Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

I THESSALONICIENS

Chapitre 4

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Au reste mes frères, je vous demande et vous prie, au nom du Seigneur Jésus, de progresser de plus en plus selon ce que vous avez appris de moi sur la manière dont vous devez vous conduire et plaire à Dieu. Car vous savez quels préceptes je vous ai donnés de la part du Seigneur Jésus: ce que Dieu veut, c'est votre sanctification; c'est que vous vous absteniez du libertinage; que chacun sache avoir sa femme à lui, saintement et honnêtement, non avec une convoitise désordonnée, comme font les païens qui ne connaissent pas Dieu; qu'on ne fasse point de tort ni de préjudice à son frère, dans les affaires; parce que le Seigneur fait justice de tout cela, comme je vous l'ai dit et attesté autrefois. Car Dieu ne nous a pas appelés à l'impureté, mais à la sanctification; celui donc qui rejette cela, ne rejette pas un homme, mais Dieu, lequel vous a aussi donné son Saint-Esprit.

IV, 1-8. Nous arrivons ici à la seconde moitié de l'épître, dans laquelle l'auteur passe de l'éloge aux exhortations, de ses souvenirs aux besoins actuels et aux espérances. Le morceau qu'on vient de lire commence par des généralités, car les termes de progrès, de bonne conduite, de sanctification, sont d'une application très variés et embrassent la vie morale tout entière, de même que la communication du Saint-Esprit est un fait fondamental dans la sphère chrétienne et la base de toute pratique du devoir.

Cependant on voit que l'apôtre s'arrête en passant à des exhortations particulières, et à cet égard son texte présente quelques difficultés. Depuis les temps les plus anciens jusqu'à nos jours, les commentateurs ont été divisés sur le sens à donner à plusieurs des avertissements que nous avons devant nous, et à vrai dire, il y a des raisons assez plausibles à faire valoir pour des interprétations divergentes. Commençons par rendre compte de la nôtre.

On remarquera que, d'après notre traduction, Paul, après avoir dit d'une manière générale que la volonté de Dieu est que les hommes se sanctifient, applique cette thèse à deux points ou cas spéciaux, et qu'il signale deux sphères de la vie, dans lesquelles il lui semblait plus particulièrement nécessaire d'insister sur ce principe fondamental: les rapports des sexes, et les rapports d'affaires. À ces deux égards, la morale des contemporains était également relâchée; jouir de la femme que convoitait la passion du moment, duper les hommes par la finesse des opérations du trafic, c'étaient des actes auxquels ne s'attachait aucune honte, aucune réprobation publique. Il était d'autant plus nécessaire que la prédication chrétienne y revînt sans cesse, pour aiguillonner les consciences et détruire des préjugés pernicieux. Dans la conviction où nous sommes, que c'est là l'intention de Paul, dans notre passage, nous avons hardiment mis le mot femme à la place d'un terme grec qui signifie proprement un vase, un instrument. Nous nous y croyons autorisé par le passage parallèle 1 Pierre III, 7. Comp. Éph. V, 28. I Cor. VII, 2. Paul veut opposer l'une à l'autre deux manières d’obtenir (litt.: acquérir, gagner, se procurer) une femme: la voie honnête, légitime, du mariage qui sanctifie le rapport sexuel, et la voie désordonnée, impure, qui est suivie par la convoitise charnelle. Dans la seconde phrase, les termes de faire du tort, causer du préjudice (litt.: surfaire, chercher un avantage par avarice), nous conduisent à prendre le mot affaire (qui est au singulier en grec) dans le sens du négoce. Et nous maintenons cette interprétation, commandée relativement aux deux verbes par l'étymologie et l'usage, bien que l'apôtre, en se résumant, ne parle plus que de l'impureté.

Les commentateurs qui ne partagent pas notre avis voient d'abord, dans le vase du texte, le corps (comp. 2 Cor. IV, 7), et traduisent: que chacun doit posséder (ce que le verbe de l'original ne signifie jamais) son corps en sainteté et ne pas s'adonner au dévergondage des passions. Ensuite on méconnaît que Paul parle des vices résultant de l'amour du gain, et l'on traduit: qu'on ne fasse pas de tort à son frère dans cette affaire (à cet égard), comme si Paul entendait parler de l'adultère d'une manière spéciale.

9 Quant à l'amour fraternel, vous n'avez pas besoin qu'on vous en écrive; car vous-mêmes vous avez appris de Dieu à vous aimer les uns les autres. Aussi bien le pratiquez-vous envers tous les frères dans la Macédoine entière. Mais je vous exhorte, mes frères, à le faire de plus en plus, et à tenir à honneur de vivre tranquilles, de vous occuper de vos propres affaires et de travailler de vos mains, comme je vous l'ai recommandé, afin de tenir une conduite honnête aux yeux de ceux du dehors et de n'avoir besoin de personne.

IV, 9-12. En présence de la formule par laquelle Paul passe à la recommandation de l'amour fraternel entre les chrétiens, ou plutôt, au moyen de laquelle il semble glisser sur ce devoir comme n'ayant pas besoin d'être recommandé, on est peut-être autorisé à constater qu'il a dû être plus facile aux apôtres d'inculquer les vertus sociales vivifiées par l'Évangile, que d'extirper les vices habituels du paganisme, sur lesquels il éprouve toujours et partout le besoin de revenir.

Quoi qu'il en soit, Paul reconnaît que le devoir de l'amour fraternel découle si naturellement des principes de l'Évangile, que là où ces derniers ont pris racine, cette application spéciale, faite pour ainsi dire instinctivement par l'action intérieure de l'esprit de Dieu, n'a pas besoin de l'être au moyen d'une instruction méthodique du dehors.

Mais il se présentait ici un autre besoin; c'était de recommander à certains membres de la communauté de ne pas abuser de cet amour fraternel, en l'exploitant par la fainéantise, ou en s'exposant à le mettre à contribution par suite de la négligence et du désordre dans leurs propres affaires. Nous verrons plus loin que ces recommandations n'étaient pas du tout superflues (2 Tess. III, 6 ss.). Il n'est pas même nécessaire de songer exclusivement ou de préférence à ceux qui se préoccupaient dès lors de la fin prochaine du monde, au point de quitter leur besogne et de tomber dans une inaction imprévoyante et honteuse. Le mauvais exemple ou les mauvaises habitudes pouvaient journellement pénétrer dans la communauté par la place publique, son bruit, son désœuvrement, ses propos oisifs et ses intrigues. La piété a pour caractère de resserrer les liens de la famille, de rechercher la tranquillité du foyer domestique, de nourrir le goût du travail, et pour conséquence d'augmenter le bien-être, de rendre les hommes indépendants de la charité publique et de conquérir l'estime au dehors.

13 Mais je ne veux pas vous laisser dans l’ignorance, mes frères, au sujet de ceux qui meurent, pour que vous ne vous affligiez point, comme c'est le cas des autres qui n'ont pas d'espérance. Car si, comme nous le croyons, Jésus est mort et ressuscité, de même Dieu ramènera les morts aussi par Jésus et avec lui. Car ceci je vous le dis d'après la parole du Seigneur: nous qui vivrons et qui serons restés jusqu'à l'avènement du Seigneur, nous ne devancerons pas les morts, parce que le Seigneur lui-même, à un signal donné, à la voix d'un archange et au son de la trompette de Dieu, descendra du ciel, et ceux qui seront morts en Christ ressusciteront d'abord, ensuite nous qui vivrons et qui serons restés, nous serons enlevés sur les nuées en même temps qu'eux à la rencontre du Seigneur dans les airs et ainsi nous serons pour toujours avec le Seigneur. Consolez-vous donc les uns les autres avec ces paroles.

IV, 13-18. On a cherché à rattacher ce morceau à celui qui précède, tantôt en voyant dans celui-ci un avis directement adressé à des personnes qui se préoccupaient trop des questions apocalyptiques, tantôt en considérant l'affliction dont il est parlé ici comme une manifestation mal avisée de l'amour fraternel. On conviendra que ces deux manières de rétablir la liaison des idées ont quelque chose de forcé, de peu naturel. Nous préférons regarder la nouvelle instruction que nous avons devant nous, comme parfaitement indépendante de ce qui précède, comme elle le sera aussi de ce qui va suivre (chap. V, 12). L'apôtre devait avoir ses motifs pour la donner, et pour la donner si explicitement; c'était l'un des sujets que les circonstances l'obligeaient de traiter, et comme il n'écrit pas de dissertation systématique, il a pu prendre la série de ses communications dans l'ordre plus ou moins fortuit dans lequel elles se présentaient à son esprit.

Quant au fond, il est évident qu'il veut rassurer des personnes qui s'inquiétaient du sort des chrétiens déjà morts depuis la fondation de l'église. Cette inquiétude, si nous en jugeons d'après ce qui est dit ici pour la dissiper, ne provenait pas autant d'un doute absolu (et païen, Éph. II, 12) relativement à l'autre vie (car Paul ne dit rien ici pour établir la foi en cette dernière, comp. 1 Cor. XV), que de la crainte que les défunts pourraient bien n'avoir aucune part à ce royaume que le Christ devait prochainement fonder pour ses croyants, d'une manière visible; en d'autres termes, on paraît avoir compris à Thessalonique que ceux qui mourraient avant la parousie, bien que réservés pour une résurrection ultérieure, seraient moins bien partagés que les survivants qui entreraient immédiatement dans le royaume de Christ. C'est en vue d'une pareille crainte que Paul insiste sur ce que les survivants ne devanceront pas les morts.

Du reste, notre texte fait voir clairement: 1°que Paul croyait à la proximité de ce grand événement, puisqu'il parle des survivants, qui resteront jusqu'à la parousie, à la première personne, de manière à se placer, hypothétiquement du moins, dans leur nombre (comp. 1 Cor. XV, 52. Hébr. X, 25. Jac. V, 8. 1 Pierre IV, 7. 1 Jean II, 18. Matth. XVI, 28, etc.); 2° que son imagination aimait à donner à ses espérances chrétiennes les formes concrètes et les couleurs vives des croyances populaires de la synagogue; les trompettes, les anges, les nuées, appartiennent à cette catégorie d'éléments; 3° qu'il a pris à la lettre, et non comme des images populaires, les paroles de Jésus, auxquelles il fait allusion et desquelles il dérive ses enseignements, (Nos évangiles n'ont pas conservé des paroles du Seigneur absolument conformes à la citation de Paul, voy. Matth. XXIV, 31 ss.; XXV, 31, etc.). — Pour ce qui est de l'évolution de la pensée, il faut bien remarquer que les v. 15-17 sont le commentaire explicatif de la phrase qui précède: «Dieu ramènera les morts par Jésus et avec lui,» c'est-à-dire que Jésus, revenant du ciel, ressuscitera d'abord les morts, les réunira autour de lui et puis les survivants iront le rejoindre, lui et les autres. Comp. I Cor. XV, 50 ss. Ce que Paul nie implicitement, c'est qu'il y aurait deux résurrections successives et séparées l'une de l’autre par un intervalle. Pour ce qui est du silence observé (ici et I Cor. XV) relativement aux incrédules, voy. Hist, de la théol. apost., t. II, p. 213 s. D'ailleurs, en cet endroit il n'est pas question de faire un enseignement complet sur les choses finales, si bien qu'il n'est pas même parlé du jugement.

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