«Éternel! tu entendras dès le matin ma voix; dès le matin, je me préparerai à t'invoquer et fixerai sur toi mes regards». Ps. V. 4.
Les hommes pieux et vertueux de tous les siècles et de toutes les religions, ont été dans l'usage de commencer et de terminer chaque journée, en présentant leurs adorations à l'Être Suprême; ils ont consacré leurs premières pensées du matin, et leurs dernières pensées du soir, à reconnaître ses bienfaits, à implorer son pardon, à solliciter sa grâce et son secours, à mettre sous sa sauvegarde leur personne, leur famille, tout comme leurs entreprises.
Cette pratique juste et raisonnable en elle-même , est accompagnée de grands avantages pour faire des progrès dans la vie spirituelle. Cependant, les jeunes gens, les gens au monde, les gens d'affaires, les gens peu réfléchis, les libertins, en un mot, tous ceux à qui cette pratique serait le plus nécessaire, sont généralement portés à la négliger, quoique les conséquences les plus fatales découlent de cette négligence, il en résulte que leurs cœurs ne se pénètrent ni de l'amour, ni de la crainte de Dieu, que leurs dispositions ne se sanctifient point, que leurs péchés s'accumulent sans en avoir obtenu le pardon, que toutes leurs affections se portent sur les objets de la terre, et que leurs passions mal contenues et mal réprimées, faute de principes religieux, deviennent grossières et impétueuses.
Ils se lèvent et ils se couchent sans goûter les fruits délicieux: de la grâce, de la miséricorde divine, et de la paix de l'âme que la dévotion fait germer, ce qui fait que chaque jour les éloigne de plus en plus de Dieu et de la vertu, que chaque jour les entraîne avec plus de force aux: folies de la légèreté, aux dérèglements des mœurs, à l'anxiété de l'avarice, à la fureur de ces penchants, de ces passions qui déchirent tous les malheureux qui s'éloignent de Dieu et de sa grâce, et précipitent dans le crime et la perdition ceux qui l'abandonnent.
Dans le but de prévenir ce malheur, de rétablir l'important devoir de la dévotion domestique du matin et du soir, de confirmer dans cette pratique ceux qui y sont attachés, de rendre plus régulière et plus constante cette adoration de chaque jour du Dieu vivant, Je viens proposer à votre imitation l'exemple d'un grand Roi, qui, au milieu des distractions des affaires. de la dissipation du monde, du mouvement et de la flatterie d'unecour , s'était fait une règle invariable d'élever chaque matin ses premières pensées à son Créateur et de consacrer à la dévotion les prémices de chaque journée. «Éternel, tu entendras dès le matin ma voix!» etc. etc.
Le but que je me propose est de vous porter à imiter cet exemple, en vous montrant la convenance, la nécessité et les avantages que l'on trouve dans l'habitude de commencer chaque journée par un sacrifice d'actions de grâces et de prières.
Et d'abord j'observerai, que lorsque là voix du Tout-Puissant prononça ces paroles: «Que la lumière soit,» Gen. I. 3. que lorsque le monde nouvellement créé sortit des ténèbres, l'Écriture nous apprend «que les étoiles du matin éclatèrent en chants d'allégresse, et que tous les fils de Dieu poussèrent des cris de joie.» Job XXXVIII. 7.
Mais comme chaque matin nous représente la vive image, disons plutôt l'imitation réelle de ce grand événement, nous devons éprouver aussi les mêmes sentiments de piété, élever aussi nos pensées à la Toute-Puissance et à la Providence de notre Créateur, remplir nos âmes de reconnaissance, et bouches d'actions de grâce, car c'est parce que Dieu a dit que la lumière soit, que la lumière du matin brille à nos regards. — II n'est peut-être aucun moment dans lequel les oeuvres de Dieu, les merveilles de la création proclament plus hautement au cœur: et à la raison la bonté, la puissance et la sagesse de notre Créateur, que celui où nos yeux s'ouvrent à la lumière.
Le
Ciel
se découvre avec toute la variété des couleurs les plus
éclatantes, le voile de l'obscurité se dissipe, un monde
nouveau se présente en quelque sorte à notre vue. «Le soleil
paraît comme un époux qui sort de sa chambre nuptiale, il
s'avance comme un vaillant homme qui entre dans la carrière.»
Ps. XIX.
Tout présente une scène à la fois majestueuse, agréable et touchante. L'éclat des deux, le calme de l'air, la fraîcheur répandue sur la terre, la joie, la vivacité des animaux, l'espèce de nouveauté de la création pénètrent le cœur, excitent des sentiments de reconnaissance, d'admiration et d'amour, et le portent à la contemplation et à l'adoration du Créateur de toutes choses.
En un mot, le spectacle de la nature sollicite les sentiments de dévotion avec une telle force, qu'il ne saurait y avoir que des hommes tourmentés de soucis, étourdis par la dissipation, ou étrangers aux sentiments de lu piété, qui puissent résister à cette impulsion, et chasser de leur esprit l'idée de Dieu et de notre dépendance. Car ici la raison fortifie l'impulsion de la nature, et nous conduit à offrir à notre Créateur les premiers fruits de chaque jour, parce qu'il est l'objet le plus noble qui puisse se présenter à la pensée, et l'Être auquel nous avons le plus d'obligations, et de qui nous avons à attendre le plus de secours, et pour le moment présent, et pour l'avenir.
C'est
une
réflexion bien répétée, mais bien juste que ce qui est placé
au premier rang dans notre estime, que ce qui est le premier
objet de nos désirs, doit naturellement occuper nos premières
pensées du matin, et se retrouver dans nos dernières pensées
du soir; c'est ainsi que l'avare s'endort sur ses calculs et
ses pensées terrestres, et qu'il retrouve à son réveil les
mêmes pensées dans son cœur.
Ainsi, l'homme de plaisir n'abandonne le souvenir des amusements que son imagination lui retrace que lorsque le sommeil ferme ses paupières, et de nouveaux projets de dissipation absorbent ses premières pensées au moment où il recouvre ses sens.
Nous sommes donc en droit de conclure que celui qui peut dire en sincérité, comme le Roi Prophète: «Quel autre ai-je au Ciel que toi? En quel autre que toi me plairais-je sur la terre?» n'aura qu'à suivre le penchant de son cœur pour diriger sa dévotion, le matin et le soir. — Les sentiments de piété naîtront d'eux-mêmes, ses yeux ne seront pas plutôt ouverts à la lumière, que son cœur s'ouvrira au sentiment de la présence de Dieu. Une impulsion irrésistible, quoique secrète, l'entraînera à des méditations religieuses, à des sentiments d'actions de grâce et à la prière.
C'est ce qu'éprouvait le Roi Prophète lorsqu'il dit: «Au moment de mon réveil je suis encore occupé de toi.» Et c'est ce qu'éprouvera toute âme pieuse; ses premières pensées, ses pensées matinales seront naturellement portées sur des objets spirituels et célestes, et comme l'idée de Dieu, l'idée des premières scènes qui se développeront a la sortie du tombeau, se présentent à elle comme le premier objet de ses désirs, comme le but final, le but de ses vœux les plus ardents; ces grandes idées s'offriront les premières à son réveil, et l'occuperont encore au moment où le sommeil viendra s'emparer d'elle.
Ces grandes pensées germeront les premières le matin, avant que les distractions du monde viennent occuper ses sens, et se reproduiront au moment où l'approche de la nuit écarte ces distractions.
Ainsi tout homme qui n'éprouve aucun penchant à la dévotion, qui ne porte point sa pensée sur Dieu et sur sa providence, doit se défier des inclinations de son cœur, reconnaître qu'il est étranger à la vraie piété, qu'il méconnaît sa faiblesse, qu'il manque au devoir de la reconnaissance, et qu'il met en oubli la Providence, ainsi que les grandes idées de puissance, de sagesse, de bonté, de sainteté, et de majesté divine, qui sont le fondement de toute disposition religieuse. De plus, si le spectacle de la nature nous invite, et si la raison nous appelle à la dévotion dès le matin, on peut dire encore que la reconnaissance y porte naturellement toute âme bien disposée.
Dans le cours de la journée, l'homme peut attribuer avec quelque fondement sa conservation à sa sagesse et à sa prudence; il est éveillé, il est sur ses gardes, il prévoit, jusqu'à un certain point, le danger, et peut jusqu'à un certain point l'éviter; mais pendant la durée de la nuit, l'homme plongé dans le sommeil est aussi incapable de s'occuper de sa conservation qu'un enfant nouveau-né, ses sens sont de nul usage; les facultés de son esprit sont sans vie, il ne voit point, n'entend point, ne pense point, il est abandonné sans défense à toute espèce d'attaque et d'accident; un souffle d'air infecté peut l'étouffer, quelque humeur viciée répandue dans son corps peut le faire entrer dans l'éternité avant d'avoir pu demander quelque secours; un ennemi peut le surprendre, le feu peut le consumer, en un mot, il ne peut ni prévoir le danger ni s'y soustraire.
Quand donc il sort de cet état d'insensibilité, qu'il se retrouve sain et sauf dans son corps, en possession des facultés de son âme, ranimé dans sa force et dans son activité, pourrait-il, sans une insouciance condamnable et une ingratitude monstrueuse, oublier cette Providence bienfaisante, qui a veillé à sa conservation et l'a enveloppé de sa protection pendant la durée de son état de faiblesse et d'abandon.
Ah!
si
nous pouvions connaître combien de fois le Tout-Puissant nous
a préservés pendant le jour et pendant la nuit, par des
suggestions communiquées à notre esprit, par une direction
supérieure donnée aux délibérations et aux projets de nos
semblables, par le ministère de ses Anges, et souvent aussi
par l'exercice immédiat de sa Toute-Puissance, je suis
convaincu que nous serions, s'il était possible, plus frappés
d'étonnement des œuvres de la Providence, que de celles de la
Création, et même souvent forcés de nous écrier avec le
Psalmiste: «Qu'est-ce que l'homme mortel pour que tu te
souviennes de lui, qu'est-ce que le fils de l'homme, pour
qu'il soit l'objet de tes soins?"
Nous apprendrions que nous avons passé bien des nuits, où après nous être couchés sans crainte, après avoir joui d'un repos tranquille, et nous être réveillés avec joie, nous avons été sans nous en douter sur le bord de notre ruine, et que nous n'aurions jamais rouvert les yeux à la lumière, si la Providence n'eût pas suspendu ou détourné plusieurs accidents, et écarté de nos têtes plusieurs dangers. Il est si ordinaire de s'endormir et de se réveiller, que ce miracle de notre conservation n'est point remarqué, et que la bonté divine ne fait sur nous qu'une impression légère.
Mais
il
n'en est pas moins vrai qu'il y a dans tout cela des
merveilles que les hommes les plus
instruits ne sauraient expliquer, et l'être le plus
superficiel et le plus simple ne saurait s'empêcher
d'apercevoir et d'admirer la bonté de Dieu, dans le bien-être
et la réparation de ses forces, que lui fait goûter le repos:
il ne peut méconnaître qu'à l'aide de ce don précieux du
sommeil ses peines s'effacent dans l'oubli, ses anxiétés
disparaissent, ses douleurs même corporelles sont suspendues,
et que Dieu allège par ce moyen les travaux de corps et
d'esprit.
Quand ce baume restaurateur nous est refusé pour une nuit
seulement, combien les heures d'insomnie nous paraissent
longues et pénibles! et quel effet n'éprouvons-nous pas dans
le cas contraire?
Ces
bienfaits
que Dieu répand sur nous pendant le cours de la nuit, ne
mériteraient-ils à notre réveil aucun mouvement de
reconnaissance?
N'y aurait-il pas de l'impiété et de l'ingratitude, après
avoir reçu un si grand bien, de nous détourner immédiatement
de notre bienfaiteur, pour nous jeter entre les bras du monde;
de consumer cette vie qu'il nous a conservée, et d'épuiser au
service d'idoles terrestres les forces qu'il nous a rendues
pour le servir?
Qu'il n'en soit pas ainsi: présentons à Dieu les premiers fruits de ses bienfaits, et profitons de la vivacité de nos sentiments, de la vigueur de nos corps, de la liberté de notre âme, affranchie de toute distraction; profitons du premier moment de cette résurrection journalière, pour faire monter aux pieds de son trône, nos louanges et l'expression de notre reconnaissance.
Convenons
donc
que lorsqu'une famille se trouve réunie au matin, et jouissant
de la santé, de la raison et d'un renouvellement de forces;
lorsque des pères et mères revoient leurs enfants, et que des
enfants recouvrent leurs parents après cette suspension de
vie, qui les avait laissés sans secours pendant le sommeil;
lorsqu'ils sont convaincus qu'aucun des lits dans lesquels les
individus de la famille avaient été déposés, ne s'est changé
pour aucun d'eux en tombeau, qu'aucune chambre de la maison ne
retient celui qui l'occupait sur un lit de douleur, lorsqu'ils
voient qu'aucun ennemi, aucun accident n'a porté préjudice ni
à leur santé, ni à leur fortune; quand des parents voient sous
leurs yeux leurs enfants gais et animés, rassemblés autour
d'eux, que des enfants retrouvent leurs parents en santé et en
paix, comment la reconnaissance ne suggérerait-elle pas à
chacun d'eux ces paroles: «Mon âme! béni l'Éternel et n'oublie
aucun de ses bienfaits. C'est lui qui te pardonne toutes
tes iniquités, qui guérit toutes tes infirmités, qui
garantit ta vie de la fosse, qui te couronne de gratuités et
de compassions,» Ps. CIII.
J'ajouterai encore que notre véritable intérêt doit nous porter aussi bien que la raison et la reconnaissance à nous souvenir de notre Créateur, en implorant chaque matin son secours et sa bénédiction, premièrement parce qu'il peut, seul, couronner nos entreprises de succès, et faire prospérer l'œuvre de nos mains, car sans lui il n'y a point de force et point de sagesse.
«L'homme
examine
les mesures qu'il doit prendre pour réussir, mais c'est
l'Éternel qui donne le succès.» Prov. XVI. 9.
Et quel projet pourriez-vous former, quel but pourriez-vous
atteindre dans le monde, sans que son assistance vous soit
nécessaire?
Voudriez-vous obtenir des richesses?
Ce n'est que par la bénédiction de Dieu que nous pouvons nous
enrichir, bien plus, ce n'est que par elle que nous pouvons
jouir avec sagesse de ce que sa Providence nous accorde.
Voudriez-vous vous avancer dans le monde?
«Mais l'élévation ne vient point d'Orient, ni d'Occident, ni
du désert, mais de Dieu qui est le Juge; il abaisse l'un et il
élève l'autre.2 Ps. LXXV.
Voudriez-vous avoir beaucoup d'amis?
«Quand l'Éternel prend plaisir aux voies de l'homme, il apaise
envers lui ses ennemis même.2 Prov. XVI. 7.
Désireriez-vous des enfants reconnaissants et heureux?
«C'est Dieu qui convertit le cœur des enfants envers leurs
pères»; Malach. IV. 6. Luc I.
17.
qui les fait prospérer par sa providence, qui les sanctifie
par sa grâce.
En un mot, quelque dessein que vous puissiez former pendant le cours de la journée, quelques puissent être vos désirs dans ce monde, s'ils sont honnêtes, justes et raisonnables, «exposez à l'Éternel vos entreprises, et il les fera réussir.» Prov. XVI. 3. Ps. XXXVIII. 5. «Ayez-le devant les yeux dans toute votre conduite, et il la dirigera.» Prov. III. 6.
Mais si vous passez d'un jour à l'autre sans solliciter la bénédiction de Dieu, sans reconnaître sa providence, vous vous rendez coupables d'ingratitude et de mépris pour ses bienfaits, vous montrez de la défiance pour les soins de sa providence, et donnez lieu de croire que vous présumez obtenir des succès, aidés de vos seules lumières et de votre seule prudence. Il est alors nécessaire que Dieu traverse vos desseins, qu'il refuse de couronner vos entreprises, ou qu'il dirige vos succès de manière a suspendre votre attente, jusqu'à ce qu'il ait confondu votre orgueil, et qu'il vous ait contraint à venir chercher un abri sous les ailes de sa providence, set à confesser avec le roi Nébucadnezar, que «Dieu fait tout ce qui lui plaît, soit dans l'armée des Cieux, soit parmi les habitants de la terre; et qu'il peut abaisser ceux qui marchent avec orgueil.» Dan. IV. 35. 37.
Permettez-moi d'ajouter une autre réflexion, c'est que la bénédiction de Dieu, si nécessaire à la réussite de nos projets dans le cours de la journée, l'est encore à notre sûreté personnelle, et à la conservation de notre vie. Et qu'il est bien présomptueux, je dirai plus, bien téméraire et insensé, l'homme qui, habitant cette terre où la mort est aux aguets sous mille formes, ose sortir de sa maison sans avoir humblement demandé la protection du Tout-Puissant.
Nous ne quittons jamais notre demeure sans que mille dangers, sans que les pièges de la mort partout tendus ne présentent plusieurs chances que nous n'y rentrerons pas. Y a-t-il une place où nous puissions dire avec assurance: «la mort n'est pas ici» ou y a-t-il un seul instant où nous osions dire «mon heure n'est pas encore venue»? Si la mort n'osait approcher de nous que lorsque nous sommes parvenus à notre soixantième année, nous pourrions jusqu'à ce moment du moins, aller et venir sans crainte; ou si ce tyran se présentait toujours sous la même forme, nous pourrions savoir où il est, et l'éviter; mais il se rencontre là où nous n'aurions pu le soupçonner, et s'enveloppe pour nous surprendre dans quelque position où nous puissions nous trouver, au moment où nous y pensons le moins.
Ne sait-on pas que la mort se tapit dans un grain de sable, dans un verre d'eau, sous une épine ou sous l'aiguillon d'une abeille; C'est quelques fois une vapeur portée sur l'aile des vents qui termine notre vie, un faux mouvement du pied peut conduire l'homme le plus robuste dans la tombe; la chute d'une tuile, la morsure d'un chien, la rencontre d'un animal furieux, ou seulement gai, peuvent séparer notre âme de notre corps. Quelqu'un de nos amis peut nous ôter la vie dans nos amusements, ou en voulant nous faire plaisir, tout comme nos ennemis dans leur colère.
En un mot, je tenterais aussi vainement à vouloir compter les grains de sable du rivage de la mer, qu'à prétendre indiquer les divers dangers auxquels nous sommes exposés chaque jour, ainsi donc l'homme qui peut sortir de son lit pour se jeter à l'aventure dans les avenues d'un monde tel qu'est celui que nous habitons, le père qui peut abandonner ses enfants au milieu de tant de dangers, ou l'ami qui peut délaisser ses amis au milieu de tant d'accidents, sans avoir sollicité la direction de cette sagesse qui connaît tout, et la protection du Tout-Puissant, de tels hommes sont plus que téméraires, ils sont ingrats, présomptueux et insensés.
Un célèbre docteur (1) prescrivait la dévotiondu matin comme le meilleur préservatif pour la santé, car, disait-il, rien ne contribue plus à la santé du corps que la tranquillité de l'âme et le gouvernement sage de ses passions, et rien ne contient mieux les passions, ne donne plus de vigueur et de vie à nos travaux de la journée, que les méditations religieuses et la prière du matin.
Je ne sais pourquoi, mais pour l'ordinaire les événements arrivent au moment où nous y sommes le moins préparés, et le Sauveur nous a avertis qu'il viendrait à l'heure où nous ne l'attendrions point. Si donc nous négligeons de commencer une journée par l'adoration de Dieu, il pourrait arriver que ce fut dans cette même journée que notre âme nous serait redemandée.
J'ajoute enfin, que quoique le succès de nos desseins soit sans doute désirable, que quoique nos enfants, nos amis, nous soient bien chers, que quoique la conservation de la vie ait bien des douceurs pour nous, il est cependant des biens d'un plus grand prix qui doivent nous porter à adresser nos prières au Tout-Puissant, et à consacrer à la dévotion nos premières pensées du matin, je veux dire, que nous avons encore à lui demander qu'il préserve nos âmes du péché.
Nous
marchons
dans un monde fécond en tentations, nous y trouvons «un
adversaire qui rode autour de nous comme un lion rugissant qui
cherche celui qu'il pourra dévorer.» 1 Pier. V.
8.
Et comme nos passions s'enflamment aisément et deviennent
fougueuses quand elles sont en feu; comme notre cœur est
volage et notre raison faible, si nous voulons nous préserver
de la honte et du crime dans nos communications avec le monde,
si nous prenons quelqu'intérêt au sort de notre âme
immortelle, si nous tenons pour un bonheur de porter au-dedans
de nous une conscience pure, nous n'entrerons jamais dans ce
monde séducteur sans avoir sollicité le secours de la grâce
divine et l'influence du St. Esprit, pour diriger nos pensées,
nos paroles et nos actions pendant tout le cours de la
journée. Car si nous y entrons sans le se d'obtenir
son
secours au besoin. Dieu nous préservera de tentation ou il
viendra à notre secours quand nous serons tentés, ou enfin il
nous relèvera et nous replacera dans un état de justice si
nous avons eu le malheur de tomber.
Mais outre que la dévotion sincère du matin nous assure le secours de la grâce divine, elle a un grand effet pour disposer le cœur à la piété, pour l'assaisonner de penchants vertueux, pour dompter sa légèreté et calmer ses passions.
Des solliciteurs cherchent dès le matin à entraîner nos affections pour la journée; le monde et ses intérêts, la chair et ses convoitises travaillent de concert; mille distractions, mille amusements nous assiègent et s'efforcent à nous entraîner, de manière que si nous négligeons de nourrir dès notre réveil, notre âme des grandes idées de Dieu, de sa Providence, de son Jugement, de là vie à venir, quelqu'une de ces sollicitations nous assaillira, prendra possession de notre cœur, s'assurera de ses affections, nous poussera à la recherche des vanités, et peut-être dans le crime, dans l'ignominie et dans la perdition.
Veuille l'Être Suprême dans sa bonté, nous délivrer de ce malheur par les mérites et la médiation de Jésus-Christ, auquel, comme au Père et au St. Esprit, soit honneur, louange, gloire et domination pour le présent et pour l'éternité.
Amen!
1) Herman Botrhave, professeur en médecine dans l'Université de Leyden, fut comme tous les grands hommes, exposé à la calomnie, et c'est au sujet de ce vice qu'il nous a laissé le conseil suivant: «Les étincelles de la calomnie s'éteignent bientôt d'elles-mêmes, si on évite de souffler dessus».
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