Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

L'ÉPÎTRE AUX HÉBREUX

Chapitre 3

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1 En conséquence, mes saints frères, vous qui avez part à la vocation céleste, fixez vos regards sur Jésus, l'apôtre et le grand-prêtre de notre profession de foi, lui qui était fidèle à celui qui l'avait institué, comme Moïse aussi l'a été dans sa maison. Car il a été jugé digne d'une plus grande gloire que Moïse, en tant que celui qui construit une maison est plus honoré que la maison elle-même.

4 (Chaque maison est construite par quelqu'un, mais c'est Dieu qui construit toutes choses.) Et quant à Moïse, il a été fidèle da7is toute sa maison, en qualité de serviteur, pour rendre témoignage de ce qui devait être révélé plus tard; tandis que Christ, en sa qualité de Fils, l’était sur sa maison, et sa maison à lui c'est nous, si tant est que nous tenions fermement et courageusement à l'espérance dont nous nous glorifions.

III, 1-6. L'auteur voulait joindre à l'exposé de sa seconde thèse (chap. II, 6-18) une application pratique, comme il l'avait fait après la première. Mais à peine a-t-il commencé son exhortation que l'emploi incident d'un terme dont il n'avait pas encore fait usage le détourne momentanément de son but et lui suggère un nouveau ou, si l'on veut, un premier parallélisme entre l'ancienne et la nouvelle Alliance, de manière qu'il ne reprend son allocution qu'au v. 7. —Nous profitons de cette occasion pour dire une fois pour toutes qu'en s'appelant saints, les premiers chrétiens n'entendaient point parler de l'absence de toute tache morale. Le mot signifie proprement sacré, consacré à Dieu, se donnant à Dieu, se détournant de ce qui est profane, et marque ainsi plutôt un but à réaliser qu'un état accompli. Malheureusement la méprise complaisante des générations suivantes a privé les langues modernes du moyen de traduire le mot d'après son véritable sens. La vocation céleste (comp. Phil. III, 14) peut-être celle qui nous appelle au ciel, ou celle qui nous vient du ciel.

Jésus est appelé l'apôtre et le grand-prêtre de notre profession de foi, c'est-à-dire qu'à l'égard de l'ensemble de nos convictions religieuses, de nos besoins et de nos espérances, il est à la fois le révélateur envoyé par Dieu, ce qui avait été dit dès la première ligne de l'épître, et le sacrificateur fonctionnant pour obtenir l'expiation, comme cela avait été dit dans la dernière des lignes qui précèdent. Cette phrase résume donc en deux mots les deux thèses déjà développées.

Mais ces deux qualités de Christ sont préfigurées l'une comme l'autre dans l'ancienne Alliance par les deux personnages de Moïse et d'Aaron. C'est là ce qui engage l'auteur à s'arrêter un moment à l'un des deux parallèles, à celui sur lequel il n'avait que peu de chose à dire, sauf à revenir sur le second, plus au long, après quelques autres pages préliminaires.

Le parallèle entre Moïse et Christ porte sur une ressemblance et sur une différence. L'Ancien Testament disait de Moïse (Nomb. XII, 7) qu'il était fidèle dans la maison de Dieu. Or, assurément Christ l'était aussi; il a accompli sa mission, obéissant jusqu'à la mort à Dieu qui l'avait institué. Le texte grec pourrait se traduire par ces mots: qui l'avait fait, et cette interprétation plus littérale a servi déjà anciennement de prétexte à des reproches d'arianisme adressés à l'auteur de notre épître. Nous ne pensons pas que les apôtres aient été grandement préoccupés du soin d'éviter de pareils reproches; mais ici nous ne voyons pas le moins du monde quel intérêt l'auteur pouvait avoir à désigner le Christ comme une créature; il ne s'agit pas de son origine, mais de sa mission, et il y a des passages parallèles qui font voir que le verbe employé ici et qui signifie proprement: faire, peut avoir le sens à'instituer. Comp. Marc III, 14. I Sam. XII, 6 (en grec).

Mais il y a aussi une notable différence entre Moïse et Christ, à l'avantage de celui-ci. Moïse était serviteur. Christ est le Fils (comp. Gai. IV, I et suiv.). Moïse, par conséquent, était dans la maison à laquelle Dieu l'avait attaché (la maison de Dieu), comme une partie coordonnée à d'autres; Christ est sur sa maison (sa maison à lui) chef et directeur; Moïse avait entre autres fonctions celle d'annoncer des choses qui devaient être révélées ultérieurement, partant plus excellentes que les choses présentes, tandis qu'après Christ il n'y aura plus rien de supérieur à lui. Les deux versets 3 et 4 sont assez obscurs à première vue, et pourtant ils sont nécessaires pour préciser la pensée de l'auteur, et contiennent des éléments très juste de son argumentation. Christ, considéré comme fondateur de la maison à laquelle il a donné son nom, est positivement au-dessus de Moïse, qui n'est qu'une partie de la maison dans laquelle il fonctionnait comme ministre de Dieu. D'un autre côté, il ne faut pas oublier que les deux maisons sont des institutions du même Dieu; on aurait tort de dire que la première était de Dieu, la seconde de Christ; il faut dire: la première était de Dieu par le ministère de Moïse; la seconde était de Dieu et de Christ, le Père et le Fils, sans intervention humaine. Tout le monde comprend que partout ici le terme de maison est employé au sens spirituel pour désigner les économies et dispensations de Dieu, et pas une seule fois (pas même au v. 4) au sens matériel. Aussi bien avons-nous dû dire: chaque maison, c'est-à-dire: chacune des deux, et non pas: toute maison, pomme s'il s'agissait de maçonnerie et de charpente.

Par les derniers mots du V. 6, l'auteur reprend le fil de ses exhortations. Nous sommes les membres de la famille de Christ, de la maison de Dieu, si nous persévérons. Le texte a été ici amplifié par les copistes qui ont inséré en cet endroit quelques mots tirés du passage parallèle, v. 14.

7 C'est pourquoi, comme le dit le Saint-Esprit, aujourd'hui, si vous entendez sa voix, n'endurcissez point vos cœurs, comme lors de la révolte, au jour de la provocation au désert, où vos pères me provoquèrent en voulant me mettre à l'épreuve, bien qu'ils eussent vu mes œuvres pendant quarante ans! C'est pour cela que je fus irrité contre cette génération et je dis: Toujours leur cœur s'égare et ils n'ont point reconnu mes voies! Aussi ai-je juré dans ma colère: Ah! certes! ils n'entreront point dans mon repos!

III, 7-11. La seconde digression exhortatoire, qui comprend le reste du chap. III et la majeure partie du IVe est d'abord formulée d'une manière générale au moyen d'un passage du Ps. XCV, 7-11, lequel adresse Un avertissement sévère aux contemporains du poète, mais que notre auteur regarde positivement comme une prophétie relative à la situation actuelle des choses.

Les paroles de Jéhovah ou du Saint-Esprit, car c'est encore lui qui parle et non quelque poète Israélite, font allusion à divers faits de l'histoire mosaïque relatés Ex. XVII et Nombr. XIV, 21 et suiv: Les Israélites avaient murmuré contre Dieu et Moïse à cause de la disette d'eau, et l'eau ayant été accordée. Moïse appela l'endroit Massa et Mériba, c'est-à-dire provocation et rébellion, mots qui, dans l'original, sont censés être devenus des noms propres, mais qui, dans les Septante et ici, sont conservés dans leur acception étymologique. À une occasion semblable, il est dit que Dieu jura que la génération récalcitrante n'entrerait point dans la terre promise.

Ce passage du Psaume va être appliqué par l'auteur de deux manières différentes, d'abord comme menace, ensuite comme promues se.

12 Prenez garde, mes frères, qu'il n'y ait pas en quelqu'un d'entre vous un cœur mauvais et incrédule, de sorte qu'il se sépare du Dieu vivant; mais exhortez-vous chaque jour les uns les autres, aussi longtemps que cet Aujourd'hui est proclamé, afin qu'aucun de vous ne s'endurcisse par la séduction du péché. Car nous avons part à Christ, à condition que nous retenions fermement jusqu'à la fin l'assurance que nous avions au commencement, tant qu'il est dit: Aujourd'hui, si vous entendez sa voix, n'endurcissez point vos cœurs comme lors de la révolte!

16 Car qui furent ceux qui se révoltèrent après l'avoir entendue? N'étaient-ce pas tous ceux qui étaient sortis d'Égypte par le fait de Moïse? Et contre qui s'irrita-t-il pendant quarante ans? Ne fut-ce pas contre ceux qui péchaient? dont les corps jonchaient le désert? Et à qui jura-t-il qu'ils n'entreraient point dans son repos, si ce n'est à ceux qui désobéissaient? Aussi voyons-nous qu'ils ne purent y entrer à cause de leur incrédulité.

III, 12-19. Première application du passage cité du Ps. XCV: Id. menace. On remarquera que partout ici les deux notions de désobéissance et d'incrédulité se tiennent de près et se confondent. C'est que, dans le fait relaté de l'histoire Israélite, il s'agit de commandements de Dieu, et, dans la situation de l'apôtre, d'un appel à la conscience religieuse; ce sont deux sphères diverses, mais analogues, de la vie spirituelle, et leur analogie est telle que l'une peut servir de parallèle prophétique à l'autre. D'après cela, le mot de péché est aussi à double entente; pour les Juifs, il s'agissait là d'une révolte directe contre une injonction positive; pour les chrétiens lecteurs de l'épître, qui pouvaient être enclins à voir dans les rites du judaïsme un puissant moyen de salut, pour lequel ils négligeaient la chose essentielle, le péché était cette négligence, cette insouciance à l'égard de l'œuvre rédemptrice de Christ, sans laquelle il n'y a point de salut (chap. II, 3; VI, 4 et suiv. ; X, 25).

Aujourd'hui! c'est l'avis à la fois salutaire et menaçant qui nous est donné incessamment pour que nous ne perdions pas le salut par négligence, après avoir fait les premiers pas dans la voie qui y conduit. Aujourd'hui! c'est aussi longtemps qu'il n'est pas trop tard, c'est tant que le siècle dure encore, avant que Christ revienne pour juger le monde. Les questions qui terminent ce morceau (car ce sont des questions, et rien n'est plus contraire à la pensée de l'auteur que la ponctuation reçue qui lui fait dire: Quelques-uns se révoltèrent, mais non pas tous) sont destinées à rendre la leçon contenue dans le Psaume plus pressante encore. Ceux qui avaient été l'objet des soins miraculeux du Très-Haut se révoltèrent; il dut s'irriter contre eux, il dut les punir, et la promesse qu'il leur avait faite de les conduire dans une belle patrie, il fut obligé de la leur retirer; eh bien! prenez garde que pareille chose ne vous arrive à vous également, pour qui Dieu a aussi fait des miracles et à qui il a aussi promis une meilleure patrie (chap. XIII, 14).

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