Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

ÉPÎTRE AUX GALATES

Chapitre 6

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6 Que celui qui reçoit l'instruction dans l'Évangile fasse participer celui qui l'instruit à tous ses biens!

VI, 6. Le sens le plus naturel de cette phrase, prise à elle seule, sera toujours celui qui enjoint au disciple de se montrer reconnaissant envers le maître, de le rétribuer volontairement et généreusement (I Cor. IX. Rom. XII, 13. I Thess. V, 12. I Tim. V, 17). Paul n'emploie nulle part les Mens (au pluriel), dans le sens moral.

Il est vrai que, ainsi traduite, cette phrase reste complètement isolée, sans aucune liaison, ni avec ce qui précède, ni avec ce qui suit. Cela se voit bien autre part aussi à la fin des épîtres; ici cependant on s'y attendait moins qu'ailleurs, parce qu'en général l'auteur ne perd pas de vue sa thèse capitale et y rattache de près ou de loin toutes les exhortations qui terminent son écrit. Mais tous les essais qu'on a faits pour retrouver une liaison sont plus ou moins forcés et contraires au bon sens; on n'arrive pas à comprendre la mention du rapport entre le maître et le disciple autrement que nous ne l'avons fait, et il faut se décider à admettre qu'une pensée, étrangère au contexte, étant venue se présenter à l'esprit de l'auteur, s'est pressée sous sa plume, et a traversé ainsi la série de ses idées jusqu'ici si naturellement associées l'une à l'autre.

7 Ne vous y trompez point! On ne se moque pas de Dieu. Ce que l'homme sème, il le récolte. Celui qui sème dans sa chair, récoltera de la chair la mort; celui qui sème dans l'esprit, récoltera de l'esprit la vie éternelle. Ne nous lassons donc point de faire le bien; car si nous ne nous relâchons point, nous récolterons aussi en son temps. Ainsi donc, autant que nous en avons l'occasion, faisons-le bien envers tous, mais surtout à nos frères en la foi.

VI, 7-10. Ces lignes se rattachent encore à ce qui avait été dit de l'abus de la liberté. Ce serait se moquer de Dieu, que de croire qu'il permettra le déchaînement des passions, et qu'il a envoyé son fils et son esprit pour inaugurer le règne de la chair. Le nouvel ordre de choses doit aider l'homme à faire le bien et non l'en dispenser. À cet égard la vieille loi subsiste: telles les semailles, telle la récolte.

Cette image populaire est appliquée de deux manières: d'abord à la nature du grain, ensuite à la nature du terrain, ce qui, pour la pratique, revient au même. Le terrain, c'est ou la chair, ou l'esprit. La semence qu'on y mettra produira un fruit conforme à la fois à sa propre nature et à celle du terrain, d'un côté la mort (dans le sens éthique ou religieux), de l'autre côté la vie.

Outre cet avertissement allégorique, il y en a un second exprimé sans figure. C'est celui de ne point se lasser. Le travail doit continuer sans relâche tant que nous avons l’occasion. Ce dernier mot ne doit pas signaler ce que nous pourrions appeler des occasions particulières, accidentelles; mais le temps déterminé que Dieu accorde à chacun, la durée de sa vie terrestre. Comp. Jean IX, 4.

Nos frères en la foi, litt.: nos commensaux, ceux qui habitent la même maison que nous, qui appartiennent à la même économie. La charité chrétienne est universelle, sans doute; elle n'exclut personne, elle ne se refuse à personne. Mais à force d'étendre sa sphère d'action, elle pourrait bien devenir trop faible quant à ses moyens; il faut qu'elle se trace un cercle qui soit en rapport avec ces derniers, car qui trop embrasse, mal étreint. Or, le cercle le plus naturel, c'est celui de la communauté qui a nos sympathies et dont nous connaissons le mieux les besoins.

11 Voyez en quels grands caractères je vous ai écrit de ma propre main! Ceux qui recherchent une approbation purement charnelle, voilà les gens qui vous obligent â vous faire circoncire, seulement pour ne pas être persécutés à cause de la croix de Christ. Car eux, les circoncis, n'en observent pas mieux la loi; mais ils veulent vous faire circoncire pour tirer gloire de votre chair. Quant à moi, à Dieu ne plaise que je me glorifie d'autre chose que de la croix de notre Seigneur Jésus-Christ, par qui le monde a été crucifié pour moi et moi pour le monde.

15 Car ce n'est rien que d'être circoncis ou de ne l'être pas; ce qui importe, c'est qu'on soit une nouvelle créature. Et tous ceux qui se dirigent selon cette règle, que la paix et la miséricorde soient sur eux, et sur l'Israël de Dieu! Désormais, que personne ne me cause des ennuis, car je porte sur mon corps les marques de Jésus.

VI, 11-17. En terminant, l'apôtre récapitule encore une fois: 1° sa thèse dogmatique, v. 14, 15 (Quant à moi.... ); 2° sa polémique, V. 12, 13 {Ceux qui recherchent....); et finit par un vœu pour ceux qui partagent son sentiment, v. 16, et par une déclaration à l'adresse de ses adversaires, qu'il en a assez de cette discussion désormais victorieusement close, v. 17.

Ce morceau final est introduit par une espèce de coup d'œil rétrospectif sur l'épître entière: tout cela, dit-il, je me suis donné la peine de l'écrire par intérêt pour vous, et en quels caractères! Nous savons que Paul avait l'habitude de faire mettre ses lettres au net par des copistes calligraphes (d'autres croient qu'il les dictait), comp. Rom. XVI, 22, et d'y ajouter quelques mots écrits de sa propre main (1 Cor. XVI, 21. Col. IV, 18. 2 Thess. III, 17), Ici, l'épître entière qu'il envoie en Galatie est écrite de sa main, soit que le temps manquât pour la recopier, soit que cela ait dû être une preuve de plus du dévouement de l'auteur. Aussi l'écriture n'est-elle pas celle d'un calligraphe, les caractères sont plus grands, peut-être aussi moins bien alignés, comme ceux de personnes qui écrivent peu.

Pour ce qui est des adversaires qui prêchent la circoncision, leurs motifs ne sont pas purs; car on voit par leur propre conduite que l'observation rigoureuse de la loi, l'accomplissement exemplaire du devoir, n'est pas ce qui les préoccupe. Ils ont un intérêt extérieur, matériel, charnel, à insister sur le rite. Ils craignent les Juifs qui persécutent ceux qui s'en tiennent à Christ exclusivement; ils veulent pouvoir se vanter d'avoir fait de nombreux prosélytes, d'avoir circoncis tant et tant de païens; ils recherchent une gloire qui s'attache à la chair, à quelque chose qui est sans valeur intrinsèque.

Loin de moi, s'écrie Paul, un pareil point de vue! Ma gloire, c'est de pouvoir m'unir, de me savoir uni à Christ crucifié, d'être en communion avec sa mort, de sorte que mon vieil homme est crucifié aussi, que le lien entre moi et ce monde du péché est désormais rompu. Car ce n'est qu'au prix de cette régénération qu'il y a espoir et héritage pour l'homme. La condition légale, quelle qu'elle soit, n'y peut rien. Heureux ceux qui reconnaissent cela et qui agissent en conséquence! Ils forment le véritable peuple de Dieu, tandis que les Juifs qui tiennent à la circoncision, comme à une condition indispensable du salut, sont l’Israël selon la chair (I Cor. X, 18).

Ce qui est dit de marques que Paul porte sur son corps, s'explique très simplement par l'usage antique du tatouage, par lequel les esclaves étaient marqués comme la propriété de leurs maîtres, ou par lequel on se consacrait quelquefois plus particulièrement à une divinité (comp. Apoc. VII, 3). On peut prendre cette phrase dans son sens général et figuré: j'appartiens à Christ et ne reconnais pas d'autre autorité; mais il serait possible aussi que l'auteur ait songé à des marques réelles, des cicatrices et autres marques des mauvais traitements qu'il avait essuyés pour la cause de Christ (2 Cor. XI, 23 ss.), de manière à s'en prévaloir dans le même sens. Nous n'avons pas voulu conserver le terme grec de stigmates, parce qu'il sert aujourd'hui à désigner un fait physiologique dont il n'est pas question ici.

18 Que la grâce de notre Seigneur Jésus-Christ soit avec votre esprit, mes frères. Amen!

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