Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

Xe SIÈCLE.

BENOIT IV

CXVIIe PONTIFE. - DE 900 A 903.

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 Nous allons entrer dans le dixième siècle, que les uns appellent le siècle de fer, d'autres d'argile, et qu'on doit plutôt appeler le siècle de scorie ou de bourbe ; siècle dans lequel Baronio, quoique romain et cardinal, reconnaît tant de crimes dans ceux qui ont possédé le trône pontifical, qu'il ne trouve de consolation qu'en disant que la foi n'y a pas souffert de préjudice notable : mais n'en est-ce pas un que l'effet subséquent de faire mépriser ce trône à cause des vices de ceux qui l'ont occupé ? Certes il n'est pas facile de faire croire à l'intervention du Saint-Esprit dans les élections pontificales, à la vue des exemples que nous avons déjà indiqués, et de ceux que nous remarquerons dans le dixième siècle ; car plusieurs parvinrent au suprême sacerdoce plutôt par les ruses du diable que par l'inspiration du Saint-Esprit.

Benoît IV fut élu pape par la faction de Benoît III, dont il était peut-être parent, puisqu'il était fils de Mumulo, citoyen romain de famille noble. Il paraît avoir été bon et charitable, et il occupa le Saint-Siège depuis l'an 900 jusqu'au commencement d'octobre 903.



LÉON V

CXVIIIe PONTIFE. - EN 903.

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 Nous ne savons pas par quelle faction Léon d'Ardée fut élevé à la dignité pontificale, et sacré le 28 octobre 903. Mais il est certain qu'il occupa le trône tout au plus jusqu'à la fin de novembre, puisque Christophe, son successeur, le lui ravît, s'empara de sa personne, et l'enferma dans une étroite prison, où il mourut le 6 décembre.



CRISTOPHE

CXIXe PONTIFE. - DE 903 A 904.


 CRISTOPHE, fils d'un habitant de Rome nommé Léon, usurpa le pontificat à la fin de novembre 903, par les moyens violents que nous avons indiqués ; mais il jouit peu de temps du fruit de son injustice, car Sergius l'en dépouilla en juin 904, par les mêmes voies dont il s'était servi. Christophe fut renfermé dans un monastère, d'où Sergius le retira pour le mettre dans une prison, où, chargé de chaînes, il acheva sa vie criminelle.



SERGIUS III

CXXe PONTIFE. - DE 904 A 911.

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 SERGIUS, compétiteur de Jean IX, et réfugié en Toscane depuis 898, revint à Rome pour chasser Christophe. La faveur des marquis de Toscane le fit monter au trône pontifical, en commettant les mêmes crimes que son prédécesseur. Il y ajouta celui de vivre en concubinage avec Marocia, épouse d'Adalbert, marquis de Toscane, fille de Théodora l'aînée, et soeur de Théodora la jeune. Théodora l'aînée fut une femme de beaucoup de talent, mais impudique, et elle contribua au concubinage de sa fille Marocia, par ambition de commander despotiquement à Rome, où elle commanda réellement.
Sergius eut de Marocia un fils nomme Jean, qui devint pape par la protection de ses parents. Cependant il passa pour fils d'Albéric, duc de Spolette, mari de Marocia, quoiqu'il ne le fût pas encore à cette époque.
Sergius, ennemi déclaré de Formose, et partisan actif d'Étienne VI, annula le concile Romain de Jean IX et les décrets des papes Romain et Théodore, ses prédécesseurs. Il fit, en conséquence, transporter avec de grands honneurs le cadavre d'Étienne VI, en réhabilitant sa mémoire, et renouvelant ses décrets contre celle de Formose. Il mit une épitaphe honorable sur le tombeau d'Étienne, et infamante pour Jean IX, qu'il qualifia d'intrus et de schismatique. Sergius mourut en août de l'année 911.



ANASTASE III

CXXIe PONTIFE. - DE 911 A 913.

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 Nous ne savons rien de certain sur ce pape, sinon qu'il fut élu en août 911 et mourut en octobre 913.


LANDONIO

CXXIIe PONTIFE. - DE 913 A 914.

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 Il en est de même de Landonio, devenu pape le 16 octobre 913, et mort le 26 avril 914.



JEAN X

CXXIIIe PONTIFE. - DE 914 A 928.

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 Il semble que l'histoire se lassait de ne pas nous présenter des exemples scandaleux. Jean, prêtre de Ravenne, résida longtemps à Rome, et forma des liaisons criminelles et déshonnêtes avec Théodora la jeune, soeur de Marocia.
Élu évêque de Bologne, et avant d'être sacré, il fut nommé archevêque de Ravenne par le pape Landonio qui le sacra. Ce dernier étant mort, Théodora obtint par ses intrigues et toutes sortes de moyens, que son amant fut élu souverain pontife. Cette femme gouverna l'Église pendant la vie de Jean, comme Marocia l'avait fait sous le pontificat de Sergius.

Le pape Jean X partit en 915 pour faire la guerre aux Sarrasins avec une armée commandée par Albéric, marquis de Toscane. La méchante Marocia, jalouse de sa soeur Théodora, et de ce que Pierre, frère de Jean X, avait plus de pouvoir à Rome qu'elle et son mari Guide, duc de Spolette, eut l'iniquité de lui persuader de persécuter mortellement les deux frères. Les soldats de Guide s'introduisirent dans le palais de Latran, massacrèrent Pierre et s'emparèrent de la personne du pape qu'ils conduisirent à une prison affreuse, où ils lui ôtèrent la vie à la fin de mai 928.
Quelques-uns disent que Jean X, en 926, avait fait assassiner Albéric duc de Spolette, premier mari de Marocia.



LÉON VI

CXXIVe PONTIFE. - DE 928 A 929.

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 LÉON fut pape depuis la fin de 928, jusqu'au 3 février 929. Nous manquons de notices originales. Les circonstances font présumer que son pontificat commença par la force de la faction de Marocia ; et sa courte durée fonde le soupçon, dans de tels temps, que sa mort ne fut pas naturelle.



ÉTIENNE VII

CXXVe PONTIFE. - DE 929 A 931.


 Il en est de même d'Étienne VII, qui gouverna depuis le commencement de février 929, jusqu'au 12 mars 931.



JEAN XI

CXXVIe PONTIFE. DE 931 A 936.

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 JEAN fut le fils sacrilège du pape Sergius III et de la célèbre Marocia, quoique les auteurs de l'art de vérifier les dates prétendent sans fondement valable, qu'il était fils légitime d'Albéric, duc de Spolette, et de Marocia.

Jean fut élu pape à cause de la puissance de sa mère et du marquis Guide son beau-père. Il n'avait que vingt-cinq ans, et se laissa gouverner par sa mère. Guide mourut peu de temps après, et Marocia, cette femme singulière, eut l'art de persuader à Hugues, roi d'Italie, frère utérin de Guide, de l'épouser, en lui promettant de le faire reconnaître roi de Rome, ce qui s'effectua. Mais alors Hugues, croyant son autorité assez affermie, traita mal plusieurs personnages distingués, et même son beau-fils Albéric, qui dans la suite devint prince romain : celui-ci était fils de la même Marocia et d'Albéric, duc de Spolette et Patrice de Rome, son premier mari. Albéric irrité enflamme l'esprit des Romains, et se mettant à leur tête, il cerne et assiège le château Saint-Ange où était le roi Hugues avec la reine Marocia et le pape Jean, et devient prince de Rome.

Les papes ayant perdu ainsi la souveraineté, il se forma une république, dont Albéric conserva durant sa vie le suprême pouvoir, et même à sa mort le transmit à son fils Octavien, qui réunit sur sa tête le souverain pontificat. Le roi réussit à s'échapper par les murailles, mais le pape Jean XI resta prisonnier et mourut en prison dans l'année 936.



LÉON VII

CXXVIIe PONTIFE. DE 936 A 939.

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 LÉON, élevé au trône pontifical par la protection d'Albéric, en janvier 906, travailla beaucoup à le réconcilier avec son beau-père Hugues, roi d'Italie, et mourut avant leur réconciliation, le 18 juillet 939, sans laisser une aussi mauvaise réputation que ceux qui l'avaient précédé dans ce siècle.



ÉTIENNE VIII

CXXVIIIe PONTIFE. DE 939 A 942.

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 ÉTIENNE, selon les uns, fut originaire de Rome, et allemand selon Martin de Pologne : je regarde le premier comme plus vraisemblable. Il continua, comme son prédécesseur, à travailler à la réconciliation d'Albéric, prince de Rome, avec Hugues, roi d'Italie, qui se faisaient une guerre cruelle et prolongée. Il prit parti dans les révolutions de France en faveur de Louis IV, dit d'Outre-Mer, contre Hugues-le-Grand, fils du roi Robert et père du roi Hugues Capet ; et il excommunia ceux qui étaient rebelles à Louis.
Martin de Pologne ajoute que les Romains coupèrent le nez au pape Étienne, et lui firent tant de blessures à la figure, qu'il n'osa pas se faire voir en public pendant son pontificat qui dura depuis le 19 juillet 909, jusqu'au commencement de novembre 942.



MARTIN III

CXXIXe PONTIFE. - DE 942 A 946.

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 Élu le 11 novembre 942, il mourut vers le 25 janvier 946, avec la réputation d'un bon pontife, charitable et pacifique, ce qu'on peut considérer comme un miracle dans ces temps-là.



AGAPITE II

CXXXe PONTIFE. - DE 946 A 955.

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 Il fut sacré le 8 mars 946, et mourut à la fin de l'année 955. Ami de la paix et pur dans ses moeurs, on ne trouve dans l'histoire aucune raison de lui imputer la faute des événements indiqués par Prudhomme.



JEAN XII

CXXXIe PONTIFE. - De 956 A 964.

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 ALBÉRIC, marquis de Toscane, mourut en 954 et son fils Octavien lui succéda, non-seulement dans ses états héréditaires, mais aussi dans ses dignités et dans son pouvoir de prince et de patrice de Rome, chef de la république.
Le souverain pontife Agapite étant mort, quand
Octavien n'était âgé que de dix-huit ans, ses confidents lui conseillèrent de se faire élire pape, et le jeune ambitieux suivit ce conseil. Il fut sacré souverain pontife en janvier 956, parce que les évêques de la province n'osèrent pas s'y refuser, malgré la nullité notoire de l'élection, soit par défaut de liberté des électeurs, soit surtout parce que l'élu n'avait pas trente ans, qui est l'âge désigné par les conciles pour occuper un siège épiscopal, et n'y ayant personne qui eût le droit de dispenser de ce défaut. Il changea son nom en celui de Jean XII ; exemple qui, dans la suite, fut imité par beaucoup d'autres.

Le jeune pape avait l'esprit militaire plutôt qu'ecclésiastique, et il en donna des preuves, en commandant lui-même ses armées dans les différentes occasions. Sa vie manifestait aussi la licence militaire, se livrant aux plaisirs des sens avec scandale, sans frein et sans modération, car il convertit le palais pontifical en un sérail qui renfermait un grand nombre de concubines. Une d'elles surtout le dominait avec un tel despotisme, qu'elle prenait part aux affaires ecclésiastiques, et disposait de tout à son gré. De-là vient que quelques écrivains, qui rejettent l'existence de la papesse Jeanne, en ont pris occasion de dire que cette fable a pris son origine de l'empire d'une femme sur le pape Jean, et de la faiblesse et de l'assujettissement de celui-ci à ses volontés : mais cela est incertain.

Se trouvant opprimé par Bérenger, roi d'Italie, second du nom, il appela à son secours Othon, roi de Germanie, en lui offrant de le couronner empereur d'Occident, dont le titre s'était éteint en 920, par la mort de Bérenger Ier, aïeul du roi actuel d'Italie. Othon se rendit à Rome et Jean le couronna : le clergé, le peuple et le pape lui-même lui jurèrent obéissance et fidélité en se reconnaissant pour ses vassaux. On célébra un concile, où Othon confirma à l'Église romaine la souveraineté de Rome et des autres états pontificaux. Le pape, le clergé et le peuple s'obligèrent à ne point élire de souverain pontife, sans l'intervention de l'autorité impériale, et Jean déclara que le royaume d'Italie serait uni pour toujours à la dignité d'empereur romain.

Après le départ d'Othon, quelques Romains s'adressèrent à lui pour se plaindre des scandales insupportables et de la faiblesse du pape. Othon répondit que Jean XII était très-jeune, et qu'on devait espérer qu'il rentrerait en lui-même, et qu'il lui écrirait à ce sujet. Le pontife, loin de se corriger, oubliant la fidélité promise à l'empereur, fit une alliance avec Adalbert, roi d'Italie, contre Othon. Ce qui le détermina, fut l'avis de quelques Romains qui se voyaient avec peine assujettis aux Allemands ; de-là naquirent les célèbres factions des Guelfes et des Gibelins, qui durèrent plusieurs siècles, et dont les dénominations servirent à désigner les partisans des papes et des empereurs.
Othon revint à Rome plein de ressentiment, et assembla un concile de plusieurs évêques d'Italie, qui déposèrent Jean XII, et élurent pour souverain pontife, le 22 novembre 963, Léon VIII, premier archiviste de Rome. Othon exigea le serment du clergé et du peuple, de reconnaître le nouveau pape et de lui obéir. Jean prit la fuite aussitôt qu'il sut l'arrivée d'Othon ; mais il revint à Rome dès que l'empereur se fut retiré, et le peuple le reçut avec acclamation, malgré le désordre de sa vie, par haine contre la domination Allemande. Jean fit mourir plusieurs cardinaux et d'autres personnages principaux du parti contraire il assembla ensuite un concile de seize évêques, le 26 février 964, par lequel il fit déclarer nul tout ce qui avait été fait, ainsi que les traités avec Othon ; mais il jouit peu de temps de son triomphe, car un mari, las de souffrir, l'ayant surpris en flagrant délit, lui ôta la vie le 14 mai.



LÉON VIII

CXXXIIe PONTIFE. DE 963 A 965.

Onzième schisme.
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 LÉON VIII s'était retiré de Rome lorsque Jean XII revint occuper le siège pontifical. L'empereur Othon, informé de sa mort, retourna à Rome accompagné du pape qui avait été sacré. Dans cet intervalle, les Romains avaient élu Benoît V, diacre de l'église de Rome, pour successeur de Jean, sans s'embarrasser des promesses faites à l'empereur. Celui-ci, très offensé de cette conduite, fit reconnaître de nouveau Léon VIII pour seul souverain pontife, et emmena avec lui Benoît qui vécut tranquille en Allemagne, sans exciter de schisme dans l'Église, ni prétendre à aucun droit contre l'ordination de Léon. Celui-ci publia une bulle pour renouveler les dispositions du concile romain, tenu par son prédécesseur Jean XII, où il est défendu de sacrer les papes sans le consentement de l'empereur. Il conserva son pontificat jusqu'à sa mort, arrivée à la fin de mars ou au commencement d'avril 965.

Mes lecteurs pourront examiner si c'est le Saint-Esprit qui dirige les élections des papes, ou plutôt si ce n'est pas l'esprit d'ambition, comme dans toutes les affaires humaines.



JEAN XIII

CXXXIIIe PONTIFE. - DE 965 A 972.

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 À la mort de Léon VIII, on procéda à l'élection pontificale, conformément au concile de Jean XII et à la bulle de Léon, en présence des députés de l'empereur Othon. Jean XIII, évêque de Narni, fut élu, et sacré le 1er octobre 965 ; mais, peu de temps après, il fut chassé de Rome, par les grands qui ne pouvaient supporter sa fierté. L'empereur, informé des troubles, y vint lui-même. Les seigneurs, craignant les effets de sa colère et voulant l'éviter, invitèrent le pape à revenir. Malgré cela, ils ne purent s'exempter de la peine capitale.
Le comte Rofrède était mort, mais on déterra son corps pour l'écarteler ; les consuls furent bannis ; les tribuns et quelques barons pendus et d'autres décapités ; le préfet Pierre fut promené sur un âne, le visage tourné vers la queue et fouetté ensuite ; beaucoup d'autres furent bannis, et enfin il n'y eut de pardon pour personne.
Mais ce qui est digne de remarque, c'est qu'un prêtre, qui se nomme le vicaire de Jésus-Christ, au lieu d'intercéder pour ceux qui l'avaient offensé, excitait au contraire l'empereur à les punir sévèrement. Ce souverain mourut bientôt, et Jean XIII mit la couronne sur le front d'Othon II, son fils et son successeur.

Quel parallèle entre Jésus-Christ crucifié, demandant au père éternel le pardon de ses ennemis, et rejetant sur leur ignorance le crime de déicide, et Jean XIII, son vicaire, respirant la vengeance et faisant couler par torrents le sang de ceux qui l'avaient offensé.



BENOIT VI

CXXXIVe PONTIFE. - DE 972 A 973.

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 Les notices originales des papes du temps que nous parcourons, sont aussi obscures que les lumières littéraires du dixième siècle. Il ne faut donc pas s'étonner de la diversité des opinions à l'égard de l'ordre successif de Benoît VI, Domno II et Benoît VII. Je suis l'ordre qu'ont suivi Platina, Fleuri et les auteurs de l'art de vérifier les dates, de préférence à celui de Prudhomme.

Benoît VI, né à Rome, fils d'Hildebrand, fut élu pape à la fin de 972 ; mais, peu de temps après, le sénateur patrice Crescence, fils sacrilège du pape Jean X et de Théodora, soeur de la reine Marocia, irrité de la conduite de Benoît, le prit à main armée et l'enferma dans un cachot fétide et obscur, où il lui donna la mort : les uns disent qu'il le fit mourir de faim, d'autres qu'il le fit étrangler, et d'autres qu'il fut empoisonné. N'y ayant plus de souverain pontife, soit qu'il fut mort, comme le pense le critique Pagi, soit qu'il ne le fut pas, comme le croit l'abbé Fleuri, on procéda à la nomination d'un autre.
Ce qu'il y a de certain, c'est qu'on élut Franconio, diacre de Rome, fils de Ferrucio. Le nouveau pape prit le nom de Boniface VII, et commença à exercer son pontificat avec le secours de Crescence. Il ne put se maintenir plus d'un mois, parce que le peuple le détestait et le menaçait. Il déroba les trésors et les bijoux de l'église de Saint-Pierre, et partit pour Constantinople.

Le choix de son asile, les circonstances de son élection et le sort de son prédécesseur, donnent lieu de croire que Crescence et Boniface tramaient une intrigue contre l'empereur Othon II, en faveur de l'empereur d'Orient, pour la souveraineté de Rome.



DOMNO II

CXXXVe PONTIFE. - DE 973 A 974.


 Après l'expulsion de Boniface VII, que l'on regarde comme antipape schismatique, et la mort de Benoit VI, connue ou supposée, Domno II fut élu.
L'histoire ne présente aucun événement relatif à mon objet, sinon que Domno mourut le 25 décembre 974.



BENOIT VII

CXXXVIe PONTIFE. - De 974 A 983.

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 BENOIT VII, né à Rome de la famille des marquis de Toscane, neveu du patrice Albéric, et évêque de Sutri, fut mis sur le trône pontifical, d'après le refus de Saint-Mayolo, abbé de Cluny, à qui l'empereur Othon et l'impératrice Adélaïde firent de vives instances pour qu'il se décidât à accepter, s'il était élu. Les empereurs agissaient ainsi, parce qu'ils regardaient comme une chose nécessaire de placer sur la chaise de Saint-Pierre des hommes saints, capables d'arrêter le désordre extrême de Rome et la contagion de la mauvaise morale, qui se répandait par les exemples pervers de la capitale du christianisme. Si l'Empereur pensait ce qu'il disait, il eut grand tort de croire qu'il n'eût pas trouvé en Italie des sujets dignes de l'élection canonique.

Le savant Muratori cite cinq actes, dont les dates forment le compte des années du pontificat de Benoit VII, à partir de 972. M. de Saint-Marc dit par cette raison, que Benoit VII était la même personne que Benoit VI, de qui il assure que, quoiqu'on l'eût cru mort dans la prison, il ne l'était pas, et qu'il en sortit libre, par la faveur de l'empereur.
Le moine Gerbert, que nous verrons bientôt pape sous le nom de Silvestre II, parle de ces papes comme si c'était le même individu avec le nom de Benoit, exilé et non pas mort. Les affaires du siège pontifical étaient alors dirigées par l'esprit infernal, au lieu de l'être par le Saint-Esprit qui paraissait sommeiller comme les dieux d'Achab.
Nous pouvons donc dire seulement que Benoît VII, considéré comme une personne distincte de Benoît VI, mourut le dix juillet 983, selon le cardinal Baronio.



JEAN XIV

CXXXVIIe PONTIFE. DE 983 A 984.

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 Pierre, évêque de Pavie, chancelier de l'empereur Othon II, fut élu pape au mois de novembre 983, par la faveur de ce prince et pour mettre fin aux désordres, mais il ne put y parvenir. Il avait de très bonnes qualités, et son humilité le porta à changer son nom contre celui de Jean, en disant qu'aucun pape ne devait s'appeler Pierre, parce que personne ne pourrait être digne de se compter pour le second, en se comparant au premier. Mais dans le mois de mars 984, il était déjà chassé du siège pontifical et prisonnier au château Saint-Ange, par la faction de Boniface VII, qui lui ôta la vie, en le faisant mourir de faim, selon les uns, et, selon d'autres, par le moyen du poison.



BONIFACE VII

CXXXVIIIe PONTIFE. - DE 984 A 985.


 Les auteurs critiques de l'art de vérifier les dates ne mettent pas Boniface VII au nombre des papes, et le regardent comme un antipape usurpateur. Mais cela ne suffit pas pour l'exclure, tandis qu'on en compte tant d'autres qui n'ont pas plus et peut-être moins de droits de s'intituler légitimes. Si les anciens ne l'eussent pas compté, on n'aurait pas pu donner le nom de Boniface VIII à ce célèbre Boniface qui eut tant de disputes avec le roi de France Philippe-le-Bel. Outre cela, nous ignorons si Benoît VI était déjà réellement mort, quand on élut Boniface, selon ce qu'en dit le critique Pagi. En tel cas, il aurait plus de droit que les papes Domno II, Benoit VII et Jean XIV.
Le courage qu'il eut de revenir de Constantinople, aussitôt qu'il apprit la mort de Benoît VII, aide à penser qu'il se croyait des droits juridiques ; le patrice Crescence le protégea comme auparavant, et Boniface fut reconnu en qualité de souverain pontife.

Sa conduite fut égale à son ambition ; et son orgueil fut porté à un tel point que ses partisans mêmes ne purent le supporter. Abandonné par eux, il périt d'une mort désastreuse en mars 985. Son cadavre fut traîné par les rues de Rome. Nu, mis en pièces à coup de lances, il fut laissé dans la place publique devant le cheval de Constantin, jusqu'à ce que quelques prêtres recueillirent ses débris et leur donnèrent la sépulture.



JEAN XV

CXXXIXe PONTIFE. - EN 985

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 À la mort de Boniface VII, on élut pape, Jean, né à Rome, fils de Robert, citoyen distingué. Il fut quatre mois sans être sacré, et mourut dans la même année. On ne sait pas bien pourquoi sa consécration fut retardée si longtemps. Cette circonstance fait que quelques écrivains ne l'ont pas inscrit sur le catalogue des papes ; mais il est certain que les anciens le comptent, car sans cela on ne pourrait nommer Jean XXII le pape qui prit cette dénomination dans le quatorzième siècle.



JEAN XVI

CXLe PONTIFE. - DE 985 A 995


 Jean, né à Rome, fils du prêtre Léon, fut élu pape après la mort de Jean XV, et sacré le 25 avril 986.
Le sénateur et patrice Crescence, qui jouissait d'une autorité presque souveraine, l'exila de Rome et le força de se réfugier en Lombardie ; mais, ayant été informé de l'approche de l'empereur Othon III, il en craignit les suites, fit chercher Jean, et l'invita à revenir, à quoi ce dernier consentit.

Ce pape est le premier qui ait canonisé solennellement les morts qui avaient joui pendant leur vie de la réputation de Saints. Le 3 février 993, il canonisa Saint-Udalric, évêque d'Ausbourg. Précédemment, l'opinion populaire avait suffi pour que les évêques morts en odeur de sainteté, fussent regardés comme saints ; mais souvent l'intérêt et la vanité achetèrent, par des intrigues et de l'argent, les suffrages de ceux qui faisaient naître l'opinion, en racontant des miracles prétendus et des vertus qui étaient imaginaires. C'est pour cela que la canonisation populaire et diocésaine des anciens temps mérite peu de cas, lorsqu'on examinant l'histoire avec impartialité et une saine critique, on y découvre des choses tout opposées à la croyance des vertus héroïques de certains personnages. L'invention romaine des canonisations solennelles a produit un bien mêlé de quelques inconvénients.

On forme à Rome des procès très dispendieux qui attirent à la cour pontificale de grosses sommes d'argent des autres nations. S'il n'y a pas une partie qui poursuive la cause, elle reste en suspens, et celui qui a peu de richesse est forcé de l'abandonner. Voilà pourquoi depuis le treizième siècle jusqu'à nos jours, presque tous les béatifiés et les canonisés appartiennent à des instituts réguliers.
Les corporations de moines sont presque les seules qui puissent supporter ces frais si énormes.

L'argent influe, non-seulement sur la suite du cours des causes, mais aussi sur la substance de la décision définitive, cependant par des voies indirectes. Il facilite les moyens de trouver des témoins et des témoignages ; il fait pencher l'indécision des rapporteurs, et dispose favorablement l'esprit du fiscal et des juges de la congrégation des
rits.

Plût à Dieu que cela ne fut pas une vérité aussi certaine ! on aurait plus de foi aux canonisations, et les protestants n'auraient pas des armes pour déclamer contre elles. D'un autre côté, ce mal produit un bien, en diminuant le nombre des canonisations.

Nous ignorons comment elles se faisaient du temps du pape Jean XVI, mais nous savons par le témoignage de Saint-Abbon, abbé, qui résidait alors à Rome, que ce pape était avare, et qu'il vendait, à prix d'argent, toutes les dépêches pontificales. Il ne serait donc pas téméraire de présumer qu'il inventa les canonisations solennelles pour multiplier les richesses de son trésor. Du temps de ce pape, il y avait à Rome quarante monastères de l'ordre de Saint-Benoît, vingt de religieuses, et soixante églises de chanoines.

Que l'on me dise si cent-vingt communautés, qui ne s'occupaient ni de l'agriculture, ni des arts, vivaient aux dépens de Rome, ou plutôt de toute la chrétienté, qui n'avait eu besoin, du temps des douze premiers papes, d'entretenir à Rome que sept prêtres.
O fatal renversement des idées !



GRÉGOIRE V

CXLIe PONTIFE. - DE 996 A 999.

Treizième schisme.
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 L'empereur Othon III ayant appris la mort de Jean XVI, fit élire, pour successeur, Bruno son neveu, fils de Liutgarde sa cousine germaine, malgré qu'il ne fût âgé que de vingt-quatre ans. L'élection s'effectua le 3 mai 996. Mais l'année suivante, l'empereur s'étant enfoncé dans le nord de l'Europe, le patrice Crescence renouvela ses anciennes entreprises, sachant bien que les Romains supportaient avec peine la domination des Allemands.

Il exila de Rome le pape Grégoire, et fit élire à sa place
Filagate, évêque de Plaisance en Italie, qui avait été parrain de Grégoire V et de l'empereur son oncle lors de leur baptême, ainsi que l'exposa l'abbé Saint-Nil devant tous les deux, quand il fut implorer leur clémence. Crescence informé qu'Othon marchait vers Rome avec une grande armée, prépara des provisions de guerre et des vivres dans le château Saint-Ange, qui s'appelait alors la forteresse de Crescence, comme on l'avait appelé autrefois la forteresse d'Adrien, parce que cet empereur l'avait fait construire. À l'approche d'Othon, Filagate, nommé Jean XVII, et Crescence s'y réfugièrent, mais en vain ; l'empereur se rendit maître de leurs personnes.

L'antipape prit la fuite : des soldats le trouvèrent ; après mille traitements indignes, ils lui coupèrent le nez et la langue, lui arrachèrent les yeux, et le conduisirent en cet état dans une prison obscure et fétide, tout cela par l'ordre de Grégoire V, qui craignait que l'empereur ne consentit à lui pardonner.
L'abbé Saint-Nil, informé de ces événements, et de l'emprisonnement de Crescence, vint à Rome dans le seul dessein de solliciter en faveur des coupables, et surtout de l'antipape, qui était son compatriote. Il allégua la circonstance qu'il les avait tenus tous les deux sur les fonts baptismaux, et ils lui promirent le pardon de la peine capitale. On dit même que l'empereur fut attendri au point de ne pouvoir retenir ses larmes, en écoutant l'exhortation du saint, dont la charité imitait l'exemple de Jésus-Christ. Mais le perfide et vindicatif Grégoire fit ensuite attacher l'antipape sur un âne, le visage tourné vers la queue, et, après l'avoir fait fouetter dans les rues de Rome, il le fit mettre dans un cachot, où on lui coupa les pieds et les mains avant de lui ôter la vie.

Crescence rendit la forteresse par capitulation, sous la condition d'obtenir sa liberté ; mais cette condition ne fut pas exécutée ; à peine fut-il sorti du château, qu'on lui coupa la tête, et on le suspendit par les pieds. Tout cela n'empêcha pas l'empereur de prendre Stéphanie, sa veuve, pour sa maîtresse. Elle y consentit alors, et dissimula son ressentiment, jusqu'à ce qu'elle put trouver l'occasion de se venger : elle y parvint en empoisonnant l'empereur, qui en mourut le 21 janvier 1002.

Je ne puis comprendre comment les historiens prodiguent tant d'éloges au jeune empereur Othon III, à la vue de semblables perfidies. L'abbé Saint-Nil fit dire au pape Grégoire V que, puisqu'il avait manqué à la miséricorde promise, il craignît la colère de Dieu qui tomberait sur lui : et Grégoire mourut le 4 février 999, la même année de l'événement.



SYLVESTRE II

CXLIIe PONTIFE. - DE 999 A 1003.

Image provenant de:
http://fr.wikipedia.org/wiki/Sylvestre_II


 L'empereur Othon III avait été élève du célèbre français Gerbert, natif d'Auvergne, qui avait été instruit dans les mathématiques par les maures de Cordoue, et qui, après avoir été professeur à Reims, les avait enseignées à l'empereur, et à Robert II, roi de France. Les Français, ses compatriotes, le traitèrent de magicien, ainsi qu'on en accusait, dans ce temps barbare, presque tous ceux qui savaient un peu de physique, de mathématiques, et d'astronomie.

Gerbert, d'abord moine bénédictin à Aurillac, ensuite à Bobio en Lombardie, fut depuis archevêque de Reims par la protection de Robert, et déposé de ce siège par Jean XVI, en 995 ; il fut ensuite nommé à l'archevêché de Ravenne, par la protection d'Othon, en 998. Cet empereur compléta son ouvrage, de manière qu'il fut élu pontife romain, et intronisé le 3 avril 999.
Gerbert prit le nom de Sylvestre II, et fut aussi ambitieux que tous ses prédécesseurs ; mais, du moins, il se conduisit de manière à ne jamais irriter les souverains, envers qui il fut toujours attentif et modéré. Le cardinal Baronio le traite de flatteur, mais en cela, il donne lui-même une preuve certaine d'adulation envers les papes.

Sylvestre savait parfaitement quel mépris on avait alors pour le siège pontifical, du moins quant aux personnes qui y étaient assises ; car lui-même étant archevêque de Reims, dit dans un concile tenu en l'année 990:

« Vénérables pères, que pensez-vous de celui que vous voyez assis sur le Saint-Siège de Rome, resplendissant d'or et de pourpre ? S'il manque de charité, et s'il n'a que la science qui enorgueillit ; ce sera l'antéchrist, assis dans le temple de Dieu, voulant figurer être Dieu. Et s'il manque également de charité et de science, ce sera une statue placée dans le temple comme une idole que vous consulteriez en vain, car on n'obtient pas de réponse d'un marbre..... O déplorable Rome ! tu donnas à nos ancêtres les lumières les plus éclatantes, et maintenant tu n'as plus que d'horribles ténèbres, qui seront célèbres dans le siècle futur..... Que nous reste-t-il à voir ?
Nous avons vu Jean Octavien conspirer, au milieu de mille prostituées, contre le même Othon qu'il avait proclamé empereur. Il est renversé, et Léon-le-Néophite lui succède. Othon s'éloigne de Rome, et Octavien y rentre ; il chasse Léon, coupe les doigts, les mains et le nez au diacre Jean, et, après avoir ôté la vie à beaucoup de personnages distingués, il périt bientôt lui-même.
Les Romains mettent à sa place Benoît-le-Grammairien. Peu de temps après, Léon-le-Néophite l'attaque avec son César, l'assiège, le prend, le dépose, et l'envoi en Allemagne dans un exil perpétuel. L'empereur Othon meurt ; un autre du même nom lui succède ; mais à Rome on lui donne pour successeur un monstre affreux.
Tel fut
Malifacio, surpassant tous les mortels en iniquités, souillé du sang du dernier pape. Il fut aussi obligé de fuir, et un concile nombreux le déposa. Sera-t-il possible de supporter encore qu'une si grande quantité de prêtres de Dieu, dignes par leur vie et leur mérite d'éclairer l'univers, doivent se soumettre à de tels monstres, ignominie du genre humain, dénués de toute connaissance des sciences divines et humaines ? »

Sylvestre parvint au suprême sacerdoce avec ses lumières, et se conduisit bien jusqu'à sa mort, arrivée le 11 mai de l'année 1003. Quelques-uns ont soupçonné que Stéphanie, veuve du patrice Crescence, l'avait empoisonné, ainsi qu'elle avait empoisonné l'empereur. Mais il n'y a ni preuves, ni motifs qui puissent le faire présumer, car Sylvestre ne participa en aucune manière au malheur de son mari.

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