Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

PREMIÈRE ÉPÎTRE AUX CORINTHIENS

Chapitre 5

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1 En général, on entend parler chez vous d'impudicité et d'une impudicité telle, qu'elle ne se rencontre pas même parmi les païens, savoir que quelqu'un vit avec la femme de son père. Et vous êtes enflés d'orgueil! Et vous ne portez pas plutôt le deuil afin que celui qui a commis une telle action soit éloigné de vous! Car pour ce qui est de moi, qui suis absent de ma personne, mais présent en esprit, j'ai déjà prononcé, comme si j'étais présent, l'arrêt de celui qui en a ainsi agi: au nom de notre Seigneur Jésus, mon esprit étant présent au milieu de votre assemblée, avec le pouvoir que je tiens de notre Seigneur Jésus, je livre un tel homme à Satan, pour la mortification de la chair, afin que l'esprit soit sauvé au jour du Seigneur!

V, 1-5. Avec ce chapitre, l'apôtre aborde un autre sujet. Il va signaler différents faits blâmables et contraires à l'esprit de l'Évangile, qui déparaient l'église de Corinthe. Mais la transition se fait naturellement, l'orgueil de certains hommes (chap. IV, 18, 19) formant un contraste aussi déplorable que saillant avec l'état moral de la communauté. Tout de même cette transition est brusque dans ce sens, que Paul, au lieu de formuler l'antithèse d'une manière générale, arrive droit à un cas particulier, le plus en évidence.

Il y avait à Corinthe un homme, membre de l'église, qui entretenait un commerce incestueux avec la femme de son père. La nature du rapport de parenté existant entre ces deux personnes n'est pas clairement déterminée dans les textes. La femme peut avoir été veuve; selon d'autres, son mari aurait encore été en vie (2 Cor. VII, 12?); il peut s'agir d'un simple concubinage, ou bien encore d'un mariage compris dans la catégorie de ceux que la loi mosaïque et les coutumes de la plupart des peuples proscrivaient; enfin, l'individu en question était probablement le beau-fils de cette femme: en tout cas, le fait était un scandale, même au point de vue des mœurs grecques. On peut encore ajouter que la femme paraît n'avoir point fait partie de la communauté, puisque autrement Paul n'aurait pas manqué de la condamner aussi (v. 13).

Un pareil fait, loin de rester impuni, aurait dû soulever un cri général d'indignation. La stupeur, la douleur aurait dû saisir l'église; elle aurait dû éloigner de son sein l'auteur d'un scandale qui compromettait son honneur et ses mœurs. Comme elle n'en fait rien, Paul, quoique absent, se hâte de couper le mal dans sa racine et prononce une excommunication solennelle contre le coupable. On remarquera l'emphase de sa formule; il insinue qu'aussitôt après la réception de sa lettre, les Corinthiens doivent se réunir en assemblée et procéder à l'expulsion de l'individu; lui, Paul, serait présent en esprit: et dès à présent il fait connaître son vote, qu'il prononce au nom du Seigneur et en vertu de son pouvoir apostolique.

L'excommunication elle-même est en réalité l'exclusion d'un homme de la communauté avec Dieu et Jésus-Christ, une expulsion qui rend celui qui en est frappé membre du monde non réconcilié avec Dieu, en fait par conséquent un sujet de Satan, le prince du monde. Seulement il faut observer que le but ou résultat définitif de cette expulsion n'est pas, dans la pensée de Paul, la damnation irrémédiable et finale, mais au contraire une correction, un amendement (1 Tim. I, 20), soit un châtiment temporaire, suivi, s'il plaît à Dieu, d'un salutaire repentir. Le diable, auteur de tout mal, est pour ainsi dire invité à mortifier la chair du condamné, à lui infliger des douleurs, des maladies, pour réveiller ses bons sentiments (chap. XI, 30).

6 C'est bien à tort que vous vous vantez! Ne savez-vous pas qu'un peu de levain fait lever la pâte tout entière? Ôtez donc le vieux levain, afin d'être une pâte nouvelle, puisque vous devez être sans levain: car notre agneau pascal, Christ, est immolé. Passons donc la fête, non avec le vieux levain, avec le levain du vice et de la méchanceté, mais avec les pains azymes de la pureté et de la vérité!

V, 6-8. En présence de pareils faits, tolérés et regardés avec indifférence, une église chrétienne a bien tort de se vanter de sa foi et de ses qualités spirituelles; elle risque de perdre ce qu'elle peut en avoir encore, car l'exemple est contagieux et l'indifférence est la mère du vice. Cette dernière idée est exprimée par un proverbe (Gal. V, 9): le levain pénètre la masse entière et lui communique son âcreté. (Comp. aussi Matth. XVI, 6, etc.)

L'image que contient ce proverbe est immédiatement employée dans un autre sens encore, et devient une spirituelle allégorie. On sait que durant la semaine de Pâques les Juifs ôtaient soigneusement de leurs maisons tout ce qui pouvait s'y trouver de levain, pour ne manger que du pain azyme. Eh bien, dit Paul, nous aussi nous devons faire cela, mais dans un sens plus élevé. Nous aussi nous avons une semaine de Pâques à traverser, c'est notre vie entière, à partir de notre entrée en communion avec Christ; la fête a commencé pour nous, car le sacrifice, par lequel le rite pascal judaïque débute, est consommé: Christ, notre agneau pascal, est immolé; donc désormais nous sommes dans la condition de ces jours fériés; le levain du vice doit être balayé dehors, il ne doit y rester que le pain azyme de la vertu chrétienne. (La vérité est prise ici dans le sens pratique.) C'est un des exemples les plus ingénieux de la spiritualisation de la loi dans la théologie apostolique. (Voyez encore sur Christ, agneau pascal, Jean I, 29. Apoc. V, 6, etc.) De la combinaison que Paul fait à cette occasion du rite et de la mort de Christ, on peut inférer qu'il savait que Jésus était mort le jour même où l'on immolait l'agneau, ce qui est conforme au récit de Jean (chap. XVIII, 28), mais contraire à celui des évangiles synoptiques.

9 Je vous ai écrit dans ma lettre de ne pas avoir de commerce avec les impudiques, non pas absolument avec tous les impudiques du monde, ou avec les gens cupides, avares ou idolâtres, autrement il faudrait que vous sortiez du monde. Mais je vous ai écrit de rompre tout commerce avec celui qui, tout en se nommant votre frère, serait impudique, ou cupide, ou idolâtre, ou calomniateur, ou ivrogne, ou avare; de ne pas même vous mettre à table avec un homme pareil. Car qu'ai-je, moi, à juger ceux du dehors? Ne sont-ce pas ceux du dedans que vous avez à juger? Quant à ceux du dehors, Dieu les jugera. Éloignez le coupable du milieu de vous!

V, 9-13. Voici quelle est la liaison naturelle des idées que développe ici l'apôtre: Il y a longtemps, dit-il, que vous auriez dû faire ce que je vous recommande ici. Déjà dans ma précédente lettre, je vous donnais un avis général à ce sujet, et j'entendais précisément parler du commerce plus intime entre les membres de l'église. Car pour le monde en général, il n'y a pas moyen d'être absolu à cet égard. Il faut bien qu'on ait des rapports journaliers d'affaires ou autres, avec toutes sortes de gens. Mais dans le sein même de la communauté, aucun vice ne doit être toléré. Les fautes de faiblesse, ou les chutes accidentelles, peuvent être pardonnées par les uns aux autres et doivent surtout être corrigées. Mais s'il y a des vices incorrigibles, enracinés, alors il faut couper court, trancher dans le vif, procéder à une séparation. Paul espérait donc établir une discipline telle, que l'église resterait pure de toute souillure.

On a demandé comment il pouvait supposer la présence dans l'église de gens idolâtres? Il suffira, pour expliquer cela, de prendre le mot dans cette acception plus large qu'il développera dans les chap. VIII et X.

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