LE SERPENT
D'AIRAIN
CHAPITRE III.
La mort détruite et la vie rendue par le
regard de la foi.
Un regard sur Jésus crucifié nous
sauve ; il arrête les funestes effets du
péché, et nous rend une vie
véritable et éternelle. Revenons
encore une fois au type du serpent d'airain, afin
qu'il nous aide à comprendre les
bénédictions qui découlent
pour nous du sacrifice de Christ.
Les enfants d'Israël mouraient au
désert. Les serpents qui les faisaient
périr sont des ennemis dont les peuples de
l'Orient connaissent encore la puissance. La
morsure de ces reptiles est suivie
immédiatement de douleurs aiguës ;
elle produit bientôt une enflure à
laquelle succède une faiblesse
complète. Bientôt la respiration
devient pénible et le pouls inégal.
Des convulsions agitent le mourant ; une sueur
froide, une fièvre intense, des ardeurs
brûlantes, puis, tout est fini : la mort
a fait une nouvelle victime...
Quel spectacle navrant devait présenter le
camp des Israélites ! Partout
règnent la souffrance, l'épouvante,
le désespoir ; les cris d'angoisse se
mêlent aux gémissements des
agonisants. Chaque blessé,
en voyant expirer son frère, peut compter
les minutes de vie qui lui restent
encore !
Mais, soudain, la voix du Législateur se
fait entendre : « Regardez et
vivez ! » s'écrie-t-il en
élevant la perche surmontée du
serpent. Tous les regards se dirigent vers cet
étendard de salut, et quelle
bénédiction pour ceux qui le
contemplent !
Un seul regard suffit pour leur rendre la vie.
Aussitôt la fièvre cesse, les
convulsions se calment, la mort s'enfuit, la
santé revient, apportant avec elle le
précieux sentiment de son retour. Et cette
merveilleuse transformation s'est
opérée dans l'espace d'un
moment ! Et, maintenant, le camp d'Israël
présente un tout autre aspect : la joie
a fait place aux larmes, l'action de grâce
aux cris d'agonie. Chacun se félicite,
chacun reprend ses occupations ordinaires ;
les amis se retrouvent, et tout rentre dans
l'ordre.
Ce tableau n'est point une simple fiction ; ce
qui se passa au désert est un symbole riche
de vérités, dont l'application nous
est personnelle.
Le Fils de Dieu a été
élevé sur une croix. Tous ceux qui le
contemplent par la foi éprouvent dans leurs
coeurs une transformation admirable. Les effets du
poison moral sont arrêtés
instantanément, et la vie de Dieu, que Satan
avait détruite, est rendue au croyant pour
toujours.
La morsure du serpent ancien est incurable. La
Parole sainte, depuis sa
première jusqu'à sa dernière
page, nous le répète et nous le
démontre par des faits, aussi bien que par
des déclarations positives. Caïn savait
la volonté de Dieu ; mais son coeur
révolté résista aux ordres de
son Créateur. La longue histoire du peuple
juif ne déroule devant nous ses incidents si
multipliés que pour nous prouver la haine
invétérée du coeur humain pour
la sainte loi de l'Éternel. Rien n'a pu
régénérer ce peuple ;
tous les moyens mis en oeuvre par la Sagesse divine
sont demeurés impuissants. Après des
exemples tels que ceux de Saül et de Balaam,
qui péchaient contre les lumières de
leurs consciences ; après les longs
ennuis par lesquels le peuple fatigua son Dieu au
désert, on ne s'étonne plus du
supplice du Calvaire. Comment ne pas
désespérer des ressources du coeur de
l'homme, puisque tous les moyens déjà
mis en oeuvre pour le guérir ont
été vains ? Il a cru au
mensonge, il a suspecté son Créateur,
il le hait, il lui désobéit, et quand
il a la volonté de se soumettre à ses
lois, il ne trouve en lui aucune force pour les
accomplir.
Un seul remède efficace est devant
nous : c'est la croix élevée en
Golgotha, c'est la foi au sacrifice expiatoire de
la sainte victime qui s'y trouve attachée.
Quel effet bienfaisant a produit et produit encore
sur les âmes des pauvres pécheurs un
regard sur la croix ?
En contemplant Jésus cloué sur le
bois maudit, nous comprenons
d'abord que le
péché mérite la mort,
c'est-à-dire la condamnation
éternelle. Là, Dieu prend vie pour
vie ; un être innocent souffre à
la place des coupables, non seulement des peines
physiques, mais des angoisses morales, l'abandon
même de son Père.
Nous ne sommes absous qu'à ce prix. Rien ne
nous humilie comme la croix, et rien non plus ne
nous fait mieux comprendre tout ce que le
péché a d'odieux aux yeux de Celui
qui n'a pu nous pardonner sans frapper notre
parfait substitut.
Jésus, abaissé volontairement au rang
des malfaiteurs, méprisé des hommes
et maudit de Dieu, est là devant nous, et la
vue de ses douleurs parle à nos âmes.
Son amour nous est rendu sensible et comme
visible ; nous en avons une preuve
éclatante, et notre foi s'y appuie. Le
Sauveur a estimé nos vies à un prix
égal à la sienne ; notre bonheur
présent et à venir a
été précieux à ses
yeux, et nous ne pouvons plus douter de ses tendres
compassions.
Un simple regard sur la croix produit tous ces
sentiments dans le coeur du pécheur
humilié. Il se confie, il se soumet, il est
heureux de posséder un Sauveur, d'être
lavé par lui et enveloppé d'une
justice parfaite. Le désir de l'aimer et de
lui obéir le remplit ; il sent qu'une
vie nouvelle s'est introduite en lui et que la mort
spirituelle n'a plus sur lui de
puissance.
Le tableau que nous avons essayé de tracer
n'est point le produit d'une imagination qui
cherche un idéal impossible à
réaliser sur la terre. Nous trouvons dans
les Écritures, comme dans l'histoire de
l'Église, des faits qui nous montrent la
grâce divine opérant dans les coeurs
et les transformant. Saul de Tarse, pendant qu'il
gardait les habits de ceux qui lapidaient saint
Étienne, sentit une ardeur sanguinaire
s'allumer dans ses veines. Il ravagea
l'Église, nous dit la Bible, et emmena,
liés à Jérusalem, tous les
chrétiens qu'il rencontrait. Sur la route de
Damas, alors qu'il ne respirait que menace et
carnage, Christ apparut dans sa gloire au jeune et
orgueilleux pharisien. Plus tard, ce même
Saul de Tarse disait de Jésus de Nazareth
qu'il avait persécuté :
« Il est venu dans le monde pour sauver
les pécheurs dont je suis le
premier. » À l'instant même
où ses yeux éblouis
rencontrèrent ceux du Maître, sa haine
pour lui fut changée en amour, et cet amour,
dévoué jusqu'à la mort,
soutint son âme durant trente années
de travaux incessants ; il le soutint au
milieu des persécutions, dans la faim, dans
la nudité, dans les périls de tous
genres. C'est lui qui, plusieurs années
après, disait à ses
frères : « Je suis
prêt, non seulement à être
lié, mais à mourir à
Jérusalem, pour le nom du Seigneur
Jésus. »
Le martyr se laissait immoler sans
résistance, et donnait avec joie sa vie pour
le Maître qui avait sacrifié pour lui
la sienne.
C'est ainsi que la grâce divine a
transformé et transforme encore ceux qui
croient.
Elle détruit aussi le doute et nous rend
capables d'obéir.
Abraham se réjouit en voyant, par la foi, le
Sauveur qui devait venir, et cette vue
anticipée lui communiqua une confiance si
parfaite, qu'il est encore pour nous le Père
des croyants.
Job, qui s'écriait : « Je
sais que mon Rédempteur est
vivant ! » Job voyait, aussi bien
que Moïse, Celui qui est invisible. Sa foi en
l'Agneau de Dieu, déjà immolé
dans les décrets éternels, le soutint
quand tout ce qu'il possédait ici-bas lui
fut enlevé, et le rendit capable de
répondre au défi de Satan et aux
insinuations de sa femme :
« L'Éternel l'avait donné,
l'Éternel l'a ôté ; que le
nom de l'Éternel soit
béni ! »
Sous l'ancienne Alliance, les saints hommes de Dieu
attendaient le Sauveur. Lisez les Psaumes, et dans
ces pages si ardentes et si belles vous trouverez
l'expression la plus complète des sentiments
que la foi en Christ ait pu produire. Jésus
y parle lui-même, par la bouche du
Psalmiste ; il nous raconte ses souffrances
les plus intimes, et les gloires qui devaient les
couronner. David nous exprime, en même temps,
la confiance qui le soutenait lui-même dans
ses détresses, et son désir
d'obéir à l'Éternel. Le
psaume CXIX tout entier nous
révèle son amour pour la
volonté de Dieu, et nous montre en lui un
homme régénéré par le
Saint-Esprit, dont l'unique désir est de
conformer sa vie aux préceptes divins.
La foi seule au Rédempteur qu'ils
attendaient produisait tous ces fruits de
renoncement et d'obéissance, dans le coeur
des patriarches.
Comparons ces hommes dévoués, qui
préfèrent l'opprobre de Christ aux
jouissances du péché, au peuple juif
incrédule et idolâtre. Le Saint-Esprit
n'avait point régénéré
ce peuple tout entier ; bien qu'il fût
l'objet constant des soins de l'Éternel, et
qu'il reçût des preuves magnifiques de
son amour, ses yeux étaient appesantis pour
ne point voir, et ses oreilles pour ne point
entendre.
Job n'avait que des douleurs
pour sa portion, et pourtant il n'attribua rien
à Dieu d'indigne de lui ; tandis
qu'Israël se plaignait quand il était
nourri de manne, et se révoltait sous le
rocher miraculeusement ouvert pour l'abreuver.
Saint Paul, affligé,
persécuté, n'avait-il pas des motifs
de se croire abandonné de son
Maître ? Les confesseurs de la foi, qui
n'ont eu comme lui en partage que des tribulations
et le martyre, n'ont-ils pas
persévéré jusqu'à la
fin, malgré les cruautés de leurs
bourreaux et les railleries d'un monde
plongé dans le mal ? Où faut-il
chercher le secret de leur fortitude ?
Ah ! c'est que la foi les animait, et que
cette foi est indépendante de toute
circonstance extérieure. C'est qu'ils
contemplaient et aimaient Jésus.
Un regard sur la croix du Calvaire, voilà
l'unique remède, le remède seul
efficace, qui ôte le péché de
nos coeurs. Ce regard de foi nous communique la
santé spirituelle, et nous attire
invinciblement vers le Seigneur. Nous voyons son
amour comme à l'oeil ; nous nous
réjouissons de son pardon, et nous lui
consacrons notre vie tout entière.
La vie spirituelle et divine que nous communique le
Saint-Esprit commence dès ici-bas. La vie
éternelle c'est de connaître
Christ ; celui qui croit est passé de
la mort à la vie, des ténèbres
à la lumière. Cette transformation
intérieure n'est pas le résultat de
nos efforts et de notre obéissance.
L'Israélite mordu par le
serpent brûlant n'allait point dans le camp,
accomplir certains devoirs, avant de regarder vers
la perche. Il était incapable de rien faire
pour recouvrer la vie qui lui
échappait ; elle ne lui était
rendue qu'en regardant au serpent d'airain, et,
dès cette heure, il montrait par ses actes
qu'il était guéri.
Le péché a desséché
dans nos coeurs les sources de la vie, et ces
coeurs sont devenus impuissants pour accomplir la
volonté de Dieu. L'amour en est absent, et,
avec lui, toute obéissance et tout bien. Ne
cherchons donc plus à blanchir les dehors du
sépulcre, ni à amender notre
conduite, dans l'espérance de créer
nous-mêmes en nous la nouvelle nature, sans
laquelle nul n'entrera dans le
royaume des cieux. Cette nature
régénérée,
sanctifiée, procède de Dieu ;
elle suit le pardon, et elle nous prépare
pour la gloire éternelle, dans laquelle elle
recevra sa consommation. La gloire est à
venir, mais la vie commence dès à
présent. Elle se manifeste par des actes
propres à sa nature ; celui qui la
possède glorifie Dieu, et c'est ainsi que
tous connaissent qu'il est passé de la mort
à la vie.
Celte vérité est humiliante et
difficile à accepter. Que d'âmes
sincères cherchent à plaire au
Seigneur, en pratiquant, aussi bien qu'elles le
peuvent, ce qu'il commande, dans le vain espoir
d'obtenir par ce moyen la vie
éternelle !
Écoutez ce que dit un apôtre, lorsque,
voulant énumérer les principes du
christianisme, il commence par celui-ci :
La repentance des oeuvres mortes. Mortes en
effet, car toutes les oeuvres qui proviennent de
notre coeur naturel ne sont devant Dieu que comme
un linge souillé, parce qu'elles ne sont pas
le fruit d'un amour réel pour lui.
La première chose que nous apprend le
Saint-Esprit, c'est à nous humilier
nous-mêmes dans la poussière, pour
avoir osé présenter au Dieu trois
fois saint nos oeuvres mortes. Mais quand nous
avons fixé un regard confiant sur la croix
où Jésus fut maudit, pour expier ces
mêmes oeuvres que nous avons estimées
bonnes, alors nous aimons Celui qui a souffert
à notre place et nous nous donnons à
lui pour le servir tous les
jours de notre vie. Alors aussi le principe nouveau
et divin de l'amour qui vivifie notre âme
devient pour elle le témoignage
intérieur qu'elle appartient à
Christ.
L'Israélite sentait qu'il était
guéri en son corps, et l'âme a aussi
le sentiment de sa guérison. Nul n'a besoin
de la lui affirmer, nul ne pourrait l'amener
à en douter. Sa conviction est intime et
puissante ; elle ne dépend en aucune
manière de l'approbation des hommes, mais
elle a pour appui solide et éternel l'oeuvre
que Jésus accomplit en mourant et en
ressuscitant pour elle.
Un regard sur la croix nous transforme et nous rend
semblables à Christ. Moïse sortait de
la présence de l'Éternel avec un
visage resplendissant de gloire. Ainsi quand nous
nous approchons du Sauveur et que notre regard
rencontre le sien, le voile qui nous le cache est
en partie ôté, et ses divines
perfections se reflètent dans nos
âmes. À mesure que nous contemplons
à visage découvert, ses souffrances
et son amour ; à mesure que nous
pénétrons plus avant dans la
connaissance de ce qu'il est pour nous, notre coeur
se dilate, se réjouit et se
pénètre de sa sainte
ressemblance.
Le Saint-Esprit descend en nous et produit ce
changement de pensées et de sentiments que
l'Écriture appelle la nouvelle naissance.
L'affection de la chair est ennemie de Dieu ;
elle ne peut se soumettre à ses lois ;
mais la nouvelle nature qui nous est donnée
et qui demeure en nous par le Saint-Esprit,
après nous avoir assuré de notre
adoption, forme un homme nouveau qui se
développera jusqu'au jour où il
reproduira parfaitement dans la gloire l'image de
Celui qui l'a créé.
Ceux qui n'ont point été
guéris de la morsure du démon, et qui
par conséquent, n'ont pas reçu dans
leurs coeurs la vie divine dont nous venons de
parler, ne comprennent pas mieux que
Nicodème la puissance de ce nouveau
principe. Ils se figurent que la vie d'un enfant de
Dieu est un service pénible, une
obéissance servile.
Ah ! ce sont ceux qui obéissent dans le
but de s'acquérir la
faveur du juge suprême qui font un service
pénible. Mais le chrétien,
déjà assuré de son adoption,
agit avec la liberté et la joie d'un enfant.
Le chemin du lieu très saint lui est
ouvert ; il sait qu'il a un avocat
auprès du Père, qu'il est membre du
corps de Christ, et qu'il peut à toute heure
aller puiser à la source des eaux vives, des
forces proportionnées à ses besoins
et à ses tentations. Il se réveille
tous les matins aussi pauvre et aussi impuissant
que la veille ; il n'a rien en lui et il n'a
pas de provisions de grâces. Mais il obtient
tout par Christ ; il peut tout par
Christ ; Celui qui est en lui est plus
puissant que ceux qui sont contre lui.
Un regard sur Jésus crucifié est le
remède souverain qui le guérit. C'est
au pied de la croix qu'il va chercher tous les
jours l'assurance que ses fautes
journalières sont purifiées par le
sang et par l'intercession de son Sauveur ;
c'est là qu'il reçoit une force sans
cesse renouvelée, pour résister au
mal et pour travailler à glorifier son
Maître ; c'est là enfin, à
ce céleste rendez-vous, qu'il rencontre sa
famille spirituelle, cette famille composée
de tous ceux qui, sur la terre, se réclament
du sang de Jésus, et de ceux qui, dans le
ciel, se prosternent devant l'Agneau.
Avant qu'une âme se convertisse, Satan a pour
but unique de détourner son regard de la
croix, parce qu'il sait bien que là
seulement tombera le fardeau de
ses péchés. Quand elle est convertie,
et qu'il ne peut lui ravir le précieux
sentiment de son adoption, il cherche encore
à détourner son regard de cette
même croix, afin de l'affaiblir et de
l'éloigner de la source vivifiante qui seule
peut la restaurer. Ce que le diable redoute avant
tout, c'est la croix sur laquelle le
Rédempteur lui écrasa la
tête ; il la redoute parce qu'il sait
très bien que son empire sur nous est
anéanti, dès l'instant où
notre âme se réfugie auprès
d'elle et l'embrasse par la foi, comme son unique
délivrance.
Ne vous étonnez donc plus de tous les
obstacles que votre adversaire place entre vous et
Jésus crucifié, et de toutes les
distractions qu'il vous suscite pour vous
empêcher de le contempler. Remarquez
seulement que tout ce qui vous tient
éloigné de la croix est une
tentation, et que tout ce qui vous en rapproche est
un bien.
Si vous dites : « Cette parole est
dure ; je ne puis, quant à moi, nourrir
mon âme du sacrifice de Christ et puiser en
lui seul ma force, » alors, je vous le
demande, que comptez-vous faire ? Au lieu
d'aller au Calvaire, où irez-vous, dans vos
tristesses, dans vos heures de
découragement ? Où irez-vous
dans vos jours de joie ? Sera-ce à
vous-même, à cette pauvre citerne
crevassée qui a nom votre coeur ?
Sera-ce au monde, à ce roseau qui perce la
main qui s'y appuie ? - Si vous dites :
« Mon âme est
heureuse, elle se confie en
Dieu, mais le sacrifice de Jésus n'est pas
souvent présent à sa
pensée, » prenez garde ! Ce
sacrifice vous est donné pour nourriture
journalière ; or, si la chair et le
sang de Christ ne forment pas la base de ce qui
sustente et fortifie votre âme, de quoi donc
cette âme se nourrit-elle ?
De ses émotions religieuses, de ses
prières et de leurs exaucements, de moyens
d'édification ?
Mais ces choses sont les grâces qui nous
viennent du salut : ce sont les dons ;
tandis que le donateur qui nous les dispense est
oublié ! - Revenons sans cesse à
la source même de toutes nos
bénédictions, à Jésus
et à son oeuvre parfaite, et rien ne nous
ravira notre joie.
Si vous dites : « Je m'efforce de
regarder à la croix, mais elle
échappe constamment à ma
vue ! » que faites-vous alors ?
Au lieu d'attendre de Dieu seul la vie nouvelle
après laquelle vous soupirez, vous
efforcez-vous d'améliorer les dispositions
de votre vieille nature ? N'est-ce point
là mettre du vin nouveau dans un vieux
vaisseau ?
C'est une vaine entreprise, qui vous conduira au
désespoir, et que le peuple juif a
tentée avant vous. Disons-nous bien que
Jésus est le seul Sauveur, la croix notre
unique remède ; n'essayons plus d'aucun
autre moyen de relèvement. Pour obtenir
l'assurance de notre pardon, un regard plein de foi
sur la croix ! Pour obtenir la
guérison du mal moral que
le venin du serpent a produit dans nos âmes,
encore un regard sur la croix ! La croix
où Jésus est crucifié pour nos
offenses, et où il crucifie avec lui notre
vieil homme, voilà le salut !
Que nos yeux ne s'en détournent plus ;
qu'ils y reviennent sans cesse : nous
comprendrons alors, par des délivrances
répétées, tout ce qu'il y a
d'admirablement vrai dans ces paroles du
prophète Esaïe, paroles qui sont comme
le résumé de
l'Évangile :
C'est par sa meurtrissure que nous avons la
guérison !
La vie spirituelle que le Saint-Esprit nous
communique par la foi en Jésus
crucifié est immortelle comme celle du
Maître. Nous avons été
identifiés avec lui en sa mort et en sa
sépulture : nous le sommes en sa
résurrection. Cette vie commence au moment
de la conversion, et elle se développe comme
le fait le bourgeon d'une plante sous l'influence
du soleil. À sa naissance, elle est faible
et délicate ; elle a besoin de soins,
de chaleur et de rosée ; elle a
été greffée dans des coeurs
mauvais ; elle croît dans un sol
ingrat ; elle est enveloppée de
l'atmosphère empoisonnée du monde,
qui cherche à l'étouffer sans cesse.
Mais elle est la vie de Dieu même,
étincelle impérissable que
l'Éternel a allumée, qu'il garde et
qu'il gardera jusqu'à la fin.
Que l'enfant du Père ne craigne donc point
de la voir s'éteindre en lui, cette
divine étincelle, sous
les souffles orageux qui la menacent ; son
céleste gardien en prendra un soin jaloux,
et un jour viendra où ce lumignon de vie
divine ira s'alimenter aux rayons qui partent du
foyer qui la forma. Le jour viendra où cette
faible plante, semée ici-bas, atteindra son
plein développement sous un ciel plus pur,
et sera pour jamais à l'abri des influences
délétères qui l'environnent.
Alors nous verrons Jésus tel qu'il est, sans
voile ; et, rassasiés de sa
ressemblance, abreuvés au fleuve de ses
délices, nous partagerons sa
félicité.
CONCLUSION.
Lecteurs ! Nous avons fait passer devant
vous les grandes vérités que nous
enseigne le type du serpent d'airain
élevé au désert. La mortelle
blessure du péché, qui a perdu toute
la race humaine, et qui la place sous
l'éternelle condamnation ; la croix du
Calvaire, remède seul infaillible, qui rend
la santé spirituelle à l'âme,
au moment même où elle contemple avec
foi la parfaite victime qui y
est attachée, et que Dieu frappe à sa
place ; la vie éternelle et divine, que
le Saint-Esprit communique au croyant
pardonné, et qui le rend aussitôt
capable d'aimer et d'obéir :
voilà ce que nous dit l'admirable symbole
dont nous avons essayé de comprendre le
sens.
Les doctrines fondamentales du christianisme s'y
retrouvent toutes ensemble. Elles nous y sont
révélées d'une manière
saisissante et dramatique, et elles arrivent
à nos coeurs par le moyen dune simple et
attrayante histoire.
Les vérités que le type nous aide
à discerner sont bien autrement importantes
que le type lui-même, puisque ce sont elles
qui nous sauvent pour
l'éternité.
Cependant il ne suffit pas de les étudier,
de les approuver et de les admirer, pour qu'elles
exercent sur nous une influence salutaire.
Jusqu'à ce que nos coeurs en soient
pénétrés par une foi vivante,
elles ne seront pour nous qu'une vaine et
stérile théorie.
Le jour vint où le roi
Ézéchias détruisit, avec une
sainte indignation, la perche du désert,
parce que le peuple l'adorait
(2 Rois, XVIII, 4.). C'est la
personne même de Jésus, c'est son
oeuvre parfaite, qui doivent être l'objet de
notre foi et de notre amour.
Christ est la réalisation
éternellement vivante de tous les
symboles ; il est le point central des
enseignements de l'Écriture, la
clé de tous les types de
l'ancienne alliance. C'est lui qu'il faut chercher
en lisant la Bible, et c'est la vie que produit le
Saint-Esprit dans le coeur qu'il faut
posséder. Hors de là notre
christianisme n'est qu'un mot, une vaine
spéculation.
Les sacrements du baptême et de la sainte
Cène nous représentent les
mêmes choses sous la forme de symboles
visibles. Ils les expriment aussi fidèlement
qu'une image matérielle peut le faire.
Simples et imposants tout ensemble, ils
prêchent au monde Christ crucifié pour
les pécheurs, et
régénérant les âmes par
le Saint-Esprit. Jusqu'à ce que Jésus
revienne, ils parleront à tous le même
langage, et annonceront les mêmes
vérités que préfiguraient les
types de l'ancienne Alliance. Mais ces deux
sacrements, les seuls que la Parole de Dieu ait
donnés à l'Église, ne sont
point de simples cérémonies ;
ils n'ont un sens, ils ne peuvent être
bénis pour nous, que s'ils sont l'expression
de notre foi.
Considérons-les avec le même respect
et le même amour qui animait
l'Israélite croyant, quand il discernait,
à travers les formes symboliques de son
culte, les réalités glorieuses de
l'avenir.
Pour nous, c'est le passé que le
baptême et la sainte Cène nous
rappellent, c'est l'oeuvre de Christ
rédempteur, dont l'Esprit nous
sanctifie ; mais n'oublions jamais que
cette oeuvre a une application permanente, et que
nos âmes doivent s'en nourrir tous les
jours. Par tous ces moyens
divers, le Seigneur nous invite à regarder
à lui. Il dirige les yeux de notre âme
vers la Croix ; il les fixe sur Jésus
mis à mort. Et maintenant, vous qui lisez
ces lignes, écoutez cette voix qui vient
encore une fois vous dire de contempler le Sauveur
et de croire à la puissance efficace de son
sacrifice.
Quel que soit l'état de votre âme,
venez et regardez ! Ne cherchez plus à
vous préparer, à vous rendre
meilleurs avant de regarder : venez
aujourd'hui, venez tels que vous êtes. Si
Dieu vous commandait d'accomplir une oeuvre
difficile, pour obtenir le salut de vos âmes,
ne la feriez-vous pas aussitôt ?
Eh bien ! il vous dit de croire à ce
qu'un autre a fait, de contempler ce qu'un autre a
souffert pour votre guérison
éternelle.
Priez, car vous ne sauriez accomplir même
l'acte si simple de regarder à Christ par
votre propre volonté. Et si vous
éprouvez douloureusement à cette
heure que se confier en Jésus par la foi est
une chose impossible à votre coeur
habitué au doute, souvenez-vous que la foi
elle-même est un don de Dieu, et
répétez, avec le pauvre père
qui vint aux pieds du Sauveur demander un
miracle :
Je crois, Seigneur !
aide-moi dans mon
incrédulité !
FIN.
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