Blackwood. - Lord Radstock. - H. Varley. - Asa Mahan. - Th. Monod.
Parmi les premiers ecclésiastiques
londoniens gagnés au mouvement de
sanctification, il faut citer Evan Hopkins, auteur
d'un opuscule sur La vie sainte
(1), et
Webb
Peploe, vicaire de la cathédrale de
Saint-Paul à Londres, qui prirent une part
active aux débuts du mouvement et à
la continuation de celui-ci dans l'oeuvre de
Keswick.
Une sorte de comité
s'était constitué autour de P. Smith.
Ses membres, tous très connus en Angleterre,
étaient comme les répondants devant
le public de celui que beaucoup accusaient de
n'être qu'un Américain exalté.
Ce comité était composé de
Stevenson, A. Blackwood, membre du parlement, Evan
Hopkins, Markus Martin, Donald Matheson, R.-S.
Morgan, T.-B. Smithies, lord Radstock et Henri
Varley.
Plus tard le professeur
américain, Asa Mahan, vint rejoindre ses
compatriotes P. Smith et Boardman. Ne pouvant
parler de tous les promoteurs de ce mouvement, nous
nous bornons à présenter à
nos lecteurs ceux d'entre eux qui
nous paraissent à distance avoir
été les plus importants.
Blackwood prononça à
Brighton une allocution remarquable de sagesse et
d'à-propos. Nous la donnons ici, elle
suffira à montrer quel rôle
pondérateur cet homme a joué dans le
mouvement.
« Chers amis, en ce qui
concerne la présence du Saint-Esprit dans
nos coeurs, j'ai pensé que plusieurs d'entre
nous sont troublés peut-être, parce
qu'ils n'ont pas été baptisés
de cet Esprit exactement de la même
manière que tel ou tel autre de leurs
frères qui ont raconté ici leurs
expériences, et qu'ils ne sauraient comme
eux rattacher à aucune époque
précise l'entrée de cet hôte
divin dans leur coeur.
Chers amis, les voies de Dieu
sont
très diverses, et ce serait folie de notre
part que de vouloir fixer des bornes au saint
d'Israël, et lui dicter le chemin par lequel
il doit nous conduire dans la vie
chrétienne.
Dieu agit différemment avec
chacun de nous : chez les uns la conversion
est soudaine, chez les autres, elle est
graduelle ; chez le plus grand nombre,
peut-être, il s'est fait pendant de longues
années un travail lent et progressif ;
puis une heure a sonné où le salut en
Christ nous est apparu dans toute sa clarté,
et dès ce moment nous avons pu, sans
hésitation, nous compter au nombre des
rachetés.
Ce qui arrive pour la
première des vérités que nous
avons reçues, arrive également pour
les vérités que Dieu nous
révèle plus tard, concernant la
sanctification ou le baptême du Saint-Esprit.
Parfois il agit soudainement, mais souvent aussi
c'est peu à peu qu'il travaille, et fait
sentir ses effets. Il nous est dit, par exemple,
dans les Proverbes, que « le sentier du
juste est comme la
lumière resplendissante
qui augmente son éclat jusqu'à ce que
le jour soit en sa perfection ». Cette
image ne nous dit pas qu'il y ait rien de soudain
dans la vie chrétienne ; car cette
lumière dont il est parlé ici, nul ne
peut dire à quelle heure en a lui le premier
rayon. Je vous défie, qui que vous soyez, de
préciser l'heure à laquelle commence
l'aurore ; je vous défie de me montrer
l'instant exact où l'aurore fait place au
jour ; je vous défie enfin de me
désigner une heure de la journée
où la lumière grandisse d'une
façon plus marquée. Non, tout dans
cette action de la nature est calme et progressif.
Nous savons que le soleil se lève ;
nous savons que c'est à l'est qu'il
apparaît ; mais nous ne savons
exactement ni quand, ni comment son premier rayon
nous atteint. C'est à Dieu qu'en appartient
le secret. De même nous savons que l'Esprit
vient en nos coeurs, mais quand et comment y
fait-il son entrée ? C'est à
Dieu seul qu'en appartient le secret.
« L'oeuvre du
Saint-Esprit
est souvent aussi comparée à la
rosée. Or cette rosée que nous
contemplons au matin, qui de vous en a vu se
former, sur les feuilles ou sur la mousse, les
premières gouttes étincelantes ?
Quand même vous auriez passé dehors
une nuit tout entière, vous n'y auriez pas
réussi. Qui de vous encore a pu distinguer
la goutte par laquelle commence une de ces
ondées qui viennent rafraîchir la
terre ? Il en est le plus souvent ainsi des
expériences du peuple de Dieu, quoiqu'il y
ait cependant des exemples de résultats
instantanés.
Mais, en règle
générale, c'est par les fruits
produits en vous que vous pouvez constater la
présence du Saint-Esprit. L'un de ses
premiers résultats, c'est de nous faire
mieux voir nos
péchés. Si donc vous ne pouvez dire,
avec d'autres : « Tel jour, et
à telle heure j'ai senti que je recevais le
baptême du Saint-Esprit »,
pouvez-vous du moins reconnaître que, depuis
la plante de vos pieds jusqu'au sommet de votre
tête, il n'y a aucune bonne chose en vous, et
à cause de cet état de
péché, vous détestez-vous plus
que jamais vous-même ?
Sentez-vous, plus que jamais,
combien Christ vous est nécessaire ?
Votre regard demeure-t-il plus
que
jamais fixé sur Lui ?
Avez-vous réussi à
mortifier, mieux que par le passé, les
oeuvres du corps ?
Avez-vous un sentiment plus vif
d'être adopté par Dieu et d'être
reçu au nombre de ses enfants ?
Pouvez-vous enfin, du fond de
votre
coeur, crier à Lui - Abba ! -
Père !
Si tout cela est vrai de vous,
vous
avez véritablement reçu le
Saint-Esprit, car ce sont là les fruits
qu'il produit, et que lui seul peut produire. Mais
quoi que nous ayons déjà reçu,
sachons bien que nous avons encore de beaucoup plus
grandes choses à recevoir ; à
quelque degré que nous soyons parvenus, nous
avons encore beaucoup à gravir. Dieu tient
en réserve des trésors dont nous ne
pouvons nous faire aucune idée, et qu'il
veut nous révéler, par son Esprit,
à mesure que nous serons capables de les
comprendre et de les recevoir
(2). »
Et tout en lisant ces paroles si
spirituelles et si sages d'un homme politique, on
est obligé de reconnaître que ce qui
fait encore aujourd'hui la valeur exceptionnelle de
l'Angleterre dans le concert des nations -
malgré de graves déchéances -
c'est qu'elle possède dans ses institutions
une proportion plus forte que les autres peuples de
ces hommes d'un courage moral
à toute épreuve et d'une
piété authentique.
Lord Radstock appartenait à
la famille des comtes de Waldegrave. Dans sa
jeunesse il s'était enthousiasmé pour
les questions militaires et était parvenu au
grade de lieutenant-colonel dans le corps du
Middlesex. À la suite d'une crise de
conscience, il se consacra tout entier, dès
1866, à l'évangélisation. Il
fit de fréquentes tournées dans les
Îles Britanniques et jusque dans les colonies
lointaines. Il visita l'Inde à sept
reprises, annonçant l'Évangile aux
natifs et aux colons anglais ; il y fonda une
caisse de secours contre la famine, la plaie de ce
pays surpeuplé.
Il s'intéressait aux
quartiers mal famés de Londres, y
créa des établissements de
bienfaisance, bâtit « Conference
Hall » où, pendant plusieurs
années, il prêcha lui-même le
dimanche après-midi, payant autant et plus
de sa personne que de sa bourse, ce qui n'est pas
peu dire.
En 1878 il réussit par la
grâce de Dieu à provoquer un
véritable réveil religieux dans la
haute société russe. Il eut la joie
de servir d'instrument à Dieu pour convertir
le colonel Pachkoff, ami personnel du tsar, les
comtes Schoulepnikoff et Korff.
Il travaillait aussi à
l'évangélisation de Paris, soit en
distribuant des Évangiles le matin aux
balayeurs de rue, aux ouvriers qui se rendaient au
travail, aux cochers de fiacre, soit en se rendant
l'après-midi dans quelque salon du faubourg
Saint-Germain pour y témoigner de sa foi
à Jésus-Christ devant une
société que son nom, ses titres et
aussi sa grande largeur spirituelle lui
permettaient de fréquenter. Il était
de ces hommes qui peuvent pénétrer
dans tous les mondes sans
dommage pour leur foi ; aucun contact ne la
faisait fléchir, c'est elle au contraire qui
s'imposait aux autres.
Lord Radstock mourut à Paris,
la main sur la Bible, à l'âge de
quatre-vingts ans, le 8 décembre 1913. Son
dernier message, transmis par son fils à
l'assemblée à laquelle il ne pouvait
plus se rendre, fut Psaume LXVIII, 29:
« Ton Dieu ordonne que tu sois
puissant ! »
Ce grand de ce monde et ce grand
chrétien disait à la Convention de
Morges, avec un sympathique accent anglais :
« Oh ! je ne suis encore qu'un petit
bébé dans la
foi ! »
Sans avoir rompu avec
l'Église anglicane, lord Radstock
s'était rapproché de la fraction la
plus large des Frères de Plymouth et quand,
en 1874, P. Smith vint à Londres, il fut
attiré d'emblée par
l'élément de puissance et de vie
profonde que renfermait le message de l'industriel
américain, qu'il compléta et rectifia
à plus d'une reprise. Il entra dans son
comité, prit une part active à toutes
les grandes assises du mouvement. Sa
présence auprès de Smith offrait une
garantie de bon sens, de sécurité et
d'authentique bénédiction. Du reste
en maint endroit, en Suède, à Berlin,
il avait préparé le réveil de
sanctification par un travail préalable
d'évangélisation parmi les
chrétiens qu'il relevait et restaurait et
parmi les inconvertis qu'il amenait au salut. Il
possédait ce double don de conquérir
les âmes à Jésus-Christ et de
les amener à la maturité spirituelle,
précisément parce qu'il demeurait
dans la sobriété, dans une
humilité touchante et dans une
fidélité étroite à
l'Évangile intégral de
Jésus-Christ.
Henri Varley, avant sa
conversion,
avait exercé la profession de boucher. Il
commença par évangéliser ses
compagnons de travail, puis il devint pasteur d'une
Église baptiste en relation avec celle de
Spurgeon. Il fit des voyages
d'évangélisation au Canada et
à New-York. Il était si
extraordinairement doué pour parler aux
foules que parfois, à New-York, quinze
à vingt mille personnes se pressaient pour
l'entendre dans l'immense hippodrome de Barnum,
loué pour la circonstance.
En 1873 il fit la connaissance
de P.
Smith auquel il osa ouvrir son coeur et
décrire ainsi son état
spirituel : « Tantôt une
oasis, tantôt un long espace de sable
brûlant, ici une source rafraîchissante
et plus loin une aridité
complète ; un jour des
résultats, le lendemain une
défaite ; tantôt de la joie,
tantôt de l'abattement ; tantôt
l'esprit de prière, et puis d'autres fois
une sorte d'incapacité de prier ; un
jour une sympathie profonde pour les âmes qui
périssent, un autre jour de
l'indifférence ; tantôt une
plénitude d'amour, tantôt de la
froideur, une fois la paix et une autre fois la
mauvaise humeur et
l'irritabilité.
- Avez-vous vu se réaliser
dans votre vie cette promesse : « A
celui qui est ferme dans ses sentiments, Tu assures
la paix, la paix, parce qu'il se confie en
Toi ! »
(Esaïe
XXVI, 3) et cette autre
parole : « Ne vous inquiétez
d'aucune chose, mais en toute occasion exposez vos
besoins à Dieu.... et la paix de Dieu
gardera vos coeurs et vos esprits en
Jésus-Christ » ?
(Phil.
IV, 6).
- Comprenez-vous ce que Jésus
entend quand il prononce cette parole :
« Je vous ai dit ces choses afin que ma
joie demeure en vous et que votre joie soit
accomplie » ?
(Jean
XV, 11) demanda
Smith.
- Non, malheureusement.
- Et pourtant Dieu est capable
de
réaliser ses promesses dans la vie de ses
enfants, et remarquez bien ceci : les
promesses que je viens de vous citer ne sont que
quelques-unes prises parmi des centaines de
pareilles.
« J'étais atteint,
raconte Varley. Jamais je n'avais encore
été questionné de cette
manière. Je n'avais jamais non plus entendu
parler de ces grâces comme si elles pouvaient
être réalisées constamment dans
la vie. Je demandai avec une profonde
inquiétude :
- Et croyez-vous donc que je
puisse
être vraiment transformé dans ma vie
intérieure ?
- Ma communion avec Dieu,
répondit P. Smith, dure depuis six ans
presque sans interruption. Je ne dis pas que je
n'aie conscience d'aucun péché, mais
au moment même où je remarque une
infidélité, je puis
immédiatement me remettre en règle
avec Dieu. Au milieu d'une foule d'affaires dont je
suis chargé, ma vie a été et
est encore maintenant une vie de joie continuelle
en Dieu depuis que j'ai appris à me confier
pleinement en Lui à chaque
instant.
« Il me devint clair,
continue Varley, que posséder une pareille
force, la force de la communion de
Jésus-Christ, devait être une
grâce immense quand on travaille au service
de Dieu et je me mis à soupirer après
la source des eaux vives.
« Maintenant ces
promesses
je les possède, elles sont miennes. Mon
affaire c'est de croire, l'accomplissement
appartient à Dieu. J'ai cru, ma foi s'est
élancée à la rencontre du
torrent de vie qui m'arrivait du Christ
glorifié et j'ai reçu de sa
plénitude grâce sur grâce. O
Seigneur, comment pourrai-je assez te
bénir !
« En lisant le passage 2
Tim. II, 21. 22 dans lequel il est
question des vaisseaux à honneur et à
déshonneur, et en examinant la conclusion
qu'en tire l'apôtre quand il dit :
« Si quelqu'un se purifie à
l'égard de ces choses-là, il sera un
vaisseau honorable, sanctifié, propre au
service du Seigneur et préparé pour
toutes sortes de bonnes oeuvres, fuis les
désirs de la jeunesse.... », je
compris que la responsabilité de cette
purification reposait sur moi et je renonçai
à cette heure même, et dans la force
du Seigneur, à tout ce qui, dans ma conduite
ou mes habitudes, pouvait être douteux, afin
de pouvoir, quoi qu'il m'en dût coûter,
me conformer à la règle divine et
posséder une conscience sans reproche devant
Dieu et devant les hommes.
« Je me suis engagé
solennellement à ne plus « poser
de bornes au Saint d'Israël » mais
je me suis livré à Lui, avec tout ce
que je suis et tout ce que j'ai afin que sa
grâce me pénétrât sans
plus trouver de résistance en moi et que sa
force agît puissamment par
moi.... »
Mlle de Niebuhr raconte qu'elle
alla
entendre Varley un soir dans son Tabernacle. Il
montra par une image bien choisie à qui
ressemblent les chrétiens qui refusent de
prendre possession de leur héritage tout
entier : « Supposez que j'aie
reçu un magnifique domaine en partage. Des
amis viennent me voir ; je sors de la loge du
portier et les invite à entrer.
Comment ! me disent-ils, au comble de
l'étonnement, le domaine tout entier ne vous
appartient-il pas ? Pourquoi demeurez-vous
dans la loge du portier ? - Oui, certainement
le domaine tout entier est à moi, on dit que
là, plus haut, se trouve un
magnifique château avec
une vue splendide, mais je n'y suis encore jamais
allé. Ainsi agissent la plupart des
chrétiens ! »
Parlant d'Henri Varley, M.
Lelièvre écrivait à
l'époque :
« Son influence a
été particulièrement
bénie surtout dans les réunions
d'évangélisation. Il vient de faire
en Amérique une campagne comparable à
celle de Moody en Angleterre. - J'avais entendu
parler de lui, comme d'un homme rempli de foi et du
Saint-Esprit. Mon attente a été
dépassée. Non, je n'avais pas
l'idée d'une puissance pareille !
Pour Varley, le chrétien dans
son état normal est un homme en qui la
divinité habite réellement, dont
l'être tout entier, esprit, âme et
corps a été assujetti au Saint-Esprit
et est sanctifié jusque dans ses fibres. Et,
véritablement, en l'écoutant
lorsqu'il parle aux multitudes, en
l'étudiant dans ses relations
particulières, comme ce fut mon
privilège de le faire, on a l'impression que
c'est bien là un homme possédé
de Dieu. On voit qu'il ne s'appartient pas, que
tout son être obéit pour ainsi dire
instinctivement aux impulsions de l'Esprit. Sa
douceur et son énergie, ses tendresses pour
l'âme humaine et ses puissantes indignations
contre le mal, le feu de son regard et dans
certains moments le rayonnement de sa physionomie,
l'autorité de sa parole, la lucidité
de ses expositions scripturaires et sa
simplicité enfantine, tout cela fait penser
au Maître et rappelle ce verset des
Actes : « On reconnaissait en eux
des hommes qui avaient été avec
Jésus.... »
« .... À Brighton,
il a été le bras droit de P. Smith.
Il a eu à présider à peu
près chaque jour deux « general
meetings ». Tout en étant
pleinement d'accord avec les
frères anglais et américains sur le
fond des choses, il a conservé une
entière indépendance dans sa
manière d'exposer ces vérités
qui sont devenues la vie de son âme. Il a
pris soin de ne pas se donner pour disciple d'un
homme et n'a cessé de déclarer que
c'est de la Bible seule qu'il relève, et que
ce qu'il en tire ce ne sont pas des
vérités nouvelles, mais des
vérités négligées. Il a
toujours évité avec soin d'employer
des expressions insolites, ou de donner une grande
place aux sentiments ou même aux
expériences.... »
Asa Mahan est né aux
États-Unis le 9 novembre 1799 et il est mort
en Angleterre le 4 avril 1889, après avoir
séjourné dans ce pays les quinze
dernières années de sa vie. À
l'âge de quatre-vingt-dix ans, il faisait
profession d'avoir marché cinquante-cinq
années de sa vie avec Dieu par la foi et
sous la conduite de l'Esprit, presque
continuellement gardé du péché
conscient. Sur son lit de mort son coeur se
répandait en actions de grâces et en
intercessions pour l'Église. Il demandait
qu'elle fût baptisée de « la
puissance d'En Haut » et que Dieu
« envoyât des dizaines de milliers
d'ouvriers porter le message du salut jusqu'aux
bouts de la terre
(3). »
Cet homme de Dieu remarquable
avait
été élevé dans les
doctrines de la prédestination calviniste la
plus stricte. Plus tard, quoique converti et
consacré, il se sentait incapable d'exercer
la cure d'âmes d'une manière
fructueuse et d'amener les membres de son troupeau
à vivre la vie divine telle qu'il la voyait
décrite dans l'Écriture.
« Un jour, seul avec
Dieu, raconte-t-il, en pleine
forêt, je dis à mon Père
céleste, d'une façon
réfléchie et
déterminée, que je désirais
une chose par-dessus tout : la conscience de
posséder un coeur pur à ses yeux et
que s'Il m'accordait cette
bénédiction-là, j'étais
prêt à accepter tout ce qu'il
demanderait de moi, je le dis « avec
grands cris et larmes ».
« C'est dans cet
état d'âme que j'arrivai à
Oberlin, dans l'Ohio en 1839, comme
professeur-président du collège. J'y
étais en fonction depuis peu de temps,
lorsqu'un travail se fit dans l'Église,
partout on cherchait le secret d'une vie sainte. Un
appel fut adressé au frère Finney
(4) et
à
moi, nous demandant de traiter ce sujet
spécial dans une série de
réunions. Cet appel redoubla mon
désir de posséder ce secret ;
toute ma vie se concentra sur ce point :
parvenir à cette vie sainte. C'est alors que
mes ténèbres se dissipèrent et
que je me trouvai dans l'éclatante
lumière de la face de Dieu. Ce secret d'une
vie sainte était désormais tout
simple pour moi et je savais comment conduire les
âmes angoissées qui le cherchaient
(5). »
À lire le petit ouvrage de
Mahan, déjà cité, Le
Baptême de l'Esprit, il faut
reconnaître cependant qu'il y a, dans la
manière du professeur américain de
rechercher et presque d'exiger un baptême
sensible d'Esprit, quelque chose d'excessif qui a
porté dans les années suivantes et
dans certains milieux des fruits malsains. Il
oubliait ou ignorait que chez de nombreux
chrétiens le don de l'Esprit s'est
manifesté non sous la forme de quelque chose
qui tombe du ciel, mais par une intensité de
confiance et d'obéissance, par une
union plus étroite du « sarment
avec le Cep », par une plus grande
fécondité spirituelle.
On peut regretter aussi qu'Asa
Mahan
ait subi plus que les autres collaborateurs de P.
Smith l'influence de Wesley - et
précisément du Wesley excessif - ce
qui a donné parfois à ses
enseignements une teinte de
perfectionnisme.
Asa Mahan n'en a pas moins fait
une
grande impression au cours des réunions
d'Oxford et de Brighton sur de nombreux auditeurs
du continent. M. M. Lelièvre en parle avec
grande admiration dans l'Évangéliste :
« Ce
vénérable docteur depuis quarante ans
dépense ses forces à propager et
à défendre, par la parole et par la
plume, la doctrine scripturaire de la
consécration à Dieu et du
baptême du Saint-Esprit. Nous avons entendu
avec édification ce grand vieillard, si
plein d'énergie et de verdeur sous ses
cheveux blancs. Il y avait une autorité
toute particulière dans la parole de ce
croyant éminent, nous apportant le
résultat des études de sa longue vie,
mais ce qui nous impressionnait plus encore,
c'était la candeur enfantine avec laquelle
ce chrétien blanchi au service de son
Maître rendait témoignage à la
grâce qui a renouvelé son être
moral tout entier et qui a fait d'un jeune homme
violent et emporté un homme dont ses amis
peuvent dire qu'ils ne l'ont jamais entendu
prononcer un mot plus haut que
l'autre. »
Dans une réunion Mahan
employait cette jolie image - « Quelqu'un
à New-York fit faillite récemment, il
perdit tout son avoir, mais il avait à
Boston un frère possesseur de plusieurs
millions qui aussitôt lui envoya une
procuration pour lui permettre
de continuer son commerce. Se
fiant à cette signature il ouvrit un vaste
magasin. Il disait à un ami :
« Je suis le plus pauvre d'entre les
pauvres et cependant je suis un des plus riches,
car le nom de mon frère suffit à
m'obtenir tout ce qu'il me
faut ! »
« Lorsque je sentis la
puissance de mes péchés, je me
trouvai en faillite, ruiné, mais Christ me
dit : Va auprès de mon Père et
demande-lui en mon nom de te pardonner. Je crus
à l'efficacité de son nom et je
reçus le pardon.... Quand donc vous vous
prosternez avec foi en l'efficace du nom de Christ,
vous avez la même puissance que Lui devant le
trône de la grâce.
« Frères, c'est une
vie divine ; je puis dire que les jours de mon
deuil sont finis ! La plénitude est
à nous, tout est à nous, si nous
croyons. Notre Seigneur nous a dit :
Demandez ! »
Asa Mahan a contribué pour
une très grande part au développement
du mouvement d'Oxford par l'influence que ses
enseignements ont eue sur un Boardman par exemple
et sur de nombreux auditeurs et lecteurs aux
États-Unis d'abord, en Angleterre ensuite.
Si l'on doit faire quelques réserves sur
certains de ses enseignements, il faut
reconnaître que la vie spirituelle qui
rayonnait de toute sa personne était
puissante.
Mais nous avons hâte d'arriver
au principal collaborateur de P. Smith, M.
Théodore Monod. Neveu d'Adolphe Monod, son
nom, sa famille, sa position de pasteur à
Paris, sans parler de sa piété et de
son talent, lui font une place à part dans
ce réveil. Pearsall Smith était
américain, la piété
anglo-saxone, surtout encore celle qui est de
nuance yankee, n'avait pas
très bonne presse dans les milieux
protestants de France, de Suisse ou d'Allemagne.
L'entrée de Théodore
Monod dans le mouvement fut comme une garantie de
sagesse et procura au réveil d'Oxford ses
lettres de grande naturalisation dans les
Églises de langue française. Mais
surtout Th. Monod fut comme le traducteur en
clarté, en logique, en langage psychologique
des pensées de P. Smith. Parlant
admirablement l'anglais, Monod précisa,
devant les Anglais eux-mêmes, les bases du
mouvement. Tel pasteur allemand, qui ne voyait pas
clairement d'où partait ce mouvement et
où il conduisait, Warneek par exemple,
rendra hommage « à la
simplicité et à la profondeur,
à la clarté et à la chaleur,
à la précision et à
l'enthousiasme harmonieusement unis » du
pasteur parisien.
À Paris, lors des
réunions de juin 1874 dont nous avons
parlé plus haut, il avait, comme Varley
à Londres, ouvert son coeur à P.
Smith.
- Une chose me trouble,
disait-il
humblement, c'est qu'il y a encore en moi des
péchés que j'aime et dans lesquels je
me complais.
À quoi l'Américain
n'avait répondu que par ce seul verset de
l'Écriture : « Reconnaissez
que vous êtes morts au
péché. »
Cette parole atteignit la
conscience
de Monod qui la médita longuement.
« Est-ce là une chose praticable,
se demandait-il, est-ce ainsi que nous devons
combattre le péché ? »
Il essaya sincèrement du moyen
indiqué et découvrit que rien n'est
plus vrai. En 1875, M. Monod publia, dans le
Libérateur d'abord, le journal du mouvement
d'Oxford qu'il rédigeait en langue
française à Paris, puis dans une
brochure tirée à
part (6) une
défense du mouvement sous forme
dialoguée dans laquelle apparaît le
vivant témoignage de
l'auteur :
« En Jésus-Christ,
dis-je à mon contradicteur - c'est Monod qui
parle - Dieu nous a donné la grâce qui
sanctifie, comme il nous a donné la
grâce qui justifie ; nous devons nous
approprier l'une et l'autre par la foi.
Est-il nécessaire de vous
citer la parole du prophète annonçant
le Sauveur et en lui « la justice et la
force »
(Esaïe
XLV, 24), ou celle de
l'apôtre déclarant que
Jésus-Christ a été fait de la
part de Dieu pour nous,
« sanctification » aussi bien
que « justice »
(1
Cor. I, 30) ?
Faut-il vous rappeler que vous
avez
été créés en
Jésus-Christ pour les bonnes oeuvres
(Ephés.
II,
10) ;
- que Dieu nous a bénis, en
lui, de toute bénédiction spirituelle
(Ephés.
I,
3) ;
- que s'il s'est donné pour
nous, c'est afin de nous purifier
(Tite
II, 14), nous retirant du
présent siècle mauvais
(Gal.
I, 4) ;
- que s'il a porté nos
péchés en son corps sur le bois,
c'est afin qu'étant morts au
péché nous vivions à la
justice
(1
Pierre II, 24) ;
- que s'il est venu nous
bénir, c'est en retirant chacun de nous de
ses iniquités
(Actes
III, 19-20) .... il faudrait
citer la Bible entière.
Toutes ces déclarations,
d'ailleurs, ne sont-elles pas renfermées
dans cette seule parole du Sauveur :
« Je suis la vie »
(Jean
XIV, 6) ?
La vie, c'est-à-dire Dieu se
donnant à nous en son Fils unique :
« Celui qui a le Fils a la vie sans
mesure et sans terme, « la vie
éternelle »
(1
Jean V, 11-12).
Que celui qui la désire la
prenne, « sans qu'elle lui coûte
rien
(Apoc.
XXII, 17) ». Vouloir
c'est la première
condition ; puis, croire ce que Dieu dit et
prendre ce que Dieu donne.
- Quand vous avez fait cela
vous-même (excusez mon insistance, mais j'ai
besoin que vous précisiez, la question en
vaut la peine), c'était sans doute sous
l'influence d'un appel entraînant dans
quelque réunion
spéciale ?
- Non ; c'était dans la
solitude, à la suite d'une paisible
après-midi passée à ma table
de travail.
- Et tout à coup il vous est
survenu un élan
d'enthousiasme ?
- En aucune façon,
j'étais très calme, mais
profondément sérieux et absolument
déterminé.
- Déterminé à
quoi ? En quoi a consisté cet acte
décisif, dont vous paraissez avoir
gardé un souvenir si net ?
- Il a consisté, en somme,
à dire à Dieu : « Je
suis à toi. »
- Rien de plus ? Mais
vous lui
avez dit cela cent fois ?
- Mille fois, et
davantage ;
mais il y avait de nouveau, cette fois-ci,
l'entière sincérité et
l'entière confiance.
- Vous vous calomniez
vous-même.
- Hélas ! non. Je ne
prétends pas qu'il n'y eût, dans ma
vie chrétienne antérieure, ni
sincérité ni confiance ; mais
cette sincérité voulait sans vouloir,
cette confiance croyait sans croire. Je me donnais
à Dieu, tout en me réservant en bien
des choses la libre disposition de
moi-même.... comprenez-vous ?
- Je ne vous comprends que trop
facilement. Eh bien, après cette
suprême prière, ce réel abandon
de vous-même entre les mains de Dieu, que
s'est-il
passé ?
- Rien
d'extraordinaire ; une
demi-heure après je prenais part au repas de
famille, très tranquillement. Mais
j'éprouvais un singulier mélange de
sécurité et de tremblement, de
surprise et de reconnaissance, ce n'était
pas un vif sentiment de la présence du
Seigneur, mais plutôt une expérience
continue de sa fidélité à
garder ce que je lui avais confié ;
c'était.... comment vous décrire
cela ?... l'étoile du matin se levant
à l'horizon, le pâle et doux rayon
d'une nouvelle aurore.... des impressions qui,
après tout, rappelaient à s'y
méprendre celles des premières heures
de ma conversion ; seulement je savais mieux,
cette fois, et avec quel Sauveur j'avais à
faire, et avec quel pécheur Il avait
affaire....
- Et le lendemain ?
- Le lendemain ce fut la même
chose.
- Il fallut vous donner à
Dieu de nouveau ?
- Pas
précisément ; mais ratifier ce
que j'avais fait, continuer à lui
dire : « Je suis à
toi », et agir en
conséquence.
- Ah ! agir en
conséquence ; il y a donc, en
définitive quelque chose à
faire ?
- Je ne l'ai, certes, jamais
contesté.
- Et qu'entendez-vous par
là ?
- Tout d'abord je dois continuer
à croire que Dieu a accepté ce que je
lui ai donné - donné, ne l'oubliez
pas, alors qu'il me l'avait lui-même
demandé : « Mon fils
donne-moi ton coeur » (Prov. XXIII,
26) ; - je dois croire que, l'ayant
accepté, il le garde, il en prend soin, il
se charge de tout ce qui me concerne, soit pour
l'âme, soit pour le corps. Dans cette
confiance, je dois lui demander toute
lumière, toute force, toute délivrance, toute
bénédiction, avec la paisible et
ferme assurance d'être exaucé. Je dois
tenir mon regard attaché sur le Sauveur,
pour être, de moment en moment, dirigé
dans le chemin de l'obéissance.
- Je dois résister à
la tentation, assuré d'en trouver l'issue
(1
Cor. X, 13) ;
- Je dois accepter, sans murmure
et
sans crainte mais non pas sans douleur et sans
larmes, les afflictions, même les plus
extrêmes (et à plus forte raison
supporter avec patience les petites
contrariétés de chaque jour),
étant « plus que vainqueur en
celui qui nous a aimés »
(Rom.
VIII, 37) ;
- Je dois vivre pour la gloire
de
Dieu
(1
Cor. X, 31) et le bien de mon
prochain
(Rom.
XV, 2).
- Je dois n'oublier jamais que
j'ai
crucifié la chair avec ses affections et ses
convoitises
(Gal.
V, 24), et cela parce que mon
vieil homme a été crucifié
avec Jésus-Christ, afin que le corps du
péché soit détruit, et que je
ne serve plus le péché
(Rom.
VI, 6) ;
- Je dois, enfin, demeurer
incessamment dans la prière
(Ephés.
VI, 18 ; 1
Thess. V, 17) et me nourrir de la
Parole de Dieu, au moyen de laquelle Dieu me fait
connaître sa vérité, sa
volonté, et révèle à
mon âme Jésus lui-même, par le
Saint-Esprit.
- Laissez-moi être indiscret
jusqu'au bout. Votre conscience est-elle toujours
sans reproche ?
- Hélas ! il s'en faut
bien, et vous n'avez pas besoin de me le demander
pour le savoir.
- À la bonne heure !
c'est là que je vous attendais.
- On dirait presque que mon aveu
vous fait plaisir ; mais il n'excuse,
croyez-le bien, ni mes chutes,
ni les vôtres, dont il n'est pas une qui ne
doive nous affliger, comme elle contriste l'Esprit
de Dieu.
- Je ne dis pas non ;
toujours
est-il que votre système s'écroule,
car je ne vois pas en quoi consiste l'avantage
pratique que vous en retirez, puisque, aussi bien,
vous n'êtes pas délivré du
péché.
- Mon cher ami, quand il n'y
aurait
pas sur la terre, quand il n'y aurait jamais eu une
seule âme qui fût arrivée
à saisir et à conserver dans sa
plénitude le salut qui lui a
été donné en
Jésus-Christ, cela ne retrancherait rien
à cette plénitude ; cela
prouverait seulement que la foi de l'homme a
été jusqu'ici trop petite pour saisir
toute la grâce de Dieu.
S'il reste quelque
incrédulité ou quelque mauvaise
volonté dans nos coeurs, il ne s'agit pas de
nous résigner à la
désobéissance en la déclarant
inévitable, mais de nous en accuser, de nous
en humilier, et de faire au péché, au
moindre péché, une guerre
d'extermination. En vue de notre succès dans
cette bonne guerre, la conception de la vie
chrétienne que j'ai essayé de vous
présenter d'après l'Écriture
est d'un avantage incalculable ; pour ce qui
me regarde, je puis vous dire, puisque vous
m'interrogez, que mon espérance actuelle
diffère de celle qui l'a
précédée autant qu'un ciel
bleu où passe quelquefois un nuage
diffère d'un ciel gris où l'on
aperçoit çà et là un
coin bleu.
Je puis vous dire aussi que la
moindre transgression me cause plus de surprise, de
douleur et de honte que ne le faisaient des
péchés beaucoup plus nombreux et plus
graves.
Vous m'accorderez que c'est
quelque
chose. Ai-je besoin d'ajouter que si je retrouve la
paix, ce n'est qu'au pied de la croix, en
confessant et en abandonnant mon
iniquité ? Ah !
béni soit Dieu de ce que, « si
quelqu'un a péché, - (nous sommes
accoutumés à entendre dire :
« puisque les chrétiens
pèchent continuellement » ;
mais, pour l'apôtre, le péché
est l'exception) si quelqu'un a péché
nous avons un avocat auprès du Père,
Jésus-Christ le Juste »
(1
Jean II, 1).
Ces paroles se trouvent dans une
lettre dont l'auteur définit l'objet en ces
termes : « Mes petits enfants, je
vous écris ces choses afin que vous ne
péchiez point ». Ne pas
pécher
(1
Cor. XV, 34), voilà notre
loi, notre but, et ce que nous devons attendre de
la fidélité de Dieu
(1
Thess. V, 23, 24). Au contraire
s'attendre à tomber, c'est tomber
infailliblement ; c'est, pour ainsi dire,
être tombé par avance....
(7) »
M. Théodore Monod fut aussi
un des poètes du mouvement ; nombreux
sont les cantiques des Hymnes du Croyant, qu'il
composa et qui passèrent ensuite dans nos
modernes recueils de chants. Rappelons parmi les
plus connus : Ah ! donne à mon
âme .... ; C'est mon joyeux service
.... ; J'ai trouvé, j'ai trouvé
la voie.... ; Sur toi je me repose.... ;
Vaillants soldats de Jésus-Christ....
etc.
Reproduisons des vers moins
connus
de Francis Ridley Havergal que M. Monod a
admirablement transposés en
français :
- Que ferais-je sans Toi, Sauveur plein de clémence
- Par ton sang précieux à grand prix racheté,
- Tes mérites parfaits sont ma richesse immense
- Mon espoir pour le temps et pour l'éternité.
- Que ferais-je sans Lui ? Les trésors de ce monde
- Ne sont rien à mes yeux, auprès de Jésus-Christ ;
- Mais plus il verse en moi sa paix pure et profonde,
- Plus je voudrais en vous voir les fruits de l'Esprit.
- Pourquoi vivre sans Lui ? Tout près de vous il passe,
- Il n'attend qu'un soupir pour vous prendre en ses bras ;
- Attendra-t-il toujours ? Il veut vous faire grâce....
- Et vous, pauvre égaré, ne le voulez-vous pas ?
- Que ferez-vous sans Lui ? Dans sa bonté suprême
- Il s'est offert pour vous, sa force est votre appui ;
- N'avez-vous pas besoin d'un Sauveur qui vous aime,
- Et qui vous aimera demain comme aujourd'hui
- Que ferez-vous sans Lui dans l'amère détresse,
- Quand un brouillard épais voilera le chemin,
- S'il vous faut porter seul le poids qui vous oppresse,
- Et n'avoir pas un guide à qui donner la main
- Vivre encore sans Lui, ce serait impossible,
- Si vous saviez quels fers vous tiennent attaché,
- Si vos yeux dessillés voyaient le mal terrible
- Qui vous mène à la mort, salaire du péché.
- Que ferez-vous sans Lui, lorsqu'une main glacée
- Vous poussera tremblant vers l'abîme inconnu
- Quelle voix vous dira - « La mort est terrassée,
- Et tu seras vainqueur, par mon bras soutenu » ?
- Que ferez-vous sans Lui, quand le souverain Juge
- Qui sait tout, qui voit tout, qui ne fait point d'erreur,
- Qui vous avait en vain offert un sûr refuge,
- Sondera les derniers replis de votre coeur ?
- Que ferez-vous sans Lui, quand la porte fermée,
- Vous vous consumerez en stériles efforts,
- Du céleste banquet la lumière embaumée
- Arrivant jusqu'à vous dans la nuit du dehors ?
- Mais avec Lui, mon frère, avec Lui, c'est la vie !
- C'est tout ce qu'il nous manque et tout ce qu'il nous faut ;
- C'est le flot débordant d'une joie infinie,
- Paix parfaite ici-bas, bonheur parfait là-haut !
- Que ferais-tu sans Lui ? Pourquoi rester rebelle
- À la voix qui t'invite et te dit : « Viens à moi »
- Ta pauvre âme a besoin de ce Sauveur fidèle,
- Et Lui, grâce ineffable, il a besoin de toi !
« Et puisqu'il a besoin de toi, consens à ce qu'il fasse de toi un instrument parfait », tel sera en raccourci le contenu du message de M. Monod.
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