Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

LA BIENFAISANCE A GENÈVE

INTRODUCTION.


Nul doute qu'il ne faille chercher longtemps avant de rencontrer ailleurs qu'à Genève des établissements de bienfaisance aussi nombreux que les nôtres, proportionnellement au chiffre de la population. Il est intéressant de constater combien l'esprit chrétien s'y est montré ingénieux et empressé à soulager l'infortune sous toutes ses formes, et même à aller au-devant de l'indigence pour lui opposer des obstacles préventifs. Mais le fait même de cette multiplicité exige que l'on mette de l'ordre dans cet examen, et qu'en formant de toutes ces œuvres quelques groupes naturels, on en fasse mieux saisir l'ensemble et la variété. On peut, ce nous semble, les réunir en quatre grandes classes, savoir:

1° Les institutions de prévoyance, comprenant toutes les mesures préventives destinées à prémunir contre la misère.

2° Les œuvres qui ont pour objet l'éducation et l'instruction, en tant qu'elles revêtent le caractère d'actes de bienfaisance. À un certain point de vue, c'est encore de la prévoyance appliquée à des considérations de l'ordre moral et intellectuel.

3° Les fondations qui ont exclusivement pour but l'assistance des indigents malades ou infirmes, et leur procurent des soins dictés par la plus légitime compassion.

4° Les établissements mixtes qui répondent à des besoins divers, et revêtent généralement le caractère de bourses de charité, mises au service de la misère, quel que soit le genre de secours qu'elle réclame.

La première série a déjà fait l'objet d'une publication récente(Voyez La Prévoyance à Genève, par G. Moynier. Brochure in-8° de 60 pages. Genève, 1857.) La troisième est celle que nous mettons aujourd'hui sous les yeux des lecteurs des Étrennes religieuses. Plus tard, s'il plaît à Dieu, nous aborderons le reste.

Ainsi, pour nous conformer à ce programme, nous allons passer successivement en revue un certain nombre d'établissements que nous subdiviserons comme suit:


I. Malades et Blessés.

1. Hôpital de Genève.

2. Hôpital cantonal.

3. Fondation Tronchin, pour les malades des communes réunies.

4. Dispensaire médical.

5. Dispensaires spéciaux pour les maladies des yeux.

6. Société des Dames du Dispensaire.

7. Caisse de Secours des Pompiers. 

8.Secours aux noyés.


II. Convalescents et Valétudinaires.

9. Établissement des jeunes garçons convalescents.

10. Chalet Tronchin, à Bessinges.

11. Pension de Tournay.

12. Établissement de Colovrex.

III. Vieillards et Infirmes.

13. Asile des Vieillards.

14. Fondation Tronchin pour les vieillards.

15. Maison cantonale des aliénés.

16. Institution des Sourds-Muets.


IV. Établissements mixtes.

17. (Notice collective.)


Hôpital de Genève.

Le nom de cet établissement semble devoir lui assurer une place, et même la première, dans le cadre que nous nous sommes tracé; mais, en fait, il n'y rentre plus, depuis que son infirmerie a cessé d'exister, et que l'Hôpital Cantonal lui a succédé.

Néanmoins, en traitant de la bienfaisance, nous ne pouvions passer complètement sous silence une institution antique et nationale à laquelle se rattachent tant de souvenirs, et qui a joué pendant trois siècles un si grand rôle. Le chiffre de ses dépenses, qui s'élèvent annuellement à 300,000 francs environ, suffit pour faire juger de son importance.

Si l'Hôpital de Genève a fermé son infirmerie, il continue à pratiquer l'assistance sur une très large échelle en faveur des anciens Genevois, qui seuls y ont droit; mais la transformation qu'il a subie nous dispense d'entrer ici dans de plus grands détails sur ce qui le concerne, et nous nous bornons à le mentionner pour mémoire.


Hôpital Cantonal.

La constitution de 1847 posa la première base de cet établissement, en imposant au Conseil d'État l'obligation de présenter un projet de loi sur cet objet. Il en résulta la loi du 23 juin 1849, qui organisa l'Hôpital cantonal. Son ouverture a eu lieu le 1er juillet 1856, et il a remplacé dès lors l'ancien Hôpital de Genève.

Le bâtiment est situé dans le domaine de la Cluse, qui appartenait à l'ancien Hôpital.

La Commission administrative se compose de neuf membres, dont trois sont élus par le Conseil Municipal de Genève, trois par les Conseils Municipaux des autres communes, et trois par le Conseil d'État. Ils sont nommés pour quatre ans.

Le but de l'Hôpital cantonal est déterminé comme suit par la loi du 23 juin 1849:

Art. 1er. Il sera, établi dans le canton de Genève un hôpital cantonal pour y recevoir et y soigner les malades et les blessés.

Art. 2. Tous les citoyens du canton de Genève qui ne peuvent subvenir aux frais que réclame une maladie ou des blessures, seront reçus gratuitement dans cet Hôpital.

Art. 3. L'Hôpital cantonal recevra en pension les malades et les blessés qui peuvent subvenir, en tout ou en partie, aux frais de leur traitement et de leur entretien.

Art. 4. Les étrangers indigents seront reçus aux frais des communes, du Bureau de Bienfaisance ou du Gouvernement cantonal, suivant les cas qui se présenteront.

Art. 5. En cas de maladie ou de blessure grave, l'entrée de l'Hôpital sera accordée immédiatement, sur le simple aperçu de la maladie ou de la blessure, ou sur le certificat d'un médecin du canton.

L'Hôpital fait face à ses dépenses annuelles au moyen des ressources suivantes:

1° Par des sommes versées chaque année par l'Hôpital de Genève, la fondation Tronchin, les communes, et le Bureau cantonal de Bienfaisance, en faveur des malades qui sont à la charge de ces établissements;

2° Par le produit des pensions, fixé provisoirement à 1 fr. 50 c. par jour;

3° Par des dons et des legs;

4° Par une collecte annuelle;

5° Par une partie (1/9) du produit des amendes perçues sur le canton par les douanes fédérales;

6° Par la moitié du produit de l'impôt sur les chiens;

7° En cas de déficit, par des centimes additionnels sur les contributions directes.


Pour parer aux frais d'achat de terrain et de construction, la Commission administrative a été autorisée successivement à émettre divers emprunts qui, au 31 décembre 1856, s'élevaient à la somme de 936,983 francs.

Le premier semestre d'exploitation a soldé par un déficit de 13,246 francs.

(Nous aurions désiré ajouter ici quelques détails sur l'Hôpital Catholique de Plainpalais. Les renseignements relatifs à cet établissement n'ayant pu être recueillis en temps utile, nous nous bornons à le mentionner pour mémoire.)


Fondation Tronchin pour les malades des communes réunies.

Par acte du 8 mai 1818, M. Ch. Tronchin fit don d'une rente perpétuelle de 3,000 francs, destinée à faire donner, dans l'Hôpital de Genève, des traitements médicaux aux malades indigents des communes catholiques réunies par les traités de Paris et de Turin. Le même acte détermina le chiffre de l'allocation de chaque commune proportionnellement à sa population. De nouvelles communes ayant été formées postérieurement à cette époque, par le partage des anciennes, leur part a été déterminée d'après la même base.

Dans un arrêté de la même année, le Conseil d'État organisa une Commission de trois conseillers d'État, avec faculté de s'adjoindre des membres externes, pour administrer la dite fondation. Cette Commission, à son tour, dut organiser dans chaque commune un comité de cinq membres, dont le maire et le curé firent partie de droit, pour recevoir les demandes, prendre des informations et les transmettre à la Commission, qui seule peut statuer sur l'admission des malades. Depuis le règlement du Conseil d'État du 4 mars 1843, le Département de l'Intérieur a remplacé la Commission administrative.

Les ressources de la fondation se sont accrues successivement de divers dons et legs, et la fondation se trouve avoir un revenu fixe annuel de 3,660 francs.

La fondation avait primitivement un fonds général de réserve qui a été supprimé en 1846. Il en est résulté un accroissement dans la répartition habituelle. Actuellement, chaque commune dépose à la caisse de l'État les économies qu'elle réalise sur son contingent annuel, pour se former un fonds de réserve particulier. Lorsque cette réserve se trouve épuisée pour une commune, le Bureau cantonal ou les administrations communales de bienfaisance y suppléent.


Dispensaire médical.

Cette institution, fondée en 1820 par MM. les docteurs Gosse, Prévost et Dupin, a pour but de fournir aux pauvres les consultations, les visites de médecin, ainsi que les remèdes, sans leur occasionner de dépense, et de donner également gratuitement une sage femme aux femmes en couche.

En conséquence, des consultations gratuites ont lieu les lundi, mercredi et samedi, de 10 à 11 h. (Cour de St-Pierre, 103, au rez-de-chaussée). Il y a toujours trois ou quatre médecins ou chirurgiens attachés à l'établissement, et ils se remplacent réciproquement à l'heure de la consultation. Quant aux visites, les malades s'adressent directement à celui d'entre eux par lequel ils désirent être soignés. Les soins du médecin étant gratuits, il n'y a à pourvoir qu'au paiement des remèdes et à celui des sages-femmes. À cet effet, le Dispensaire a fait imprimer des cartes qui se trouvent chez M. Bruno, pharmacien du Dispensaire, et dont les personnes charitables peuvent se pourvoir a raison de 6 fr. le paquet de douze cartes, et 12 fr. le paquet de vingt-quatre. Les cartes de douze au paquet sont bleues, et périmées six mois après le jour de leur achat; les autres sont blanches, et valables pour une année.

Les souscripteurs distribuent leurs cartes aux pauvres, qui, s'ils peuvent sortir, les apportent à la consultation; l'ordonnance est alors écrite et signée sur le dos de la carte, et, sur sa présentation, le remède est délivré gratis par le pharmacien. À chaque consultation, il faut apporter une nouvelle carte, les médecins n'en distribuant jamais au Dispensaire même.

Les soins des sages-femmes ne sont pas donnés gratuitement de leur part. Elles reçoivent du Dispensaire 6 fr. par accouchement, et elles s'engagent à soigner la femme en couche pendant le temps nécessaire. Le Dispensaire exige dix cartes de la personne qui vient s'inscrire pour un accouchement. Si la sage-femme estime avoir besoin de l'aide d'un chirurgien, on fait chercher un de ceux du Dispensaire.

Un registre est ouvert, au Dispensaire, pour y inscrire les accouchements et les consultations, ainsi que les ordonnances qui en ont été la conséquence, afin, surtout pour ces dernières, que le médecin puisse retrouver l'histoire du malade et les remèdes déjà prescrits. — Pour les visites, comme c'est toujours le même médecin qui suit une maladie, aucun registre n'est tenu; le médecin emploie une carte pour chaque visite, si toutefois il a un remède à prescrire.

Pour ce qui regarde les bandages, le Dispensaire a un bandagiste qui s'est engagé à fournir les bandages simples pour le prix de 5 francs. Cette somme est payée par le protecteur du malade, sur un bon du chirurgien.

Toutes les catégories de pauvres, s'ils sont malades, ont droit aux secours et aux visites du Dispensaire. Les médecins et les souscripteurs doivent exercer la plus grande surveillance pour s'assurer si les pauvres qui réclament des secours sont réellement dans l'indigence.

Les dépenses du Dispensaire proviennent de la différence qui existe entre le prix de la carte (50 centimes) et le prix réel du remède qui s'y trouve prescrit, puis du franc payé pour chaque accouchement; il y a en outre le loyer d'un petit appartement pour les consultations et le logement d'un concierge. L'établissement n'a pour ressources que la vente des cartes et les dons qui lui sont faits.

On voit, par ce qui précède, que le Dispensaire médical est entièrement distinct de celui connu sous le nom de Dispensaire des Dames.

Le personnel du Dispensaire médical est composé de MM. D'Espine, Gautier, Appia et Duval.


Dispensaires spéciaux pour les maladies des yeux.

M. le docteur Moricand a fondé cette année un Dispensaire spécial, où il donne des consultations et des soins aux personnes affectées de maladies d'yeux. Ce petit établissement, situé place du Molard, 95, au 1er étage, est entretenu aux frais de son fondateur. — Il contient quatre lits, dont deux pour hommes et deux pour femmes. On y reçoit les malades dont le traitement des yeux nécessite une opération ou des soins assidus. Un infirmier et sa femme y habitent et peuvent recevoir, de ceux des malades qui le désirent, le prix d'une pension alimentaire, quoique, pour les indigents, M. Moricand prenne a sa charge tous les frais nécessités par leur séjour dans son établissement.

Des consultations gratuites ont lieu au même endroit tous les jours de 11 h.1/2 à 1 h., le dimanche excepté.

Un autre Dispensaire, destiné à la même catégorie de malades, a été aussi institué récemment au local des vaccinations publiques, rue du Marché, 36, allée de l'Écu-de-France, 2e cour. Des consultations gratuites y ont lieu les mercredis et les samedis de 11 h. à midi.


Société des Dames du Dispensaire.

Cette Société a été créée en 1824. Peu après la fondation du Dispensaire médical, lequel date de 1820, les Docteurs qui le composaient alors reconnurent la nécessité d'un complément à leur œuvre charitable, mais purement médicale, et, dès leur premier compte rendu en 1823, ils émirent le vœu de voir un comité de Dames s'associer à leurs travaux. Bientôt l'appel fut entendu: quelques Dames se réunirent dans le but de visiter les malades indigents traités par les médecins du Dispensaire, et de contribuer, soit à l'allégement de leurs souffrances, soit à l'accélération de leur rétablissement, par une surveillance active, par des soins affectueux, et par quelques secours appliqués à propos.

Ces secours consistent principalement en aliments appropriés à l'état du malade, en prêts de linge de lit et de corps, et dans l'assistance une garde-malade. Le Comité a souvent aussi payé des pensions à la campagne pour des convalescences prolongées, ou pour le rétablissement de santés ébranlées.

Les Dames du Dispensaire accordent des secours aux malades qui leur sont adressés par MM. les Docteurs, ou par les Pasteurs, ou par toute autre personne recommandable; mais elles ne fournissent en aucun cas des remèdes, ni l'assistance d'une sage-femme. Cette charge incombe au Dispensaire médical, qui a créé pour cela des cartes dont la distribution ne concerne en aucune façon le Dispensaire des Dames.

Les ressources de la Société consistent uniquement dans les dons et les legs qui lui sont faits.

Le nombre des malades secourus a toujours été croissant depuis l'origine de la Société, et, en 1857, il a atteint le chiffre de 476.

Les dépenses, pour la même année, se sont élevées à 10,120 francs, et les recettes ont 10,320 francs.


DAMES DU DISPENSAIRE.

Mme Sarasin, présidente; Mlles Choisy, secrétaire, et Lafon, trésorière.

Pour la Diaconie de Saint-Pierre: Mmes Comte, Deloche, et Paris-Freundler.

Pour la Diaconie de la Madeleine: Mmes Bertrand-Senn, Archinard-Duvillard, Goy-Audra, Alfred Vieusseux.

Pour la Diaconie du Temple-Neuf: Mlles Lutscher et Duperrut.

Pour la Diaconie de Saint-Gervais-Sud: Mlle Schaub; Mmes Menn et Magnin-Foex; M1Ie Odier-Cazenove, et Mme Guédin.

Pour la Diaconie de Saint-Gervais-Nord: Mlles Mestral et Trot, et Mme Borgeaud.


Caisses de secours pour les Pompiers.

Il existe quatre Caisses de secours pour les pompiers du Canton, savoir: une pour les sapeurs-pompiers de la ville de Genève, et trois pour les pompiers des communes rurales.

La première est la plus ancienne. Son règlement a été approuvé par le Conseil d'État le 4 novembre 1844, confirmé le 27 mars 1846 et modifié le 25 septembre 1849, pour le mettre en harmonie avec les exigences de la loi sur les fondations du 22 août 1849, et en particulier de l'art. 15, § 11. De nouvelles modifications furent encore introduites a la date du 10 décembre 1852, ensuite de la loi du 16 Juin 1852 sur les compagnies d'assurances.

Les Caisses destinées aux pompiers des communes rurales furent créées par la loi du 16 juin 1852, qui en institua trois, savoir: une pour les communes entre le Lac et l'Arve, une pour celles entre l'Arve et le Rhône, et une pour celles entre le Rhône et le Lac.

Un règlement du 10 décembre 1852 en détermina l'organisation. Ce règlement est calqué en grande partie sur celui de la Caisse des sapeurs-pompiers de la ville, en sorte que ce que nous allons dire de cette dernière pourra s'entendre aussi des autres. Observons cependant que la Caisse urbaine est une institution municipale, tandis que celles des communes rurales sont du ressort de l'autorité cantonale. De là vient que la surveillance exercée par le Conseil Administratif, pour la ville, est remplacée par celle du Département de l'Intérieur pour les communes.

Chaque Caisse a pour but de fournir, aux pompiers du groupe de communes correspondant, des secours ou des indemnités en cas de maladies graves ou d'accidents survenus dans leur service relatif aux incendies. La famille d'un pompier mort dans l'un de ces cas peut également recourir aux secours de la Caisse.

Le fonds capital est formé: 1° par des legs; 2° par le solde disponible au 31 décembre de chaque année. Ce fonds capital, placé dans les établissements publics ou en rentes ou rescriptions sur l'État ou sur les communes, ne peut être employé que dans des cas très graves et avec l'approbation du Conseil d'État.

Remarquons ici que l'arrêté du Conseil d'État du 2 novembre 1849 exempte la Caisse des sapeurs-pompiers de la ville des droits de succession sur les legs qui peuvent lui être faits, mais elle ne dit rien des Caisses des communes, qui n'existaient pas alors. Toutefois, le Conseil d'État s'étant réservé de statuer sur requête spéciale pour les cas non prévus, il étendra probablement de cette manière et par analogie la dispense aux Caisses rurales.

Il est pourvu aux dépenses ordinaires: 1° par les intérêts du capital; 2° par les dons, primes ou gratifications qui peuvent être faits à la Caisse; 3° par le droit perçu sur les Compagnies d'assurance contre l'incendie. Ce droit de patente a été établi comme suit par la loi du 28 février 1855.

Les Compagnies sont divisées en trois classes: celles de la première paient 300 fr. par année; celles de la deuxième, 200 fr.; celles de la troisième, 100 fr.; l'assurance mutuelle paie une somme égale au total des droits de patente perçus sur les Compagnies.

Les Caisses ont droit à la répartition de ces revenus dans la proportion du capital immobilier assuré dans leur circonscription, et un compte est ouvert à cet effet sur le grand-livre de l'État aux Caisses de secours pour les pompiers.

Chaque Caisse est administrée par un Comité dont les fonctions sont gratuites et qui est renouvelé intégralement tous les cinq ans. Il porte le nom de Comité de la Caisse de secours. Ceux des communes rurales ont leur siège à Chêne-Thonex, à Carouge et au Petit-Saconnex. Le Comité est composé de neuf membres pour la ville, et d'autant de membres qu'il y a de communes dans la circonscription de la Caisse pour les campagnes. Ils sont élus par tous les membres du corps qui ont droit à la Caisse; leurs noms sont affichés dans chaque hangar.

Les demandes de secours doivent être faites par écrit au Président du Comité, ou présentées verbalement par un membre du dit Comité. Le Comité délibère sur la quotité et la nature de l'indemnité à accorder, s'il y a lieu, dans chaque cas particulier. Il peut aussi déléguer un ou plusieurs de ses membres pour surveiller la judicieuse application des secours, et même prendre l'initiative pour en accorder avant toute réclamation.

Les Comités sont présidés par:

MM. Mercier, lieutenant-colonel, à Genève.

Dutrembley, capitaine, à Chêne-Bougeries.

Chaleuil, Ch., à Carouge.

Schaub, capitaine, au Petit-Saconnex.


Secours aux Noyés.

Le lac, le Rhône, l'Arve et naguère encore les fossés des fortifications, offraient, aux abords de la ville, des dangers trop réels, pour n'avoir pas éveillé dès longtemps la sollicitude du gouvernement.

Une publication du Petit Conseil, du 26 juin 1786, engagea les citoyens, même par l'appât d'une récompense, à porter secours aux noyés. Il fit en outre dresser par les docteurs-médecins et les maîtres en chirurgie une Instruction sur les secours les plus provisionnels et les plus utiles pour rappeler à la vie les noyés, et manière d'administrer ces secours.

Enfin, dix boîtes de secours furent déposées dans des localités judicieusement choisies.

L'institution de ces boîtes s'est maintenue, et, durant l'existence du Conseil de santé (1829 à 1856), elles étaient sous sa surveillance. Par les soins de l'un des membres de ce Conseil, elles étaient visitées régulièrement deux fois par année et maintenues en bon état. Une enseigne apparente indiquait les maisons où elles étaient déposées.

Leur contenu consistait:

1° En un certain nombre d'objets qui peuvent être employés par le premier venu, par exemple: une couverture et un peignoir de laine, des frottoirs, des serviettes, etc.;

2° En instruments spécialement destinés aux soins médicaux;

3° En quelques médicaments;

4° En une instruction imprimée relative aux premiers soins à donner aux asphyxiés.

Les boîtes étaient déposées aux lieux ci-après désignés:

Pour le Lac: Hermance; Versoix; Cologny (Belle-Fontaine); Pâquis, (Hôtel de la Navigation); Eaux-Vives.

Pour le Rhône et les fossés: Bains Marin; Bains de l'Ile; Moulins du Seujet; Poste; Couloirtrenière; Octroi de la Porte Neuve.

Pour l'Arve: Bains de Carouge; Bains de Plainpalais.

Indépendamment des boîtes de secours, l'autorité a fait placer des appareils de sauvetage en divers endroits, savoir: Bâtiment de la Poste, place Bel Air; Quai de l’Île, 244; Quai des Bergues, 26; Ile Bousseau; Bains d'Arve.


Établissement des jeunes garçons convalescents.

La création de cet établissement est due à quelques dames, membres du Dispensaire, qui, ayant eu connaissance de l'embarras où se trouvent les personnes qui s'occupent d'enfants pauvres, dont la santé exigerait un séjour à la campagne, formèrent en 1850 le projet de faire, dans ce but, un modeste essai d'établissement.

Ayant pu, par les dons de quelques personnes charitables, réunir la somme nécessaire pour faire face aux frais d'installation, ces dames firent choix d'un emplacement salubre, situé dans les environs de Chêne, et y placèrent comme gouvernante une personne capable et dévouée pour être à la tête de la maison sous leur direction immédiate. Cet établissement, situé aujourd'hui à Grange-Falquet, près Chêne, est ouvert du 1er mai au 31 octobre. Il est destiné à recevoir à la fois 16 à 18 jeunes garçons de 3 à 12 ans, convalescents ou d'une santé délicate. Le prix de la pension est de 18 fr. par mois.

Les parents ou les protecteurs de l'enfant qu'on désire y faire admettre, doivent s'adresser à Mme Morel, Fusterie, 82.

Les affections de la peau sont un motif d'exclusion lorsqu'elles présentent un caractère contagieux. Les enfants doivent être amenés dans un état de grande propreté; ils doivent apporter un chapeau de paille, 2 pantalons, 2 blouses et 2 paires de souliers; le linge est fourni par l'établissement.

Il n'y a point d'instruction obligée; cependant on occupe les enfants par quelques leçons.

Les ressources de l'établissement consistent en dons et en legs, et dans le prix des pensions.

En 1857, il y a eu 31 pensionnaires.

Les dépenses se sont élevées à 3,783 fr., et les recettes ont 3,320 fr.

Les dames du comité sont: Mmes Bouvier-Bernard, Duvillard, Goty, Schaub, Brocher-Duvillard.


Châlet Tronchin, à Bessinges.

M. Henri Tronchin eut, en 1839, l'idée de fonder dans sa belle campagne de Bessinges, dans un lieu qui réunit aux agréments de la plus magnifique vue des promenades variées et un air vif et pur, un établissement propre à recevoir pendant l'été, moyennant une modique pension, les personnes qui ont besoin de soins, d'un bon air, d'un régime sain approprié à leur état de santé, et même de directions médicales et de remèdes. Un docteur de Genève s'y rend, au moins une fois par semaine, pour voir les personnes qui ont besoin de ses conseils.

Le prix de la pension a été fixé à 25 fr. en tout, remèdes compris, ce qui est, on le comprend, fort au-dessous de la dépense. On ne reçoit que des femmes adultes. L'ouverture du chalet a lieu ordinairement au 1er avril, et il se ferme au 1er novembre.

Pour être admis au chalet, il faut d'abord s'adresser au médecin de l'établissement, M. D'Espine, rue du Puits-Saint-Pierre, qui déclare s'il croit l'air de Bessinges propice à la requérante. Une fois ce point éclairci, la demande est adressée au fondateur, qui l'admet lorsqu'il y a place, ou qui détermine à quelle époque l'entrée pourra avoir lieu. Le docteur prescrit aussi, suivant l'état des personnes admises, quelle doit être la durée de leur séjour.


Pension de Tournay.

Cet établissement, qui date de 1851, est dû à la Société genevoise d'Utilité Publique, qui, pénétrée de la convenance de fonder un asile destiné à recueillir et à soigner à la campagne, pendant la belle saison, des jeunes filles maladives ou convalescentes, s'est occupée des moyens de favoriser la création d'une pareille institution. À cet effet, en prenant part elle-même aux premiers frais, elle a nommé dans son sein une commission chargée de faire connaître ses intentions, de recevoir des dons, et de réunir ensuite en assemblée générale les souscripteurs, lesquels nommèrent un comité de dames qui, dès lors, a administré ce pensionnat.

Les ressources de cet établissement consistent uniquement dans les dons qui lui sont faits et dans le prix des pensions.

Pour faire recevoir une jeune fille, ses parents ou ses protecteurs doivent la présenter à M. le docteur Figuières, Chanoines, n° 126, lequel, après avoir reconnu la convenance d'un séjour à Tournay, délivre une carte. Munie de cette carte, la jeune fille doit s'adresser à Mlle Morel, Fusterie, n° 82, pour être admise dans l'établissement.

La pension est ouverte du 1er mai au 1er novembre. Elle a reçu 36 pensionnaires en 1857. Le prix de la pension est de 18 fr. par mois. L'âge fixé pour l'admission est de 5 à 14 ans. Les enfants admis sont tenus d'apporter leur petit trousseau de linge et de vêtements; l'établissement ne fournit que le linge de lit, de table et de chambre.

Le château de Tournay, situé sur la colline de Pregny et choisi pour siège de l'établissement, offre tous les avantages désirables, sous le rapport de la localité, de la distribution et de la salubrité de l'air. Une fontaine coulante y facilite le service des bains.

En 1857, les recettes se sont élevées approximativement à 3,600 fr., et les dépenses à 2,710 fr. L'excédant des recettes sera affecté à des améliorations hygiéniques et à des agrandissements.

Les dons peuvent être déposés chez Mlle Morel, Fusterie, n° 82.

Les dames du comité sont: Mmes Bontems, Panchaud-Brun, Perrot de Pourtalès, Saladin (Ernest), Schaub, de Sellon (Hortense).


Établissement de Colovrex.

Tandis qu'à Tournay on n'admet que des jeunes filles et à Bessinge que des adultes, l'établissement fondé en 1857 a Colovrex, par Mme Eynard, est destiné aux unes comme aux autres et répond à des besoins de même nature. On y admet les femmes convalescentes ou d'une santé délicate, qui ne réclament pas des soins médicaux quotidiens. — M. le docteur Sylvestre est attaché à l'établissement, et le visite chaque semaine.

Dans la petite maison, qui a servi à son installation, il y a 12 lits actuellement, mais des agrandissements projetés permettront d'en augmenter le nombre. — Le prix de la pension n'est pas encore définitivement fixé, car la pensée de la fondatrice n'a reçu jusqu'ici qu'un commencement d'exécution.

L'Établissement est placé sous la direction d'une diaconesse, Mlle Gallot.


Asile des Vieillards. (Voyez la Prévoyance à Genève, page 51)

Cet asile est une création de la constitution de 1847. La loi du 27 juin 1849 en posa les bases principales. Il a été ouvert le 15 juin 1856.

Il est administré par une commission de 11 membres, dont trois sont nommés par le Conseil Municipal de la ville de Genève, trois par le Conseil d'État, et deux par les citoyens admis dans l'établissement.

Pour l'achat du terrain (ancienne campagne de Grenus, au Petit-Saconnex) et pour la construction des bâtiments, la commission administrative a fait un premier emprunt de 200,000 fr., pour lequel l'État garantit un intérêt de 4 pour cent et un amortissement de 4 pour cent (Loi du 11 juin 1851). Plus tard, elle dut faire aussi un emprunt supplémentaire de 100,000 fr. avec le même amortissement et une garantie d'intérêts de 4 1/2 pour cent. (Loi du 27 septembre 1854.)

Les revenus de l'asile consistent en dons, en legs, en diverses fondations, en 1/9 du produit des amendes perçues sur le canton par les Douanes fédérales, et en la moitié du produit de l'impôt sur les chiens.

Tout Genevois sexagénaire, et, en cas de place disponible, tout étranger domicilié dans le canton de Genève, peut y devenir pensionnaire. — Il y a trois quartiers: celui des mariés, celui des hommes et celui des femmes. Chaque vieillard est logé seul, ou réuni à d'autres s'il le désire. Tout d'ailleurs concourt à rendre ce séjour agréable: chambres confortables, salles de réunion, bibliothèque, promenades, etc.

Un culte protestant y est régulièrement célébré.

Le taux de la pension est fixé à 30 fr. par mois; mais il devait être élevé récemment, lorsqu'une circonstance fortuite permit de le maintenir sans changement jusqu'au 1er mars 1859. Le reliquat de la souscription nationale en faveur des militaires appelés à prendre part à la campagne de 1857, montant à 13,000 fr. environ, fut abandonné à l'Asile sous cette condition.

Une caisse d'assurance viagère, placée sous la même direction que l'établissement, assure à ses sociétaires l'admission gratuite à l'asile dès l'âge de 60 ans.

Toute demande d'admission doit être faite par écrit à l'administration, et accompagnée de l'acte de naissance légalisé et de l'indication du domicile du requérant.


Fondation Tronchin pour les Vieillards.

Au commencement de janvier 1835, M. Ch. Tronchin créa un comité de 7 membres et lui fit don d'une somme de 100,000 fr., dont le revenu était destiné à fournir à un certain nombre de vieillards indigents des moyens d'existence, ou quelques-unes des douceurs qui allègent les infirmités de l'âge.

Les secours de cette fondation s'accordent à des vieillards des deux sexes, âgés de plus de 70 ans, protestants ou catholiques, et, de préférence, ont des citoyens du Canton. Ils peuvent également être accordés à des étrangers habitant le Canton depuis plus de 30 ans, mais seulement dans la proportion de 1 sur 10 des premiers.

Les secours sont accordés à deux classes de personnes.

La première comprend les pensionnaires; ce sont des vieillards que la fondation place en pension, principalement à la campagne, dans d'honnêtes familles dont les soins leur sont garantis et où l'on pourvoit à tous leurs besoins. Chaque vieillard est placé sous la surveillance directe d'un membre du Comité, qui doit le visiter souvent. Le prix des pensions est d'environ 300 fr. par an.

Les secours de 2e classe, qu'on peut dire exceptionnels, car ils ne rentrent pas précisément dans le but de la fondation, sont accordés à des vieillards septuagénaires qui ne peuvent pas être déplacés, et qui n'ont besoin que d'un supplément de secours variant de 5 à 15 fr. par mois.

D'après un accord fait avec la Direction de l'Hôpital de Genève, la fondation peut recevoir au nombre de ses pensionnaires des vieillards qui reçoivent de cet établissement des secours à domicile. Alors l'Hôpital leur continue son assistance, et la fondation complète le prix de la pension.

Grâce à cet arrangement et aussi à divers dons et legs importants, la fondation a pu augmenter passablement le nombre de ses assistés, qui s'élève actuellement à 60 environ.

Les demandes peuvent être adressées à M. D'Espine père, secrétaire du Comité. (Puits-St-Pierre.)


Maison cantonale des Aliénés.

La loi du 19 juin 1833 autorisa un achat de terrain aux Vernaies, en vue de l'établissement d'une Maison d'aliénés, qui fut créée par la loi du 9 janvier 1835. Cette maison fut construite aux frais de l'État. Des fonds réservés déjà pour cet objet aux budgets des années 1827, 1828, 1831 et 1834, et montant à la somme de 260,000 florins, y furent affectés; mais cette somme fut très inférieure à celle du coût total de l'établissement, qui, aujourd'hui, pourvoit entièrement à son entretien par le remboursement des journées de malades.

La création de cette maison motiva une loi du 5 février 1838 sur le placement et la surveillance des aliénés, ainsi qu'un règlement d'exécution du 7 avril 1838.

La Maison des aliénés est placée sous la surveillance du Département de l'Intérieur, et gérée par un Directeur (M. Duchosal), qui y réside. M. le docteur Coindet, qui, depuis la création de l'établissement, donnait ses soins aux malades, a été remplacé, au mois de mars 1856, par M. le docteur Olivet.

Tout individu atteint d'aliénation mentale peut être reçu dans la maison, sans distinction de sexe, de nationalité, ni de culte. Pour tout individu admis, il est dû une pension dont le prix est variable pour les étrangers, mais qui, pour les Genevois et les Suisses, est fixé, au minimum, a 1 fr. 50 c. par jour.

Pour obtenir l'entrée dans la maison d'un individu atteint d'aliénation mentale, son conjoint ou ses parents doivent s'adresser au Département de Justice et Police, en indiquant les noms et la demeure de l'aliéné, et en produisant un avis médical émanant d'un docteur de la faculté de médecine de Genève, ou d'un officier de santé reçu dans le canton. L'ordre de placement peut être donné d'office par le Département de Justice et Police.

Toute demande relative au placement des aliénés, doit être adressée au président du Conseil d'État.

Le nombre des pensionnaires s'élève ordinairement à une centaine environ.


Institution des Sourds-Muets.

La loi du 5 avril 1833 autorisa le Conseil d'État: 1° à accepter du comité Boissier d'utilité cantonale l'offre d'une somme de 65,000 florins pour contribuer à l'achat d'un terrain et à la construction d'un bâtiment destiné à y placer l'établissement des Sourds-Muets; 2° à y affecter, en outre, une somme de 35,000 florins.

L'établissement ne tarda pas à être installé à Plainpalais. Son but est de donner aux sourds-muets de naissance l'instruction qui tend à les amener à vivre avec indépendance dans la société, et à améliorer par une bonne hygiène, pendant l'enfance et l'adolescence, les mauvaises conditions de santé inséparables de leur état.

Quoique l'établissement soit fondé pour des Genevois, il s'est introduit cependant quelques exceptions à cette règle. Au point de vue religieux, il est mixte; protestants et catholiques y reçoivent également l'instruction religieuse. Il sert aussi pour les deux sexes. Il y a place pour trente élèves, et ce nombre est presque toujours complet. La durée de l'enseignement est en général de six années, et le prix annuel de la pension d'environ 370 francs. L'administration dispose d'une rente annuelle de 600 francs, pour compléter le prix de la pension dans le cas où la famille de l'élève, ou ses protecteurs, ne pourraient atteindre le prix fixé.

L'institution des Sourds-Muets dépend du Département de l'Instruction publique, qui est chargé des frais relatifs à l'immeuble et à l'instruction; une allocation de 2,300 francs environ figure chaque année au budget cantonal sous cette rubrique. Le Département a délégué, pour l'administration de cet établissement, MM. D'Espine père et Pictet-de-Bock, auxquels les demandes d'admission doivent être adressées. Trois dames inspectrices surveillent de près l'établissement, qui est situé à Plainpalais, chemin Gourgas, 393; ce sont Mmes De Lor, Coutau et Duval.

  1. Le docteur D'Espine donne gratuitement ses soins aux élèves.


Établissements mixtes.

Pour compléter l'énumération de tous les établissements qui viennent en aide aux malades et aux infirmes, nous devrions, à la suite de ceux que nous venons de passer en revue et qui répondent exclusivement à ce besoin, en citer plusieurs autres qui rentrent, pour la plupart, dans la quatrième catégorie que nous avons établie dans notre préface, et que, par cette raison, nous nous bornerons à mentionner ici.

Ce sont, en premier lieu,  l’Hôpital de Genève, le Bureau cantonal et les administrations communales de bienfaisance, la Caisse de secours pour les étrangers, la Bourse allemande, la Bourse italienne, etc., etc., qui paient, pour le compte de leurs ressortissants, des pensions, soit à l'Hôpital cantonal, soit à la Maison des Aliénés, soit ailleurs.

Viennent ensuite les Sœurs de la Charité, qui donnent des soins aux indigents; la Fondation Fremin, qui loge et entretient gratuitement six vieillards invalides de la commune du Grand-Saconnex; les Secours à domicile fournis par l'administration de l'Hôpital de Genève.

Enfin, n'oublions pas les Sociétés de secours mutuels, qui ont figuré dans une notice (La Prévoyante à Genève, p. 42.) que nous nous abstiendrons de reproduire.

G. MOYNIER.


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