Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

II

UNE CONVERSION.

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Jean, IV

 Or, il fallait qu'il passât par la Samarie.
Il arriva donc à une ville de Samarie, nommée Sichar, qui est près de la possession que Jacob donna à Joseph son fils.
C'était là qu'était le puits de Jacob. Jésus donc, étant fatigué du chemin, s'assit près du puits ; c'était environ la sixième heure du jour.
Une femme samaritaine étant venue pour puiser de l'eau, Jésus lui dit : Donne-moi à boire.
Car ses disciples étaient allés à la ville pour acheter des vivres.
Cette femme samaritaine lui répondit : Comment, toi qui es juif, me demandes-tu à boire, à moi qui suis une femme samaritaine ? car les Juifs n'ont point de communication avec les Samaritains.
Jésus répondit, et lui dit : Si tu connaissais la grâce que Dieu te fait ; et qui est celui qui te dit : Donne-moi à boire, tu lui en aurais demandé toi-même, et il t'aurait donné une eau vive.
La femme lui dit : Seigneur, tu n'as rien pour puiser, et le puits est profond ; d'où aurais-tu donc cette eau vive ?
Es-tu plus grand que Jacob notre père, qui nous a donné ce puits, et qui en a bu lui-même aussi bien que ses enfants et ses troupeaux ?
Jésus lui répondit : Quiconque boit de cette eau aura encore soif ;
Mais celui qui boira de l'eau que je lui donnerai n'aura jamais soif, mais l'eau que je lui donnerai deviendra en lui une source d'eau qui jaillira jusqu'à la vie éternelle.
La femme lui dit : Seigneur, donne-moi, de cette eau, afin que je n'aie plus soif, et que je ne vienne plus ici pour en puiser.
Jésus lui dit : Va, appelle ton mari et viens ici.
La femme répondit : Je n'ai point de mari. Jésus lui dit : Tu as fort bien dit : Je n'ai point de mari ;
Car tu as eu cinq maris ; et celui que tu as maintenant n'est pas ton mari ; tu as dit vrai en cela.
La femme lui dit : Seigneur, je vois que tu es un prophète.

Nos pères ont adoré sur cette montagne, et vous dites, vous autres, que le lieu où il faut adorer est à Jérusalem.
Jésus lui dit : Femme, crois-moi, le temps vient que vous n'adorerez plus le Père ni sur celle montagne ni à Jérusalem.
Vous adorez ce que vous ne connaissez point ; pour nous, nous adorons ce que nous connaissons ; car le salut vient des Juifs.
Mais le temps vient, et il est déjà venu, que les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité, car le Père demande de tels adorateurs.
Dieu est esprit, et il faut que ceux qui l'adorent, l'adorent en esprit et en vérité.
Cette femme lui répondit : Je sais que le Messie, c'est-à-dire le Christ doit venir ; quand il sera venu, il nous annoncera toutes choses.
Jésus lui dit : Je le suis moi, qui te parle.
Sur cela ses disciples arrivèrent, et ils furent surpris de ce qu'il parlait avec une femme ; néanmoins aucun d'eux ne lui dit : Que lui demandes-tu ? ou, pourquoi parles-tu avec elle ?
La femme laissa donc sa cruche, et s'en alla à la ville, et dit aux gens du lieu :
Venez voir un homme qui m'a dit tout ce que j'ai fait ; ne serait-ce point le Christ ?
Ils sortirent donc de la ville, et vinrent vers lui.

Cependant, ses disciples lui disaient, en l'en priant : Maître, mange.
Jésus leur dit : J'ai à manger d'une viande que vous ne connaissez pas.
Les disciples donc se disaient l'un à l'autre : Quelqu'un lui aurait-il apporté à manger ?
Jésus leur dit : Ma nourriture est de faire la volonté de Celui qui m'a envoyé, et d'accomplir son oeuvre.
Ne dites-vous pas qu'il y a encore quatre mois jusqu'à la moisson ? Mais moi, je vous dis : Levez vos yeux, et regardez les campagnes qui sont déjà blanches et prêtes à être moissonnées.
Celui qui moissonne en reçoit la récompense, et amasse le fruit pour la vie éternelle ; en sorte que celui qui sème et celui qui moissonne en ont ensemble de la joie.
Car en ceci, ce qu'on dit est vrai, que l'un sème et que l'autre moissonne.
Je vous ai envoyés moissonner où vous n'avez pas travaillé ; d'autres ont travaillé, et vous êtes entrés dans leur travail.
Or, plusieurs des Samaritains de cette ville-là crurent en Lui, à cause de cette parole de la femme qui avait rendu ce témoignage : II m'a dit tout ce que j'ai fait.
Les Samaritains étant donc venus vers Lui, le prièrent de demeurer chez eux ; et il demeura là deux jours.
Et il y en eut beaucoup plus qui crurent en Lui, après l'avoir entendu.
Et ils disaient a la femme : Ce n'est plus à cause de ce que tu nous as dit, que nous croyons : car nous l'avons entendu nous-mêmes, et nous savons que c'est Lui qui est véritablement le Christ, le Sauveur du monde.


L'histoire de la Samaritaine est l'histoire d'une conversion. C'est une de celles qui sont opérées sans intermédiaire humain, par le Seigneur lui-même. Les disciples étaient allés à la ville, quand Jésus-Christ parlait à la Samaritaine ; cela nous montre que les serviteurs de Christ sont souvent loin quand le Seigneur parle à une âme ; mais le Sauveur n'a pas besoin d'aides, ce n'est qu'une faveur quand il se sert de nous comme de ses instruments.
Or, dans toute conversion, il y a trois états à distinguer. Cette oeuvre commence par un travail de la grâce prévenante ; personne, dit Jésus-Christ, ne peut venir à moi, si le Père, qui m'a envoyé, ne l'attire. Ce premier travail doit conduire à un réveil général de conscience ; réveille-toi, dit saint Paul, toi qui dors, et te relève d'entre les morts, et Christ t'éclairera.
Si ces deux conditions sont remplies, il y aura aussi changement de vie et de conduite ; plantez un bon arbre, il portera de bons fruits ; l'homme au bon trésor tirera de bonnes choses de ce fond renouvelé ; car c'est de l'abondance du coeur que la bouche parle.

C'est ce triple travail que nous voyons aussi dans la conversion de la Samaritaine et que nous allons poursuivre. Dieu ne convertit pas l'un comme l'autre ; mais il y a une porte étroite pour tous, et pourvu qu'on pénètre par cette porte, on se rencontrera après dans le même chemin. Suivons la Samaritaine à travers les états qui l'attendent, et voyons jusqu'où la grâce est entrée dans notre propre vie.


Nous trouvons le Sauveur devant une ville de Samarie, nommée Sichar, à côté d'un puits, creusé jadis par le patriarche Jacob. C'est près de ce puits que la Samaritaine trouve le Seigneur. Cette femme venait tous les jours puiser de l'eau dans cette citerne ; mais Jésus la met dans une situation où elle peut trouver autre chose que de l'eau simple, si elle comprend la grâce que Dieu lui fait. En regardant à ce puits de Jacob, à ce puits terrestre, ne voyons-nous pas là l'image de ce fond de vanité, duquel les enfants de ce monde attendent leur bonheur ?
Prenez l'homme ordinaire : que cherche-t-il ? La terre, et toujours la terre ; il veut étancher sa soif, en se creusant des citernes crevassées, et la source des eaux vives il ne la voit pas.
Le monde l'a mille fois trompé, et vous ne pouvez pas le détacher du monde ; il dira avec vous : Vanité des vanités, et si vous le revoyez demain, il poursuivra encore la vanité. Et il y a souvent de ces situations où il semble qu'il soit impossible qu'un tel homme ne doive trouver le Seigneur. Il y tant de perplexités dans la vie, tant d'épreuves, tant de croix domestiques ; Jésus n'est souvent qu'à deux doigts d'une âme, et cette âme ne le voit pas et ne le veut pas. Elle ne sort pas de son ornière, et n'entend pas cette voix qui lui dit : Voici, je me tiens à la porte et je frappe. Si l'on nous renvoyait, comme nous renvoyons le Seigneur, au lieu de ces richesses de bonté, de patience et de long support, aurions-nous autre chose en nous que des trésors d'indignation ?

La Samaritaine, dominée par la vie matérielle, ne pensait pas au Seigneur ; mais Lui, en la voyant venir, reconnaît aussitôt une de ces âmes que le Père a adressées au Fils, et desquelles Jésus-Christ a dit : Tout ce que le Père me donne, viendra à moi, et je ne mettrai point dehors celui qui viendra à moi. Et Jésus, jetant les yeux sur cette femme, lui demande à boire.
C'est donc Jésus qui fait le premier pas dans la conversion, ce n'est pas nous. Ce n'est pas vous, dit-il, qui m'avez choisi, c'est moi gui vous ai choisis. Il nous a appelés par notre nom et nous avons désignés, bien que nous ne le connussions point.

Qu'arrive-t-il quand la grâce commence une oeuvre dans l'un de nous ? Vous vous sentirez attiré, et vous vous mettrez à chercher. Les premières lueurs de la vérité pénètrent dans le chaos de la nature déchue, et l'on entrevoit des besoins qui jusqu'ici n'avaient point parlé.
La Samaritaine s'étonne que cet étranger qui est Juif lui parle à elle qui est Samaritaine. Cet étonnement est celui d'une âme à qui viennent des voix nouvelles, mais ces voix d'en-haut ne sont pas encore comprises.
La Samaritaine ne devine pas encore la grâce que Dieu lui fait, ni qui est celui qui lui dit : Donne-moi à boire. Malgré cela, l'oeuvre est commencée, et où il y a un levain divin, il travaille. Seulement une âme, entreprise par la grâce, croit d'abord qu'elle peut satisfaire ces besoins nouveaux par des moyens naturels.

Jésus-Christ avait parlé à la Samaritaine d'une eau vive, et la femme croit que l'étranger va la désaltérer à la façon du monde. Cela est aussi vrai au spirituel. Quand un homme du monde a reçu les premiers ébranlements, il espère qu'avec quelques bons efforts et avec un peu de persévérance il se changera. Il ne sait pas encore que cela ne vient ni de celui qui veut ni de celui qui court, mais de Dieu qui fait miséricorde.

Que dit Jésus à la Samaritaine ? Quiconque boit de cette eau, aura encore soif. D'abord on court aux plaisirs, et l'on est trompé ; puis l'on court aux pratiques, et l'on est encore trompé : quiconque boit de cette eau, aura encore soif. Et ainsi une âme peut longtemps chercher, longtemps se fatiguer, et ne pas trouver la paix. Qu'est-ce qui manque alors ? Il faut à la Samaritaine d'autres clartés sur elle-même, et ces clartés lui viendront d'un réveil de conscience. C'est à ce second état que doit amener la grâce préparatoire.

La femme venait de s'écrier : Seigneur, donne-moi de cette eau, afin que je n'aie plus soif et que je ne vienne plus ici pour en puiser. C'est ainsi qu'on s'écrie souvent : Seigneur, ouvre-moi ton ciel, et je n'irai plus me tourmenter dans ce triste monde. On veut jouir, on veut s'enrôler, mais ce n'est pas ainsi que le Seigneur l'entend. Il y a une porte étroite, et cette porte est gênante. Regardez-vous enfin de plus près, il y a mille choses en vous à juger.
Le Seigneur arrive tout droit à la conscience, et il trouve toujours l'endroit fatal qui, une fois touché, réveille le sentiment du péché. La Samaritaine doit appeler son mari ; elle veut s'esquiver en disant : Je n'ai point de mari. Mais Celui dont les yeux sont comme des flammes de feu pénètre dans cette réponse et met à nu ce que la Samaritaine a voulu cacher. C'est toute une vie de désordres qui paraît au jour ; la conscience de la femme est frappée, et ne pouvant plus échapper, elle s'écrie : Seigneur, je vois que tu es un prophète. Voilà comme Jésus-Christ produit le réveil. Il perce la paroi et arrive au coeur de la vie. L'honnête homme, comme le larron, a dans sa vie toutes sortes de choses que le Seigneur peut rendre rouges comme du cramoisi. Et une peccadille suffit pour nous mettre mal avec nous-mêmes si Jésus-Christ vient avec l'épée.
C'est ordinairement quelque chose d'isolé que Jésus-Christ nous présente, non pas nos péchés, mais un péché ; vous ne serez plus pécheur en général, mais condamnable pour telle cause ; le Sauveur attaque directement. Il fouille, il creuse, et il arrive toujours à un côté malade ; il presse cet ulcère et ne vous laisse plus de repos ; échapper n'est plus possible ; mettez-vous sous le glaive, et laissez-le tomber sur le vieil homme. La Samaritaine est frappée au coeur, et la voilà en plein réveil.

C'est un terrible article que l'article du péché. On le cache, on le couvre, on veut l'oublier ; mais il y a une main invisible qui l'écrit sur le mur, au moment où nous y pensons le moins. Et de même qu'un éclair qui fend les ténèbres met au grand jour toute une contrée, un seul péché, quand Jésus nous le dévoile, met à nu toute notre nature.

Que va faire la Samaritaine ? Elle veut apprendre à prier. Est-ce sur la montagne ou est-ce à Jérusalem qu'il faut adorer et qu'on peut trouver la paix ?
Jésus fait comprendre à la femme que Dieu est esprit, et que le grand point, c'est d'adorer en esprit et en vérité.
Nouvelles lumières pour la Samaritaine. Quand la conscience est réveillée, il se fait aussi une réforme avec la prière. Vous adorez, dit Jésus à la femme, ce que vous ne connaissez point. Le dieu d'une âme non réveillée est le dieu du vague ; on peut longtemps prier ainsi et sans aucun résultat. Que ce soit sur la montagne ou à Jérusalem, dans telle église ou dans telle autre, c'est le même esprit déchu qu'on porte avec soi, et qui n'arrive point au Dieu véritable. Mais dans la communion de Jésus, cet esprit est changé. C'est une intelligence spirituelle qui prend la place de l'aveuglement de la chair ; quand la conscience s'ouvre, le monde de la prière s'ouvre, les secours vont venir l'un après l'autre ; quand Dieu donne une grâce, il les donne toutes.

Et quelle révolution dans la vie, quand la prière devient enfin la prière ! Aujourd'hui, elle n'est qu'une pratique stérile ; demain, elle sera la main qui saisira tous les trésors de Dieu. D'une pauvre routine, elle va devenir une communication de vie avec le Dieu fort de vérité. Pourquoi adore-t-on sans connaître, quand le salut peut venir à chacun ?
La réponse est facile : Il n'y a point de brèche dans la conscience, et pour prier, il faut un esprit froissé, un coeur brisé.

La prière est un cri de l'âme, un premier soupir après une délivrance ; or, tant que l'homme se plaît dans sa vaine manière de vivre, comment peut-il prier ? Ce qui est né de la chair est chair ; mais Dieu est esprit, et il faut que ceux qui l'adorent, l'adorent en esprit et en vérité. La Samaritaine répond : Je sais que le Messie, c'est-à-dire le Christ, doit venir ; quand il sera venu, il nous annoncera toutes choses.
Expérience merveilleuse ! Quand une âme est convaincue de péché, quand elle se tourne vers la prière, un souvenir confus de Jésus s'élève de cette âme délaissée. Jésus commence enfin à être quelque chose ! La lumière peut luire dans les ténèbres, jusqu'ici les ténèbres ne l'avaient point reçue. La grande heure a sonné où Jésus peut se donner à connaître et où il y a place pour la parole certaine et digne d'être reçue avec une entière croyance, savoir que Jésus-Christ est venu au monde pour sauver les pécheurs.

Je le suis, moi, qui te parle ! Ah ! quand cette conviction tombe dans une âme, ce sera l'heure d'une nouvelle naissance. Alors plus de condamnation et plus d'amour des ténèbres ; les écailles tombent, l'étoile du matin s'est levée dans le coeur. Il y a donc autre chose encore ici-bas que le puits de Jacob ! l'homme ne vit pas seulement de pain ! À côté de cette vie de vanité, de ces bonheurs remplis de larmes, il y a un bien vivant, une éternelle réalité, et la vérité rend témoignage à elle-même : Je le suis, moi, qui te parle !
Sur cela, les disciples arrivèrent, et furent surpris de ce qu'il parlait avec une femme. Pauvres disciples, qui ne connaissaient pas encore Celui qui dit : Que la lumière soit, et elle fut !
Pendant qu'ils vont en ville, acheter des poissons, Jésus fait passer une âme de la mort à la vie ! L'étonnement des disciples n'est-il pas souvent le nôtre ? Nous étions loin, et quand nous revenons, nous trouvons un changement dans une âme qui était peut-être la dernière pour qui nous ayons eu de l'espoir ! Nous venons avec nos provisions, et le Seigneur peut s'en passer ; il est lui-même le pain vivant qui est descendu du ciel. Les disciples sont assez délicats pour ne point questionner le Seigneur et lui dire : Que lui demandes-tu ? ou pourquoi parles-tu avec elle ? Imitons cette délicatesse. On peut effaroucher une âme quand, entreprise par le Seigneur, elle devient trop l'objet de notre curiosité. Réjouissez-vous en silence, mais ne questionnez pas ; priez que ce travail, qui a trop de pudeur pour se montrer, mûrisse en silence ; plus il est lent, plus les racines seront profondes.

On peut bien s'attendre que la Samaritaine, une fois qu'elle peut dire : Je sais que mon Rédempteur est vivant, ne restera plus ce qu'elle était. Si la grâce est en nous et qu'elle y abonde, elle ne nous laissera point oisifs ni stériles dans la connaissance de notre Seigneur Jésus-Christ. C'est la troisième phase de la conversion : nous allons voir paraître la vie chrétienne.

Il est dit que la Samaritaine laissa sa cruche et qu'elle s'en alla à la ville où elle va devenir un instrument de bénédiction. Elle laissa sa cruche. En d'autres mots : Ce qui lui était autrefois un gain, lui est devenu une perte à cause de Christ. Elle oublie les choses qui sont derrière elle, et s'avance vers celles qui sont devant elle ; elle court vers le but, vers le prix de la vocation céleste de Dieu en Jésus-Christ.

De tous les spectacles, le plus beau c'est celui d'une âme qui se transforme. Vous admirez le papillon quand il perce son enveloppe, mais quel autre sujet d'admiration quand une âme touchée sort de sa vaine manière de vivre ! quand une vie nouvelle commence à percer, que les vieilles habitudes tombent, que l'amour du monde fait place à l'affection des choses d'en haut, que de la dépouille du vieil homme sort un élu de Dieu, un saint, un bien-aimé !
Quels moments, quand vous êtes témoin de ce dépouillement, quand vous en jouissez en silence, quand il se fait sans vos paroles, sans vos exhortations, quand Christ seul parle à votre Samaritaine et qu'elle laisse derrière elle sa cruche pour l'amour de Jésus !
Que sont toutes les puissances du monde à côté du pouvoir de cet amour nouveau ! Pas besoin de dire alors : II faut renoncer à vous-même ; le renoncement arrive : ce sera une seconde vie, ce ne sera plus un devoir. Comment ne pas diminuer avec joie, pour que Christ croisse, Lui qui est l'espérance de la gloire ! Il s'est anéanti jusqu'à la mort, et le péché voudrait encore vivre ; on ne le crucifierait pas dans ses affections et dans ses convoitises ! Le Maître n'avait point de lieu où reposer sa tête, et le serviteur demanderait une vie commode, à l'abri de tout souci ! Christ a souffert une si grande contradiction des pécheurs, et je ne souffrirai point qu'on me résiste, qu'on contrarie mes désirs ! Il a porté une couronne d'épines, et je voudrais marcher sur des rosés ! Au lieu de la joie qui lui était proposée, il a souffert la croix, et je refuserais de fléchir, je vivrais encore pour moi-même, je n'amènerais point captives toutes mes pensées, pour les soumettre à l'obéissance de la foi ! Oui, il est roi, il est né pour cela, et, depuis qu'il a été élevé de la terre, il attire à Lui les coeurs comme leur souverain. La Samaritaine changée est une prédication vivante ; si vous ne voulez pas croire à l'Évangile, croyez au moins aux oeuvres qu'il produit ; vous le refusez comme une parole, eh bien ! vous le voyez comme une puissance pour sauver tous ceux qui croient.

La femme de Sichar court à la ville et devient un levain pour toute la population. Quel pouvoir n'a point une seule âme, si elle est véritablement à Christ ! La vie chrétienne a une force qui renverse ; c'est Dieu dans l'homme qui parle, qui agit et qui triomphe.
Le témoignage de la Samaritaine est bien simple : Venez et voyez un homme qui m'a dit tout ce que j'ai fait ; ne serait-ce point le Christ ? Comme il m'a changée, il vous changera ; allez à Lui et vous le saurez ! II est vrai, tout est là ; il faut qu'on puisse dire : II m'a changé. Les messagers du Seigneur, ce sont les nouvelles créatures. Montrez-moi ce que vous avez laissé derrière vous pour Jésus et je vous croirai, pas avant. Il me faut une démonstration d'esprit et de puissance ; et la plus parlante, c'est le dépouillement.

Les Sichariotes accourent, d'abord sur le témoignage de la femme ; mais une foi d'autorité ne suffit pas, il faut la propre expérience ; et Jésus la donne à quiconque court à Lui. C'est ici la volonté de Dieu, que quiconque contemple le Fils et croit en Lui ait la vie éternelle. Et, comme Jésus peut vivifier une âme, il peut vivifier toute une population. D'un champ de morts, il peut faire un jardin de Dieu. Sa nourriture est de faire la volonté de Celui qui l'a envoyé, et la volonté de Dieu est que tout genou fléchisse et que toute langue confesse qu'il n'y a qu'un seul nom qui sauve.
Quelle joie pour Jésus de voir accourir tout ce peuple ! Bien des besoins dormaient, et, où le réveil commence par une âme, les campagnes, peu à peu, blanchissent ; demandez des ouvriers pour ces moissons ! Les Sichariotes viennent et voient ; jetez vos préventions, allez jusqu'au bout, et vous saurez que Jésus est vivant. Étant donc venus vers Lui, ils le prièrent de demeurer chez eux, et il demeura là deux jours.
Deux jours avec Jésus ! Que de choses pourrait-il nous dire, si nous persévérions deux jours dans sa communion ! L'eau qu'il nous donnerait deviendrait en nous une source d'eau qui jaillirait jusqu'à la vie éternelle. Deux jours de pleine expérience peuvent fonder pour toute la vie ; bientôt les gens de Sichar peuvent dire à la femme : Ce n'est plus à cause de ce que tu nous as dit que nous croyons, car nous l'avons entendu nous-mêmes, et nous savons que c'est Lui qui est véritablement le Christ, le Sauveur du monde.

Avons-nous fait la même expérience ! Jusqu'où Jésus a-t-il pénétré dans notre vie et dans notre conversion ? Ne nous mettons point les bras croisés devant cette histoire, en nous bornant à dire ; Qu'elle est belle ! Votre propre conversion a-t-elle commencé et est-elle réelle ? Cherchez dans votre vie passée, vous y trouverez un travail de la grâce préparatoire. Il y a tant de circonstances, dans la vie la plus ordinaire, qui nous disent de la part de Dieu : Réveille-toi ! C'est de votre salut personnel qu'il s'agit ; avez-vous compris le grand appel et êtes-vous en route ?
Voyez ce que le Seigneur vous a découvert, et quels désordres en vous il a attaqués ! Si vous avez appris à vous connaître, vous avez aussi appris à prier.
Heureux les adorateurs en esprit et en vérité, un tel état ne laisse pas stationnaire. On laissera derrière soi bien des choses, quand la source de là vie est enfin trouvée ; mais ici aussi, examinez-vous.

Si le Seigneur vous a préparé, s'il vous a réveillé, en vous disant : Je le suis, moi qui te parle ; quel caractère a pris depuis votre vie ? De l'année passée au jour d'aujourd'hui, les choses sont-elles restées les mêmes ? Vous n'êtes point converti, si ces vieilles choses ne sont point passées, si toutes choses ne se renouvellent. Rallumez le don qui est en vous, et n'ayez pas autant de peur de vous dépouiller du vieil homme ; dites-vous qu'il vous corrompt par les convoitises qui séduisent ; voulez-vous être corrompu, quand vous pouvez être guéri ? séduit, quand vous pouvez être plus que vainqueur ?
Comme le Sauveur est entré dans Sichar, le salut veut entrer dans votre maison ; il y a une action divine, toute puissante et qui vient de la grâce de notre Seigneur Jésus-Christ.
Donnez champ libre à cette grâce dans votre coeur, et, sous votre toit domestique, elle vous communiquera cette piété qui est utile à toutes choses et qui a les promesses de la vie présente et de celle qui est à venir.

Prenez pour devise : Tout pour Jésus, rien pour moi. Aujourd'hui, vous crierez, demain vous bénirez ; rien de si malheureux qu'une conversion qui cloche.
Pour les secours, il y a abondance, et vous les avez tous si vous avez Jésus. Après tous les sermons qu'on vous a faits, après tous les volumes que vous avez lus, transformez tout cela en suc et en sang ; les convertis du Seigneur sont ceux qui peuvent dire : Ce n'est plus à cause de ce qu'on m'a dit que je crois ; je l'ai entendu moi-même et je sais que c'est Lui qui est véritablement le Christ, le Sauveur du monde.



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