Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

TIMOTHÉE (2)

Chapitre 4

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1 Je te conjure au nom de Dieu et du Christ Jésus, qui jugera les vivants et les morts, et par son avènement et par son royaume, prêche la parole, insiste en toute occasion, opportune ou inopportune, avertis, censure, exhorte, en toute patience et toujours en instruisant. Car il va venir un temps où ils ne supporteront pas un enseignement sain, mais où ils se donneront une masse de docteurs, selon leurs goûts, et comme leurs oreilles en seront chatouillées f ils se détourneront de la vérité et se tourneront vers les fables. Mais toi, sois toujours vigilant, sache souffrir, fais ton devoir de prédicateur de l’Évangile, sois tout entier à ton ministère!

IV, 1-5. Nous abordons ici ce que nous pourrions appeler la péroraison de l'épître. Elle se compose de deux parties. La première, que nous avons sous les yeux, récapitule, avec une éloquente brièveté, les devoirs du disciple, héritier présomptif d'une grande et belle tâche; la seconde (v. 6-8) contiendra les adieux du maître qui a accompli la sienne et qui va la résigner.

Quelques expressions ont besoin de commentaires. Dans la première phrase, nous suivons une leçon qui fait dire à l'apôtre: je te conjure par l'avènement de Christ, c'est-à-dire, en te rappelant les grandes espérances de notre foi. La leçon vulgaire combine autrement les membres de la phrase: il jugera... lors de son avènement. Du reste, voyez pour le fond 1 Thess. IV, 16.

La traduction: en toute occasion, opportune on inopportune, n'est pas tout à fait précise; mais c'est à dessein, parce que le texte ne l'est pas non plus. On peut y voir un avis direct adressé à Timothée: que cela te convienne ou que cela te gêne; ne consulte pas ta commodité; ou bien aussi ce sens: soit que le moment te semble propice, soit qu'il y ait peu d'apparence de succès. Le temps de rendre témoignage à la vérité et de faire son devoir est toujours là, que le monde en veuille ou non; ou plutôt, c'est d'autant plus le cas d'y songer, que le monde est moins disposé à l'accueillir. Et à cet égard, la perspective n'est pas riante. Les hommes n'aiment pas à se faire dire la vérité, ils veulent entendre ce qui leur plaît.

6 Car pour ce qui est de moi, mon sang va être versé, et le moment de mon départ approche. J'ai bravement soutenu le combat, je suis arrivé au terme de ma course, j'ai gardé ma foi. Il ne me reste plus qu'à recevoir la couronne de la justice, que le Seigneur, le juste juge, me donnera en ce jour-là, et non seulement à moi, mais aussi à tous ceux qui ont pris à cœur son avènement.

IV, 6-8. Pour la situation qui se reflète dans ces paroles, voyez l'Introduction. Les phrases mêmes offrent une frappante analogie avec celles de l'épître aux Philippiens (I, 23; II, 16, 17), où les paroles de l'auteur expriment des pressentiments analogues. Pour les images, on peut aussi comparer 1 Tim. VI, 12. La première, que nous avons un peu effacée en traduisant: mon sang va être versé (au lieu de: moi je vais être versé), est empruntée à l'usage de verser du vin sur l'autel ou sur la victime, dans les rites sacrés. La cause pour laquelle l'apôtre est menacé de mort étant une cause sacrée, il pouvait bien se permettre un pareil rapprochement. — On lui pardonnera aussi d'avoir parlé de justice, de mérite et de récompense, d'après le point de vue populaire (2 Cor. V, 10). Il savait parfaitement faire la part de Dieu et la sienne propre, dans ce qui avait pu donner de la valeur à sa vie (1 Cor. XV, 8-10).

9 Tâche de me rejoindre au plus tôt: car Démas m'a abandonné, par amour pour les choses de ce monde; il est allé à Thessalonique, Crescens en Galatie, Tite en Dalmatie. Luc seul est avec moi. Prends Marc et amène-le avec toi, car il me sera utile pour le ministère. Quant à Tychique, je l'ai envoyé à Éphèse.

13 Le manteau que j'ai laissé à Troade chez Carpus, apporte-le quand tu viendras, ainsi que les livres, surtout les parchemins. Alexandre, le serrurier, m'a montré beaucoup de mauvaise volonté. Que le Seigneur lui rende selon ses œuvres! Celui-là, tu t'en garderas aussi, car il s'est vivement opposé à mes paroles.

IV, 9-15. La dernière page de la lettre est remplie, selon la coutume de l'auteur, de détails personnels, commissions, vœux, etc., qui sont pour nous en partie inexplicables. Nous avons dû discuter ce texte dans l'Introduction, parce que c'est en partie de lui que dépend la fixation de l'époque de cette épître. Nous n'avons donc qu'à ajouter ici quelques notes accessoires. L'énumération des personnes qui sont éloignées en ce moment, pour n'importe quel motif, est faite pour engager Timothée à venir lui-même et à amener un autre ami encore. Nous verrons plus loin que Paul a des connaissances et des amis à Rome même (v. 21); il parle donc ici de préférence de ceux qui pouvaient prêcher.

Sur Démas (Démétrius), voy. Col. IV, 14. Philém. 24. — 11 paraît qu'il avait quitté Rome pour vaquer à ses propres affaires. Crescens est inconnu. Sur Luc et Marc, voyez Col. IV, 10, 14; sur Tychicus, Éph. VI, 21. Col. IV, 7. Tite III, 12.

Tout ce passage montre d'ailleurs combien il est difficile à l'homme de se familiariser avec l'idée de la mort. Tout à l'heure Paul en parlait comme d'une chose certaine et imminente, et maintenant il attend l'arrivée de Timothée, qui demandait des mois entiers, et il songe encore à des détails domestiques qui appartiennent à un horizon tout différent. La traduction du mot grec inconnu phélonès (en latin pœnuda?), qui pourrait bien avoir été un nom de mode ou de fantaisie, est très incertaine. D'autres en font une valise, un portefeuille, etc. En nommant les parchemins à part, l'auteur dit implicitement que les autres livres étaient des papyrus. Du reste, il est hors de propos de faire des conjectures sur ces choses.

Quant au serrurier Alexandre on l’a identifié tantôt avec celui qui est nommé Act. XIX, 33, tantôt avec un autre dont il est question 1 Tim. I, 20; tantôt on a supposé qu'il habitait Éphèse, tantôt qu'il avait été hostile à Paul pendant sa captivité romaine. Le fait est que cette allusion restera pour nous une énigme. L'imprécation prononcée contre cet individu est un effet de la faiblesse humaine, contre laquelle nous aurions bien tort de lever la première pierre, mais que nous n'avons pas non plus le droit ou le devoir de justifier.

16 Lors de ma première défense, personne ne m'a assisté, tous au contraire m'ont abandonné. (Qu'il ne leur en soit pas tenu compte!) Mais le Seigneur m'a assisté et m'a donné des forces, afin que la prédication fût accomplie par moi et que les païens l'entendissent tous. Et j'ai été délivré de la gueule du lion; et le Seigneur me délivrera de toute méchante affaire et me sauvera dans son céleste royaume: à lui la gloire aux siècles des siècles! Amen.

IV, 16-18. Paul donne à Timothée quelques nouvelles de la marche de son procès. Une première action judiciaire a eu lieu. L'accusé a dû paraître devant ses juges, publiquement. Il y allait de sa vie. Il s'était attendu à ce que des chrétiens romains, parmi lesquels il pouvait y avoir des hommes considérés, vinssent l'assister, d'après l'usage, comme patrons ou témoins (advocati), mais personne ne se montra. Tout de même ce premier acte ne lui fut point fatal. Il n'y eut point d'arrêt de condamnation. Probablement le tribunal conclut à un sursis pour plus ample information. Mais la cause avait attiré de nombreux auditeurs; Paul avait saisi l'occasion de parler de l'Évangile devant cet auditoire de circonstance (comp. Phil. I, 12). Ainsi cette fois, dit Paul, j'ai été arraché à la gueule du lion (ce lion n'est ni Néron, ni la mort, mais Satan, 1 Pierre V, 8, qui est l'adversaire naturel des champions de Christ). S'il ajoute immédiatement: et il me délivrera de toute méchante affaire, et me sauvera dans son royaume céleste — il ne peut pas vouloir exprimer l'espoir positif que le procès se terminera par son acquittement. Le royaume céleste n'est pas de ce monde; il dit donc que Dieu, quoi qu'il arrive, lui fera obtenir après tout la vraie liberté, le fera entrer dans le lieu du repos et de la compensation, en l'arrachant à tout le mal que les hommes pourraient lui faire encore.

19 Salue Prisca et Aquila, et la famille d'Onésiphore. Éraste est resté à Corinthe; j'ai laissé Trophime malade à Milet. Tâche de venir avant l'hiver. Eubulus te fait saluer, ainsi que Pudens, Linus et Claudie, et tous les frères. Que le Seigneur soit avec ton esprit! Que la grâce soit avec vous!

IV, 19-22. L'histoire d'Aquila et de sa femme Prisca ou Priscilla peut se recomposer, dans ses contours généraux, d'après les passages Actes XVIII, 2. 1 Cor. XVI, 19. Rom. XVI, 3, auxquels nous renvoyons nos lecteurs. Sur Onésiphore, voyez plus haut, chap. I, 16. Sur Éraste, Act. XIX, 22. Rom. XVI, 23, bien qu'il ne soit pas sûr que dans tous ces endroits il soit question d'un seul et même personnage. Trophime a été nommé Act. XX, 4 et XXI, 29. Les chrétiens romains, dont les salutations sont transmises par Paul à Timothée, nous sont inconnus, et nous ignorons surtout dans quels rapports ils peuvent avoir été avec l'apôtre. La tradition veut que Linus ait été plus tard évêque de Rome et successeur de Pierre.

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