Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

Discours sur le Culte domestique

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La vraie piété est un principe qui porte l'homme à honorer Dieu en toutes choses. Ce principe influe sur lui au-dehors et dans l'intérieur de sa maison, en société, comme dans la solitude, dans les occasions ordinaires, comme dans les occasions extraordinaires.

Ce principe porte le Chrétien à donner des soins religieux à l'instruction de sa famille, et en cela, il manifeste non seulement la disposition de son âme à y maintenir ses sentiments de dévotion, mais encore la sagesse de son jugement. Tout homme sage reconnaît la nécessité d'un plan de gouvernement domestique, pour empêcher que sa maison ne tombe dans un état de confusion et de misère: et le Chrétien ne peut atteindre ce but plus sûrement qu'en engageant chaque membre de sa famille à sentir la force de ces mêmes principes, dans lesquels il a puisé pour lui-même ses dispositions à la sainteté et le sentiment de son bonheur.

Les personnes animées d'une vraie piété pourront aisément conformer leur plan de conduite à cette idée générale, Elles pourront varier dans les moyens à employer, mais elles n'ignoreront pas qu'il existe une coutume sainte et d'une haute antiquité, pratiquée dans tous les temps, pour maintenir le bon ordre dans leurs maisons, cette coutume c'est l'exercice régulier du culte religieux.

Les raisons pour maintenir une religion de famille sont faciles à présenter; elles s'offrent si naturellement à l'esprit d'un Chrétien réfléchi, qu'il semblerait superflu de s'y arrêter.

On ne pourrait supposer qu'un homme nourri des saintes Écritures, et qui prend intérêt au bonheur temporel et éternel de ceux qui sont confiés à ses soins, ne fut pas convaincu qu'il est de son devoir d'adorer Dieu dans le sein de sa famille.
Pour un tel homme, l'approbation que Dieu donna à la conduite d'Abraham, peut être envisagée comme un commandement exprès. «Je le connais et je sais qu'il commandera à ses enfants, et à sa maison après lui, de garder la voie de l'Éternel pour faire ce qui est juste et droit.»
 Gen. XVIII. 19. En effet, n'est-il pas raisonnable d'honorer Dieu dans une petite société, qui reçoit de lui toutes les jouissances qu'elle goûte?

Il y a des bienfaits de Dieu répandus sur des familles, et que tous ses membres partagent également; n'est-il donc pas convenable, et bienséant, que tous ses membres se réunissent pour adresser ensemble leurs hommages à leur commun protecteur et bienfaiteur?

Un rassemblement journalier pour adorer l'Être Suprême est d'une grande influence pour procurer les plus heureux effets, en perfectionnant la conduite des domestiques. En invitant fréquemment l'attention d'une famille à des idées religieuses, on parvient à imprimer dans l'esprit de ses membres l'idée de l'autorité de Dieu et de la dépendance où nous sommes de sa Providence, on présente ainsi à leur esprit la Religion, non comme un devoir d'occasion, mais comme une obligation de chaque jour. L'habitude de lire constamment les saintes Écritures, d'implorer fréquemment le pardon de ses péchés, de solliciter le secours divin, pour nous aider à nous conduire raisonnablement envers Dieu et envers les hommes, laisse imperceptiblement dans l'âme la connaissance des devoirs que nous avons à remplir envers Dieu, envers nos semblables et envers nous-mêmes.

Nous voyons aussi que là où les familles sont assujetties à une règle religieuse, on y sent mieux la différence du juste et de l'injuste, et quoique des passions vicieuses s'y montrent occasionnellement, elles n'y manifestent pas un caractère de violence qui secoue toute espèce de frein, les heureux effets de l'instruction religieuse et du culte particulier se laissent apercevoir dans le caractère comme dans la conduite des domestiques, au milieu même de leurs imperfections.

D'un autre côté, on aperçoit une déplorable ignorance de toute obligation morale dans les familles où les instructions et les dévotions domestiques sont étrangères, et on ne saurait être surpris d'y entendre généralement des plaintes sur la conduite des domestiques, car quel soin prend-on dans ces familles de les instruire de leurs devoirs? Ne serait-il pas déraisonnable d'attendre que des hommes chez qui on n'inculque point la crainte de Dieu par des préceptes ou par de bons exemples, fussent toujours prêts à obéir à des hommes?

Lors donc que nous ne consulterions que notre bien-être et notre bonheur domestique, nous ne pourrions mieux l'obtenir qu'en marchant sur les pas de ces saints hommes, dont les maisons étaient sanctifiées par un culte domestique et journalier. La paix et le bonheur sont si souvent altérés par des domestiques négligents, paresseux, infidèles, débauchés, qu'on devrait compter comme un grand bienfait, tout remède à un mal aussi fâcheux et qui s'accroît de jour en jour. Mais on ne saurait se flatter de déraciner ce mal, que par le rétablissement de la piété de nos pères, et le renouvellement des instructions religieuses et d'un culte régulier dans l'intérieur de nos maisons.

Nous pouvons présenter encore une considération d'un grand poids, c'est l'attention que nous devons apporter au bien-être de la société en général, et qui nous sollicite à cultiver dans nos familles les principes religieux. Les familles sont la pépinière de l'État, Les pères et mères, les Magistrats, les Sénateurs, les Ministres de la Religion, ont été une fois des enfants dans leurs familles, et ont probablement conservé dans les différentes places qu'ils occupent aujourd'hui une forte teinture des habitudes qu'ils ont contractées dans leur première jeunesse. Nous conservons généralement les impressions que nous avons reçues dans nos premières années, et si ces impressions ne sont pas favorables à la vertu, on en retrouve la trace dans les actions d'un âge plus avancé.

Des jeunes gens élevés dans la licence deviennent des hommes qu'on ne saurait gouverner. N'ayant point été habitués dans leur enfance à respecter Dieu, ni les choses qui appartiennent à la vie à venir, on retrouve souvent chez eux, lorsqu'ils sont devenus grands, une insensibilité païenne sur les matières de Religion, une insensibilité qui perce à travers tous les talents et tous les avantages d'une éducation polie et libérale. Et si quelque fonction, quelque vocation, qui suppose une confiance morale vient à être donnée à de tels hommes, on peut aisément conjecturer comment ils s'en acquitteront.

Tout homme, dont l'âme est vraiment chrétienne, éprouvera des sentiments de bienveillance pour tout ce qui intéresse la société; il portera une attention sérieuse sur la conduite de ceux qui lui sont confiés; il donnera tous ses soins à les faire entrer dans le monde munis de bons principes, afin que, lorsqu'ils feront partie de la masse du peuple, ils puissent lui communiquer quelque influence de correction, qui tende à diminuer, et non à augmenter la somme de corruption qui se trouve répandue dans cette classe. Mais par quel moyen procurerez-vous cet effet plus sûrement que par la pratique des principes religieux et des dévotions domestiques? S'il existait une méthode plus sûre, qu'on veuille bien donner à la société communication de cette utile découverte?

On dira pour s'excuser de remplir le devoir dont je recommande la pratique, «Je ne suis pas indifférent au perfectionnement religieux et moral de ma famille; je fréquente régulièrement l'Église le dimanche, et j'exige que mes domestiques suivent l'exemple que je donne, je pense que cela est suffisant pour les porter à remplir leurs devoirs, s'ils sont dans l'intention de les remplir.» Mais n'y aurait-il aucun avantage à s'occuperchaque jour de ce qui peut contribuer au plus grand bien de nos semblables, et cette application journalière à leur perfectionnement ne serait-elle pas d'une nécessité indispensable?

L'intervalle d'un dimanche à l'autre n'est-il pas considérable, et, dans cet intervalle, combien de tentations variées ne peuvent-elles pas affaiblir notre nature corrompue? Consentirons-nous à ce que la portion de notre famille la plus dépourvue d'expérience et de prudence, laisse écouler la semaine, sans que nous fassions rien de notre côté pour arrêter la présence journalière et continuelle des tentations au mal?

Mais, sans parler de l'influence dangereuse que les tentations peuvent avoir sur nos domestiques, nous devons nous rappeler que, plus l'intervalle est long entre les instructions qu'on reçoit, et plus il est à craindre que l'impression salutaire ne s'en perde. Ne serait-il donc pas à désirer de trouver quelque méthode pour prévenir la perte des instructions reçues le premier jour de la semaine? Mais le culte domestique prévient ce danger, il nous invite à porter nos regards vers Dieu, il sert à renouveler l'impression des grandes vérités qui nous ont été présentées dans le culte public, vérités que malgré leur importance nous sommes si portés à mettre en oubli.

Je crois devoir relever ici une erreur, qui n'est que trop générale, plusieurs pensent que tout ce qui concerne l'homme dans le culte, que tout ce qui a rapport à l'enseignement et à la prière dans les jours consacrés au culte, est borné en quelque sorte dans l'enceinte de l'Église, tandis que ce qui n'est que commencé dans l'Église, doit être achevé dans l'intérieur de la famille. L'ouvrage ébauché par le Ministre chargé d'instruire sa paroisse, doit être continué par les instructions données dans chaque famille.

Heureux, si ceux qui ont des Pasteurs fidèles, et capables de leurs dispenser la sainte parole de Dieu et les Sacrements, connaissaient le prix de cet avantage. «Rien de ce qui peut leur être utile ne leur est caché. » Act. XX. 20. Leurs oreilles reçoivent les saintes vérités qui concernent la rédemption du genre humain. De tels Pasteurs les invitent à recevoir avec dévotion ces grandes vérités, animés du désir de faire partager au troupeau qui leur est confié les consolations du Christianisme, ils ne se bornent pas à les inviter en général à la pratique de leurs devoirs, mais ils leurs montrent encore ce qu'ils ont à faire, chacun dans leurs vocations, et dans leurs circonstances particulières.
Mais ce Pasteur ne saurait aller plus loin, cependant, il faut que l'œuvre commencée par lui se poursuive, sans quoi son travail risque d'être perdu.

On a de fortes raisons de croire, que quoique les sermons de ce Pasteur révéré puissent avoir produit des impressions sérieuses au moment où il les prononçait de la chaire, ces dispositions ne laisseraient pas de s'évanouir si elles n'étaient entretenues par une continuation de réflexions et d'instructions analogues. La semence a bien été déposée dans le cœur des auditeurs, mais il ne faut pas s'en tenir là, il faut la surveiller, il faut l'arroser, il faut en écarter les ronces et les mauvaises herbes, afin qu'elle puisse donner du fruit; mais ce travail est abandonné aux individus qui ont reçu la semence de la parole de Dieu, c'est à eux à y pourvoir. Et c'est sur cela que les maîtres de famille doivent porter leur attention, pour le bien de ceux qui sont confiés à leurs soins. Celui-là donc qui, animé par des principes dignes d'un Chrétien pourvoit aux besoins de ceux qui composent sa maison, poursuivra le travail du semeur, non seulement à l'aide de prières particulières, mais encore d'exercices de famille propres à préserver et développer ce précieux grain qui a été déposé.

Lorsque ces devoirs sont remplis avec sagesse et diligence, le Pasteur qui est l'instituteur public se réjouit en apercevant le fruit de son travail. Mais quel fruit pourra-t-il découvrir dans ces familles où les domestiques n'entendent et ne voient rien de ce qui pourrait rappeler à leur esprit ce qu'ils avaient entendu dans le culte public; rien des ce qui peut avoir quelque rapport avec ces instructions? Le domestique pensera (si tant est qu'il porte sa pensée sur ce sujet) que la Religion ne consiste qu'à aller à l'Église, car il n'aperçoit pas que la Religion de ses maîtres s'étende au-delà.

Les enfants et les domestiques éprouvent quelques effets salutaires des instructions que leur adresse directement un père de famille. Ils jugent des choses, non d'après ce qu'un Pasteur leur dit une fois la semaine, mais d'après ce que chacun leur répète chaque jour. Les coutumes, les habitudes d'une famille, forment par leur répétition, l'opinion et le caractère de ses membres, et si parmi les personnes avec lesquelles ils se trouvent journellement, il n'y a aucun acte qui tende à rendre honneur à la religion, alors non seulement rien ne s'opère pour perfectionner l'instruction de la famille, mais il se fait beaucoup de choses qui détournent de ce but, même sans qu'on ait l'intention de s'en écarter.

La négligence que l'on apporte à accompagner l'instruction publique de l'instruction domestique, est une des causes qui fait qu'un culte régulier établi dans l'Église ne produit pas les bons effets qu'on aurait lieu d'en attendre.
Ceux qui s'élèvent contre le peu de fruit de cette institution de culte public, ne font pas attention aux bornes dans lesquelles l'influence d'un instituteur public est resserrée, en calculant l'utilité qui résulte de cette instruction dès la chaire, ils ne devraient pas la méconnaître parce qu'elle ne produit pas tous les avantages auxquels elle ne saurait atteindre.

Le vrai Ministre de Christ travaille incessamment à engager les chefs de famille à répandre et à développer l'instruction, chacun dans sa maison en particulier. Ce n'est pas la foule des auditeurs qui satisfait ce bon Pasteur. Il serait disposé à pleurer à la vue de cette multitude qu'il découvre de la chaire, s'il savait que malgré l'attention extraordinaire avec laquelle elle recueille ses paroles, il ne se trouve dans la demeure de ces auditeurs zélés, ni autel, ni prêtre, ni sacrifice, ni aucun signe d'une vraie piété. Il n'apprécie pas son utilité comme Pasteur, d'après le nombre de ses auditeurs, mais d'après les effets que ses discours produisent sur eux. Et dans les informations qu'il prend pour connaître les fruits de sa prédication, il cherche à savoir s'il existe quelque culte de famille dans les demeures de ses paroissiens. Lorsqu'il apprend que la religion y a sa place, il en conclut qu'il a touché leurs coeurs, et que non seulement eux-mêmes, mais leurs enfants après eux, profitent de son zèle et de ses travaux. Mais aussi longtemps qu'il ne voit pas la religion entrer avec avec eux dans leurs demeures, il juge que quelque éloge qu'il ait pu recevoir comme prédicateur, il est encore douteux s'il a pu produire an effet sensible sur ceux qui l'écoutent.

Telle étant l'importance du culte domestique, on doit s'attendre que tout homme qui s'honore de porter le titre de Chrétien, ne se laissera pas détourner d'un devoir aussi sacré par la crainte du ridicule auquel cette pratique pourrait l'exposer.

Un homme de sens, s'il a du caractère, se refuserait-il à un devoir aussi raisonnable, renoncerait-il à rendre à Dieu dans sa maison l'honneur qui lui est dû, à travailler au bonheur de ses enfants, de ses domestiques, et de la société par la crainte de quelque moquerie de la part d'hommes frivoles, qui ne se sont jamais donnés la peine d'examiner sérieusement ce dont ils font l'objet de leur ridicule? Ne cherchera-t-il pas plutôt à réprimer avec la fermeté qui convient à un Chrétien cette disposition à la raillerie, qui s'efforce d'éloigner de la pensée tout ce qui est grave et sérieux? Ne s'armera-t-il pas contre cette disposition à la plaisanterie, eu considérant qu'il est presque impossible de l'appliquer à propos, et en même temps d'échapper à ce genre d'attaque. Combien ne lui paraîtrait-il pas honteux de céder dans une cause aussi bonne.

Les choses les plus solennelles et les plus dignes d'approbation peuvent offrir quelque prise à la plaisanterie; mais voyons comment ces choses sont jugées par d'autres observateurs. N'est-ce donc pas un spectacle touchant de voir un homme religieux rassembler ses domestiques autour de lui, ouvrir la Bible, lire distinctement et avec respect une portion de ce Livre Sacré, puis s'agenouiller avec eux, pour rendre grâces à Dieu des biens, dont lui et sa famille ont joui, et pour solliciter avec humilité la continuation de la miséricorde divine? Je comprends que cela peut être mal représenté par des hommes vains et légers, quoique ce spectacle soit grand aux yeux de Dieu et de ses Anges.

Je vais maintenant présenter quelques idées à ceux qui sont résolus d'établir dans leurs maisons un culte de famille.
En premier lieu, je souhaite que le chef de famille se rappelle, que plus le culte qu'il cherche à établir sera rendu agréable, et plus il en résultera de bien. Pourvu qu'en cherchant à le rendre tel, on ne se permette pas de le dépouiller de sa partie essentielle, pour le ravaler à quelques observances insignifiantes. Il faut éviter la longueur, de peur de le rendre fatiguant et ennuyeux.

Il importe de bien choisir l'heure pour le rassemblement de la famille. Cette heure doit être celle où le plus grand nombre des membres de la famille pourront s'y rencontrer, celle où on sera le moins exposé à être interrompu, celle où les assistants seront le mieux disposés à l'attention. Si l'on fixé les prières du matin avant que la moitié de la famille soit levée, ou si on attend le moment où les occupations ont commencé: si on fixe les prières du soir après souper, on tomberait dans une erreur qui nuirait au but qu'on se propose dans ces rassemblements.

Quand vous aurez fixé une heure, que rien ne puisse y apporter de changement sans une nécessité absolue. La ponctualité est essentielle à l'ordre.
Si quelques familles
adoptent pour leur service domestique la forme des liturgies anglaises; le chef de famille exigera de ses domestiques qu'ils joignent leur voix dans les parties qu'ils doivent remplir. La beauté des prières disparaît, lorsque la congrégation ne répète pas les parties qu'elle est censée devoir répéter.

J'ai toujours supposé que l'Écriture sainte doit être lue dans les familles où le culte domestique est établi, mais j'ai observé que l'on se bornait quelquefois à la lecture des prières. Cependant cette omission, si elle était constante, serait fâcheuse. La lecture d'une portion peu considérable de l'Écriture ne saurait ajouter que quelques minutes au service. Et cette lecture paraît nécessaire à plusieurs égards. C'est un honneur qu'on rend à l'Écriture sainte aux yeux de la famille, cet usage empêche que ceux qui ne la lisent pas en particulier ne deviennent étrangers à son contenu, et cette lecture en public fait que ceux qui ne la lisent pas avec assez de jugement et de préparation, en éprouvent un effet plus sensible et une impression plus profonde.

Lorsque l'on s'occupe d'un devoir aussi sacré, on ne doit rien négliger pour en faire sentir l'importance. Il n'est pas indifférent de quelle manière celui qui en est chargé le remplit. Il doit se garder de toute habitude qui pourrait présenter l'idée d'un manque de respect, qui pourrait distraire l'attention, et faire de mauvaises impressions sur les assistants au culte. Il donnera attention que la lecture ne soit ni lente, ni bruyante, ni précipitée, ni langoureuse, il ne négligera rien pour donner à ce service domestique quelque solennité et quelque attrait, par sa contenance, le ton de sa voix, son extérieur, l'expression de la piété, de sa bonté et de son contentement.

Je crois encore qu'il est essentiel que le chef de famille se considère comme étant Ministre de Dieu dans sa maison, je voudrais qu'il se nourrit de cette idée, en priant Dieu avec humilité de lui donner les dispositions en accord avec ce caractère.

Si, sous ce point de vue, un père veut profiter de toutes les circonstances qui se présenteront dans sa famille, pour faire quelque impression sur chacun de ses membres, il saisira l'occasion d'un danger évité, d'un mal dont on était menacé, d'une maladie, d'un rétablissement, et même d'une mort; tous ces événements sont instructifs, et il en tirera parti dans ses prières, pour développer les impressions que ces événements ont pu faire sur les membres de famille.

Je crois même qu'il pourrait aller plus loin, en se considérant comme le Ministre de Dieu dans sa maison. Pourquoi ne chercherait-il pas à se rendre utile à un ami, aussi bien qu'à son enfant ou à son domestique? La philanthropie aussi bien que la piété lui en font un devoir. Un homme en visite, devient pour le temps qu'il séjourne sous notre toit, un membre de la famille, et il doit avoir sa part de l'intérêt que nous prenons à ceux qui nous sont le plus intimement liés. Il est digne d'un Chrétien de recevoir son ami, en désirant que leur communication ne se borne pas à des civilités d'usage, comme s'ils n'avaient ni l'un ni l'autre aucune relation avec Dieu, et avec un état avenir. Il doit souhaiter que son hôte puisse ainsi que lui-même tirer quelque avantage de sa visite dans ce qui concerne la Religion, ce point étant d'une toute autre importance que ceux dans lesquels nous nous efforçons à nous rendre réciproquement service.

Il pourrait arriver que, dans le nombre, de ceux qui nous visitent, il s'en trouva qui eussent été si mal élevés, qu'ils n'eussent jamais assisté à un culte domestique, de telles personnes pourraient envisager cet usage comme une singularité particulière à quelque secte. Et cette circonstance serait un motif de plus pour les y inviter. Je sais que dans un cas semblable on se croit obligé de suspendre dans une famille le culte domestique. Mais à Dieu ne plaise qu'un Chrétien suive cet exemple. Que plutôt cet étranger soit témoin de notre dévotion domestique, voit l'attention que nous donnons à la présence de ce Dieu invisible, voit sur quels fondements nous reposons nos espérances. Mettons sous ses yeux des objets d'un si grand intérêt pour lui, et espérons qu'en l'admettant à notre culte, il comprendra qu'il ne suffit pas d'être né Chrétien, mais qu'il faut en donner la preuve. Rappelons-nous qu'en agissant autrement par suite de cette frivole politesse du monde, nous manquerions à notre devoir de Chrétien, La bienveillance chrétienne reprouve cette fausse politesse, qui prive la société d'un de ses grands moyens de perfectionnement, de l'influence des bons exemples. L'homme religieux, qui aurait cette criminelle condescendance, manquerait à son caractère, qui doit le porter à se faire connaître aux yeux de tous, et à donner par sa sincérité à professer sa foi, une leçon importante à ses voisins.

Qu'on me permette de présenter quelques observations sur la nécessité indispensable où sont les chefs de famille de profiter de toutes les occasions pour donner un bon exemple. L'observation régulière d'un culte domestique ne remplit pas toutes leurs obligations. S'ils se bornaient à cela sans s'acquitter dans leur famille d'autres devoirs qui les concernent, il serait à craindre que cet usage, quelque respectable qu'il soit en lui-même, ne dégénérât en une pratique incommode et méprisée. Celui-là donc qui se charge de remplir cette importante fonction, doit maintenir le respect qui lui est dû par une conduite en accord avec les principes qu'il professe.

Si ce culte de famille est régulièrement observé, et si cette pratique est accompagnée d'une conduite édifiante chez celui qui en fait les fonctions, d'une attention sage à ses intérêts temporels, d'une probité sans tache, et d'un caractère respectable, on ne saurait douter qu'il en résultera un grand bien pour la famille et pour la société.

On a prétendu montrer l'inutilité des dévotions domestiques, en alléguant la mauvaise conduite des enfants de quelques familles, où ce devoir n'était cependant pas négligé. Ce fait, en le supposant tel que le présentent ceux qui méconnaissent l'utilité de cette pratique, ne prouverait autre chose sinon que quoique nous donnions à nos enfants de bonnes instructions et de bons exemples, nous ne saurions leur donner de bonnes dispositions.

C'est sans doute une vérité affligeante, qu'après avoir pris beaucoup de soins pour former des enfants à la crainte de Dieu, le monde ne laisse pas de l'emporter par la force de ses séductions, et de les entraîner malgré nos conseils, notre exemple et nos prières. Mais il faut aussi convenir que les désordres dans lesquels plusieurs jeunes gens se sont laissés entraîner malgré une éducation religieuse, peuvent être attribués au manque d'accord entre la profession des principes et la conduite de ceux qui les professent, entre les prières domestiques et les mœurs des pères et mères.

Parmi ceux qui se disent être Chrétiens, nous en voyons en qui la Religion n'a point de consistance. On lit des prières dans leurs maisons, mais ces actes de dévotion ne sont accompagnés d'aucun ordre, d'aucune fermeté dans l'exercice de l'autorité paternelle. Il y a peut-être aussi de grands vides dans cette instruction, certaines vérités chrétiennes y sont présentées avec force, tandis que d'autres sont mises de côté, quoique aussi importantes, les enfants apprennent à connaître quelques hérésies, mais on néglige de leur inculquer de bons principes de conduite. Les pères et mères leur parlent quelquefois vaguement, et en général des conséquences du vice, mais n'ont pas l'œil assez ouvert sur leurs inclinations, leurs occupations ou les liaisons qu'ils forment; ils ne leur présentent pas toujours un exemple de sobriété, de fermeté et de droiture. Qui s'étonnerait alors que les enfants de tels parents devinssent des libertins? Si rien n'a frappé ces jeunes gens qu'une apparence de Religion démentie par l'exemple de leur père, qu'est-ce qui les porterait à la respecter? Ce qu'ils ont pu apercevoir pourrait même leur faire mépriser ces principes démentis par les mauvais exemples de celui qui les prêche.

Profitons de ces erreurs qui ont pu corrompre les enfants de quelques pères inconséquents, ne négligeons pas de présenter dans nos instructions, comme dans notre conduite l'ensemble de la religion; que la dévotion, l'instruction, l'inspection et l'exemple marchent ensemble et s'appuient l'une et l'autre. Alors vos demeures seront des habitations de paix, on trouvera chez les supérieurs l'autorité tempérée par la bonté, chez les inférieurs, la sobriété, la fidélité, l'industrie, et la frugalité, et réciproquement, un désir de se complaire.

Veuille le Dieu de toute grâce accompagner de sa bénédiction ces réflexions tendantes à rétablir parmi nous le culte domestique, faire trouver du plaisir aux pères et mères, aux chefs de famille, à répandre l'instruction religieuse sur leurs enfants, et sur leurs domestiques!

Puisse leur instruction être embellie par leur exemple!

Puisse le sacrifice de prières et d'actions de grâces du matin et du soir être offert dans chaque famille au Dieu de notre salut.

Puisse la bénédiction descendre sur tous les membres qui la composent, purifier leurs cœurs, les soutenir dans leurs épreuves, les rapprocher les uns des autres par les nœuds de la charité chrétienne, et leur faire goûter l'avant-goût de cet état heureux dans lequel Dieu sera adoré et exalté aux siècles des siècles!

Amen.

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