créancier daignera la recevoir en paiement d'une partie de sa dette. Ce n'est plus un esclave tremblant qui se demande, à chaque pas, s'il satisfait aux exigences de son maître, et qui craint le châtiment de ses fautes bien plus que ses fautes mêmes.

C'est un fils qui est joyeux d'obéir, parce qu'il est heureux d'aimer. Il ne compte pas avec son Père céleste, parce qu'il sait que son Père ne compte pas non plus avec lui. À en juger par les apparences, on croirait qu'il fait les mêmes choses; en réalité, tout est nouveau: le principe, les sentiments, la volonté, les actes, la vie. Étant à Christ, il est une nouvelle créature; voici, toutes choses en lui sont faites nouvelles (2 Cor., V, 17.).

C'est le dernier point qui devait entrer dans l'économie de notre salut, et auquel aboutissent tous les autres: la sanctification.

La Bible nous en indique la nature, les conditions, les moyens, et ne cesse de nous y ramener. Elle nous annonce que sans la sanctification personne ne verra le Seigneur; elle veut que nous soyons saints parce que Dieu est saint, parfaits comme notre Père qui est aux cieux est parfait, et nous ordonne même de nous abstenir de toute apparence de mal (Héb, XII, 14; 1 Pierre, I, 16; Matth., V, 48; 1 Thes., V, 22.).

Sagesse et profondeur du plan de la rédemption! La loi nous conduit à Christ par le sentiment de nos iniquités, et ensuite Christ nous reconduit à la loi par le sentiment de ses compassions. En nous délivrant de la peine du mal, l'Évangile augmente l'horreur qu'il nous doit inspirer, et personne ne fait plus de bonnes œuvres, ou plutôt ne fait d'œuvres véritablement bonnes, que celui qui croit d'une foi bien assurée qu'il est justifié gratuitement par grâce, selon l'énergique langage de l'Écriture (Rom., III, 23.).

Pour l'incrédule c'est une contradiction; pour le croyant c'est une vérité doublement certaine; car elle repose sur le témoignage de Dieu et sur son témoignage intime.

Mais par quelle voie mystérieuse, ce qui paraît contradictoire à la pensée humaine, devient-il un dans le système évangélique? Sondez les Écritures, et vous l'apprendrez. Le Saint-Esprit qui est la grande promesse du Nouveau-Testament, comme le Messie l'est de l'Ancien, nous donne la foi, et avec la foi l'amour de Dieu. Dès lors, la volonté est elle-même transformée; car qu'est-ce que la volonté? C'est l'amour qui prend un parti, après avoir triomphé de toutes les affections opposées. Nous voulons toujours ce que nous aimons d'un amour supérieur à tout le reste; et si l'amour de Dieu domine réellement en nous, il est évident que nous voudrons ce que Dieu veut.

Pour aller jusqu'au bout, quand la volonté est renouvelée, elle renouvelle la vie; car elle est le moteur auquel toutes les facultés de l'âme et toutes les forces du corps obéissent. Quand la foi en Christ est plantée dans un cœur d'homme par le Saint-Esprit, elle produit donc un autre homme tout entier.

Voilà le divin système du salut, tel qu'il nous est enseigné dans les Écritures. Voilà ce qui faisait dire au grand Newton: «La Bible contient la plus sublime philosophie;» et à Schelling, le premier des penseurs de notre époque: «La Bible contient l'universalité des choses.»

Les questions simplement curieuses sont laissées en dehors des écrits inspirés, parce qu'elles n'auraient fait que nous distraire de ce qui est essentiel; mais les questions vitales y sont éclairées de la plus vive lumière. Tout est renfermé dans un livre de médiocre étendue, et cette brièveté même est un bienfait de plus. Tandis que la collection des lois humaines, ne fût-ce que pour un seul pays et dans une seule période, exigerait d'immenses recueils, toutes les lois du royaume des cieux ne dépassent pas la mesure d'un volume qu'on peut lire dans le cours d'une année.

Nous savons maintenant pourquoi Dieu nous a donné la Bible; et si quelqu'un demandait encore ce qu'elle vaut, je lui demanderais à mon tour: Sans la Bible, où en serions-nous?

Supposez, pour un moment, que la Bible ne nous ait jamais été donnée: quel vide effroyable! Les hommes, placés au bord de l'abîme, sentent leurs genoux trembler et leur cœur défaillir. Ils cherchent la vérité, et ne rencontrent que le doute. Rien n'est absolument vrai pour eux, ni absolument faux.

Plus de remède, plus de bonne nouvelle à offrir aux âmes angoissées: la mort est seule chargée de résoudre le terrible problème de notre avenir. Et nous n'avons parlé que de l'absence des biens spirituels! Que serait-ce encore si, nous rappelant l'histoire du monde ancien, nous tracions le tableau des désordres qui régneraient dans le monde:

Quel vaste amas de misères, au-dessus desquelles planerait la grande misère de l'homme, celle dont par lui-même il ne peut s'affranchir à aucun prix: son état de déchéance et de condamnation devant Dieu.

Gloire donc au plus haut des cieux et sur la terre, gloire et actions de grâces te soient rendues, à toi, Seigneur, qui nous as donné ta Parole pour être une lampe à nos pieds et une lumière à nos sentiers!


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