Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

Chapitre 8

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1 II y eut à cette époque une grande persécution contre l'église de Jérusalem, et tous furent dispersés dans les campagnes de la Judée et de la Samarie, à l'exception des apôtres. Cependant quelques hommes pieux donnèrent la sépulture à Étienne, et lui rendirent les derniers honneurs avec éclat. Mais Saul ravageait l'église, en allant de maison en maison pour en arracher hommes et femmes, et les faire mettre en prison.

VIII, 1-3. La dispersion des chrétiens de Jérusalem ne peut avoir été que partielle, puisque dans ce chapitre même et plus loin, nous voyons l'église de cette ville parfaitement établie et aussi nombreuse que jamais. Le texte semble lui-même faire une restriction de ce genre, en exceptant les apôtres. Or, si ces derniers restèrent dans la ville, ce ne pouvait être par la raison qu'eux seuls en avaient le courage, car ce courage ne les aurait pas protégés contre les persécuteurs, et la police, qui devait les connaître, n'aurait pu manquer de s'assurer des chefs tout d'abord. Il y a évidemment là une circonstance à moitié voilée par la narration: la persécution ne s'attaquait pas à tous les chrétiens indistinctement, mais à ceux qui, avec Étienne, faisaient mine de vouloir se séparer de la Synagogue et se soustraire à la Loi. Les apôtres, tout le monde le savait, n'étaient pas de ce nombre, et la majorité était de leur avis. Il faut surtout relever ici ce qui est dit des derniers honneurs rendus à Étienne. Cet homme, victime du fanatisme religieux et mort comme un criminel, trouva des amis qui osèrent publiquement porter son deuil. Ces amis courageux n'étaient pas les apôtres; c'étaient des hommes pieux, c'est-à-dire des païens ralliés, des prosélytes non circoncis, qui, d'après cela, ont dû, dès avant cette époque, et sans doute par suite des prédications d'Étienne, se trouver dans un certain rapport avec l'Évangile, sans avoir encore pu obtenir accès dans la communauté. Tout cela nous laisse entrevoir qu'il s'agit ici des symptômes d'une première transformation de l'Église, transformation qui, comme toutes les phases analogues de l'histoire, est à la fois un progrès et une occasion de schisme. Les apôtres restent à Jérusalem, à l'ombre du temple; les hellénistes persécutés vont porter la parole de Dieu aux Samaritains et aux païens. La Providence poursuivait son œuvre en la confiant à d'autres mains.

4 Cependant ceux qui avaient été dispersés allèrent annoncer l'Évangile de côté et d'autre. Philippe aussi, qui s'était rendu dans une ville de la Samarie, y prêcha le Christ, et la population tout entière prêtait une oreille attentive à ce que Philippe disait, lorsqu'elle l'entendit et qu'elle vit les miracles qu'il faisait. Car de beaucoup de gens possédés il sortait des esprits impurs, en poussant de grands cris, et beaucoup de paralytiques et de perclus furent guéris, et il y eut une grande joie dans cette ville.

VIII, 4-8. L'évangéliste, dont il est question ici, n'était pas l'apôtre de ce nom, mais l'un des sept diacres nommés au chap. VI, comp. XXI, 8, et nous ne nous tromperons pas en le regardant comme un ami d'Étienne et comme le continuateur de l'œuvre de son collègue, au gré duquel les barrières élevées par l'esprit judaïque entre les diverses nationalités devaient tomber devant l'Évangile. La foi en la bonne nouvelle de la venue du Christ attendu produisait ici les mêmes effets miraculeux qu'on avait constatés ailleurs.

9 Or, il y avait antérieurement déjà dans cette ville un homme du nom de Simon, magicien de profession, lequel en imposait au peuple de Samarie en se faisant passer pour un grand personnage. Tous, petits et grands, lui prêtaient l'oreille en disant: c'est lui qui est la grande puissance de Dieu, comme ils l'appelaient. Ils lui prêtaient l'oreille, parce qu'il leur en avait imposé longtemps par ses sorcelleries.

12 Cependant, quand ils eurent été amenés à la foi par Philippe, qui leur annonçait l'Évangile du royaume de Dieu et de la personne de Jésus-Christ, ils se firent baptiser, hommes et femmes. Simon lui-même devint croyant aussi, et après avoir reçu le baptême, il s'attacha à Philippe et voyait avec étonnement les signes et les miracles qui se faisaient.

VIII, 9-13. Simon, le magicien, joue un grand rôle dans les traditions de l'ancienne Église. Il est le héros de plus d'un roman théologique du second et du troisième siècle, et est généralement représenté comme l'adversaire acharné de Pierre et le patriarche de toutes les hérésies philosophiques (du gnosticisme). Le texte que nous avons devant nous, examiné sans préjugé, nous donne de lui une tout autre idée. Luc, en l'appelant un magicien de profession, le met évidemment au nombre de ces aventuriers si communs dans ces temps-là, qui exploitaient la crédulité publique par des prétentions à la science occulte, comme astrologues, exorcistes, devins, nécromanciens, interprètes de songes et sorciers de toute espèce. Nous en rencontrerons d'autres encore dans le présent livre; la littérature profane de cette époque les mentionne plus fréquemment encore.

La phrase mise par l'auteur dans la bouche du peuple samaritain: «c'est lui qui est la grande puissance de Dieu,» a fourvoyé les exégètes anciens, qui croyaient que Simon lui-même s'était ainsi nommé; ce qui entraînait la conséquence qu'on lui attribuait un système gnostique, dans lequel il se serait réservé à lui-même le rôle d'une puissance divine, d'un èon. Mais le récit de Luc dit assez clairement que le peuple fit de Simon plus qu'il ne prétendait être. Il en imposait à la foule par ses sorcelleries, et elle le regardait comme une manifestation personnelle d'une force divine, comme une espèce de dieu incarné. Quand on songe à la confusion des idées qui régnait dans ce siècle de superstition et de syncrétisme religieux, une pareille opinion n'a rien d'étonnant, et Simon se sera bien gardé de la contredire. D'ailleurs le texte authentique, en insérant un mot que nous avons cru pouvoir rendre par cette parenthèse: «comme ils l'appelaient,» coupe court à toute méprise. Du moins, nous ne saurions croire que le texte doit signifier: Le peuple disait que Simon était ce qu'on appelle la grande puissance; comme si ç’avait été là une notion vulgaire.

Ce Simon devint croyant, c'est-à-dire que, voyant quelqu'un dont la puissance miraculeuse surpassait la sienne, il s'attacha à lui, acceptant le baptême comme une espèce d'initiation, et espérant obtenir les moyens de perfectionner sa science ou d'apprendre quelques secrets. Comp. Marc IX, 38. Act. XIX, 13. Dans ce sens, sa conversion était sincère.

14 Cependant les apôtres qui étaient à Jérusalem, ayant appris que les Samaritains avaient accueilli la parole de Dieu, leur envoyèrent Pierre et Jean, lesquels, s'y étant rendus, prièrent pour qu'ils reçussent le Saint-Esprit (car il n'était point encore descendu sur aucun d'eux; ils avaient seulement été baptisés au nom du Seigneur Jésus). Puis ils leur imposèrent les mains et ils reçurent le Saint-Esprit.

VIII, 14-17. Les apôtres de Jérusalem (les Douze) n'avaient été pour rien dans l'évangélisation de la Samarie. L'idée d'entrer en communion avec les schismatiques ne leur était pas venue; ils apprennent donc, comme une chose inattendue et en tout cas étrangère à leur mission actuelle, que ces mêmes schismatiques avaient accueilli la parole de Dieu, que d'autres leur avaient apportée. Deux d'entre eux vont s'assurer du fait, et ceux-ci, loin de trouver à y redire (c'est là ce que Luc veut constater), s'associent à l'œuvre commencée et prient Dieu qu'il veuille bien l'achever. Car, dit le texte, les Samaritains n'avaient point encore reçu le Saint-Esprit. À la suite de cette prière et sous l'imposition des mains, ils le reçoivent et Simon (v. 18) le voit.

Il est évident, d'après cela, que la communication du Saint-Esprit est représentée ici comme un fait qui produit des effets immédiatement visibles, saisissables même par des profanes. Il ne s'agit donc pas d'une illumination de l'intelligence, ni d'une sanctification de la volonté, mais d'une manifestation extérieure et exceptionnelle. Or, la comparaison des passages II, 4; X, 45; XIX, 6, qui sont ici très explicites, nous fait voir que l'auteur veut parler du phénomène de la glossolalie, qui se manifesta pour la première fois dans cette localité après la prédication de Pierre et de Jean. Ce n'est pas que ceux-ci aient donné un enseignement supérieur à celui de Philippe, ou que leur dignité prééminente ait davantage engagé la grâce de Dieu (bien que cette dernière explication ne soit pas exclue par le texte); mais leur présence a pu provoquer un mouvement plus intense, des transports plus énergiques et, par suite, des phénomènes psychiques analogues à ceux qu'on avait déjà observés ailleurs.-La chose essentielle pour le narrateur, c'est que, par cette démonstration d'un genre si nouveau et si émouvant, Dieu ratifiait visiblement le baptême des Samaritains, et que les apôtres eux-mêmes constatèrent définitivement que l'Évangile pouvait et devait être prêché à la dissidence aussi. La suite du récit fait voir d'ailleurs que tous les Samaritains n'avaient pas reçu l'esprit dans le sens indiqué, en d'autres termes, que le phénomène de la glossolalie ne s'était produit que dans un certain nombre d'individus, comme lors de la Pentecôte, ce qui ne peut que confirmer notre explication.

18 Or Simon, ayant vu que l'esprit se donnait par l'imposition des mains des apôtres, leur apporta de l'argent en disant: « Donnez-moi ce pouvoir, à moi aussi, afin que celui auquel j'imposerai les mains reçoive le Saint-Esprit.» Mais Pierre lui dit: «Que ton argent périsse avec toi, puisque tu crois que le don de Dieu s'achète à prix comptant! Tu n'as aucune part à ce qui se traite ici, car ton cœur n'est point droit devant Dieu. Repens-toi donc de cette mauvaise pensée-là, et prie le Seigneur de vouloir bien te pardonner l'intention de ton cœur; car je vois que tu es comme empoisonné et enchaîné par la méchanceté.»

24 Alors Simon reprit et dit: Priez vous-mêmes le Seigneur pour moi, afin qu'il ne m'arrive rien de ce que vous avez dit. Après avoir ainsi protesté et prêché la parole du Seigneur, ils retournèrent à Jérusalem, en annonçant l'Évangile dans beaucoup de villages des Samaritains.

VIII, 18-25. Simon voyant les effets produits par les apôtres, effets qui évidemment ne se renfermaient pas dans la sphère spirituelle, et s'imaginant que ces nouveaux venus possédaient des secrets inconnus à Philippe, en demanda la communication, et offrit de l'acheter à prix d'argent, naturellement pour se créer une nouvelle industrie. Il ne voyait donc là qu'un effet magique, et l'élément religieux, tant de la prédication que de l'expérience personnelle, lui était resté absolument étranger. (Cet acte de Simon a donné le nom à la Simonie, c'est-à-dire au trafic des choses ecclésiastiques.) Il est à remarquer que Simon ne demande pas l'esprit pour lui-même, et comme il nous est impossible d'admettre qu'il l'ait déjà eu, il en résulte, comme nous venons de le faire pressentir, qu'il fallait des dispositions particulières et individuelles pour éprouver l'inspiration à un degré si intense et, visible.

Pierre reconnaît sans peine qu'il n'a pas affaire à un chrétien. Car cet homme ne montrait pas seulement une grossière ignorance dans les choses religieuses, mais il voulait faire servir ce qu'il y avait de plus sacré à des fins malhonnêtes, à satisfaire sa vile cupidité. Il est empoisonné, littéralement: il y a en lui un fiel amer, ce qui, dans le style biblique, est l'image du poison. Cependant Pierre ne le condamne pas d'une manière absolue, il lui laisse la perspective de l'amendement et du pardon, et si le récit de Luc ne nous dit pas quels furent les rapports ultérieurs de Simon avec l'Église, il ne paraît pas du moins que l'hostilité ouverte, l'antagonisme permanent dont parlent des auteurs plus récents, soit parvenue à la connaissance de notre historien.

L'incident se termine par la mention expresse d'une évangélisation directe de la Samarie par les chefs de l'Église. Cette oeuvre est ainsi désormais légitimée.

26 Cependant un ange du Seigneur parla à Philippe et dit: Va-t'en et dirige-toi vers le sud sur la route qui descend de Jérusalem à Gaza. (C'est une solitude.) Et s'étant mis en route, il rencontra un Éthiopien, un eunuque, officier de Candace, reine des Éthiopiens, et ministre de son trésor; lequel était venu en pèlerinage à Jérusalem et s'en retournait maintenant assis sur son char et lisant le prophète Ésaïe.

29 Or, l'esprit dit à Philippe: Va rejoindre ce char! Philippe se hâta de s'approcher et ayant entendu comme il lisait le prophète Ésaïe, il lui dit: Comprends-tu aussi ce que tu lis? L'autre répondit: Comment le pourrais-je, à moins que quelqu'un ne me guide? Et il invita Philippe à monter et à s'asseoir à côté de lui.

32 Or, voici quelle était la teneur du texte qu'il lisait: « Comme une brebis il a été conduit à la boucherie, et comme un agneau muet devant celui qui le tond, ainsi il n'ouvre pas sa bouche. Dans son humiliation, son arrêt fut levé; mais sa génération, qui est-ce qui la racontera? car sa vie est ôtée de la terre.»

34 Et l'eunuque reprit et dit à Philippe: Je t'en prie, de qui le prophète dit-il cela? est-ce de lui-même ou de quelqu'un d'autre? Alors Philippe prit la parole, et commençant par ce texte-là, lui exposa l'évangile relatif à Jésus.

36 Et comme, en continuant leur route, ils arrivèrent à un cours d'eau, l'eunuque dit: Voici de l'eau; qu'est-ce qui m'empêche de recevoir le baptême?

38 Et ayant fait arrêter le char, ils descendirent tous les deux dans l'eau, Philippe et l'eunuque, et il le baptisa. Mais lorsqu'ils furent remontés de l'eau, l'esprit du Seigneur enleva Philippe, et l'eunuque ne le vit plus. Car il continuait son chemin tout réjoui et Philippe se trouva être à Azot, et de là il passa outre en évangélisant toutes les villes, jusqu'à ce qu'il arrivât à Césarée.

VIII, 26-40. La liaison du récit qu'on vient de lire avec celui qui précède, suffirait à elle seule pour nous y faire reconnaître un fait analogue, nous voulons dire une conversion faite en dehors de la sphère judaïque. Mais le soin que l'auteur met à y signaler une intervention plus directe de la Providence (l'ange qui envoie Philippe dans une contrée déserte sans but apparent, l'esprit qui lui désigne l'objet de sa mission, et surtout aussi le dénouement final) ne nous permet plus de douter qu'il s'agit ici d'une nouvelle extension donnée à l'action de l'évangile, d'une nouvelle barrière rompue et franchie désormais. Évidemment cet Éthiopien ne peut pas avoir été un simple Juif, car alors sa conversion n'aurait été importante qu'en tant qu'elle aurait porté la semence de l'évangile dans un pays lointain; mais Luc ne dit pas un mot pour relever une pareille conséquence. Nous admettrons donc qu'il s'agit ici d'un prosélyte de la porte, comme on disait alors, c'est-à-dire d'un homme né païen, non circoncis, mais qui, abandonnant le culte des faux dieux, avait cherché et trouvé dans l'adoration du Dieu d'Israël une satisfaction plus entière pour ses besoins religieux. Il était venu pour cela à Jérusalem, avait trouvé à y acheter un des volumes dont se composait la collection des Écritures sacrées et allait rentrer dans sa patrie, quand Philippe vint le rejoindre. Cet homme fut donc le premier individu non circoncis qui reçut le baptême; et encore une fois, ce ne fut point l'un des Douze, mais un ami d'Étienne qui le lui donna. Il fallait une manifestation plus éclatante encore pour que Pierre se décidât à en faire autant (chap. X).

Cet homme était attaché à la cour d'une reine d'Éthiopie, d'un pays situé au-delà de l'Égypte, vers le Nil supérieur, aujourd'hui l'Abyssinie (Habesch), alors florissant par le commerce et l'industrie. Ce pays était gouverné par des reines qui portaient le titre de Candacé. La population était de race sémitique et parlait un idiome voisin de l'ancien arabe, mais elle était païenne. Ce sont les Koushites fréquemment nommés dans l'Ancien Testament. Peut-être la circonstance que l'officier éthiopien était eunuque doit-elle être plus spécialement relevée ici. La loi mosaïque (Deut. XXIII, 1) excluait les eunuques de la communauté d'Israël; la prédication évangélique ne fait aucune distinction de ce genre; par ce fait seul, l'acte de Philippe peut apparaître comme une nouvelle protestation contre les restrictions observées jusque-là dans la sphère de l'activité apostolique (comp. Sap. III, 14).

Le passage que Philippe est prié d'expliquer est tiré d'Ésaïe LUI (v. 7, 8). Le texte grec que nous avons devant nous ne correspond pas exactement à l'original hébreu et il est même assez difficile de dire quel sens les traducteurs ont pu attacher à chacune de leurs phrases. Cependant il est clair que le 53e chapitre d'Ésaïe était dès lors interprété par les chrétiens comme une prophétie relative à la mort du Christ souffrant innocemment et patiemment. C'est à ces deux idées que se rattache la double image de l'agneau. Les dernières lignes de la citation resteront toujours obscures, car en traduisant (comme cela se fait ordinairement): son arrêt fut consommé; qui est-ce qui dira toute la perversité de ses contemporains? etc., on introduit dans le texte des choses qui n'y sont pas. Il faudra donc s'en tenir à la pensée générale qui n'est pas douteuse, et réserver à l'étude de l'original la détermination du sens des détails. C'est donc à ce passage que Philippe rattache tout l'évangile, tout ce qu'il avait à dire sur la personne et l'œuvre de Christ. Voilà donc la mort de Christ prise comme point de départ, comme base de l'enseignement évangélique. Dans aucun des discours précédemment mentionnés dans ce livre, il n'en avait été question à ce point de vue. On prêchait Jésus le ressuscité, c'est-à-dire le Christ rejeté par les hommes, mais glorifié par Dieu, on parlait de sa future parousie. Maintenant on ne se contente plus d'expliquer qu'il ait pu mourir, parce que Dieu permettait que les Juifs le rejetassent, mais on insiste sur ce qu'il a dû mourir pour le salut des hommes. On n'a qu'à comparer Matth. VIII, 17 et 1 Pierre II, 24, deux passages où le même verset d'Ésaïe est expliqué d'après les deux points de vue opposés. Il ne faut pas oublier que cet enseignement relatif à la signification de la mort de Christ est lié de la manière la plus intime aux tendances anti-légales et anti-judaïques, qui nous ont été signalées dans la prédication d'Étienne. (Voyez l’Hist. de la théol. apost., t. I, p. 339 ss.)

Nous avons omis dans la traduction le v. 37 du texte reçu: Et Philippe dit: Si lu crois de tout ton cœur, cela petit se faire. Et il répondit: Je crois que Jésus-Christ est le fils de Dieu. Cette phrase manque dans les meilleurs témoins. Elle a été ajoutée sans doute pour remplir une prétendue lacune. On a pensé que l'Éthiopien avait dû faire une profession de foi en règle, pour être admis au baptême. La formule consignée dans ce texte fait du terme de Christ une partie intégrante du nom de Jésus. À l'époque de Philippe, on disait: Je crois que Jésus est le Christ, le fils de Dieu; comp. Matth. XVI, 16. Act. II, 36; III, 20 (texte corrigé); IX, 20, 22, etc.

La fin du récit contient un fait positivement miraculeux. Philippe disparut subitement, et se trouva tout à coup dans un autre endroit, d'où il continua sa route dans la direction opposée à celle que suivait l'étranger. Cette disparition se fit donc, dans la pensée du narrateur, par un enlèvement, et quelque disposés que nous puissions être à n'y voir qu'une séparation subite, le texte est trop clair pour nous permettre de supprimer un miracle dont nous n'entrevoyons pas le but. Le nouveau converti continue son chemin réjoui de sa rencontre (et réjouissant les amis de l'évangile par le fait de la conquête d'un principe plus conforme à son esprit), et l'apôtre se tourne vers un nouveau champ à exploiter, sans regarder en arrière (Luc IX, 62).

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