Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

PARABOLE DE L'ENFANT PRODIGUE

LUC, XV, 11-32


Enfant prodigue

Cette belle parabole paraît avoir été proposée par le Seigneur, en même temps que celles de la brebis perdue et de la Pièce de Monnaie: il est probable que les Pharisiens et les scribes, ainsi que les péagers, objet de leur mépris, étaient aussi présents pour l'entendre, et que Jésus les avait spécialement en vue les uns et les autres dans la parabole qu'il leur adressa.

«Un homme, dit-il, avait deux fils.» Le Sauveur ne nous apprend rien sur leur première enfance; mais la suite du récit nous fait présumer qu'ils avaient été élevés dans l'abondance et que leur père se montrait indulgent pour les désirs de leur âge. Néanmoins, le plus jeune, pour s'affranchir entièrement de l'autorité paternelle, résolut de quitter la maison, et sans beaucoup de ménagements, il lui dit: «Mon père, donne-moi la part du bien qui me doit échoir.» Le père dut, sans doute, être blessé d'une semblable demande, cependant il ne s'y refusa pas et partagea tout ce qu'il possédait entre ses deux fils. Il semble qu'après une telle marque de bonté ces jeunes gens auraient dû se sentir engagés par la reconnaissance à demeurer près de leur père et à répandre du bonheur sur la fin de sa carrière: au lieu de cela, peu de jours s'étaient écoulés, lorsque le cadet, «ayant tout amassé, s'en alla dans un pays éloigné.» Il s'attendait probablement à être fort heureux lorsqu'il serait devenu son propre maître et qu'il aurait acquis la liberté de faire tout ce qu'il lui plairait; mais il ne tarda pas à être tristement désabusé. Il se livra à tant de débauches et d'extravagances, que bientôt il eut dissipé tout son bien; aucun ami ne pouvait venir à son aide, car il n'était entouré que d'étrangers, et pour ajouter à sa détresse, «il survint une grande famine dans ce pays-là», en sorte que ceux mêmes qui auraient pu s'intéresser à lui n'avaient rien à lui donner. Enfin, une personne consentit à lui accorder de l'occupation, mais sans se charger de sa nourriture; elle l'envoya dans ses possessions pour paître ses troupeaux, emploi bien vil et rebutant pour un Juif, à qui la loi défendait de manger la chair de ces animaux et même de les toucher (Lévit., VII, 8). Quel changement de situation pour ce pauvre jeune homme! lui qui naguère vivait dans la maison d'un tendre père, nourri, vêtu, servi, entouré de soins et de prévenances, le voilà réduit à une condition si dégradée que le moindre des serviteurs de son père s'y serait refusé; et pour surcroît de misère, son dénuement était tel qu'il se trouvait réduit à envier la grossière et dégoûtante nourriture des pourceaux.

Maintenant, mes jeunes amis, avant que j'essaie de vous expliquer ce que le Sauveur veut nous apprendre par cette portion de la parabole, je vous ferai remarquer que bien des jeunes gens agissent aujourd'hui de la même manière que l'enfant prodigue, et se plongent volontairement dans une infortune aussi grande que la sienne. Peut-être parmi mes lecteurs n'y en a-t-il aucun qui se trouve actuellement dans ce cas, niais j'ai lieu de craindre que quelques-uns ne soupirent après le moment où ils pourront se livrer à leur goût pour l'indépendance.

Sans doute, plusieurs ont des parents pieux qui s'efforcent de les élever dans la connaissance et dans la crainte du Seigneur. Chaque Dimanche, ils les conduisent dans la maison de Dieu, et ne leur permettent pas de passer leur temps à folâtrer et à courir de côté et d'autre pendant ce saint jour; ils ne les conduisent ni aux fêtes mondaines, ni au théâtre, et cherchent à leur inspirer du goût pour un autre genre de récréations. Vous qui avez de tels parentsvous devriez en éprouver une véritable reconnaissance et vous rappeler toujours qu'en agissant de cette manière ils vous donnent la plus forte preuve de leur attachement. Mais peut-être cette contrainte vous est-elle à charge; peut-être quand vous voyez d'autres enfants passer le jour du Dimanche dans les jeux et les plaisirs, vous laissez-vous entraîner à l'envie et seriez-vous bien aises de vous joindre à eux, quoique vous sachiez qu'en faisant cela vous causeriez une vive peine à ceux auxquels votre devoir est d'obéir. Vous n'êtes pas libres maintenant de courir après la multitude pour faire le mal; mais ne vous arrive-t-il point de soupirer après le temps où votre âge vous permettra d'échapper à la surveillance et à la discipline sous laquelle vous retiennent vos parents. N'avez-vous point résolu d'embrasser quelque carrière qui devra nécessairement vous entraîner loin d'eux et vous permettra de pécher sans qu'aucun contrôle soit exercé sur votre conduite?

S'il en est ainsi, mes chers enfants, est-ce là le retour dont vous voulez payer tant d'années de fatigues, de peines et d'anxiétés que vos parents ont endurées à cause de vous: votre mère vous a nourri quand vous n'étiez encore qu'un faible petit marmot. Combien de nuits sans sommeil n'a-t-elle point passées, tandis qu'elle s'efforçait d'apaiser vos cris enfantins, et qu'elle pleurait peut-être elle-même de ne pouvoir vous soulager; combien de fois elle vous a porté dans ses bras, ou bien, penchée sur vous, que de peine n'a-t-elle pas prise pour vous apprendre à marcher, lois même que ses propres forces étaient presqu'épuisées; pendant combien d'heures vous l'avez vue absorbée par son aiguille, afin que vos vêtements fussent mis en bon état, tandis qu'elle aurait eu besoin d'exercice ou de repos. Et votre père, que n'a-t-il pas fait pour vous! Il a été diligent dans ses affaires, il a peut-être travaillé bien tard pendant les six jours de la semaine pour gagner de quoi vous nourrir ' peut-être a-t-il même exposé sa santé afin de se procurer les moyens de vous envoyer à l'école. Ou si votre famille se trouve dans une situation plus aisée, et que votre père ait voulu être lui-même votre instituteur, quelle patience, quel dévouement n'a-t-il pas déployé en cherchant à vous instruire, lorsque vous étiez si paresseux à suivre ses enseignements. Et que de bons avis, que de remontrances affectueuses n'avez-vous pas reçues de si bons parents? Combien de fois ils ont prié avec vous et plus souvent encore pour vous? Est-il réellement possible que vous puissiez songer à les affliger, à récompenser tant de soins et de tendresse par une conduite qui briserait leurs cœurs. Oh! je vous en supplie, abandonnez à jamais de si coupables pensées.

Mais si vous êtes peu touchés des chagrins que vous pourriez causer à vos parents, ne tremblerez-vous pas du moins en pensant au misérable sort que vous vous préparez à vous-même? L'enfant prodigue eut sans doute des compagnons de débauche qui se nommèrent ses amis, tant qu'il eut de l'argent à dépenser avec eux; mais quand la détresse et le besoin survinrent, pas un d'eux n'essaya seulement de lui apporter des consolations ou du secours. Il en sera toujours de même, car la véritable amitié ne se trouve pas dans le cœur des méchants. Êtes-vous riche et heureux, ils vous encouragent à pécher et prennent plaisir dans votre compagnie; mais quand les mauvais jours arrivent, ce sont alors «des consolateurs fâcheux.» La misère et la maladie sont bien plus pénibles à supporter quand elles sont, comme c'est souvent le cas, la suite de ces vices dans lesquels on trouvait une fois tant de charmes; mais, à supposer même que ces afflictions vous fussent épargnées, comment pouvoir être heureux lorsqu'on se sent sous le poids d'une malédiction particulière du Tout-Puissant? (Voyez Deut., XXVII, 16; Prov., XX, 20; XXX, 17).

J'espère que le plus grand nombre de mes jeunes lecteurs frémit à la seule idée d'une conduite aussi dénaturée que celle dont je viens de parler. Vous aimez vos parents, mes chers enfants, et vous seriez bien fâchés de les affliger. Mais aimez-vous Dieu, votre Père céleste, et avez-vous la crainte de l'offenser? Il vous a donné la vie, il vous a nourri chaque jour, et vous a gardés et protégés depuis que vous êtes dans ce monde. Tous les plaisirs, toutes les jouissances que vous possédez viennent de lui; en outre, il vous a fait connaître l'immensité de son amour par le don de son Fils bien-aimé, qui est mort à place des pécheurs.

Eh bien! éprouvez-vous de la reconnaissance pour tant de bonté? désirez-vous par-dessus tout de lui plaire et «estimez-vous» droits tous les commandements qu'il vous donne (Ps. CXIX, 12S)? ou bien ne sont-ils qu'une tâche et un fardeau pour vous? 
Quels sont vos sentiments à l'égard du Dimanche? Êtes-vous de ceux qui pensent et qui disent: «Quand sera passé ce sabbat» (Am., VIII, 5)? Vous étonnez-vous qu'on puisse trouver du plaisir à prier, à lire la parole de Dieu ou à la méditer? S'il en est ainsi, quelqu'aimable et quelque docile que vous soyez envers vos parents, votre conduite envers Dieu est aussi ingrate que celle de l'enfant prodigue à l'égard de son père. Vous ne pouvez, il est vrai, fuir la présence de Dieu ou vous dérober à sa vue, mais vous faites tous vos efforts pour oublier qu'il vous voit.

Notre Sauveur, en décrivant la misère à laquelle l'enfant prodigue se trouva réduit, voulut nous enseigner quel est le déplorable sort de ceux qui se révoltent contre Dieu. Il en est fréquemment parlé dans la Bible. (Voyez Prov., IV, 19; XXII, 5; Jér.,II, 19). Peut-être, dites-vous: «Nous ne sommes point à plaindre, nous avons autant d'amusements que nous pouvons le désirer; nous ne savons comment nous pourrions être plus heureux que nous ne sommes.) Ah! mes jeunes amis, si vous pensez ainsi, c'est seulement parce que vous ne croyez pas ce que Dieu vous dit dans sa Parole: il déclare «que le Dieu fort s'irrite contre le méchant tous les jours (Ps. VII ,11); que la face du Seigneur est contre ceux qui font le mal.» Maintenant, si vous croyez que cela est la vérité, comment vous serait-il possible d'être heureux? Pensez à ce que doit être la colère du Dieu tout-puissant. Vous ne la redoutez guère, parce que dans ce moment elle ne se fait pas sentir à vous; mais peut-il y avoir du bonheur quand on sait «que les méchants iront en enfer avec toutes les nations qui oublient Dieu?» Remarquez ce trait de la misère de l'enfant prodigue: «Il désirait se rassasier des carouges que les pourceaux mangeaient, mais personne ne lui en donnait.» Cela est probablement destiné à nous enseigner que les plaisirs du péché ne satisfont jamais l'âme et qu'elle est toujours avide de quelqu'autre chose: les carouges n'étaient pas une nourriture convenable à l'homme; et ainsi les choses de ce monde ne sont pas faites pour apaiser ses besoins spirituels. Dieu a créé l'âme pour qu'elle vécut à toujours, et rien que ce qui est éternel ne peut la rendre véritablement heureuse.

Quelque triste et pénible que fut la condition de ce jeune homme, il semble cependant avoir été longtemps avant de penser au moyen d'y échapper. Cette expression: «Étant revenu à lui-même», indique que jusque-là il avait été comme hors de sens, autrement il se serait décidé plus tôt à retourner dans la maison de son père, où il y avait du pain en abondance. Telle est justement la conduite de ceux qui avancent dans la vie sans chercher à recouvrer la faveur de Dieu. Comme je m'adresse à de jeunes lecteurs qui n'ont pas encore éprouvé toutes les jouissances de ce monde, peut-être, se disent-ils, que quand ils seront plus âgés, s'ils n'ont rien trouvé sur la terre qui puisse leur donner du bonheur, ils commenceront alors à le chercher dans la religion; mais s'ils pensent ainsi, ils ne font que s'abuser eux-mêmes, car combien ne voit-on pas de gens qui ont vécu bien des années loin de Dieu, demandant le bonheur aux choses de ce monde, et ne rencontrant qu'amertume et désappointement, répétant sans cesse: «Qui nous fera voir des biens?» et ne trouvant rien qui les satisfasse, et cependant ces mêmes personnes sont encore aussi empressées que jamais à poursuivre ces objets qui tant de fois déjà les ont cruellement trompées.

C'est pourquoi nous conjurons les jeunes gens de revenir à leur Dieu avant de s'être engagés plus loin dans les sentiers de l'iniquité. «Venez, enfants, leur dit David, écoutez-moi, je vous enseignerai la crainte de l'Éternel; qui est l'homme qui prenne plaisir à vivre et qui aime la longue vie pour voir du bien? Garde ta langue de mal, et tes lèvres de parler avec tromperie; détourne-toi du mal et fais le bien; cherche la paix et la poursuis» (Psaume XXXIV, II—14).

Mais si vous persistez à mépriser la faveur de Dieu et à préférer les plaisirs du péché, qui ne durent qu'un temps, rappelez-vous que l'habitude du péché endurcira votre cœur et aveuglera vos yeux de plus en plus; en sorte que Satan vous enlacera dans des chaînes qu'il ne sera plus en votre pouvoir de rompre.

Nous devons maintenant considérer la dernière partie de la parabole, laquelle est destinée à montrer l'amour de Dieu envers les pécheurs et sa bonne volonté à les recevoir en grâce, même après qu'ils ont longtemps erré loin de lui. Mais cet exemple, si bien fait pour encourager les pécheurs à revenir à Dieu sans retard, quelle qu'ait été leur vie passée, ne doit nullement leur servir d'excuse pour différer leur conversion jusqu'au moment où ils seront rassasiés et fatigués de ces choses qui ne sont «que vanité et rangement d'esprit.»

Le prodigue repentant ne chercha point à pallier sa conduite; il ne croyait plus mériter le nom de fils et consentait à être traité comme un domestique, si seulement son père lui permettait de venir vivre dans sa maison. Si vous voulez obtenir les grâces de votre Père céleste, cherchez-les dans le même esprit, et n'imaginez pas que parce que vous êtes des enfants et que vous n'avez pas violé ouvertement les lois de la décence et de la justice, vous n'ayez pas besoin de vous humilier pour obtenir miséricorde. Si vous avez aimé quelqu'autre objet plus que Dieu, si vous avez choisi les joies du monde plutôt que celles qui se trouvent dans l'observation de ses commandements, vous avez été coupables de la plus noire ingratitude, et «ce sont les gratuités de l'Éternel que vous n'ayez pas été consumés» (Lam., III, 22).

Remarquez aussi combien le père fut content du retour de son fils. Il n'attendit pas que son enfant malheureux vînt à lui, mais, «comme il était encore loin, son père le vit et fut touché de compassion, et courant à lui, il se jeta à son cou et le baisa.»
Ainsi Dieu attend pour faire grâce et vient au-devant du pécheur qui s'est mis en route pour retourner à lui. «Il ne veut point qu'aucun périsse, mais que tous se repentent» (2Pier., III, 9).

Le père n'adressa aucun reproche à son fils sur sa mauvaise conduite et n'en fit pas même mention, car il l'interrompit par des expressions pleines de bonté avant qu'il eût achevé son humble requête. Notre bon Dieu aussi a promis à ceux qui le cherchent de tout leur cœur, que «il ne se souviendra plus de leurs péchés, ni de leurs iniquités» (Hébr., VIII, 12). Et ce n'est pas que leurs péchés soient peu de chose à ses yeux, car, au contraire, il les a en abomination; mais s'il veut bien les mettre en oubli, c'est parce que «il a fait venir sur son Fils bien-aimé les iniquités de nous tous» (Es., LIII, 6).

Non seulement le père fit un bon accueil à son fils, mais, de plus, il pourvut immédiatement à tous ses besoins, il ordonna un festin de réjouissance pour son retour, et lui témoigna son affection et son estime devant tout le reste de la famille. Dieu a de même une abondance de biens en réserve pour les pécheurs humiliés et repentants; il les appelle ses enfants, et leur apprend à le nommer leur Père(Gal., IV, 6, 7). Il les honore en leur permettant d'approcher de lui en tout temps par la prière; puis il leur promet encore de plus grands honneurs dans le siècle à venir (Mal., III, 17, 18), et dans ces demeures célestes où ils seront éternellement heureux de son amour.

Les sentiments de dureté et d'envie exprimés par le fils aîné, représentaient, dans l'intention du Seigneur, le caractère des scribes et des Pharisiens qui murmuraient en le voyant recevoir les péagers et les gens de mauvaise vie. Il y aura toujours dans le monde des gens semblables aux Pharisiens, se croyant meilleurs que les autres, et méprisant ceux qui s'avouent eux-mêmes pécheurs. Mais quoique les hommes puissent dire ou faire, «l'Éternel règne», et nul ne peut l'empêcher d'agir selon son bon plaisir. Il est «le Dieu fort, pitoyable, miséricordieux, tardif à colère, abondant en gratuité et en vérité» (Exode, XXXIV, 6). Il est impossible d'exprimer le crime et la folie de ceux qui n'aiment pas le plus parfait de tous les êtres, et il est également impossible de décrire le bonheur de ceux qui l'ont choisi pour leur Dieu, car «l'Éternel est un soleil et un bouclier; l'Éternel donne la grâce et la gloire, et il n'épargne aucun bien à ceux qui marchent dans l'intégrité» (Ps. LXXXIV, 11).


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