Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

CHAPITRE II.

DE LA NATURE DES PEINES À VENIR, ET DE LEURS DIVERS DEGRÉS.

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L'Écriture nous dépeint les peines à venir, principalement sous l'image d'un feu dévorant, ou de flammes éternelles, ces flammes étant placées dans un lieu particulier, que l'Écriture appelle I’étang ardent de feu et de soufre. (Math, XXV, 41; Apoc. XIX, 20.)

Ailleurs, elle use de la comparaison d'un ver qui ne meurt point. (Marc IX, 44.)

Ailleurs, ce sont des coups dont les méchants seront battus, les uns plus, les autres moins. (Luc XII, 47.)

Ailleurs, les ténèbres du dehors (Mat. VII, 12), et des chaînes d'obscurité (Jude 13), où il y aura des pleurs et des grincements de dents (ibid.);

Ailleurs, le méchant boira du vin de la colère de Dieu (Apoc. XIV, 10);

Ailleurs enfin, et sous diverses expressions générales, c'est la simple réjection de la présence de Dieu; sans autre image: «Je ne vous connais pas.» (Mat. XXV, 12.)

Pouvons-nous, d'après ces déclarations, nous faire une idée tant soit peu précise de l'état futur des réprouvés? Évidemment l'intention de l'Écriture est de nous donner celle d'un affreux malheur, d'un malheur irréparable.

Mais quel genre de malheur?
Ce serait être bien futile que de poser cette dernière question par simple curiosité; mais on peut le faire sérieusement.
Dès que nous voulons réellement croire, il faut bien que nous nous fassions une idée quelconque de ce qu'il s'agit de croire: sans cela, tout en nous imaginant avoir la foi sur tel point donné, nous n'aurions que des idées vagues, et faibles à proportion, ou même que des idées fausses, prises à la hâte dans la crainte de pousser l'examen jusqu'à une vaine indiscrétion. Notre recherche est donc la conséquence nécessaire d'une foi sérieuse et respectueuse aux Écritures, lesquelles veulent que nous fassions effort pour les comprendre, autant du moins que la chose est possible.


Or, dès que nous entrons dans cet examen, la première question qui se présente à nous c'est de savoir si nous devons, si même nous pouvons prendre les expressions que nous venons de citer, dans leur sens littéral, ou s'il faut n'y voir que des expressions figurées, les plus propres sans doute à exciter l'impression que l'Écriture veut produire en nous touchant les peines réservées aux méchants, mais cependant de simples figures. Et il semble qu'il ne peut y avoir de doute à ce sujet, ne fût-ce qu'à raison de l'incompatibilité de quelques-unes de ces figures entre elles, si nous les prenons à la lettre. Sera-ce un ver rongeur, ou des flammes, ou des coups, ou des douleurs d'une nature plus morale, des grincements de dents, ou un simple bannissement hors de la présence de Dieu, suivi de conséquences dont on ne nous dit pas la nature?

Ce genre de réflexions semble d'autant plus naturel que la plus fréquente des images employées, celle des flammes de la géhenne, semble à elle seule déjà incompatible avec la doctrine si positive des degrés divers de sévérité dont les méchants seront punis, suivant leur plus ou moins de désobéissance et de méchanceté. Il semble en outre que la nature spirituelle des êtres et des choses dont il s'agit dans toute cette question, suppose que les douleurs, comme aussi les joies de l'autre vie, seront, non pas exclusivement, mais principalement des douleurs ou des joies morales. Sans doute nous aurons dans l'autre économie un corps aussi bien qu'une âme; mais il semble inévitable que, le péché étant de sa nature un acte où l'âme entre pour partie principale, les souffrances qu'endurera le réprouvé doivent aussi être des souffrances d'une nature semblable. Du reste l'Écriture même nous le dit: les pleurs, cette chose terrible, les pleurs et les grincements de dents ne proviendront sûrement pas de coups reçus ou de brûlures matérielles; le ver qui ne meurt point ne sera pas une morsure sur le corps, mais la suite de remords; et sans rejeter l'idée des souffrances plus matérielles, qui sont la suite presque infaillible du péché, même dans ce monde-ci, nous devons croire que le malheur de l'impie et du méchant sera, avant tout, un regret immense de l'âme et la séparation de Dieu à jamais.

Ces pensées s'imposent surtout à nos esprits avec puissance, lorsque nous revenons à la considération, tout à l'heure indiquée, des nuances sans nombre que présentent les dispositions morales des hommes, et tout particulièrement cette classe innombrable d'hommes que nous osions traiter de zoophytes, ces pauvres créatures qui semblent végéter à moitié chemin entre le bien et le mal, entre le ciel et l'enfer, dont la vie s'emploie tout entière à gagner leur vie, sans rien faire d'autre de cette même vie. Sont-ils méchants? sont-ils bons? Lecteurs pieux et croyants, sortez de l'abstraction; et, sans prétendre rien décider, mais en laissant parler simplement votre conscience chrétienne, dites-nous ce que vous pensez de tel être que vous avez sous les yeux, riche ou pauvre, instruit ou ignorant, vieillard simple, ou bonne jeune fille sans connaissance aucune de l'Évangile, sans élévation de caractère, peut-être, mais sans malice aussi, patient, complaisant, pacifique! Comment les classerez-vous?

Nous avons connu un vieillard de 80 ans qui désirait devenir membre d'une société religieuse à principes très prononcés, mais qui ne savait trouver chez lui un seul péché dans toute sa vie, «si ce n'est, peut-être,» ajouta-t-il, comme on le pressait sur ce point, «d'avoir tiré sur l'ennemi pendant que j'étais au service militaire!» Est-ce que ce pauvre mouton semblait bien fait pour aller chanter dans le ciel avec les séraphins? Est-ce qu'il comprenait le premier mot à la rédemption? Est-ce qu'il avait subi la nouvelle naissance, sans laquelle personne ne verra le royaume des cieux?... Et d'un autre côté, est-ce qu'il semblait fait pour aller brûler éternellement, à jamais, sans fin, et sans cesse avec des pleurs et des grincements de dents, dans l'étang ardent de feu et de soufre?

Ce sont là les graves questions que soulève ce sujet quand on veut bien l'examiner, non avec une machine théologique, mais avec sa conscience, la conscience, disons-nous, d'un fidèle, d'un vrai croyant.

Peut-être nous demandera-t-on alors ce que sera, d'après les vues que nous exposons ici, la manière d'être des hommes bons ou méchants dans l'autre vie? Mais ce serait nous demander plus qu'il ne nous est révélé. Toute notre conclusion sur ce sujet, c'est:

1° qu'il est probable au plus haut degré que si nous devons respecter profondément les expressions dont s'est servie l'Écriture pour nous faire trembler sur le sort de ceux qui, dans la vie présente, négligent les avertissements de l'Évangile, il n'en reste pas moins très probable que ces expressions ne sont que des figures, (quoique les plus justes possibles), pour nous peindre combien «c'est une chose terrible que de tomber entre les mains du Dieu vivant;»

2° qu'il y aura des nuances infinies de degrés entre les douleurs d'un méchant et celles d'un autre; tout comme entre le développement plus ou moins glorieux des bons, puisque, encore une fois, «chacun recevra selon ce qu'il aura fait en son corps, soit bien, soit mal.» Ce sont les déclarations positives de notre Sauveur, et de l'apôtre le plus éminent du salut par grâce. (Math, XXV, et II Cor. V, 10.)

Ce que nous pourrions encore ajouter sur ce point va se trouver dans les pages qui suivent, où nous abordons la grande question de l'éternité des peines.

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