Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

CHAPITRE XII

DIEU OU LE HASARD

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Genèse 40. 1-4.

1. Une visite qui a une grande importance.

 Un vieux cantique s’exprime ainsi : "Lorsque l’heure est propice, le secours arrive avec puissance pour confondre les plaintes de l’homme." Les serviteurs de Dieu rendent fréquemment témoignage à cette vérité, et notre récit nous montre à sa manière comment nous devons la comprendre. Un jour, il se produisit un fait très ordinaire ; dans une vaste prison on amena deux nouveaux condamnés : l’échanson et le panetier du roi d'Égypte. Ces hommes étaient des personnages marquants dans lesquels le roi avait place sa confiance. Nous ne nous arrêterons pas à décrire, d’après des documents vieux de quatre mille ans, les attributions de ces hommes, ni à faire des suppositions sur la faute dont ils s’étaient rendus coupables.
La seule chose qui nous intéresse, c’est que l’arrivée de ces gens, spécialement confiés à la garde de Joseph, marqua pour lui le début d’une existence nouvelle. Ils ne se doutaient guère que leurs manquements, la colère de Pharaon, leurs rêves enfin, avaient un but mystérieux à l’égard du jeune Hébreu qui les reçut à la porte de la prison. Joseph lui-même n’avait nul pressentiment que la visite involontaire de ces hommes fut le premier pas vers sa libération et son élévation.
D’innombrables prisonniers étaient arrivés depuis qu’il était captif. Les uns étaient encore sous sa garde, d’autres avaient été mis à mort ou envoyés dans les mines, d’autres avaient été libérés. Rien de tout cela n’avait eu d’influence sur sa position. Comment aurait-il pu supposer que cet échanson qui, dépouille de ses habits somptueux, venait de revêtir le grossier uniforme de la prison, l’introduirait à la cour malgré la colère de Potiphar ? Et pourtant il en fut ainsi, et cela arriva nonobstant l’oubli de l’échanson, ou plutôt à cause de cet oubli qui chassa pendant deux ans sa promesse de sa mémoire.
Nous anticipons là sur les faits. Mais à cette occasion qui nous montre dans son ensemble le plan divin, il n’est pas hors de propos de dire quelques mots de l’action de la Providence.


2. Deux points de vue.

 "Dieu voit une fourmi noire qui, pendant une nuit noire, passe sur une pierre noire." Ainsi s’exprime le Coran. Qu’est-ce que Mahomet entendait par là ? Une fourmi est bien petite, et il est particulièrement difficile d’en voir une, par une nuit obscure, quand encore elle passe sur une pierre noire. Si Dieu voit ce petit insecte, c’est qu’il voit tout ; s’il dirige sa course, c’est qu’il dirige toute chose. Notre Sauveur exprime la même pensée lorsqu’il dit : "Il ne tombe pas un passereau en terre sans la volonté de mon Père, et même les cheveux de votre tête sont tous comptés." Il ne survient pas le plus petit événement sans que sa main n’y soit. L’homme pieux en tire la conclusion consolante qu’il ne lui arrive rien qui ne lui soit avantageux, et il choisit lui-même librement ce que Dieu a choisi pour lui ; il sait que tant que les rapports entre Dieu et lui sont ce qu’ils doivent être, tout ira bien.

Il est évident que telle est l’opinion unanime des écrivains sacrés. On pourrait remplir un livre des passages qui expriment cette idée sous différentes formes, et toutes ces paroles réunies composeraient une harmonie céleste. Un abîme de consolations est contenu dans le fait que toutes les circonstances de nos vies sont sous la direction paternelle de Dieu.

"Oui, cela serait bien beau" dit un de mes lecteurs, "si nous pouvions le croire ; mais moi, je ne le crois pas." Et ce doute est partagé par des milliers d’hommes. Ils affirment que, en regardant de près la vie humaine, ils arrivent forcément à la conclusion que bien des choses mènent le monde, mais qu’à coup sûr la Providence n’y est pour rien. Les uns disent : "C’est l’argent qui règne", d’autres : "C’est la presse", d’autres : "C’est le génie." Il y en a même qui affirment que c’est le diable. Ainsi deux points de vue sont en présence. Aucun pont ne franchit l’abîme qui sépare les deux camps, pas le plus petit sentier ne les relie l’un à l’autre.

Ne nous occupons pas, pour le moment, de ces deux opinions opposées, et regardons à l’histoire de Joseph. Nous avons là une des preuves les plus concluantes de l’action de la Providence. Essayons d’écrire sa vie à la manière des incrédules et d’après la théorie du hasard. Le hasard suppose que les causes qui produisent un fait sont sans liaison entre elles et ne sont nullement destinées à le produire. Ce fut donc par hasard que les atomes combines par des forces mystérieuses ont formé l’oeil, cette merveille de sagesse et de beauté. Il n’a jamais existé de Maître qui ait conçu l’idée de ce chef-d’oeuvre. C’est là une création fortuite comme toutes les autres. L’histoire entière de l’humanité n’est que l’oeuvre du hasard, dans son ensemble et dans ses détails ; la vie de Joseph est également dans ce cas ; voyez plutôt.

Par hasard, une robe bigarrée fut offerte à Jacob, et un caprice fâcheux le poussa à l’acheter et à la donner à son fils. Le hasard voulut que le patriarche ignorât la haine des frères de Joseph pour lui, et qu’il l’envoyât lui-même à sa perte. II aurait été tué ; mais, par hasard, au moment critique, des marchands ismaélites passèrent par cette contrée déserte, et il se trouva qu’ils pratiquaient le commerce des esclaves. Heureusement Potiphar avait besoin d’un homme intelligent, et il vint fortuitement sur la marche, le jour même ou Joseph s’y trouvait.
Un sort malheureux voulut que cet homme ait une femme infidèle, et Joseph fut jeté en prison. Ce fut fort triste pour lui ; mais, quand on a de la chance elle se montre précisément dans l’infortune. Il advint que Joseph acquit de la considération dans le cachot même. Parmi les malheureux que le caprice des grands envoyait en prison, se trouvaient par hasard deux employés de la cour ; par un singulier enchaînement de circonstances, l’un d’eux exerça une grande influence sur Joseph.
Un rêve que le jeune Hébreu interpréta, en ayant saisi par hasard la signification, fut la cause imprévue qui l’amena à sa haute position. Il arriva, il est vrai, que l’échanson oublia pendant deux ans la promesse d’intercéder auprès du roi pour son geôlier. Cet oubli même, quelque douloureux qu’il fût pour notre héros, fut la cause de son bonheur. Si l’échanson avait pensé plus tôt à parler en sa faveur, le roi l’aurait sans doute éconduit par égard pour le puissant Potiphar.
Chose étrange ! le monarque, a son tour, songea. Il est si facile d’expliquer des rêves ! mais il se trouva par hasard que, cette fois-là, parmi les prêtres, les astrologues, les savants, aucun n’en fut capable.

La bonne étoile de Joseph voulut que l’échanson se souvienne de ses torts et que le roi ait confiance en cet étranger. Joseph put dire au roi ce que signifiaient ses visions. Le sort voulut que ses prophéties s’accomplissent, et ainsi, par une succession d’événements fortuits, Joseph devint le chancelier de l'Égypte.

De plus, il arriva que la famine règne également en Canaan, et poussa fortuitement les frères de Joseph dans ses bras. Le vieux Jacob, circonstance heureuse, était encore de ce monde malgré toutes ses épreuves, et ainsi l’histoire eut le dénouement touchant que nous connaissons. Que pensez-vous, lecteurs, d’une semblable manière d’expliquer les événements ? Jugée au point de vue de la seule raison, n’est-elle pas absurde et ridicule ? Ces hommes divers, avec leurs vices et leurs vertus, leurs faiblesses et leurs erreurs, sont tous au service d’un maître ; quand même ils sont libres, ils travaillent à leur insu à un plan admirable, et ils construisent un édifice merveilleux qui avance insensiblement. Enfin, le chef-d’oeuvre est sous nos yeux, et le grand architecte, dites-vous, a nom le hasard ? Celui qui lit l’histoire de Joseph ne peut faire autrement que reconnaître à genoux l’action d’un Dieu personnel, tout-puissant et seul sage. Retirez de cet édifice une seule pierre : que les Ismaélites, par exemple, passent une heure plus tard ; que l’échanson ne rêve pas ; que Pharaon, dans son rude langage, dise : "Je ne tolérerai pas que cet étranger, ce chien impur, paraisse en ma présence" ; que la famine soit localisée en Égypte, tout s’écroule. Je demande : Qu’est-ce que notre raison a le plus de peine à admettre : que le hasard aveugle ait tout enchaîné, ou qu’un Maître conscient et sage ait tout disposé ? En vérité, ce sont les incrédules qui, dans ce cas, croient aux miracles !

"Mais", dira-t-on, "qui peut savoir si les choses se sont réellement passées ainsi ? Cette histoire a tout l’air d’un récit à thèse inventée par un croyant pour la plus grande gloire de son Dieu." Je réponds : "Inventez vous-même une semblable histoire, et vous verrez combien on se moquera de vous. Remarquez encore combien tous les détails portent un cachet exceptionnel de vérité et de sincérité. Puis, expliquez, si vous le pouvez, l’histoire entière d’Israël sans cet épisode."

Je ne veux pas insister. Notre récit n’est en définitive qu’un petit fragment de l’histoire universelle, et la question qui se pose en face du sort de l’humanité ou du sort des individus est celle-ci : Est-ce un Dieu personnel et saint qui règne ? Est-ce le hasard, cette puissance aveugle ? Nous voici en présence d’un redoutable dilemme.


3. De deux choses l’une.

 Il est des hommes qui ne veulent pas entendre parler de ce dilemme. À certaines heures, ils s’expriment ainsi : "Dieu a évidemment dirigé les événements ; telle était sa volonté." Cinq minutes après, ils parlent du "hasard qui a voulu", d’une chance heureuse ou malheureuse, etc. Ces gens sont inconséquents. Dieu dirige tout ou rien. Il est contraire à sa nature de partager le pouvoir avec le hasard, car qui pourrait, dans ce cas, distinguer l’action de l’un de l’action de l’autre ?

Impossible d’échapper à notre dilemme. Entre la fourmi et la reine d’Angleterre, il n’existe à cet égard aucune différence, car pour Dieu rien n’est grand ni petit. Si le hasard a fait retentir le glas des morts au moment où vous alliez proférer une mauvaise plaisanterie, c’est lui aussi qui a disposé les molécules du cerveau d’un Alexandre ou d’un Mahomet de manière à en faire ce qu’ils ont été. Si le hasard produit aujourd’hui chez vous un feu de cheminée, c’est lui aussi qui, en 1812, produisit en Russie un hiver précoce et changea le cours de l’histoire. Qui connaît la vie sait que les circonstances les plus insignifiantes sont la cause des événements les plus importants.
De graves incendies ont été allumés par une étincelle, des guerres meurtrières amenées par des raisons futiles. Souvent nous reconnaissons que les choses qui nous paraissaient être des vétilles avaient une importance extrême, et vice-versa. Vous ne pouvez donc pas dire : "Les petites choses sont dirigées par le hasard, les grandes par Dieu." Le hasard est tout ou rien. Il y a des milliers d’hommes, et, dans le nombre, de très savants, qui ne reculent pas devant cette conséquence et attribuent tout au hasard. Ils nous apprennent que le monde est gouverné par des forces aveugles, qui se jouent des hommes comme le vent fait tourbillonner les sables du désert.

La théorie matérialiste qui anéantit en nous tout germe d’espoir et de consolation est infernale. Bien des hommes qui ne croient pas à la Révélation reculent devant elle. Mais nous devons reconnaître qu’elle est absolument logique. En revanche, la théorie des gens qui ne veulent pas détrôner Dieu, mais qui attribuent au hasard un pouvoir égal au sien, est insoutenable. Tous ceux qui n’ont pas encore jeté leur foi par-dessus bord, devraient comprendre à quel point ils la rendent ridicule en nous parlant de cette force aveugle. Je sais que la notion de la Providence soulève de grandes objections, mais ces objections ne sont pas sérieuses.

Vous ne comprenez pas comment un Dieu unique peut diriger 1400 millions d’hommes, connaître leurs joies, leurs peines, leurs folies, leurs erreurs, les circonstances fortuites de leur vie, aussi bien que les progrès de la civilisation, et les faire servir à l’accomplissement de ses desseins. Que répondriez-vous, sage raisonneur, à votre petit garçon s’il vous affirmait d’un air capable qu’il ne peut pas admettre qu’en 1870 le maréchal Moltke ait pu conduire un million d’hommes d’après un plan unique, et que toute cette histoire est une pure invention ? Cette comparaison est même trop faible.

Quand vous prononcez le nom de Dieu, vous parlez de l’Incompréhensible. Pour comprendre Dieu, il faudrait être Dieu, ou il faudrait que Dieu fût un homme comme vous. Vous ne pouvez pas expliquer comment il a créé le premier grain de blé, et vous voulez savoir comment il gouverne le monde ! En vérité, cette prétention fait peu d’honneur à votre jugement !

"Mais", dites-vous encore, "il est inadmissible que Dieu tienne toutes choses en main." "J’aimerais bien savoir" me disait en dernier lieu un homme très cultivé, "qui a le premier imaginé un Dieu d’amour résidant dans le ciel." "Si vraiment Dieu tient toutes choses en main" disait Schopenhauer, "je ne voudrais pas être à sa place, car un aveugle seul pourrait prétendre que la justice, la sagesse et l’amour règnent dans le monde. En revanche, on voit sans cesse les hommes les plus nobles et les plus pieux foulés aux pieds par les plus hardies coquines ou poursuivis par les plus dures tribulations."

Ce mystère est évident ; les croyants les plus zèles se sont inclinés devant lui (lisez, par exemple, le psaume LXXIII), mais ils n’ont pas pour cela cesse de compter sur la Providence. Ils savaient que Dieu a l’éternité pour accomplir ses plans, et que les hommes pieux doivent apprendre la patience. Il semblait, en effet, qu’il dut être contraire aux desseins de Dieu de laisser, pendant les trois premiers siècles de notre ère, couler à flots le sang des disciples de Christ ; et pourtant, les martyrs mourants chantaient des hymnes de victoire. Ils savaient qu’ils retrouveraient plus que ce qu’ils perdaient. Ils pressentaient déjà ce que disait plus tard un grand théologien : "L'Église terrestre du Christ aurait dès longtemps cessé d’exister si elle n’avait pas été arrosée du sang des martyrs."

L’action de la Providence est pour nous un dogme. Nous marchons par la foi et non par la vue. Un vieux paysan disait, lorsqu’on parlait de telle mystérieuse dispensation de Dieu : Enfants, taisez-vous ; il nous restera quelque chose à apprendre dans le ciel. Là est la solution du problème. Tenons-nous en repos ; Dieu a le temps, car il est éternel. L’heure n’a pas encore sonné pour lui, bien que pour nous elle soit venue des longtemps. Puisqu’il est patient, nous devons l’être aussi. Nous nous écrions parfois avec horreur : Seigneur, comment peux-tu tolérer telle chose ? Mets donc ta main dans cette affaire. Lui ne bouge pas, ce qui signifie pour nous : "Soyez tranquilles, attendez."

Les voies de Dieu ne sont jamais si obscures que sa main ne perce la nuée assez souvent pour que notre foi demeure vivante. Quiconque a une vie cachée avec Dieu est aussi convaincu de son action dans toutes les circonstances, que de sa propre existence ; ce qu’il voit ne saurait le tromper. Il n’est rien de prodigieux dans les desseins de Dieu, puisqu’il est lui-même un prodige. Il doit être pour nous, créatures bornées, le Dieu cache, mais il permet par instants au brouillard de s’écarter pour nous laisser voir la montagne d'où nous viendra le secours. Parfois, des faits de détail nous donnent un aperçu de la sagesse de ses dispensations. Lorsque Joseph, dans la prison, contemplait sa vie passée, il la voyait semée de débris. Mais, lorsqu’il fut plus tard à son poste élève, il reconnut avec délices ce qu’il avait cru jadis avec larmes, à savoir que ces débris étaient des pierres qui toutes avaient servi à la construction d’un édifice admirable.

J’ose dire la même chose de ma modeste existence. Les choses insignifiantes, fortuites en apparence, les événements les plus pénibles, les coups les plus douloureux, mes propres folies devinrent les moyens de m’amener là où j’en suis par la grâce de Dieu. Lorsque ces événements se produisirent, je n’avais pas la moindre idée qu’ils dussent concourir à un but important. Longtemps après, le plan du divin Architecte se réalisa dans sa beauté.

La vie de tout homme qui se confie en Dieu est un chef-d’oeuvre admirable du Maître souverain, comme le fut celle de Joseph. Après nous avoir donné un aperçu de ses voies d’amour, il les a peut-être voilées à nouveau, mais il suffit que vous ayez pu dire une fois avec une conviction profonde : Le Seigneur a agi directement sur ma vie. pour pouvoir, dans cent autres cas ou vous ne comprendrez pas, croire sans voir. Il est tout naturel qu’habituellement ses desseins dépassent votre horizon, cela tient à la grandeur de Dieu, à votre petitesse et à votre vue bornée. Quiconque vous a une seule fois appelé par votre nom, vous prouve par là qu’il vous connaît ? Dieu vous a parlé. Après cela il s’est peut-être tu longtemps s’il avait des raisons pour agir ainsi, mais cela ne prouve pas qu’il vous ait oublié.

Il me serait facile de trouver dans ma vie et celle d’autres hommes une foule de preuves irréfutables que Dieu est près de nous, qu’il entend nos prières, compte nos larmes ainsi que le nombre des pièces de monnaie renfermées dans notre bourse, et que, pour diriger l’émonde, il se sert autant des erreurs des hommes que de leur sagesse. Ces preuves seraient néanmoins aussitôt réfutées par ceux qui veulent les faire suivre du point d’interrogation de l'incrédulité. On ne peut démontrer les choses divines comme les lois de la physique. Je lésais de longue date. Je sais aussi que le cerf ne brame pas en vain après le courant des eaux, je sais que le Dieu vivant ne reste pas sans témoignage auprès d’une âme qui le cherche de tout son coeur. Pour quiconque est persuadé de l’existence de Dieu, pour celui qui peut dire : "Mon Dieu," tous les mots de hasard, de destin aveugle, d’enchaînements des circonstances tombent dans l’abîme et aboutissent à l’enfer où ils sont nés. L’âme qui est remontée à son origine, a l’élément divin, sait qu’elle est toujours dans la main de son Père céleste et n’est que dans la sienne.

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