Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

TIMOTHÉE (1)

Chapitre 5

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1 Ne réprimande pas rudement un homme âgé, mais exhorte-le comme un père, des jeunes gens comme des frères, des matrones comme des mères, des femmes jeunes comme des sœurs, en toute chasteté.

V, 1, 2. Dans ses rapports avec les différents membres de la communauté, le pasteur doit se regarder non comme un maître qui aurait à faire valoir son autorité par des formes plus ou moins roides, mais comme un membre de la famille, qui sait trouver, à l'égard de chaque autre membre, le ton convenable, d'après son âge et son sexe, cela implique donc à la fois le respect et l'amour, en général, une certaine familiarité, mais celle-ci telle, qu'elle ne saurait donner lieu à des soupçons compromettants.

3 Aie des égards pour les veuves, j'entends celles qui le sont véritablement. Mais si une veuve a des enfants ou des petits enfants, ceux-ci doivent être tenus les premiers à s'acquitter de leur devoir filial envers leur famille, et à rendre la pareille à leurs parents; car cela est agréable à Dieu. Une veuve, qui Test véritablement, seule et sans famille, met son espérance en Dieu et persévère nuit et jour dans les prières et les supplications. Celle, au contraire, qui court après les plaisirs, est morte, tout en vivant. Rappelle-leur ceci, pour qu'elles ne prêtent pas à la critique. Mais si quelqu'un ne prend pas soin des siens, surtout de ceux de sa propre famille, il a renié la foi et est pire qu'un incrédule.

9 Une veuve ne doit être inscrite sur le registre que si elle n'a pas moins de soixante ans, si elle a été la femme d'un seul mari, si elle est connue par ses bonnes actions, si elle a élevé des enfants, exercé l'hospitalité, lavé les pieds des fidèles, pourvu aux besoins des malheureux, et si elle s'est appliquée à toutes sortes de bonnes œuvres. Quant aux jeunes veuves, tu ne les admettras point; car lorsque leurs désirs les détachent de Christ, elles veulent se remarier, en s'exposant au reproche de rompre leur premier engagement; en même temps elles s'accoutument à être oisives, à courir les maisons, et non seulement à être oisives, mais aussi jaseuses, intrigantes, parlant à tort et à travers.

14 J'aime mieux que les jeunes femmes se marient, qu'elles aient des enfants, gouvernent leur maison et ne donnent point prise à l'adversaire, pour médire de nous. Car déjà quelques-unes se sont détournées pour suivre Satan. Si donc quelque fidèle, homme ou femme, a des veuves à assister, qu'il pourvoie à leurs besoins, et qu'elles ne soient pas à la charge de la communauté, afin que celle-ci puisse pourvoir aux veuves qui le sont dans la force du terme.

V, 3-16. Ce passage a été le sujet de conjectures historiques et de tours de force exégétiques très variés. Beaucoup de commentateurs sont d'avis que l'auteur parle de différentes classes de personnes, savoir, d'un côté de veuves pauvres à assister, de l'autre côté, de femmes chargées de certaines fonctions dans la communauté (par ex. du diaconat). Il nous semble cependant peu probable que l'auteur eût employé le même terme de veuves, indistinctement et d'un bout à l'autre de ce morceau, s'il avait eu en vue deux catégories de personnes absolument différentes. De plus, on remarquera qu'il reproduit tout à la fin une injonction par laquelle il avait débuté, de manière que par ce fait même le morceau tout entier se caractérise comme se rapportant à un seul et même sujet:

Dans notre pensée il est question ici de personnes âgées de l'autre sexe, membres de l'Église, veuves et indigentes, dont la communauté prenait soin, au moyen d'une caisse de secours, comme nous savons qu'à Jérusalem déjà il en existait une (Comment, sur les Actes II, 44 s.; V, 1 ss.). Les personnes qui devaient recevoir de ces secours étaient portées sur un registre, et l'auteur, en recommandant aux chefs d'églises d'avoir égard à elles, ce qui veut dire de les traiter, non comme des mendiantes, mais comme des matrones dignes et respectables), leur donne des règles d'après lesquelles ils doivent procéder pour bien employer les ressources de leur caisse.

Il excepte d'abord les veuves qui ont une famille (v. 4, etc.), laquelle peut et doit pourvoir à leurs besoins. Le devoir filial est aussi un devoir sacré pour le chrétien; que ceux que cela regarde s'appliquent donc à l'exercer, à rendre à leurs mères ce que celles-ci autrefois leur ont donné d'abord, et que la commune n'intervienne qu'à défaut de cette ressource (v. 8 et 16).

En second lieu, il faut avoir égard à la conduite personnelle des femmes qui pourraient solliciter ces secours. Celles qui sont veuves dans la force du terme, isolées, sans famille, celles enfin qui n'ont/plus rien à attendre du monde, se recommanderont par leur piété; au contraire, celles qui tiennent encore aux plaisirs ne méritent pas cette assistance; il y a plus: au point de vue de l’Église, elles n'appartiennent pas même au nombre des vivants (dans le sens religieux et spirituel de ce mot); car si la femme chrétienne, en général, doit mener une vie modeste et réservée, à plus forte raison le veuvage lui imposera le devoir de la résignation et d'une retenue exemplaire.

Enfin il y a à prendre en considération les antécédents de ces personnes. Mais les qualités énumérées v. 9 et suiv. ne doivent pas être considérées comme des conditions absolues, comme si les secours devaient être refusés aux veuves sans enfants (ce qui serait en contradiction avec une note précédente) ou à celles qui n'auraient jamais été dans le cas d'exercer l'hospitalité. Ce sont des exemples de bonnes œuvres que l'auteur cite ici, des motifs à faire valoir en faveur des postulantes. De plus, il ne faut pas perdre de vue qu'il ne s'agit pas ici de la charité privée, qui n'était soumise à aucune règle, mais de l'assistance publique, pour laquelle il en faudra toujours. Ainsi la limite d'âge n'a rien de choquant; la règle relative à l'exclusion des personnes remariées en secondes noces s'explique par l'état de l'opinion dont nous avons parlé à l'occasion de Tite I, 6, et n'aura pas été d'une bien fréquente application. Puis une femme qui a fait son devoir à l'égard de ses enfants, qui a donné ses soins hospitaliers à des étrangers, qui ne s'est pas même refusée à des services inférieurs à leur égard, une telle femme mérite bien que dans sa vieillesse on s'occupe d'elle à son tour et qu'on lui rende la vie facile. Nous connaissons les noms de plusieurs femmes chrétiennes d'Éphèse dont Paul fait l'éloge à cet égard (Rom. XVI, 6, 12).

En un mot, il ne suffit pas qu'une femme ait perdu son mari pour qu'elle tombe à charge à la communauté. Il faut surtout ne pas être trop facile à l'égard de celles à qui leur âge permet de se remarier, ce que l'auteur ne considère pas du tout comme un péché ou comme une chose inconvenante (1 Cor. VII, 39 suiv.). Il vaut toujours mieux qu'une femme, qui en a les forces, se charge des devoirs que la Providence a imposés à son sexe, et qu'elle rende ainsi des services à la société, que de la voir livrée à l'oisiveté, exposée à des distractions, sollicitée par des regrets, s'adonnant au commérage et à tous les vices enfantés par le désœuvrement, etc., et cela après avoir déclaré publiquement vouloir se retirer de la vie de famille, se consacrer uniquement à Christ et aux œuvres de charité, afin d'obtenir de la caisse publique ce qu'elle aurait dû chercher à gagner autrement. Cette caisse ne doit pas être exposée à devenir un moyen de subsistance provisoire en attendant mieux. Si nous ne nous trompons, l'auteur fait même allusion à des cas où des veuves chrétiennes auraient contracté mariage avec des païens. Voilà, dit-il, ce qu'on risque de la part de personnes non suffisamment éprouvées et sûres; la communauté ne doit pas s'exposer à être exploitée de la sorte. Tout cela, nous l'avons déjà dit, semble accuser un état des choses qui ne se comprend pas bien dès les débuts de l'Évangile, et sous la plume de Paul.

Nous admettons d'ailleurs volontiers que des matrones ainsi assistées s'employaient, autant que leurs forces le permettaient, à des services de charité.

17 Les Anciens, qui auront fait leur devoir comme chefs de la communauté, doivent être jugés dignes d'un double honneur, surtout ceux qui se donnent de la peine pour la prédication et renseignement. Car l'Écriture dit: Tu ne muselleras pas le bœuf qui foule le blé, et un ouvrier doit recevoir son salaire.

19 N'accueille pas d'accusation contre Un Ancien, à moins qu'il n'y ait deux ou trois témoins. Ceux qui sont en défaut, réprimande-les en présence de tous, pour que les autres aussi le prennent à cœur. Je te conjure, à la face de Dieu et du Christ Jésus, et des anges élus, d'observer ces choses, sans parti pris d'avance, ni pour ni contre.

22 Ne te hâte pas trop d'imposer les mains à quelqu'un, et garde-toi de te rendre solidaire des torts d'autrui. Tâche de rester pur. Ne bois plus d'eau pitre, mais use d'un peu de vin, à cause de ton estomac et de tes fréquentes indispositions.

24 II y a des hommes dont les fautes sont manifestes et devancent le jugement; il y en a d'autres qui ne se dévoilent qu'après. Il en est de même des bonnes œuvres; elles sont manifestes, ou du moins ne sauraient rester cachées.

V, 17-25. Tout ce morceau, à l'exception d'une phrase que nous avons soulignée, s'occupe spécialement des Anciens, et des devoirs particuliers que Timothée, en sa qualité de suppléant temporaire de l'apôtre, aura à remplir à leur égard.

Il est d'abord question d’honorer les services rendus par ces fonctionnaires, et nous serions assez disposé à nous servir, à cet effet, du terme & honoraires, qui serait en même temps la traduction littérale de la phrase grecque, pourvu qu'on ne voulût pas songer à un traitement fixe qui leur aurait été servi, et que l'auteur dirait devoir être doublé (comp. chap. VI, 1). La citation empruntée à Deut. XXV, 4, est entendue comme formulant d'une manière figurée ou allégorique (1 Cor. IX, 9) le principe exprimé aussi par le proverbe qui suit immédiatement, et dont Jésus déjà s'était servi dans le même sens (Luc X, 7), savoir que tout travailleur doit pouvoir vivre de son travail, que nul ne doit être tenu de travailler sans une juste rémunération. Plus d'une fois nous avons vu Paul appliquer ce principe au travail des directeurs spirituels de la communauté et le revendiquer comme un axiome dont il pourrait, s'il le jugeait à propos, réclamer le bénéfice (1 Thess. II, 6. 1 Cor. IX. 2 Cor. XII, 13 suiv., etc.). Nous voyons aussi par ce passage, que les Anciens ne faisaient pas tous et nécessairement le service de prédicateurs, car l'auteur distingue, comme méritant plus particulièrement de recevoir des témoignages de reconnaissance, ceux qui, dans cette position, se chargent aussi de l'enseignement. Ce qu'il recommande ici à leur égard, c'est que par des dons ou cotisations volontaires on fasse en sorte qu'ils soient suffisamment et généreusement récompensés de leurs peines (Gal. VI, 6. 1 Thess. V, 12).

Il passe ensuite à un autre ordre de faits. Il peut aussi y avoir des Anciens qui manquent à leur devoir. Cependant à cet égard il importe avant tout qu'on ne prête pas l'oreille trop facilement aux dénonciations qui pourraient être faites, car rien n'est plus fréquent que de voir les personnes placées en évidence et occupant une position supérieure, exposées à une critique malveillante et intéressée. Mais si l'accusation est fondée, et qu'une réprimande devienne nécessaire, qu'elle soit faite en présence de tous (les autres Anciens): pour que chacun en fasse son profit, litt., éprouve une crainte (salutaire) et se garde de tomber dans la même faute. (Pour ce qui est dit des témoins, comp. Deut. XIX, 15. Matth. XVIII, 16. 2 Cor. XIII, 1. C'est de la part de l'auteur l'application d'un antique principe de droit.) Il va sans dire que le jugement doit être impartial, litt.: sans préjugé (défavorable) ni propension (prévention favorable). C'est là un principe tellement important, que l'auteur prend un ton solennel pour le recommander à l'attention du disciple, en le conjurant de ne point le perdre de vue. Si à cette occasion il mentionne les anges, à côté de Dieu et du Christ, il ne faut pas y voir une allusion au jugement dernier, mais une trace de la croyance que les anges surveillent les hommes comme gardiens (1 Cor. XI, 10) et s'intéressent aux destinées de l'Église (1 Pierre. I, 12). L'épithète d'élus qui leur est donnée, est un simple titre honorifique et n'indique point, comme on l'a pensé, une classification hiérarchique.

Une troisième recommandation concerne le choix des Anciens. Car, dans ce contexte, l'imposition des mains ne peut guère être comprise que comme la cérémonie de la consécration à un ministère ecclésiastique (comp. chap. IV, 14. 2e ép., I, 6). Un pareil choix ne doit pas être précipité. Car s'il tourne mal, le supérieur qui l'a fait est en quelque sorte responsable des mauvaises conséquences que cela peut avoir; il est solidaire (litt.: participant) des fautes commises par un homme indigne ou incapable. Si la phrase: Tâche de rester pur, appartient au contexte, elle exprime affirmativement ce que la phrase précédente a formulé négativement. Rester pur, ce sera avoir mis sa responsabilité à couvert. S'il fallait traduire: Reste chaste, il faudrait y voir un avis analogue à celui du v. 23, dont nous allons parler plus loin.

C'est à cet avis relatif à la circonspection nécessaire dans le choix des Anciens, que nous rattachons encore les deux derniers versets. D'après cette combinaison, l'auteur aurait voulu donner un avis sur la difficulté d'un pareil choix et un conseil pour se guider dans l'occasion. Voici, ce nous semble, le sens de ces paroles tant soit peu énigmatiques. Il faudrait traduire à la lettre: Les fautes de quelques-uns sont manifestes, les précédant au jugement; pour quelques-uns elles suivent, etc. L'auteur veut dire: En thèse générale, les actes des hommes sont la plus sûre base du jugement à porter sur leur compte. Généralement ces actes marchent, pour ainsi dire, en avant, de manière à précéder le jugement, et à le rendre ainsi assez facile; et cela est vrai pour le bien comme pour le mal. Il y a des exceptions, sans doute. Les bonnes actions ne se produisent pas toujours au grand jour, et comme en parade, les mauvaises réussissent quelquefois à se cacher. Mais tôt ou tard tout se révèle, tout est connu. Ces témoins de la valeur morale de l'individu viennent faire en quelque sorte leur déposition devant le juge, un peu tardivement peut-être, mais ils finissent par faire connaître la vérité.

Le v. 23, que nous avons fait imprimer en caractères particuliers, n'a rien à faire dans ce contexte, auquel il est entièrement étranger. Cependant il porte le caractère de l'authenticité la plus absolue, nous voulons dire qu'il est de la main de l'auteur de tout le reste, une personne étrangère n'ayant pu choisir une place si peu convenable pour introduire une recommandation du genre de celle que nous avons devant nous. Nous ne serons pas étonnés d'apprendre que des chrétiens des premiers temps croyaient devoir s'abstenir de boire du vin (Rom. XIV, 21). L'auteur leur conseille ici, en s'adressant à Timothée, de soigner leur santé. Paul pourrait très bien avoir écrit cela, vu les tendances ascétiques qui commençaient à prévaloir; un autre peut avoir été amené à l'écrire à son tour. Mais on sent instinctivement que ce n'est pas en cette place que ce conseil a pu se produire, à moins que les v. 24, 25 aient un sens également étranger au contexte et qui, dans ce cas, nous échapperait complètement. Nous croyons donc que le v. 23 était dans le manuscrit primitif une note mise en marge, un post-scriptum, absolument indépendant de tout le reste, et que les copistes lui ont assigné fort mal à propos la place qui lui est restée.

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