Oh ! elles ne furent point sans
défaut ! Il n'y a pas que Marie
Dentière, l'ambitieuse et vindicative
épouse du réformateur Antoine
Froment, femme dé plume et de langue et qui
avait parfois trop bon bec, espèce de
« Madame Sans-Gêne »
assez capable d'aller tirer la barbe à
Calvin. Catherine de Parthenay, par exemple,
l'auteur des Ballets allégoriques dont nous
donnons un curieux extrait,
n'était pas précisément une
roucoulante colombe ; elle avait la dent
très dure. Florence Estienne, la femme
d'Isaac Casaubon, laquelle aimait tant entonner les
psaumes dans le bateau qui l'emmenait à
l'assemblée des fidèles à
Charenton, avait hérité de l'humeur
de son père, l'illustre imprimeur Henri
Estienne, et se laissait emporter par la
colère.
« Si les femmes s'en
mêlent, écrivait, le 6 décembre
1563, François Morel, qui fut le pasteur de
Renée de France à Montargis, si les
femmes s'en mêlent, nous ne pourrons faire
aboutir nos discussions. Nos réunions
deviendront la risée des papistes et des
anabaptistes. »
Renée de France ne
prétendait-elle pas vouloir assister aux
séances du consistoire ?
« Morel était injuste,
déclare un juge excellent, M. Rodocanachi.
Dans le grand mouvement de la Réforme, comme
dans toutes les crises, le rôle de la femme
fut prépondérant... Il se peut que
les femmes soient d'une utilité
médiocre dans les
délibérations, mais elles secondent
efficacement les hommes dans l'action, les guident
avec leur sens si délicat de
l'opportunité, triomphent de leurs
hésitations, enflamment leur courage et
consolent leurs défaites »
(20).
Nous avons parlé plus haut de la
Dame de la Caille, dans sa prison de la
Conciergerie, incitant Anne Du Bourg à
persévérer et ranimant sa vocation
chrétienne. La place nous manque pour donner
ce grand morceau où d'Aubigné,
s'élevant à la hauteur de
l'épopée, raconte pour la
postérité comment Charlotte de Laval,
en 1562, après les massacres de Vassy et de
Sens, décida Coligny à aller
rejoindre l'armée des protestants
commandée par Condé. Elle lui
représenta vivement tant
de sang versé des
« frères » huguenots.
Coligny lui dépeignit, par contre, tout ce
qu'elle et leurs enfants auraient à souffrir
de la guerre. « Supporterez-vous tout
cela ? Je vous donne trois semaines pour vous
éprouver. - Ces trois semaines sont
achevées. »
À la suite de l'affaire de
Montargis, en 1563, cette Renée de France,
fille du roi Louis XII, dont se plaignait si
amèrement le ministre Morel, fut tenue, dans
le parti protestant, pour une héroïne
légendaire que les pasteurs proposaient en
exemple à toute l'Eglise de Dieu. Rappelons
cet épisode. La Cour voulait détruire
la « nichée de
huguenots » de Montargis. François
de Guise lui-même, qui avait
épousé sa fille Anne,
dépêcha à la duchesse,
nonobstant qu'elle fût sa belle-mère,
le sieur de Malicorne, avec quatre compagnies de
cheval. Sommations de Malicorne, menaçant
d'employer le canon contre le château.
Renée de France lui fit porter ces
paroles :
« Avisez ce que vous
entreprenez, car il n'y a homme en ce royaume qui
me puisse commander que le roi, et si vous en venez
là, je me mettrai la première sur la
brèche, pour essayer si vous serez si
audacieux que de tuer la fille d'un roi,
n'étant, au reste, si peu apparentée
ni si peu aimée que je n'aie moyen de me
ressentir de votre audace jusqu'en votre
lignée, voire jusqu'aux enfants du
berceau. »
Ce terrible message mit en fuite
Malicorne.
En vérité, ces
calvinistes, en qui battait le meilleur sang de
France, où il y avait du courage, de
l'opiniâtreté et de la vigueur,
portèrent des âmes plus hautes que
celles des héroïnes de Corneille, selon
la remarque de Samuel Rocheblave ; car ce
n'est plus ici de l'héroïsme
imaginé, c'est de l'héroïsme
vécu. Elles animèrent le parti
huguenot de leur pénétrante flamme.
Il en est même qui
combattirent comme des hommes, firent le coup de
feu. Les Rochelaises en 1573. Vers la même
époque, la Dame de Miraumont, qui portait la
cuirasse et maniait l'épée, plus
audacieuse que les plus audacieux, tenant la
campagne à la tête d'une soixantaine
de gentilshommes et, quand les ennemis devenaient
trop nombreux, se retirant dans son château,
où elle soutint plusieurs sièges
(21).
Julienne
Couillard, à Saint-Lô, dans le
Cotentin, lorsque les troupes de Henri Il
commandées par Matignon
assiégèrent ce boulevard du
protestantisme, en 1574
(22).
La
« Cotte rouge », une jeune
fille inconnue, qui fit des prodiges à La
Mure, en Dauphiné, pour repousser les
soldats de Mayenne, en 1580
(23).
Marguerite d'Ailly de Piquigny, épouse du
fils aîné de Coligny qui, au temps de
la Ligue, armant quelques marmitons et valets, sut
défendre le château de
Châtillon. Les femmes de Montauban, en 1621.
Les femmes de Saint-Antonin, en 1622. Les femmes du
Mas d'Azil, en 1625.
La France Protestante rapporte
l'intrépidité de deux dames
poitevines, Mme de Forin et sa fille Mme de
Régnier. Le temple d'Exoudun ayant
été condamné à la
démolition en 1666, les deux
châtelaines se mirent à la tête
de deux ou trois mille gens du pays. Exoudun dut
être occupé par deux compagnies de
chevau-légers et des troupes d'infanterie
(24).
Que dire des Camisardes dans les
combats, d'une Lucrèce Guigon
électrisant la troupe de Jean Cavalier et
sabrant les soldats royaux au cri
de : « Vive
l'épée de
l'Éternel ! » des Camisardes
assistant les exécuteurs des vengeances de
Dieu, soignant les blessés et les malades
qu'elles abritaient dans des grottes
ignorées ? Le capitaine de Planque
mandait à Chamillard, le 16 janvier
1704 : « Je fis tuer cinq femmes ou
filles fanatiques ou prophétesses, qui
moururent fermes dans leur religion, sans vouloir
entendre les raisons que le prêtre leur
disait. » Et quelques jours
après :
« Je fis en même temps
passer par les verges jusqu'au sang quatre femmes
ou filles qui avaient été plusieurs
fois entendre prêcher la Blonde, fameuse
prophétesse parmi les rebelles »
(25).
Le prophétisme fut l'âme de
cette guerre folle et
désespérée qui sauva le
protestantisme méridional. Les
prédicantes en coiffe de percale et en robe
de cadis ne firent pas que consoler le peuple de
« leur chant de colombes »,
comme le veut Michelet ; elles
l'exaltèrent d'un souffle brûlant et
sauvage
(26).
La persécution, est le triomphe
du huguenot, a-t-on dit. Le
« régister »
gravé par de pauvres paysannes sur la pierre
définit bien son âme invincible.
Honorons ces femmes de mulquiniers de la
Thiérache à l'humble et superbe
héroïsme, que nous
révèle, en une précieuse
monographie, M. Paul Beuzart
(27).
Admirons cette Marie Buisnard de la
Ville-Voisin, dame de Cahan, en Bretagne,
épouse de René de Madaillan-Lesparre,
comte de Chauvigny, dont les biens furent vendus
judiciairement en 1687 : son zèle
dévorant pour la Réforme est
resté légendaire dans cette province
si catholique, où l'on parle encore, avec un
frisson, de la terrible comtesse huguenote
(28).
Ce mot de
la Dauphinoise Mme de Bardonnenche, femme d'un
ancien conseiller de la Chambre de
l'Édit : « J'irai où
l'on voudra, même au feu, mais je n'irai pas
à la messe ! » est un beau
cri de huguenote
(29).
« Je ne changerai pas ma
Religion, » voilà le cri de leur
coeur, quand, à l'heure de la mort, le
magistrat vient leur présenter la formule
d'abjuration. Procès sera fait â leur
mémoire et leur cadavre traîné
sur la claie ou « enterré aux
champs, », c'est-à-dire
jeté à la voirie : qu'importe
à ces moribondes qui vont
se trouver face à face avec Dieu et veulent
passer au chant des psaumes ?
(30).
- Uganaudo èron nascudo,
- uganaudo voulièu mouri (31),
dit le poème de Bigot :
« Huguenotes elles étaient
nées, huguenotes elles voulaient
mourir. »
Quelques-uns des écrits qui
suivent attestent la cornélienne constance
dont firent preuve de toutes jeunes et de
très âgées, nous les montrent
au couvent, dans les maisons de
« Nouvelles :
Converties », dans l'hôpital de
Valence, - un enfer, - au fond de geôles
d'une humidité meurtrière, dans les
havres où se formaient les
« voitures » de
déportés pour les lointaines plages
désertes.
Comme on pourra s'en convaincre,
à la lecture de leurs récits, ce
n'étaient pas des âmes ordinaires que
celles qui, foudroyées par la
Révocation et ne voulant pas plier, en
prononçant les trois mots : « je me
réunis », s'arrachèrent à
leur patrie et à leur foyer pour
obéir à leur conscience, On les
verra, peintes par elles-mêmes, fugitives sur
les routes terrestres ou liquides de l'exil.
« Nul roman comparable, pour
l'intérêt des aventures et le
pathétique des situations, à ces
histoires trop vraies... De jeunes demoiselles,
devenues tout-à-coup intrépides et
aventureuses, à quinze ans, à seize
ans, se hasardaient dans les
bois, les déserts, à la merci
d'hommes de mine affreuse et affamés
d'argent... Il y a mille histoires d'embarquements
aventureux »
(32).
Elle n'avait pas plus de seize ans,
cette Suzanne Villaret, de la Fauguières,
près de Saint-Nazaire-des-Gardies, dans le
canton de Sauve, Gard, lorsqu'elle partit sur la
belle jument blanche de son père, une nuit
de l'été de 1700, en compagnie d'un
sien cousin, Ducros, marié en Suisse, et
sous la conduite du muletier La Violette. De
Lausanne, elle écrivit à ses parents
pour leur demander pardon d'être partie sans
en rien dire.
« N'eût
été le grand désir que j'avais
de glorifier Dieu en liberté, je n'aurais
commis un crime semblable... Rien au monde n'aurait
su m'ébranler d'auprès de vous, s'il
n'avait été pour faire quelque
avancement à mon salut »
(33).
Nous n'avons rien, et c'est grand
dommage, de la plume de Mlle Batally, femme de M.
Cognard et originaire de Bordeaux, dame de
condition, qui habitait Rouen. Elle passa en
Angleterre, cachée à fond de cale,
sous des ballots de marchandises, où elle se
trouva à côté d'un pasteur. Au
moment de partir, ce dernier lui demanda comment
une femme de sa qualité pouvait se
décider à abandonner son pays et ses
richesses : « Il n'est rien,
répondit-elle, que je ne sacrifiasse pour la
gloire de mon Dieu. » D'Angleterre elle
gagna la Hollande et se retira
à Delft, où elle
vécut du produit de la vente d'un magnifique
collier de perles, seul reste de son opulence
(34)
Gardiennes, protectrices du foyer dont elles
ont
préservé jalousement la
pureté, les femmes de la Réforme
française ont marqué fortement leur
empreinte dans la famille.
Au XVIe siècle, d'après
Lucien Romier, c'est la femme qui nourrit à
la maison un « idéalisme
vivace », et c'est « par les
mères et les épouses » que
« la Réforme gagna quelques-uns de
ses meilleurs soutiens dans la noblesse »
(35).
Il faut
ajouter, avec John Viénot : pas
seulement dans la noblesse, et se souvenir de la
mère de Jean Leclerc, le cardeur de laine,
de Meaux, car les premiers Réformés
étaient du peuple.
« J'ai perdu l'excellente
compagne de ma vie, écrivait Calvin à
Viret, en 1549, celle qui ne m'eût jamais
quitté, ni dans l'exil, ni dans la
misère, qui n'eût pas voulu me
survivre. Tant qu'elle a vécu, elle m'a
fidèlement aidé à remplir mon
devoir. Jamais elle n'a été pour moi
une peine ni un obstacle. Et, comme elle ne
s'occupait jamais d'elle-même, elle n'a point
voulu, dans tout le cours de sa maladie, me
tourmenter pour ses enfants (36). Craignant
qu'elle ne
renfermât ce souci au fond de son coeur, je
lui en ai parlé moi-même trois jours
avant sa mort, et lui ai promis que je ne leur
manquerais point. - « je les ai
déjà recommandés
à Dieu, me
répondit-elle. - Mais cela n'empêche
pas, lui dis-je, que moi aussi, je n'en prenne
soin. - je sais bien, reprit-elle, que tu ne
négligeras point ce que tu sais que j'ai
recommandé à Dieu. » De
pareils sentiments peuvent tout sur
moi », ajoutait Calvin
(37).
Nommons ici les purs modèles du
mariage chrétien et huguenot. Après
Idelette de Bure, les épouses des trois
Châtillon : Charlotte de Laval, dont il
sera question plus loin, et Jacqueline
d'Entremont ; Claude de Rieux et Anne de Salm,
la première et la seconde femme de ce
François de Châtillon, seigneur
d'Andelot, qui mérite d'être
compté parmi les premiers confesseurs de la
foi réformée ; et cette fille
d'un gentilhomme normand, Elisabeth d'Hauteville,
dont les convictions religieuses
impressionnèrent si vivement Odet de
Châtillon.
Voici des héroïnes, voire
des martyres de la piété conjugale.
Éléonore de Roye, princesse de
Condé, et la femme de François de La
Noue, dit Bras-de-Fer, cette Marie de Luré,
en qui Moïse Amyraut reconnaissait le
véritable type de l'épouse
calviniste. La Noue est pris, en Flandre, par les
troupes de Philippe II : 1580. Cinq
années d'une horrible captivité. Mais
la femme, alors, fut aussi grande que l'homme.
À lire ce qui reste de sa correspondance,
« on sent que, pendant cinq longues
années, toute la puissance d'aimer et d'agir
de cette vaillante se concentra sur les quelques
pieds carrés où le prisonnier
souffrait toutes les tortures du corps et de
l'âme, au fond de cette abominable tour de
Limbourg, où il « avait une
même habitation avec les
crapauds. » Pour le tirer de cette
géhenne, il n'est effort qu'elle ne tente,
déployant une vigueur vraiment virile, celle
qu'elle avait, une
première fois, exercée, pour
échapper aux massacreurs de la
Saint-Barthélemy. Un Anglais s'était
lié d'amitié indissoluble avec La
Noue : l'ancien ambassadeur d'Elisabeth
à Paris, François Walsingham ;
Marie de Luré s'adresse à lui, car il
est devenu l'un des conseillers de la reine
d'Angleterre. Et Walsingham
« écoute sans sourire les
propositions les plus folles que l'amour conjugal
inspire à Marie, comme celle d'armer en
course une flotte anglaise qui surveillerait les
côtes de Flandre », dans le but de
préparer la délivrance du Bras-de-Fer
(38).
Il y avait, chez certaines femmes de
cette époque, un oubli de soi-même, un
enthousiasme pour l'autorité souveraine du
devoir, qui leur faisaient affronter tous les
périls, toutes les privations, la mort
même, lorsqu'il s'agissait de venir en aide
à leurs maris.
Connaissez-vous ce trait d'Antoinette
d'Aubeterre, l'épouse distinguée
à tous égards, de Jean de
Parthenay-Larchevêque, seigneur de
Soubise ? Celui-ci, envoyé à
Lyon en 1562, pendant la première guerre de
religion, l'engage à venir le rejoindre.
Elle lui répond qu'elle a eu
« avertissement qu'on les voulait
prendre, elle et sa fille, et les mener devant
Lyon, menaçant le sieur de Soubise de les
tuer toutes deux, s'il ne rendait la
ville. » Elle le « supplie, au
nom de Dieu, de n'être ému de nulle
affection naturelle, mais de préférer
la gloire de Dieu en son devoir à la vie
d'elle et de sa fille, d'autant qu'elle aimerait
beaucoup mieux mourir de mille morts, que si cela
était cause de lui rien faire faire contre
l'honneur de Dieu, le sien, et le service de son
roi »
(39).
« Mon conseil en
perplexité, disait du
Plessis-Mornay de sa femme Charlotte Arbaleste, ma
consolation en adversité, aiguillon
perpétuel à tout bien faire,
au-dessus et de son sexe et de son
siècle. »
Vous reconnaîtrez sans peine que
la doctrine et l'esprit de Jean Calvin pouvaient
faire un grand caractère d'un homme capable
de tous les excès comme Agrippa
d'Aubigné ; mais ne négligez pas
de noter l'influence de sa première femme.
Quel dommage que nous n'ayions rien de la belle
Suzanne de Lezay, qui était,
« contre l'ordinaire de son
sexe », discrète et capable de
garder tous les secrets !
« Laquelle, ajoute d'Aubigné,
comme génie de mon âme, m'exhortait au
bien, me retirait du mal, arrêtait mes
violences, consolait mes afflictions, tenait la
bride à mes pensées
déréglées et donnait de
l'éperon aux désirs de m'employer
à la cause de la
vérité »
(40).
La belle et bonne qualité
française des épouses huguenotes, on
la retrouve sous Louis XIV, aux temps où
l'on s'efforça de détruire tout droit
des protestants à la vie civile et de rendre
leur vie privée intenable. « Le
roi croit que la persévérance de
certains maris ne tient qu'à celle de leurs
femmes. Qu'elles cèdent, ils
céderont »
(41).
La belle et bonne qualité
française des épouses huguenotes, on
la retrouve au XVIIe siècle, où des
compagnes comme Étiennette Pagès, la
« Rachel » d'Antoine Court, ou
Madeleine Gaidan, de Nîmes, la
« Rachel » de Paul Rabaut,
furent la Providence attentive et les anges
protecteurs de leurs maris.
Épouses. Mères
aussi.
Nous vous saluons avec tendresse,
pauvres ménagères poitevines et
saintongeaises qui, dans les faubourgs de Londres,
aviez gardé vos vêtements de deuil,
parce que vous ne pouviez oublier les enfants que
les cavaliers du roi vous avaient
ravis !
Mères huguenotes, dont le coeur
parlait un si saisissant langage. Nous entendons
encore la clameur de la mère de Jean
Leclerc. En 1525, voyant fustiger son fils, elle
lui donna courage, et après l'avoir vu
flétrir au front, s'écria :
« Vive Jésus-Christ et ses
enseignes ! »
(42).
Deux siècles plus tard, en 1728,
Alexandre Roussel fut exécuté sur
l'esplanade de Montpellier ; il avait 27 ans.
Antoine Court alla trouver sa mère, Suzanne
Martin. Elle lui dit : « Si mon fils
eût témoigné quelque faiblesse,
Je ne m'en fusse jamais consolée ; mais
puisqu'il est mort constamment, toute ma douleur se
change en actions, de grâces »
(43).
Certes, une part essentielle revient aux
mères dans la formation de la conscience
protestante.
Belles traditions de la
piété domestique, saints usages du
culte de famille, de la prière dite aux
repas, et dite le matin et le soir, pures
leçons, glissant leurs parfums dans tous les
jeunes coeurs, de la grande Bible in-folio et du
psautier achetés un jour à un
colporteur et qui se transmettaient comme un
héritage sacré. Les mères.
Gardiennes énergiques et tendres d'un
évangile à la fois mystique et moral,
institutrices des moeurs et des
caractères, sachant
trouver pour leurs enfants ou leurs neveux des
« amitiés », suivant un
mot de Maurice Barrès, des images puissantes
sur leur esprit et capables de
déchaîner en eux de la musique. Il
vient du foyer huguenot à découvert
une senteur de profonde et simple
spiritualité. Le christianisme vivant est
là, avec l'amour des mères. Et c'est
là que « de
génération en
génération se renouvelait une force,
contre laquelle la persécution venait se
briser. Le centre suprême de
résistance, la force victorieuse, ce fut la
famille » (44). Quel éloge
pour les
mères !
L'on voudrait pouvoir peindre ici une
Marguerite de Fay, - des de Fay-Châteaurouge,
proches parents de Coligny, - laquelle,
après avoir entraîné son mari
dans la Réforme, fit un homme d'élite
et un huguenot inébranlable, de son fils
aîné, Jean de Madaillan-Lesparre de
Montataire, intrépide compagnon et fervent
admirateur du Béarnais, mais qui ne reparut
plus à la cour lorsque Henri IV eut
embrassé le catholicisme
(45).
Parcourez, dans le Bulletin de la
Société de l'Histoire du
Protestantisme français, l'étude
de M.-J. Gaufrès sur Philippe Mornay de
Bauves, le fils de Charlotte Arbaleste et de du
Plessis-Mornay, ou plutôt feuilletez les
Mémoires de Charlotte Arbaleste
elle-même, si vous voulez apprécier le
modèle accompli d'une éducation
protestante au XVIIe siècle. Sur un
exemplaire de la Vérité de la
Religion chrétienne, de du Plessis-Mornay,
qui se trouve au château de Fontainebleau, on
lit ce vers, transcrit d'une main
inexpérimentée et
juvénile :
Craindre Dieu, vous servir, ma
mère, c'est mon
tout.
Une Charlotte Arbaleste fait figure,
assurément, de fondatrice de
« cette tradition, aujourd'hui trop
effacée, de l'éducation protestante,
à laquelle nous devons tous le meilleur de
nous-mêmes » (46
).
À propos des Méditations de Guizot sur
l'essence de la Religion chrétienne,
parues en 1864, Sainte-Beuve a noté :
« Je crois voir encore (et de ceux qui
ont eu l'honneur de la voir une seule fois, quel
est celui qui peut l'avoir oubliée ?)
sa vénérable mère, dans cette
mise antique et simple, avec cette physionomie
forte et profonde, tendrement austère, qui
me rappelait celle des mères de Port-Royal,
et telle qu'à défaut d'un Philippe de
Champaigne, un peintre des plus délicats
nous l'a rendue, cette mère du temps des
Cévennes, à laquelle il resta
jusqu'à la fin le fils le plus
déférent et le plus soumis... Je la
crois voir encore, en ce salon du ministre,
où-elle ne faisait que passer et où
elle représentait la foi, la
simplicité, les vertus subsistantes de la
persécution et du Désert : M.
Guizot a recueilli et reconquis, on le sent, toute
cette piété filiale et maternelle
avec les années »
(47).
- Oh ! Oh ! des écrivains,
les
auteurs de ces Pages féminines de la
Réforme française ? On en
peut discuter.
- Eh bien, discutons-en.
- La forme est trop souvent
inférieure à l'idée et une
Marguerite d'Angoulême elle-même, pour
si grande qu'elle soit, dit M. Jourda,
« ne satisfait pleinement ni notre
goût de la clarté, ni celui, que nous
devons aux classiques et aux romantiques, d'une
forme esthétique qui flatte à la fois
notre intelligence et nos sens. »
- D'accord. Aucun souci d'art, nul
apprêt. Seulement, si elles ne savent presque
pas composer, elles parlent, du moins, une langue
nourrie de la vivante sève française.
Que l'on veuille bien examiner avec quelque
attention notre « dessus de
paniers » huguenots, et l'on admirera
chez plus d'une, nous en avons la certitude, cette
lumière d'acier, qui vient du dedans, du
fond de la conscience, d'un coeur âprement
convaincu.
Que de choses instructives : et
charmantes, non pas toutes, évidemment,
assez parfaites pour servir en tous points de
modèles, - oui, il y a des
inégalités, des défaillances
et, si vous voulez, du fatras - mais bien dignes
d'être connues et étudiées avec
profit
(48).
Leur style est loin d'être, comme
il en a la réputation, un style froid. Nous
la rencontrons, chez nos calvinistes, la
« vieille prose du XVIe siècle,
drue, haletante, crépitante,
torrentielle » que Henri Brémond
admire tant chez certains
humanistes dévôts
(49). On
conviendra, avec M. Raymond Ritter, qu'il y a dans
les lettres de Catherine de Bourbon,
griffonnées à la diable, des
répétitions, des négligences,
des incorrections ; mais on devra aussi
reconnaître avec lui que cette princesse des
fleurs de lys, tout comme le roi, son frère,
avait l'étincelle, et que, si les billets de
Henri IV lèvent la paille, comme on dit, ou
sont des diamants, ceux de Catherine renferment
« des trouvailles constantes d'images
justes et colorées »
(50).
La langue d'une Louise de Coligny, d'une
Catherine de Parthenay, d'une Elisabeth de Nassau,
- j'en passe, et des meilleures, qu'on rencontrera
plus loin - n'est pas moins bonne ni moins
pertinente. Franchise du ton, rondeur des termes,
le contraire de tout raffinement et de toute
hypocrisie, et, avec tant de naturel,
l'éclat du rire ou du sourire et la
fraîcheur du teint. Simplicité
savoureuse et vivacité « telle sur
le papier qu'en la bouche ». Une
grâce incontestable, « le charme
propre à la langue de cour »,
assure Michelet. « Tandis que les
provinciaux, même hommes de génie, un
Montaigne, un d'Aubigné, fatiguent par un
travail constant, les grandes dames de
l'époque écrivent, au courant de la
plume, une langue déjà moderne,
agréable et facile, où le peu qu'on
trouve de formes antiques semble une aimable
naïveté gauloise »
(51).
Paul-Louis Courier, qui s'y connaissait, affirmait
que la moindre femme du XVIII, siècle
écrivait mieux que les maîtres de son
temps. Le style des lettres de nos protestantes du
grand siècle est, à
l'ordinaire, vif et leste. S'il a son tour
particulier, il ne devient jamais grave ou terne,
au point de faire déjà pressentir ce
qu'on appellera plus tard le « style
réfugié ». Elles
excellaient à écrire des lettres,
comme elles excellaient à causer. Les femmes
causent à merveille, et, la plume à
la main, elles causent encore.
Au XVIIe siècle, Voiture et
Balzac mirent à la mode de genre ou
plutôt la littérature
épistolaire. On se faisait un nom par
quelques lettres. Mme Des Loges, qui fut un peu,
sous Louis XIII, dit Jacques Pannier,
« une précieuse avant les
précieuses », est regardée
par Tallemant des Réaux comme « la
première personne de son sexe qui ait
écrit des lettres raisonnables »,
entendons des lettres destinées à
être lues en société et
à courir de main en main. Cette
épistolière huguenote, dont il reste
trop peu de chose, est véritablement un
précurseur. Mme de Sévigné n'a
fait que porter à sa perfection, en le
cultivant avec art, un genre qu'elle n'a point
inventé, elle est la première entre
mille rivales. Hé ! nos protestantes,
encore une fois, firent leur partie comme les
autres.
J'attache le plus grand prix aux pages
intimes de quelques-unes. Ce sont des impressions
rapides et sincères au jour le jour, et non
de ces mémoires que l'on écrit pour
poser devant la postérité. Femmes
d'esprit, elles ont conté joliment ce
qu'elles voyaient. Femmes d'imagination, elles ont
su traduire les sensations vives que produisaient
sur elles les événements ou les menus
faits de la vie mondaine. On découvre dans
leur correspondance la chronique des moeurs du
temps. Anecdotes piquantes, papotage amusant,
histoires de chiffons, description d'une robe
nouvelle, éloge d'une coiffure, rien n'y
manque. On se sent en présence de
patriciennes et de lettrées qui
évitent d'être
pédantes, restent simples et naturelles,
femmes, vraies femmes, bien françaises et
chrétiennes, joignant les qualités
les plus délicates de l'esprit aux talents
les plus précieux du coeur.
Arrêtons-nous. Il ne faut pas les trop
vanter, sans doute, mais il serait injuste de les
laisser dans l'oubli, et la postérité
leur doit, à tout le moins, un souvenir de
très haute estime et de
reconnaissance.
Après les morceaux choisis des
grandes dames de la Réforme, on lira des
témoignages, dont l'humanité
profonde, la candeur et la réelle
élévation émeuvent infiniment.
Pages de foi, de ténacité, de
prière et de lutte, susceptibles de nous
mettre, pour employer le mot de Matthieu
Lelièvre, parlant de son commerce avec le Livre des Martyrs de
Jean Crespin,
« un peu de fer dans le sang ».
Pages belles entre toutes. Mères du
Désert, qui avez porté nos
destinées, vous êtes les plus
grandes.
On notera, en somme, dans leurs
écrits, assez peu de cette
phraséologie sentimentale et
déclamatoire qui devait régner
à la fin du XVIlle siècle. Des
lettres ingénues, simples, graves. Des
confessions mûries sous le soleil de la
souffrance, trempées, de larmes,
quelques-unes écrites d'un cachot ou d'une
basse-fosse, si vivantes et si sincères, en
dépit de leur forme un peu rude. Les
entendez-vous parler, nos huguenotes du Midi
nourries des prophètes et des psalmistes
d'Israël, et qui surent s'assimiler avec tant
d'aisance les tours, les images, l'accent de la
Bible ? Saveur de leurs phrases,
pensées en patois avant d'être
écrites en français. On dirait que
ces femmes ont mâché toutes les herbes
et tous les songes du Désert. Timbre
inoubliable de leurs voix.
Combien nous regrettons de n'avoir
aucun fragment de la main des
prophétesses (52), d'une
Isabeau Dubois, « celle qui, entre
toutes, parut à Court la plus sage et la
plus humble » (53).
Elles manquèrent, sans doute, un peu, de
modération, ces hardies prédicantes,
qui ont sur elles l'odeur de férigoule de
leur Cévenne, et nous sommes très
loin d'en vouloir faire des saintes du calendrier
huguenot (54). Mais, pour mon
compte, je l'avoue, leur âme si
passionnée me touche, et j'ai cru les voir,
plus d'une fois, à écouter telle
paysanne de l'Anduzenque, d'une très verte
sève, qui avait le don énergique et
coloré de la conteuse - ma propre
mère, par exemple, que j'aimais entendre,
quand j'étais enfant, redire, avec mon
grand'oncle Gédéon Ribes, cette
vieille chanson languedocienne
- Deman, avans l'aubeto,
- Sans tambour ni troumpeto,
- Cargaren biasso e capèl
- E fugiren coumo d'aucèl
- Devers lou camp de l'Eternel
- E vers la maisoun d'Israel (55).
De pareilles femmes demeurent l'honneur de
leur
pays, en même temps que la gloire de leur
communion. Françaises du sang
français le plus pur, si bonnes
Françaises ! Dans leurs rêves et
leur labeur de souffrance pour le triomphe de la
Cause, nos Mères n'ont jamais
séparé leur patrie - notre patrie -
de leur foi évangélique. La valeur
à la fois si française et si humaine
de leur caractère ne passera point.
« La vie des saints a
été, de tout temps, pour le
catholicisme, la grande école
d'éducation... Il nous faut aimer. Il nous
faut admirer. Nous avons besoin de maîtres de
la vie spirituelle sur lesquels nous essaierons de
nous modeler. Devant la foule bigarrée des
saints catholiques, certains protestants se
prennent à déplorer de n'avoir pas
leurs saints, Ces doléances
témoignent surtout de la
méconnaissance totale de nos richesses.
Riches, nous le sommes, infiniment... Nos hommes
sont grands d'une humanité palpitante et
forte ; et si les vivants seuls propagent la
vie, quelle vitalité nous connaîtrions
si nous établissions un commerce intime et
prolongé avec les
Pères ! »
(56).
Et avec
les Mères. Avec les Mères sans qui,
certainement, nous ne serions pas ce que nous
sommes.
Comprenons bien que notre mission est de
saisir pour nous-mêmes tout ce que Dieu a
placé ainsi à notre berceau.
Recueillons les traditions de nos protestantes, le
fonds de pensée et l'attitude religieuse qui
nous viennent d'elles, directement. Respirons le
parfum de leur coeur, et que ces
magnifiques natures nous donnent quelque peu de
leur trésor : grande idée de
Dieu et du Christ, et souci de l'honneur de Dieu,
piété et vie pure indissolublement
unies, affinement de la conscience,
véracité, loyauté, joies du
sacrifice ou de l'indomptable constance, et
poésie de l'âme, tout ce qui, dans les
tristesses et les menaces de l'heure
présente, nous rendra fervents, courageux et
libres.
Celui qui écrit ces lignes a
longuement hanté le moyen âge
mystique, surtout le XIIIe siècle
franciscain ; mais les hautes images
spirituelles, les nostalgiques visions dont sa
mémoire et son coeur sont remplis n'ont
obscurci en lui d'aucune façon un vivace
patriotisme de l'âme, l'irréductible
orgueil de son terroir cévenol et de sa
mère calviniste.
Nous tenons à avertir qu'en respectant scrupuleusement le style du temps et des personnes, nous ne nous faisons nullement une religion d'en reproduire l'orthographe ou la ponctuation. Car nous désirons que ces textes soient lus, comme ils méritent de l'être. Quel intérêt y aurait-il à transcrire ainsi un extrait de Renée de France - « Jay ressu la laictre, etc... » L'orthographe était alors, comme chacun sait, des plus fantaisistes et des plus variables. Nous ne parlons pas de l'absence souvent totale de ponctuation. Aux difficultés que peuvent présenter certains morceaux, n'allons pas ajouter celles qui résultent d'une graphie compliquée, souvent inconséquente, et qui est parfois, peut-être, moins celle des auteurs que celle des imprimeurs ou éditeurs. Dans leurs Morceaux choisis du XVII, siècle, publiés par la librairie Hachette, M. E. Huguet (Prosateurs du XVIe siècle), M. A. P. Lemercier (Chefs d'oeuvre des poètes duXVIe siècle), tout comme M. Alfred Jeanroy, membre de l'Institut (Principaux chapitres et extraits des « Essais » de Montaigne), ont systématiquement modernisé l'orthographe.
M. Charles Bost nous a fourni très
généreusement les plus utiles
indications. Nous lui devons la belle lettre de
Rose de Boileau et, en outre, tous les
renseignements, en grande partie nouveaux, que
renferment les notices sur Rose de Boileau, Marie
Gebelin, Étiennette Pagès, Isabeau
Corteiz.
M. Samuel Pierre-Loti-Viaud a eu la
bonté de nous ouvrir ses dossiers et nous a
autorisé à citer les lettres
inédites de Judith Renaudin qui
fascinèrent l'enfance huguenote de l'un des
plus grands écrivains français. Nous
avons mis à l'épreuve l'extrême
complaisance de M. le Duc de La Force, de
l'Académie Française, et celle de M.
Jacques Pannier, secrétaire de la Société de l'Histoire du
Protestantisme Français. À tous
ceux qui nous ont aidé dans nos recherches
nous exprimons notre reconnaissance profonde.
15 février 1937.
(20) E. RODOCANACHI, Renée de France, Paris 1896, p. 385.
(21) C. ViNCENS (Arvède Barine), François de la Noue dit Bras-de-fer, Paris, 1875, p. 190.
(22) G. MORIN, Julienne Couillard, broch., éd. de la Cause.
(23) France protestante, 2, éd, I, 710.
(24) Fr. protest., 20 éd., VI, 614 ; cf. 0. Douen, La Révocation de l'Édit de Nantes à Paris, I, p. 303.
(25) Cité par G. TOURNIER, Au Pays des Camisards, Musée du Désert, en Cévennes, 1931, p 56. Il s'agit évidemment de la femme du Camisard Castanet, Marie Planque, « que nous appelions Blondine », mémoires inédits d'Abraham Mazel et d'Elie Marion, éd. Ch. Bost, Paris, 1931, p.189.
(26) Voir une liste d'inspirées dans les Mémoires de Mazel et Marion, p. 188-190. Beaucoup avaient pris le Désert bien avant la guerre des Camisards. Charles Bost, dans son ouvrage sur Les Prédicants Protestants des Cévennes et du Bas-Languedoc, Paris, 1912, Il, p. 48-52, 64, 187, cite des femmes capables de prêcher, qui marchaient quelquefois avec les troupes que formèrent les prédicants après les « conversions » de 1685. La veuve Dumasse, de Soudorgues ; Isabeau Redourtier, de Milherines, au pied du Liron, à peine âgée de vingt ans, qui s'imposa à Claude Brousson par sa modestie, son humilité, sa simplicité et sa piété ; Pintarde, de Cros, laquelle prit les bois dès l'âge de seize ou dix-sept ans ; Poussielguesse, du mas de Maliestre, près de Lasalle. Les prophétesses pullulèrent aussi dans le Dauphiné et le Vivarais. On connaît Isabeau Vincens, nommée à tort « la bergère de Crest » ou « la belle Isabeau »,- car elle n'était ni native de Crest, ni remarquable par sa beauté : elle tombait en extase et prononçait des discours en patois, en français. En janvier 1698, prêchaient dans le voisinage de Bourdeaux Suzanne Mazel et d'autres. M. E. Ponsoye a étudié le dossier de Marie la Boiteuse qui, dit-on, « pleurait du sang » et celui d'Isabeau « Dauphinenche », qualifiée de « présidente des prophétesses ». (Arch. Hérault, c. 181.)
(27) Le Protestantisme en Thiérache, Paris, 1931.
(28) Maurice CAMPAGNE, Histoire de la Maison de Madaillan, Bergerac, 1900, p. 198-189.
(29) ARNAUD, Histoire des Protestants du Dauphiné, Paris, 1876, III, p. 58.
(30) « Monsieur, que me voulez-vous ? S'il ne vous faut que ma vie, je suis prête à vous la donner », déclare au sénéchal du Siège présidial de Nantes une fille de trente ans, Renée Pineau, échappée aux dragons d'Angers en 1687, et malade d'une fièvre (Bull., IV, 1856, p. 512). Mourante, la noble demoiselle de Chandieu répond au curé de Maringues, dans la Saône-et-Loire, le 14 avril 1690 : « Ah ! je vois bien que vous êtes l'ennemi de mon salut. J'ai la conscience en paix et en repos, parce que l'Esprit de Dieu qui est en moi me le fait connaître » (Bull. LX, p. 487).
(31) Li Flou d'Armas, Nîmes, 1891, p. 32.
(32) MICHELET, Histoire de France, XI, p. 302-2. Voir, dans le Bull. LXXXI, P. 198, l'aventure du pasteur Jean Barbin de Telliers et de sa femme, Jeanne Derval, en 1685. Ils cherchaient à sortir de France. Des dragons les surprirent, pendirent le pasteur à un arbre, et s'en allèrent. La femme, qui s'était cachée, reparut, coupa la corde et ramena son mari à la vie. Ils gagnèrent la Hollande en mendiant leur pain.
(33) Bull. LIX, p. 506.
(34) France Protestante, 21 éd., p. 960,
(35) Cité par John VIÉNOT, Histoire de la Réforme française des origines à l'Édit de Nantes, Paris, 1926, p. 282.
(36) D'un premier mariage d'Idelette de Bure.
(37) Cf. France Protestante, 2e éd., III, 638.
(38) H. HAUSER, François de la Noue, p. 126-131.
(39) Bull. XXIII, p. 501.
(40) S. ROCHEBLAVE, Agrippa d'Aubigné, éd. « Je sers », p. 133. Le cri que d'Aubigné a poussé sur le tombeau de Suzanne est « peut-être le plus profond, le plus poignant qui retentisse dans toute son oeuvre ».
(41) Cité par MICHELET, Histoire de France, XV, p. 265.
(42) Crespin, I, p. 244.
(43) Et la mère du prédicant Gavanon enfermé dans un cachot du fort de Saint-Hippolyte, en Cévennes, 1692 : « En m'embrassant, a-t-il raconté, elle m'exhorta d'être toujours ferme et constant, de quelle mort que l'on voulût me faire mourir ; ce que je lui promis, ... et sur cela elle s'en alla contente. » (Ch. Bost, op. cit., II, p. 23.)
(44) E. PONSOYE, Almanach des Églises Réformées Evangél., 1933, p. 37.
(45) Maurice CAMPAGNE, Op. cit., p. 89-105.
(46) M. J. GAUFRES, dans Bull. XVII, p. 279.
(47) Nouveaux Lundis, IX, p. 96-7. Cf. Victor HUGO, dans Choses vues, 6e éd., Paris, 1887, p. 167, à la date du 18 décembre 1846 : « Au milieu de ce salon de velours et d'or, une apparition des Cévennes. M. Guizot lui disait un jour : « Vous rappelez-vous, ma mère, le temps où votre grand'mère vous parlait des dragons Qui la poursuivaient dans la montagne et des balles qui venaient trouer ses jupes ? »
(48) La surprise est grande de découvrir, à la fin d'un testament d'Elisabeth d'Hauteville, femme d'Odet de Châtillon, la prière purement splendide que voici : « Or, laisse, Créateur, aller en paix ta servante, rassasiée de jours, comblée de tes biens, désireuse de cet éternel séjour et repos où son âme vole et aspire... Seigneur, l'abîme de mes péchés appelle l'abîme de ta miséricorde et ce sang de Jésus... auquel tu laveras cette pauvre âme pécheresse, selon tes saintes promesses. » (Bull. LXXI, p. 91.)
(49) Histoire littéraire du sentiment religieux en France, Paris, I. p. 198.
(50) R. RITTER, Lettres et poésies de Catherine de Bourbon, Paris, 1927, p. XII.
(51) MICHELET, Histoire de France, XI, Les Guerres de religion, p. 298.
(52) On se fera une idée assez exacte de leur instruction et de leur langage en lisant Marie Oursel, Blanche Gamond et Jeanne Terrasson. Cf. dans le Bull. XIX-XX, la « confession de foi » rédigée par une bourgeoise protestante de La Rochelle (p. 27-32).
(53) Mémoires d'Antoine Court, éd. Ed. Hugues, Toulouse, 1885, p. 34.
(54) Pourtant, tout n'était pas malsain, je m'assure, dans leur message, tout n'était pas ridicule dans leurs imaginations. Benjamin Du Plan, écrivant à Antoine Court, le reconnaissait (Lettre citée par G. Tournier, Au Pays des Camisards, P. 38).- (55)Demain, avant l'aubette,
- Sans tambour ni trompette,
- Portant besaces et chapeaux,
- Nous fuirons comme des oiseaux
- Devers le camp de l'Éternel
- Et vers la maison d'Israël.
- Je retrouve cette chanson dans le Bull. LX, p. 288.
(56) Wautier D'AYGALLIERS, Le Coeur des Réformateurs, dans Évangile et Liberté du 5 août 1925.
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